JUNIOR DI ROSA
Ce véhicule est sorti de l’usine Di Rosa en octobre 1952. Il sera ensuite exposé sur le stand Panhard sur un plateau tournant.
La n°2 sera dans le hall Panhard des Champs Elysées, attirant les regards de tous les passants.
Auparavant, la n°1 a été exposée avec une actrice au volant : Monsieur Lemaitre pense qu’il s’agit de Blanchette Brunoy qui était une célèbre actrice dans les années cinquante et qui se fit remarquer dans les rôles d’ingénues, puis en petite bourgeoise.
La photo avec elle, apparaissait dans le numéro de « Paris-Match » de la semaine du Salon de l’Automobile 1951
Mais comment en est-on arrivé là ?
Albert Lemaitre est entré chez Di Rosa en 1949. Ce dernier possédait un atelier à La garenne Colombes.
Italien d’origine, Di Rosa était spécialisé dans la construction de carrosseries d’autocars avec lesquels il avait plusieurs fois remporté des Oscars sanctionnant la qualité de ses œuvres.
Le projet du Junior est né en avril 1951 suite à l’ouverture à Panhard d’un providentiel marché américain.
En ce début des années cinquante, vendre à l’étranger n’était pas le point fort de Panhard lancé sur une politique de reconversion et de redressement après les terribles années de guerre au terme desquelles Panhard avait failli disparaître, « oublié » par le plan Pons.
Ce marché américain ouvrait à Panhard une perspective nouvelle d’atteindre une dimension lui permettant d’asseoir définitivement son aura parmi les plus grands constructeurs mondiaux.
Une étude de marché fit apparaître qu’une Université américaine souhaitait doter ses étudiants d’une petite voiture économique, vive et jeune, comme l'avait été quelques années plus tôt la célèbre MG TD.
Ces qualités de base correspondaient exactement à celles de Panhard en ce début de décennie.
Ne s’arrachait-on pas sa mécanique, son châssis et ses suspensions pour fabriquer des roadsters dans le coin d’un garage ?
Les marques sportives elles-mêmes, n’avaient d’yeux que pour la mécanique Panhard qui leur donnait une chance supplémentaire de victoire.
Alors pourquoi Panhard ne réaliserait-il pas à son compte ce roadster tant demandé en France ?
Aux USA, Panhard pouvait compter sur M. Ferguson qui s’engagea totalement dans ce projet et serait un relais important.
Les bases étant posées, il ne restait plus qu’à étudier et réaliser cette voiture.
Le petit bureau d’étude de la Porte d’Ivry ne pouvait mener de front la montée en puissance du modèle Dyna X et cette nouvelle charge.
La base mécanique étant sans surprise, il fallait un partenaire sûr et éprouvé pour réaliser les premières carrosseries à la main.
Di Rosa se trouva bientôt désigné en raison des rapports de qualité avec Panhard pour lequel il réalisait déjà des carrosseries pour ses autocars et ses camions.
Les 3 dessinateurs disponibles chez Di Rosa se mirent tout de suite au travail.
La carrosserie que nous connaissons, dessinée par Albert Lemaitre, était carrément rustique dont la ligne râblée ne possédait qu’une porte et un pare-brise rabattable.
C’est ainsi que la n°1, premier prototype sera présenté fin mai 1951 en vert métallisé à Jean Panhard.
Jean Panhard en effectua un essai au terme duquel, il souhaitait apporter une soixantaine de modifications (améliorations ?) pour rendre ce projet viable.
Ces évolutions ne demanderont pas moins de 400 dessins et plans. Je n’entrerai pas dans les détails de ces transformations, mais sachez que, pour notre plus grand regret, cette voiture était prévue en aluminium. Mais la simplicité et le moindre coût du travail de la tôle d’acier l’emporta.
Les premières photos du prototype réajusté partent pour les Etats-Unis, mais le goût français en matière automobile n’est pas le même que celui de la haute couture.
M. Ferguson renvoya la copie, le 12 juin 1951, avec le restyling souhaité qui n’avait plus rien à voir… !
M. Di Rosa demanda donc à ses dessinateurs de s’en inspirer.
Hélas, ou tant mieux, la guerre de Corée qui s’enlisait et faisait mourir des centaines de jeunes américains en Asie, fit arrêter le projet Junior US et fin juin 1951, la société Fergus-Motor stoppa le projet.
Déçu, mais opiniâtre, Paul Panhard décida de poursuivre le travail commencé et l’adapter au marché français avant de l’adopter dans sa gamme exposée au Salon d’Octobre 1951.
Rappelé de vacances en plein mois d’Août, Albert Lemaitre et ses ouvriers mirent les bouchées doubles pour réaliser une présérie de 10 cabriolets dont la n°2.
Le voici à côté de son chef-d’œuvre :
Pour accompagner la voiture, un tract avait été réalisé à la sauvette avec comme illustration un dessin d’Alex Kow venu lui-même réaliser l’ébauche dans la cours de l’atelier Di Rosa.
Et le miracle se produisit : les feux du salon de l’Automobile 1951 pouvaient éclairer ce prototype de la voiture minimale pour un maximum de bonheur…!
Charly RAMPAL