Paul Frère, ingénieur, grand journaliste et pilote belge, a participé au début des années cinquante à diverses épreuves internationale.

A l’occasion d’une course d’une heure organisé par le R.A.C. de Spa sur le célèbre circuit du même nom, Paul Frère y participa au volant d’un Dyna X fraîchement sortie des chaines de l’avenue d’Ivry.

Paul Frère était alors à la recherche d’un modèle qu’il pourrait piloter et profiter de l’évènement pour en faire peut-être la promotion si les résultats s’avéraient positifs.

C’est à la toute dernière minute que Panhard décida d’envoyer à Bruxelles une voiture et 2 moteurs de série rodés au banc et soigneusement mis au point et qui prouve l’intérêt de notre marque pour les compétitions au risque d’entacher sa réputation.
Mais Panhard a toujours su prendre des risques, ce qui en a fait une marque attachante…

C’est donc le témoignage de Paul Frère que je vous livre et qui était paru dans la revue « Belge Automobile » d’Août 1950 et en même temps la découverte des qualités de la Dyna X.

« La voiture me fut confiée 3 jours avant le début des entrainements, afin que je puisse un peu m’y acclimater, ce qui se fit assez rapidement.
Il s’agissait de la dernière version de la Dyna, c'est-à-dire avec moteur de 750cc dont la puissance au frein, comprise entre 32 et 33cv, assure à ce petit véhicule de 580 kg seulement, un rapport poids / puissance de quelque 15 kg par CV, extraordinaire pour une voiture de tourisme de cette cylindrée.

Arrivée sur le circuit le vendredi soir, la Dyna, sans autre préparation que l’enlèvement du filtre à air et la substitution d’un gicleur de 115 au gicleur de 105 du Solex 32 PBI, pour minimiser les risques d’échauffement excessifs aux soupapes d’échappement, s’avéra immédiatement être la plus rapide des petites voitures jusqu’à 1.100 cm3, réalisant un tour à 98,7 km/h de moyenne, sans forcer dans les descentes.

J’avais acquis la certitude de pouvoir tourner au moins à 100 après quelques mises au point.

Ce qui était assez terrifiant cependant, c’est que, grâce à l’extraordinaire maniabilité de la voiture et son étonnante tenue de route, il y avait moyen de faire tout le circuit, y compris, avec un peu d’entrainement, le virage en S de l’eau rouge, en gardant continuellement l’accélérateur au plancher, sauf au virage de la Source, bien entendu, où les gaz étaient coupés pendant 2 à 3 secondes que durait le freinage.

La seule limitation était purement mécanique : dans la descente vers Burnenville, les soupapes commençaient à s’affoler à 135 au compteur et la prudence m’obligeait à lever le pied pour ne pas dépasser cette vitesse si on voulait éviter un désastreux contact entre les soupapes et les pistons.

La conclusion à tirer de ce premier entrainement était donc qu’il fallait tout mettre en œuvre pour que, pendant cette marche forcenée d’une heure, le moteur soit maintenu le plus froid possible.

Le circuit de réchauffage du carburateur fut donc coupé ; ce qui devait en même temps assurer un certain gain de puissance par augmentation de la densité de la charge, et toute possibilité d’auto-allumage fut écartée en utilisant des bougies de course Champion LA 11 et en ajoutant environ 20% de benzol à l’essence.

Je demandais qu’on amène à Bruxelles un silencieux à absorption qui fut monté à la place du silencieux à chicanes. Le gicleur principal fut porté à 120.

Je pouvais maintenant espérer que ce moteur donnerait le petit surcroit de puissance nécessaire pour me permettre, sans que la vitesse de la voiture dans la montée de Stévelot et dans la côte de Burnenville n’en souffre , de faire monter par Englebert, à la place des 135 x 400 des pneus 145 x 400 qui devaient me permettre d’aller plus vite dans les descentes.

Dans leur ensemble, ces diverses mises au point furent d’une efficacité qui dépassa largement les prévisions : des le premier essai, nous avions gagné 20 secondes au tour.

Un fait intéressant est qu’une fois le réchauffage du carburateur rétabli, le réglage de la carburation adopté à Francorchamps était nettement trop riche et les performances inférieures à celles réalisées avec le filtre à air et le gicleur principal standard de 105 et qui comprennent des accélérations de 0 à 80 km/h en 15,5 secondes et de 0 à 100 km/h en 39 secondes.

Le premier de ces deux chiffres correspond aux accélérations d’une voiture moyenne de deux litres de cylindrée.

Ayant vu aux entraînements la plupart des concurrents à l’œuvre, j’ai la conviction que le facteur conducteur a joué un rôle déterminant sur les moyennes réalisées par les différentes voitures de course.

Il faut donc se garder de tirer des conclusions trop hâtives des résultats comparatifs de l’épreuve.

Le dimanche, c’est donc avec l’espoir de dépasser le cap des 100 km dans l’heure que je m’alignai au départ d’une course qui fut sans histoire.

La Tatra que j’avais dépassé au départ, me devança au deux tiers de la côte de Burnenville, pour laquelle la 3ème de la Dyna était trop basse et la 4ème trop haute. Je restais collé derrière elle à près d’un 130 réel (6.000 tours) dans la descente jusqu’après le virage de Malmédy, ne fus que peu distancé jusqu’à Stevelot, puis, dans remontée vers la Source, les 1.200 cm3 supplémentaire de mon concurrent firent valoir leurs droits. Derrière, plus rien depuis Stévelot.

6 tours s’écoulèrent ainsi sur le même rythme, sans que je ne vis personne, sauf deux concurrents plus rapides, en panne : deux places de gagnées. C’est le raisonnement égoïste du coureur à son volant.

Il restait donc devant moi une Peugeot, la Volvo d’Attilio Pizzamenti et la Tatra.

Le septième tour vit s’évanouir mes espoirs de ne pas être doublé par Georges menant avec brio sa 203 à deux carburateurs, terriblement rapide, mise au point par ses soins.

Par contre, j’eus moi-même la satisfaction de doubler l’une des petites Renault puis la seule autre voiture de ma catégorie, une Minor.

A l’arrivée, les fleurs couvrirent littéralement la Dyna, qui, en une heure avait abattu plus de 103 km.

La plus petite des voitures qui la précédait, la Volvo, dont la marche fut d’ailleurs remarquable, avait 1.410 cm3, soit près du double de sa cylindrée.

D’inquiétude, je n’en eus qu’une seule : le niveau d’essence.
La quantité limitée que j’avais mise dans le réservoir pour réduire le poids mort, disparaissait à un fameux rythme avec les réglages et l’allure adoptée.

J’en avais tout juste encore pour un tour quand le Baron de Tornaco brandit son drapeau à damiers. »