Dans les années 60/70, le sport automobile battait son plein en France, et nous, les soixante-huitards  étions à notre apogée de nos 20 ans avec cette envie d’en découdre sur les circuits au volant de ces monoplaces qui sanctionnaient les étapes vers le graal : la Formule 1 ! 

Elles avaient pour nom : Formule bleue, Formule France, Formule 3, formule 2, avant d’atteindre le sommet.

C’était aussi le temps où le mot liberté s’affichait en lettre de feu sur les frontons des Mairies.

Il faut dire que les écolos n’étaient pas encore rentrés en politique, tout juste s’étaient-ils rassemblés à Woodstock et le principe de précaution était absent de notre vocabulaire.

Mais avant de pratiquer, il faut apprendre et les écoles de pilotage fleurissaient à chaque coin de circuit, dont la plus célèbre était à Nevers-Magny-Cours sous la férule de Tico Martini et pour laquelle je m’étais préinscrit, étant encore à l’armée pour quelques mois encore.

Avec l’école Windfield, deux autres écoles faisaient fois dans l’hexagone : le Bugatti au Mans et celle de Nogaro.

C’est de cette dernière dont il sera question, pourquoi ?

Eh bien parce qu’en 1969, c’est avec une MEP X2 que l’on pouvait faire ses premiers tours de roue en monoplace !

Cette école était dirigée de main de maître par François Chevalier, assisté par Jean-Claude Lhoro.

COMMENT CA MARCHE ?

 Le circuit Paul Armagnac (déjà un nom qui enchante nous les Débéistes) se trouve sur la route de Tarbes et il n’est pas difficile à trouver.

Un climat bon enfant règne entre élèves et instructeurs.

François Chevalier y reçoit les élèves, hilare de voir les têtes de ces citadins passablement interloqués et serre la main de tous.

Il y a là, deux monoplaces : une MEP X2 et une Merlyn ex-F3 équipée d’un moteur 1100 revu et corrigé.

Le premier jour, tout commence par un cours théorique qui s’appuie sur un tableau noir sur lequel François Chevalier dessine et commente.

Tout le monde est attentif et ne pense plus à rien. La pensée est accrochée au morceau de craie qui trace la trajectoire sur un ruban de route auquel tous les yeux sont rivés.

A Nogaro, en effet, la première matinée est réservée au tableau noir où l’on apprend successivement la position des mains sur le volant, l’explication schématique du » talon-pointe », les études de trajectoires suivant les différents types de courbes ou de virages, et tout ce qu’un apprenti pilote doit s’efforcer de connaitre pour ne pas être ridicule en se retrouvant sur la piste.

Ne pas être ridicule, c’est la hantise de tous avant de passer l’après-midi de la théorie à la pratique avec les voitures personnelles.

Pendant le déjeuner pris en commun, les conversations tournent toujours autour des voitures et certains, la tête déjà enflée, paraissaient aptes à piloter des Formule 1…

Puis l’APM, François et Jean-Claude allaient expliquer sur le terrain la procédure, en marchant d’abord, puis il montra son savoir faire.

« Allez, à vous maintenant… »

Un par un et au volant de leur voiture personnelle qu’ils connaissent pourtant bien et qui leurs semblent soudain étrangère, ils essayent de penser à tout simultanément, ce qui les rend empotés, débutants, apprentis en diable.

Un à un, ils passent chaque courbe, une fois deux fois, en se remémorant de toutes leurs forces ce que l’on vient de leur dire : en braquant au petit drapeau placé à l’entrée, en allant tangenter la corde au troisième pneu, en sortant près du fanion rouge, prenant garde à bien utiliser toute la largeur de la route.

Pendant qu’au volant ils essayent de faire de leur mieux, François dissèque leur comportement, expliquant aux élèves ce qu’il y a de bon et ce qui l’est moins.

On écoute les critiques, les recommandations diverses et tout le monde reprend la volant pour des passages successifs jusqu’à ce que le virage soit correctement exécuté.

Lorsque votre tour est passé, vous regardez ce que font les autres et vous écoutez les observations que formulent François et Jean-Claude.

