LES 24 HEURES DU MANS 1950

C’est le week-end des 24 et 25 juin que l’A.C.O. accueillait les concurrents qui allaient se livrer une bataille à tous les niveaux.

Près de 100.000 spectateurs ceinturent le circuit de 13,492 kms resté sans changement depuis 1932. La piste a reçu un nouveau enrobé et marquée de lignes blanches sur le bas côté pendant l'hiver de 1949/50. Un nouveau pont Dunlop sous forme de moitié de pneu enjambe la piste au premier droit après la sortie des stands.

Le règlement est lui aussi le mêmes qu'en 1949, l’A.C.O. fournissant à tous les concurrents le carburant de 80 d’indice d’octane. Le réapprovisionnement en eau et essence est permis seulement tous les 25 tours

LES FORCES EN PRESENCE

Soixante engagés (un record), dont les Aston Martin, les Ferrari, les Cadillac, inédites en Sarthe, et trois Jaguar XK engagées à titre privé. Mais Talbot s’est mis au goût du jour. Loin des grosses sports d’avant-guerre, les formules 1 450cc biplace qui s’élancent sont élégamment profilées et, surtout, surpuissantes. Comme la plupart des marques cette année-là, françaises (Panhard) comme anglaises, font preuve d’une fiabilité remarquable.

La lutte est très ouverte entre Ferrari, Talbot, Jaguar et Aston Martin.

Parmi les débutants, quelques étoiles actuelles ou futures : Juan Manuel Fangio, Froilan Gonzalez, Maurice Trintignant et Jean Behra.

On notera cette année une originalité : un an après la 1ere apparition d'une voiture équipée d'un moteur Diesel aux 24 heures du Mans, MAP (Manufacture d'Armes de Paris) engage une voiture assez révolutionnaire. Voiture biplace, mais une voiture révolutionnaire puisque c'est la première voiture à moteur central de l’histoire du Mans. Arborant le n° 1, elle est pilotée par Lacour et l'illustre Veyron, déjà vainqueur sur Bugatti en 1939.
Des fuites au niveau du refroidissement vont la contraindre à l'abandon après 39 tours.
Ce sera la seule et unique expérience de ce constructeur dans la Sarthe.

Des 4 CV Renault, des Simca, Dyna Panhard, D.B., Monopole, toutes ces petites cylindrées Françaises vont se battre pour l'indice de performance.

Rappelons que c’est en 1923 qu’est mis en place un classement des performances en fonction de la cylindrée. C'est l'indice de performance. En cette année 1950, le calcul est le suivant :

3.000 x C
D1 = -----------------
C + 350
Dans lequel :
C est la cylindrée en cm3, D1 est la distance minimale imposée.
D étant la distance réellement réalisée par la voiture en 24 heures ; le quotient D/D1 définit l'indice de performance
- Pour toutes les cylindrées supérieures à 4L, 'C' est plafonné à 4000 cm3.
- Les compresseurs sont admis mais un coefficient x2 les pénalise. Ainsi, un 1500cm3 suralimenté doit parcourir la même distance qu'un 3000cm3 non suralimenté.
Les retraits d'un Ferrari, 203 Peugeot et d'un suédois, a permis à 3 suppléants d’être présents sur la grille de départ. : DB-Citroën n° 64, une 4cv Renault n° 63 et une Simca n°66.
Comme beaucoup d'autres équipes, Aston Martin est venu par la route et a perdu un DB2 de Jack Fairman dans un accident de la circulation dans lequel son épouse Marion, enceinte, a eu un grave problème de dos. L’Aston n’a pas pu être réparée et a été remplacée par le prototype UMC 66 qui n’a tenu seulement que 8 tours (vilebrequin cassé).
Chez les voitures à mécanique Panhard 611 cm3, nous trouvons :
• Une Monopole tank X84 conduite pas Jean De Montrémy / Jean Hémard
• Une Dyna X84 sport conduite par Auguste Lachaize / Albert Debille

• Une Callista conduite par Raymon Gaillard et Pierre Chancel
• Une Dyna X84 conduite par Louis Eggen / B. Escale

• Une Monopole conduite par Jacques Savoye / Eugène Dussous
• Une Dyna X84 sport conduite par Guy Lapchin / Charles Plantivaux
• Une DB conduite par Claude Guyot / Fernand Chaussat

• Une DB conduite par René Bonnet / Elie Bayol

Notons que pour cette dernière, le marseillais Elie Bayol remplace Charles Deutsch, C’est un garagiste et pilote de talent, rapide et sûr (lire son portrait dans la rubrique « les Hommes »). Ce n’est pas un débutant, Il a couru sur Bugatti et Racer 500 DB.
Le départ est donné par M. Jean Letourneau, (ministre français du Commonwealth ! ).
Départ fulgurant de Raymond Sommer qui bat le record du tour. Après 2h de course, Louis Rosier sur Talbot prend la tête mais à 5H, il doit s'arrêter 45 minutes. Il va effectuer une remontée fantastique. Aidé par l’hécatombe des Ferrari, Rosier montera sur la plus haute marche du podium.
Louis Rosier entrera ce jour là dans la légende du Mans. Il est resté au volant pendant 23 heures et 10 minutes, ne laissant la place à son coéquipier (son propre fils) que pendant 2 tours. Il gagne la course avec 2 tours d'avance.
L’indice de performance est remporté par la Monopole de Jean de Montremy / Jean Hémard après une belle bataille avec la DB de Bonnet / Bayol.

Bonnet a perdu la course à cause d’un problème de piston. Il a évité la mise hors course par une astuce devenue légendaire, comme René Bonnet vous le raconte lui-même :

L’autre DB abandonnera sur accident. En effet, Claude Guyot plus au fait de boxe que de sport automobile, sort violemment de la route dès la première heure de course.
Quant aux autres Panhard, Lapchin/Plantivaux abandonneront à la 17ème heure pour des problème d’allumage.
Savoye / Dussous, abandon pour fuite d’huile.
Les autres termineront sans trop de soucis.

Charly RAMPAL