Après une dizaine de mois de préparatifs dans le nouvel atelier « carrosserie plastique » de Chausson, le coach DB se présente au Salon d’octobre 1954 dans sa configuration définitive.

Exposé avec une carrosserie en Duralinox au salon de Paris 1953, le prototype du coach DB HBR 5 a été envoyé peu de temps après à Gennevilliers où l’on préparera sa mise en fabrication dans ce nouvel atelier.
A la fin de 1953, cette puissante entreprise d’emboutissage a conclu un accord avec Deutsch et Bonnet pour la production d’une centaine de coach HBR 5, quantité minimale qui permettra l’homologation des DB en classe Grand Tourisme.

Au terme d’une année de préparation dans la perspective d’une production régulière, le premier coach HBR 5 sort de chez Chausson à la veille du salon de Paris 1954 et sera exposé sur le stand DB : il porte le n°100.

Chez Chausson, la fabrication en série des DB commence en janvier 1955, sous la direction de Robert Sobeau dont je vous ai longuement parlé

Mais c’est au produit auquel cet article va s’attacher et plus particulièrement à son essai d’époque pour éviter toute partialité à travers le journal « L’Automobile » que j’ai revisité.

René Bonnet a toujours considéré que la compétition était le seul banc d’essai qui lui permettait de mettre au point de véritables voitures de Grand Tourisme.

Ce coach est donc le premier à posséder une caisse entièrement en résine et fibre de verre, plus vulgairement dit « en plastique ».

Cette voiture avait fait le buzz (comme on dirait aujourd’hui) et dès la fermeture du Grand Palis salon, les journalistes automobiles se sont dirigés vers les ateliers de Champigny-sur-Marne pour prendre en main un coach DB.

Cette voiture de Grand Tourisme est aussi une voiture de sport véritable (l’une des seules à cette époque en France).

UN MOTEUR PANHARD

Certes, ce n’est pas une surprise pour nous Panhardiste ou DBéistes, mais il faut savoir que DB y avait apporté sa touche personnelle qui porte principalement sur la distribution, l’équilibrage de l’ensemble mobile et la carburation.

Encore, ces légères améliorations exigent-elles un soin particulier et des mises au point méticuleuses.
Les caractéristiques techniques sont évidemment proches des moteurs Panhard dont je rappelle ici les principales caractéristiques pour les béotiens : flat-twin de 850cc refroidi par air, taux de compression de 7,8, développant 50 cv à 5.000 t/mn.
Les culasses des cylindres sont monoblocs sans joint.
Les soupapes sont en acier spécial, donc pas celles d’origine. Elles sont commandées par barre de torsion.
Le vilebrequin, renforcé, travaille sur des roulements à rouleaux.
Les bielles dites « Tour Eiffel » à cause de leur forme similaire à l’emblème parisien, travaillent sur rouleaux également.
La culbuterie, on le sait, comporte un rattrapage de jeu hydraulique.
Le carter d’huile est placé très bas et très bien refroidi.
Le moteur est posé sur un patin de caoutchouc et stabilisé à l’arrière par une patte fixée à la boite de vitesses.
Ce montage amoindrit les résonnances dues au fonctionnement mécanique et autorise des reprises basses sans vibrations, sans à-coup.

Ce moteur poussé aime l’effort et ne manifeste aucune tendance à chauffer anormalement.
Lors des essais effectués sur le circuit routier de Monthéry qui met à dure épreuves les voitures, le thermo d’huile du DB ne dépassera pas le chiffre de 70°.

L’embrayage est du type monodisque à sec. Sans doute gagnerait-il à être renforcé par un PK10, car lors des accélérations vitesse et d’accélération distance, il manifeste une certaine tendance à chauffer puis à patiner.

La boite de vitesse est une Panhard dont les rapports sont revus par René Bonnet.
Elle comporte quatre rapports synchronisés : la 4ème étant surmultipliée.

Cette boite est commandée par un levier très court situé au plancher bien à portée de la main du pilote.

Le dessin de la grille pour logique qu’il soit, est inhabituel et dans les premières cinq minutes, un conducteur peu concentré commettrait quelques erreurs : le point mort est longitudinal, les 1ère et 2ème vitesses se trouve de part et d’autre du point mort, en arrière, les 3ème et 4ème en avant.