Puis s’enchaine l’étude de trajectoires de virage en virage.

Si ça ne rentre pas, François se met au milieu de la piste et vous force à passer au point précis, car rien à faire, il faut y passer…

C’est Sparte qui rejoint Rome, car si les élèves sont là pour travailler, flotte malgré tout une ambiance décontractée autour de ce petit circuit, où l’on s’étonne de rien, où tout sent le farniente et le chaud soleil.

Sommeil après le diner, c’est nécessaire.

Et puis demain, pas de blague, ce sera sérieux : on attaque la monoplace.

Le stage dure quatre jours.

Au petit matin, les élèves à peine éveillé, se retrouvent sur le circuit, mais très excités.

C’est qu’elle est déjà là, cette bête qu’on dit de race…

Race si l’on veut, puisqu’au premier stade, c’est le volant d’un MEP X2 que d’aucuns n’ont pas hésité à appeler « la monoplace agricole ».

Mais appréciée ou non, il s’agit d’un fuseau muni d’un volant dans lequel on se couche entre un treillis de tubes et à l’extérieur duquel se trouvent les roues découvertes dont les pneus paraissent énormes.

Il suffit de tirer un petit bouton rouge pour mettre le contact, on entend un sec tic-tic qui amène l’essence et on appuie sur le démarreur.

A cet instant, si l’élève avait été debout, il serait tombé assis tant il sentirait ses jambes en coton !

Bien calé dans le siège baquet, c’est parti pour poursuivre l’étude des virages, répétition de l’apprentissage sur sa voiture perso de la veille.

Au départ, si cela paraissait un monde, un rêve avant que de savoir, maintenant, on se sent déjà à l’aise, bien dans sa peau.

Lorsqu’après les premiers tours de roue et une matinée passée à apprendre à freiner, lorsqu’après une journée destinée à étudier les trajectoires, il faut céder le volant à un autre, on fait presque triste mine.

C’est qu’elle plait cette MEP frappée de la coquille Schell.

Après 48 heures d’apprentissage proprement dit, commencent les choses sérieuses.

Tandis que François grimpe à la tour de contrôle d’où l’on voit tout le circuit, on commence à boucler les premiers tours complets au volant de la MEP en respectant un régime moteur fixé à 4.000 t/mn.

Un bon élément doit alors effectuer son tour de piste en 1’08’’.

Pour ce faire, il dispose de deux tours de lancement, de trois autres chronométrés et d’un dernier destiné à l’arrêt.

Il s’agit alors de bien prendre ses trajectoires et, pour être tout à fait sûr de ses élèves, François fait ensuite avec eux quelques tours dans leur voitures personnelle.

Si l’on a été bon élève en respectant les 4.000 tours (un mouchard en témoigne), on obtient alors l’autorisation de faire les six tours suivants à 4.500 t/mn.

C’est en quelque sorte une récompense, puisque lorsque vous dépassez les tours imposés, vous êtes sanctionné et l’on vous fait redescendre d’une tranche de 500 tours.

Arrivé à ce stade qui est le maximum à atteindre avec la MEP, on saute dans la Merlyn.

L’anglaise est déjà plus apte à combler les aspirations belliqueuses des stagiaires que la petite albigeoise.

Plus tard, c’est la MEP X27 qui remplacera la X2, mais ce seront les années 70… une autre époque…

SUR LES TRACES DE LA MEP AUTO-ECOLE DE NOGARO

La MEP de l’école de pilotage de Nogaro est maintenant la propriété de Serge Mace.

Il l’a achetée en 1988 ou début 1989 et porte le numéro 34.
Serge l’a achetée à Paul Alquier, collectionneur et fana de véhicule d’époque localisé à Mazamet.

Cette voiture était conforme à son origine, il y avait une tôle en aluminium fixée par rivets qui empêchait aux pilotes de remettre l’aiguille du  compte tour SMITH à zéro,

l’autocollant des passages de vitesses est d’origine également.

La tôle du réservoir d’essence ou venait s’appuyé le dos n’était pas incurvée comme les constructions d’après.

Ci-après, les photos du réservoir et de la plaque de fabrication .

Charly  RAMPAL