C’est le 17 juillet 1992 que Gaston Serraud nous avait quitté, âgé alors de 83 ans.

Pourquoi s’attacher à ce personnage que beaucoup ont aujourd’hui oublié ?

Parce qu’il a été un des grands pilotes de course automobile d’après guerre, mais surtout, il a fait partie des quelques rares pilotes qui participèrent à la première course de Monomill qui eut lieu le 25 avril 1954 à Montlhéry.

L’HOMME

Apprenti mécanicien à l’âge de 15 ans, Gaston Serraud fut toujours  un fervent de l’automobile.

Conduisant à l’âge de 11 ans, c’est en 1928 qu’il passe son permis de conduire, le rendant le plus heureux des hommes.

Comme mon idole, Graham Hill, c’est par les fonctions de mécanicien qu’il devient pilote.

En 1937, les établissements Delahaye l’engage comme metteur au point et il obtient sa première licence de coureur automobile.

Un pilote amateur, Daniel Porthault, repère ses grandes qualités et le prend comme mécano.

Grâce à lui, Gaston Serraud va débuter en course le 19 septembre 1937 à la « Coupe d’automne des Indépendants ».

Il s’y classe 5ème sur Delahaye.

En 1938, après le Grand Prix d’Anvers, il remporte un magnifique succès pour sa première participation aux 24 Heures du Mans en plaçant sa Delahaye à la 2ème place avec Giraud-Cabantous.

Après la guerre, encore sur Delahaye, il remporte des places très intéressantes au Grand Prix de Comminges, aux 12 Heures de Paris, etc…

Puis, il va courir sur Simca au Bol d’Or de 1949, puis la Coupe d’Automne à Montlhéry en 1950 sur Simca Deho.

Rebelote en 1954 sur Dergi Simca en 1954 ainsi que la course de côte de Lapize à Monthléry toujours en 1954.

C’est alors, en lisant le journal L’Equipe du 3 février 1954, sous la plume de Maurice Henry, sous le titre : « La 1ère Monoplace course Monomill est sortie hier des ateliers DB à Champigny. » qu’il séduit par cette nouvelle formule de promotion ouverte à de futurs pilotes potentiels.

Il s’agit d’une première tranche de 15 voitures identiques en tout point qui courront sur le même circuit.

Tirés au sort entre les pilotes désignés, certaines seront réservées à quelques débutants qui pourront ainsi se mesurer au talent de pilotes déjà confirmés.

Deux exemplaires sont déjà prêts en principe. Cette première tranche de 15 exemplaires devrait être suivie d’une seconde.

Les deux Monomills seront présentés officiellement non pas sur la piste de Montlhéry en raison du froid, mais à 18h à Paris, 41 avenue Gabriel à l’issue de la réception donnée à l’occasion du Rallye Charbonnières.

Le Monomill, dont j’ai déjà fait les présentations dans un article spécifique, est équipé d’un moteur Panhard de 850 cc, préparé spécialement pour la compétition.

Il développe 55 cv à 5500 t/mn, alimenté par un carburateur double corps Solex.

Il est muni d’un démarreur et de freins hydrauliques sur les 4 roues.

La carrosserie est en alliage léger, mais sera vite remplacée  par une carrosserie de « plastique ».

Le Monomill pèse 320 kg et devrait atteindre la vitesse de 175 km/h : c’est une véritable monoplace de compétition.

Pourquoi ce nom de Monomill ? Tout simplement parce qu’il s’agit de voitures de course monoplace et que sa cylindrée ne doit pas excéder 1000 cm3, un peu comme la règle des Maxi 1000 à leur début.

Inutile de dire que l’idée vient de René Bonnet, qui est déjà un pilote et un constructeur confirmé.

Lors des épreuves de course pour que chaque pilote soit sur un pied d’égalité quant à sa monture, celui-ci devra surveiller son compte-tours.

En effet, avant son départ, l’une des deux aiguilles que compte ce compteur spécial, sera bloquée sur le chiffre le plus compatible avec la sécurité du moteur.

Si ce nombre de tours est dépassé, la seconde aiguille dépassera la première peinte en rouge jusqu’au point atteint où elle se bloquera.

Ce « mouchard » permettra aux organisateurs de voir en un coup d’œil si les instructions ont été respectées.

PREMIERE COURSE MONOMILLS A MONTLHERY

Déjà, la Presse annonce la 1ère course de Monomills pour le 25 avril 1954 à Montlhéry.

Mais on pense déjà aux courses suivantes en créant la Société Française des Véhicules de Course, composée d’un groupe de sportifs lyonnais et parisiens.

Le Président est Marc Gignoux et les fondateurs Charles Deutsch et René Bonnet, Michel Blanchon, Gabriel Lacour et André Maury.

Elle est tout simplement nommée « Monomill ».

Son objectif est de prévoir tout au long de l’année, dans le plus grand nombre de villes possibles, l’organisation d’épreuves où seules les qualités du conducteur interviendraient.

Un véritable baptême est organisé sur l’autodrome de Linas-Montlhéry où l’on a procédé à une démonstration de Monomills avec des pilotes tels que Armagnac, Vidilles, Gaston Serraud, mais aussi René Bonnet et Marc Gignoux.

Plusieurs séances d’entrainement ont lieu durant le mois d’avril pour que les pilotes s’habituent à ces nouvelles monoplaces.

Afin d’augmenter l’intérêt des spectateurs, on a aménagé devant les tribunes en passage en « V » de 9m de large, que les voitures abordent à la sortie de la piste de vitesse à 170 km/h.

La semaine précédant la course, la liste de 30 pilotes est diffusée dans L’Equipe.

Gaston Serraud, qui est engagé au titre de l’AGACI, toujours à la recherche d’un volant, est très intéressé par cette nouvelle formule.

Il se voit sélectionné pour participer à cette première course de Monomills.

Elle se déroule l’après-midi à partir de 15h30, selon un dispositif de 2 manches de 40 km et une finale de 75 km.

L’épreuve retiendra tout particulièrement l’intérêt du public, tant l’animation y est grande.

Vidilles remporte la première manche, Gaston Serraud se classe 10ème, car son Monomill, n’était pas assez rodé et le moteur Panhard ne pouvait pas exprimer toute sa puissance.

Lors de la deuxième manche, c’est Burgraff qui arrive à la première place, Laureau est deuxième.

Gaston Serraud va courir une seconde fois sur Monomill à Aix les Bains, le 6 juin 1954, sur le circuit du lac.

Au cours de l’épreuve éliminatoire, Gaston Serraud n’aura pas de chance car il est contraint à l’abandon en raison d’une défaillance de son circuit de freinage et d’un cylindre moteur : la chance ne l’avait pas favorisé lors du tirage au sort.

Le dimanche, après une lutte passionnante et acharnée, c’est Mougin qui remporte la finale, devant Vidilles, Dannenmuller, Storez, Etienne, Armagnac, Dupont, Feuz, Laureau, Bayol, Fayen, Chennevoy et Davoine.

Le circuit d’Aix les Bains avait consacré définitivement la formule « Monomill ».

Quant à Gaston Serraud, engagé au circuit de Comminges à St Gaudens, on ne le verra plus…

Ne pas confondre avec Gaston Soreau qui couru ensuite sur Monomill à partir de 1957…

Charly  RAMPAL  (Document P.R.T.)