L’accoutumance est vite prise et l’extrême maniabilité de la boite aidant, on parvient à passer les différents rapports avec beaucoup de facilité.
Seule la marche arrière située en arrière de la 1ère et la 2ème est plus difficile à trouver et nécessite un effort de traction trop important sur le levier.

La synchronisation est correcte, mais la 4ème tend à accrocher au passage.
Quant à l’étagement des rapports, il est exempt de toute critique. Le verrouillage est quant à lui ferme.

Le moteur est alimenté par un carburateur Solex double corps, monté sur des tubulures de gros diamètre de série ;

Le réservoir de carburant en alliage léger, a une contenance de 60 litres, ce qui autorise une autonomie respectable.
Malheureusement, l’orifice de remplissage, situé sous la custode arrière est trop étroit pour une voiture pouvant participer à des compétitions.
L’équipement électrique fonctionne sous 12 volts. L’allumage est classique par Delco.

La transmission attaque les roues avant. Un amortisseur de couple est monté sur chacun des cardans.

La direction qui est aussi une DB, est d’une précision exemplaire.
Une vis de réglage, montée sur la base de la fusée permet de régler sa dureté.
Cette direction autorise des manœuvres hardies et en virage, c’est au millimètre qu’on choisit sa trajectoire.
Le rayon de braquage est suffisant pour que les manœuvres en ville s’opèrent avec aisance. Le volant souple cerclé de bois, est fort agréable aux mains.

DES PERFORMANCES BRILLANTES

Les performances du Coach DB sont réellement brillantes.
Les accélérations sont franches.
A titre indicatif, la DB n’exige que 18’’ pour passer de 0 à 100, contre 24’’7 pour la Dyna Z.
Les reprises sont nerveuses. Quant à la vitesse de pointe, elle est assez étonnante pour un moteur de cette cylindrée, puisque l’essayeur du moment dit avoir bouclé le tour de l’anneau de vitesse en 1’02’’, soit à 147,962, sans tenir compte de la correction induite à ce circuit.

Inutile de préciser qu’avec cette voiture, on parvient à réaliser des moyennes à la mesure de voitures beaucoup plus puissantes.

La tenue en côte n’est pas décevante et la bonne synchronisation de la boite, jointe à sa très grande maniabilité permettent de se tirer avec élégance d’à peu près toutes les difficultés.

Le coach DB est incontestablement une très grande routière qui possède en plus du rush d’une voiture de sport authentique.

La consommation est réduite et aux grandes vitesses 9,5 litres aux 100 km lui suffiront.
Il faut noter enfin que ce D.B. se conduit sans précaution spéciale, très exactement à la manière de n’importe qu’elle voiture de tourisme.

L’échappement, également conçu par Bonnet, émet un son feutré. Seules les oreilles délicates regretteront peut-être que le niveau sonore à l’intérieur de la voiture soit assez élevé au-delà de 100 km/h.
Un effort réalisé dans le sens de l’insonorisation ne mourrait qu’ajouter à l’agrément d’utilisation de cette voiture.

UNE STRUCTURE ROBUSTE ET UNE SUSPENSION EFFICACE

La carrosserie de cette D.B. repose sur une poutre centrale tubulaire en acier.
De cette poutre, un berceau part vers l’avant qui supporte la coque, la mécanique et qui sert de patte d’amarrage aux amortisseurs avant.

La caisse monobloc est en matière plastique produite, comme on l’a vu au début, par les usines chausson.
L’ensemble parait extrêmement rigide. De plus, tous les bruits parasites, tels que grincements, rossignols, etc… en sont exclus, même sur les fragments de route défoncée ou sur les pavés, nombreux à cette époque.

A l’avant, cette voiture comporte des roues indépendantes.
La suspension est assurée par des ressorts à lames transversaux, plus larges qu’à l’origine, afin d’assurer une meilleure résistance à la déformation avant et arrière sur un effort de freinage brutal à grande vitesse.

