Le Tour de France de 1958 s’est achevé, à peu de chose près, comme celui de 1957. Gendebien et Trintignant occupent encore les deux premières places du classement Scratch Grand Tourisme (tous les deux sur Ferrari 250 GT), tandis que Jean Hébert associé à Bernard Consten, enlève encore les deux rubans qui sanctionnent la première place aux classements généraux (Scratch et Indice) des voitures de Tourisme. Seul changement, Gérard Laureau prend la place qu’occupait l’année précédente Claude Storez au premier rang de l’indice pour les voitures de Grand Tourisme.

Les résultats sont en tous points logiques : la seule surprise qui n’en aurait d’ailleurs été qu’une demie, ne pouvait venir que de Claude Storez et de sa rapide Porsche Zagato qui, avec ses 1.500 cm3 avait non seulement des chances au classement à l’indice mais aussi au classement absolu.
Il a dû hélas abandonner sur le circuit du Mans pour des raisons d’ordre mécanique, non sans avoir semé le trouble dans les rangs serrés des Ferrari.
Après sa disparition, il n’y avait plus, dans sa catégorie GT, à proprement parler de course : tout semble s’être passé comme si les 4 Ferraristes de tête (sauf Olivier Gendebien) s’étaient facilement mis d’accord pour ne pas prendre de risque dans les derniers kilomètres, estimant qu’il était plus sage et plus rémunérateur d’arriver à bon port avec leur classement déjà acquis.

Dans ce Tour de France, la mécanique Panhard, est présent au-delà de tout ce qu’on pouvait imaginer à travers 16 DB (voir la liste détaillée dans la bible sur DB de mon ami Alain Gaillard), des Dyna Z1 et même Monopole !

Comme d’habitude, le départ est donné à Nice le dimanche 14 septembre (ici départ de Aboudara-Chavarot) :

et l’arrivée sera jugée à Pau le 21.

Cette décentralisation – puisque l’arrivée, après avoir eu lieu à Nice, puis Paris et à Reims, se fera cette année dans la ville du bon Roi Henri – montre déjà la grande liberté des organisateurs nullement prisonniers des règles établies.
Par mesure de sécurité, le parcours de 5.934 km a été scindé en quatre étapes au lieu de trois. Au cours de chaque étape, il ne sera jamais passé plus d’une nuit sur la route.

Les dix épreuves de classement, joueront cette année encore, un rôle fort important que ce soit en course de côte ou en circuit.

Même si le rôle de la route reste prépondérant, ces sprints successifs vont soumettre les voitures à des tests incomparables.

Après les courses de côte de la Turbie et du Mont Revard et les circuits de Reims, de Rouen ; du Mans, de Monthléry et de Clermont-Ferrand, la dernière étape dans le Mont Ventoux et le Tourmalet ajouté au circuit de Pau, aura tôt fait d’achever les mécaniques les plus fragiles par tant d’efforts répétés !

Dans la Turbie, Laureau et sa camionnette DB annonce déjà la couleur en réalisant une très belle performance. Mais dès cette introduction, disparaît, à la suite d’une collision, une figure comme Condriller sur sa Dyna Z1.

Le circuit de Reims sera meurtrier pour deux de nos DB.
C’est ainsi que Menneron, après avoir fait connaissance avec l’arrière de la DB de Laureau, quitte la piste et percute le mirador situé en haut de la ligne droite

et Aboudara – Chavarot voient leur DB HBR5 brûler complètement à la suite d’un retour de flamme.

Enfin Picart sur sa Z1 abandonne par déception sur une panne d’essence : il avait calculé trop juste la quantité nécessaire en oubliant de penser au prélèvement de contrôle.

De nouveau sur le circuit de Rouen, Laureau sur sa camionnette DB et Trautmann sur Citroën ID19, se distinguent par des performances exceptionnelles.

Puis, ce sera le circuit de Clermont-Ferrand qui verra une lutte âtre entre Gendebien et Trintignant pour la première place du classement Scratch, tous les deux au volant de voitures identiques !

Cinquante deux voitures (22 en Tourisme et 30 en GT) terminent cette 3ème étape.

Dans l’épreuve suivante les concurrents survivants vont se frotter au géant de Provence : le Mont Ventoux. Le plus malchanceux de cette ascension fut sans nul doute Marang sur DB-Panhard HBR5. Après avoir oublié de desserrer le frein à main (il escalada ainsi les 21,6 km !), il crève puis évite de justesse de perdre son copilote Badoche dans un virage : la portière s’étant ouverte !

Sur la route des Pyrénées entre Alès et Lodève se joue, hélas, un drame. La Jaguar des frères Whitehead quitte la route, tombe dans le ravin et se retourne. Graham, qui pilotait, est blessé à la jambe quant à Peter, il est mortellement atteint.

Dans ce même tronçon, Bartholini-Zimmermann sur DB vont aussi au fossé. Heureusement pour eux, ils s’en sortent indemnes après une perte de temps de plusieurs minutes pour extraire leur voiture de cette fâcheuse position.

A Pau, par un temps gris et orageux et sur une piste humide, se déroule la dernière épreuve de vitesse. Trintignant et Consten sortent vainqueurs de leur catégorie respective. Trintignant ne doit sa victoire qu’au geste « élégant » de Gendebien. Ayant pris un demi tour d’avance, Gendebien s’arrête à proximité de la ligne d’arrivée pour permettre à Trintignant de la franchir en premier, sachant que ce geste pourrait effacer son comportement « douteux » du circuit de Charade où il empêcha par tous les moyens que Trintignant, pourtant plus rapide, le dépasse.. Sachant aussi que ce geste ne pouvait pas influencer le classement final : pas folle la guêpe !

On notera l’excellente prestation des Dyna Panhard en Tourisme avec quatre classées sur sept au départ. Quant on sait que seulement 37 sur 113 véhicules terminent on mesure l’exploit et la fiabilité de notre marque préférée !

Comme ici la meilleure des Z1 : celle de St Auban-Queffeleant

Si Maurice Trintignant est récompensé par le « prix orange » du pilote le plus agréable et le plus courtois (ça ne m’étonne pas pour l’avoir côtoyé pendant 10 jours lors d’un Rétromobile !), le prix de la malchance aurait du aller, s’il avait existé un, à l’équipage Justamond-Tassoul sur DB HBR5. Ces derniers ont connu les pires malheurs : crevaison, panne de dynamo, sortie de route, panne d’essence, erreur d’itinéraire, cheval qui leur a barré la route dans le Tourmalet et un accrochage avec un touriste… Ouf !

Autre malchanceux dans nos rangs, Vinatier-Masson sur Panhard Monopole, dont l’essieu arrière se brise à quelques kilomètres de l’arrivée.

Mais notre grande satisfaction sera la première place à l’indice GT de Gérard Laureau sur sa camionnette DB qui avait assuré depuis sa course sur le circuit du Mans une avance substantielle qui le mettait à l’abri de tout retour.

LES CLASSEMENTS :

Charly RAMPAL