En vue des « 24 Heures de 1967 », le développement de la voiture se fixait 4 objectifs :

1 – améliorer la commande de vitesses pour la rendre fiable à 100 %

2 –  alléger la voiture

3 – réduire les jeux des rotules des bielles de guidage de suspension

4 – réduire la légèreté de direction.

Seuls les objectifs 1 et 3 purent être réalisés complètement. Les développements relatifs aux objectifs 2 et 4 furent limités par les coûts de transformations. En particulier, une réduction importante de la légèreté de direction impliquait la création d’un nouveau boîtier de direction ( à la place du boîtier extrapolé de la série).

Cette modification ne put être réalisée et l’équipe se limita à un changement de la géométrie de pivot.

En effet, celle-ci était si douce que l’effort à produire pour placer la voiture en courbe était extrêmement faible.

Cette quasi-absence de contre-réaction ne permettait pas au pilote d’apprécier facilement le niveau de sollicitation auquel il soumettait réellement la voiture.

L’origine de ce défaut était cependant connue : d’une part l’angle de pivot était faible (de l’ordre de 4°) et d’autre part, la démultiplication de la direction était importante (de l’ordre de 18,5 à 1).

Ceci résultait, comme on l’a dit, de l’usage d’une crémaillère de direction d’une voiture de série et d’une mise en place d’organes du train AV qui, pour des raisons d’angle de braquage, conduisait à d’assez longs leviers de direction.

Créer un boîtier de direction sensiblement plus direct était la bonne solution : ce n’était, hélas, pas dans les possibilités financières de CD, dont le budget pour cette année là était des plus modestes.

C’est pour cela que seule l’augmentation de l’angle de pivot et l’allongement du   triangle inférieur seront retenus.

La suspension AR fut également retouchée pour augmenter l’anti plongée et l’anti braquage. La voiture pris la désignation de 66C.

Elle fut prête que quelques jours avant les 24 Heures du Mans. Une brève séance d’essai sur la piste de Michelin permit de commencer le rodage du moteur utilisé en course.

CHOULET y participa activement et il put se rendre compte combien l’augmentation du rappel de direction facilitait la négociation des courbes. Cela permettait de se sentir très à l’aise au volant.

Mais le fait d’être en rodage, c’est à dire de limiter la vitesse à 220 km/h au lieu des 245 que permettait l’usage de la pleine puissance, allait masquer un problème important qui apparut deux jours plus tard sur la piste du Mans.

Là, il fut constaté, qu’à pleine vitesse, la partie extrême avant du carénage inférieur touchait le sol lorsque la suspension devait absorber les variations rapides du profil longitudinal de la chaussée.

Un léger réajustement de l’angle d’incidence ne résolut pas le problème.

En fait, l’origine de cette nouvelle difficulté était connue : par un souci de normalisation – pour ne pas dire d’économie –  les ressorts AV de la 66C étaient les mêmes que ceux de la 66B. Mais l’allongement du triangle avait légèrement réduit la raideur effective à la roue.

La flèche de suspension de la suspension, sous l’effet des portances négatives induites par les variations d’incidences  provoquées par les défauts de planéité de la chaussée, en était de ce fait assez nettement accrue.

Quelques photos de cette voiture dans tous ses états à l’atelier avec Stéphane Seckler:

La voiture vue de l’arrière :

La voiture vue de face :

La voiture vue de profil :

Le tableau de bord :

Deux voitures étaient engagées. Elles abandonnèrent rapidement :

– rupture de moteur pour l’équipage BERTAUT / GUILHAUDIN, qui explosa carrément au lever du pied au bout des Hunaudières.

  • surchauffe sur celle de BALLOT LENA / DAYAN à cause d’un désamorçage du circuit d’eau, qui eut raison de son joint de culasse.

Or, on sait qu’à cette  époque, il était interdit de ravitailler en eau avant un certain nombre de tours.

– retour à la définition de moteur développé par Peugeot,

– retour au circuit d’eau d’origine, un peu plus complexe.

La CD n°53 de Guilhaudin / Bertaut abandonnera après 8h de course et la n°52 de Dayan / Ballot Léna après 5h de course

 Ainsi se terminait une aventure riche d’enseignements.

LA FIN DE CD

Jusqu’en fin de saison, et après Reims, les CD tournèrent régulièrement sur les pistes d’essais Michelin afin de participer au développement des pneus Racing de la marque, mais, la décision avait été prise d’arrêter : plus d’argent !

Esso aidait l’équipe CD, mais ce n’était pas suffisant pour pouvoir poursuivre l’aventure. Il aurait fallu trouver d’autres soutiens.

Pour que tout ce travail ne parte pas en fumée, un bilan récapitulatif de ce qui avait été appris en matière de dynamique : un livre en est né, « la dynamique des véhicules routiers ».

Les CD furent toujours des voitures fantastiquement pures et belles : l’aboutissement en est bien sûr la CD66.

L’équipe CD était parfaitement consciente de la marche à suivre et prête à tenir compte de l’expérience qu’aurait pu lui prodiguer la participation à d’autres épreuves que Le Mans.

Bien conçues, les CD ne purent jamais évoluer suffisamment et faute de s’appuyer sur une base commerciale, Charles DEUTSCH s’est vu contraint de mettre un terme à un effort qui reposait entièrement sur le mécénat.

Une des 66 a été rachetée en 97 par le Conseil Régional de la Sarthe, après des travaux de restauration : elle sera exposée au Musée du Mans parmi tant de ses glorieuses aînées.

Elle participera au Salon Rétromobile :

Ou en démonstration au Mans-Classic :

Charly  RAMPAL   (Documents photographique du Moteur-Moderne et celles en couleur de Roland Roy)