Les amortisseurs avant sont télescopiques hydrauliques à double effet.
Ils proviennent des ateliers de Champigny.
La suspension arrière est semi-indépendante par barre de torsion. Elle est complétée, elle aussi, par des amortisseurs hydrauliques.
Ce mode de suspension est très efficace et il assure à la voiture une tenue de route proprement remarquable.
Il est pratiquement impossible da faire décrocher en virage. Seule dans le cas extrême, la caisse se couche sans que pour autant aucune amorce de chasse ne se manifeste.

La D.B. a une manière de virer très personnelle. Même dans les virages serrés pris à toute allure, la roue arrière intérieure ne lève pas.

On peut dire de la D.B. qu’elle se joue des difficultés et qu’elle est particulièrement à son aise sur les routes sinueuses.
La moyenne réalisé sur le routier de Monthléry, demeure éloquent à ce sujet.

La suspension de la D.B. est néanmoins assez sèche, sans pour autant nuire au confort des occupants.
Les freins hydrauliques qui équipent la voiture agissent sur les quatre roues. Les tambours de freins sont spécialement étudiés pour elle. P as de double circuit de freinage cependant.

Les segments ont 45 mm de large. Puissants et progressifs, ils ne manifestent aucune tendance à perdre de leur efficacité lorsqu’in malmène la voiture.
Le frein à main qui agit sur les roues avant est actionné par un long levier situé sous le tableau de bord, pas très pratique et trop long lorsqu’il est tiré gênant le conducteur lorsqu’il veut sortir de la voiture où y entrer.
De plus son efficacité est assez relative.

La D.B.accuse sur la balance 600 kg, mais un allègement est possible pour une vocation en compétition, ce qui améliore encore ses performances sans pour autant nuire à sa tenue de route, non plus qu’à sa robustesse.

UNE LIGNE EQUILIBREE ET UNE FINITION LUXUEUSE

Juger la ligne d’une voiture est avant tout une question de goût. Mais le coach D.B. a une ligne très équilibrée.
C’est une deux portes certes, mais qui autorise un accès facile aux places avant. Quant aux places arrière, elles n’existent que pour la forme, comme sur toutes les voitures de ce genre.

La finition est luxueuse et les garnitures intérieures épaisses, sont de bon goût. Les deux sièges baquets sont très enveloppants et maintiennent bien le corps.
Les jambes sont à l’aise, la largeur aux coudes est généreuse.
Quant à la garde au toit, elle est largement suffisante, même pour une personne de grande taille.
La visibilité est bonne à l’avant et latéralement, moins bonne à l’arrière.
Le tableau de bord bien présenté est complet et très lisible : le tachymètre, le compte-tours, les différents indicateurs de pression d’huile, de température d’huile et de niveau d’essence sont groupés sous les yeux du conducteur, à l’extrême droite, un grand vide-poches y est ménagé.

Les manettes de commande sont groupées sur la colonne de direction, à l’exception des clignotants qui sont commandés par un bouton situé devant le levier du changement de vitesses.
Le démarreur est commandé par solénoïde.
Le chauffage est efficace. Les essuie-glaces ne balaient réellement le pare-brise qu’en deçà de 100 km/h.

Les phares s’escamotent dans les ailes.

Pour la nuit, il suffit de presser un bouton pour qu’ils prennent leur position.
Malheureusement, ils donnent une prise an vent importante.

Lors d’un essai de vitesse maxi réalisé à Monthléry, les phares en position d’éclairage, nous n’avons plus tourné qu’à 142 km/h.

On verra que plus tard, cet inconvénient disparaître avec l’apparition du carénage des phares.

L’accessibilité mécanique est satisfaisante.
Quant aux bagages, ils trouvent asile derrière les sièges avant et dans le coffre arrière.
La roue de secours est logée dans ce coffre dans un emplacement qui lui est propre.

CONCLUSION

Une grande routière, rapide et équilibrée :

Le coach D.B. de 1955 est incontestablement l’une des premières voitures françaises de grand tourisme en même temps que l’une des seules voitures de sport.
Le mérite de son constructeur n’est pas mince, qui s’obstine dans une tâche difficile et, somme toute, peu lucrative,.
Si elle autorise des performances brillantes, elle procure à ses occupants un vrai confort, et cet élément n’est pas négligeable.
Cependant son prix reste élevé.

Charly RAMPAL sur un Essai de L’Automobile

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