CHARADE 1958 : LE BAPTEME DU CIRCUIT

Le Sport Automobile et L’Auvergne font bon ménage depuis longtemps. Songez que le premier Tour de France Automobile y est passé en 1899. Depuis, de très grands évènements s’y sont déroulés :
La coupe Gordon Bennett
La coupe Rocher Schneider
La coupe d’Auvergne
Le critérium de France
La course de côte de la Baraque
Tous ces évènements eurent lieu avant la deuxième guerre mondiale.

Le premier projet d’un circuit autour du Puy de Dôme apparut en 1908 : il capota et d’autres projets se succédèrent sans plus de résultat. Les dossiers restèrent dans les cartons jusqu’après la guerre de 40/45.
C’est à partir de 1953 que l’idée resurgit car l’Automobile Club d’Auvergne (A.C.A.) voulait commémorer le cinquantenaire de la coupe Gordon Bennett.

Le principe retenu sera un tracé de 4 à 6 kilomètres environ. Tout ne sera pas facile, car il fallait trouver un accord avec les pouvoirs publics pour réaliser un parcours répondant aux normes de l’époque et offrant dans ses abords immédiats de larges possibilités de parking.

Après maintes vicissitudes, le parcours proposé trouva l’approbation de la majorité et de Raymond Roche, le célèbre Directeur de course.
L’aspect « circuit de montagne » constituait manifestement un atout majeur mais les difficultés apparurent lorsqu’il fallut imaginer l’emplacement des diverses installations : les tribunes, la ligne droite de départ, les paddocks, les stands de ravitaillement, la piste de décélération, les restaurants, les buvettes, la tour de chronométrage, l’emplacement pour les journalistes, etc…

Le circuit terminé, il faisait l’objet d’envieux, mais il était important pour l’A.C.A et pour tous ceux qui s’étaient lancés à corps perdu dans cette entreprise de détenir le contrôle absolu des terrains sans lesquels rien n’eut été possible !

Le 24 mars 1958, le beau circuit de Charade fut présenté à la presse. Cette date avait été choisie pour avoir la presse spécialisée à leur retour du Rallye Lyon-Charbonnières. Les commentaires recueillis sur place, comme les articles parus dans les 48h qui suivirent se révélèrent flatteurs et constituaient pour l’A.C.A. un stimulant supplémentaire. Les journalistes se montrèrent cependant sceptiques sur la bonne fin des travaux pour le 27 juillet prévu pour les premières courses.

Les semaines qui suivirent montrèrent l’excellence du planning élaboré par les Ponts et Chaussées.
C’est donc par une belle matinée de juin que l’administration des Ponts et Chaussées présenta dans la salle du Conseil de l’A.C.A. les plans complets du beau circuit. L’exposé ne suscita aucune critique.

Les derniers jours qui séparaient du 27 juillet passèrent très vite et toute l’équipe eut à fournir un effort exceptionnel pour faire face à la situation. Les journées se terminaient souvent vers 2 ou 3h du matin !
Et le miracle se produisit : tout fut prêt pour l’inauguration du Circuit le dimanche 27 juillet 1958.

Qu’y avait-il au programme de ces premiers Trophées d’Auvergne : une course de Formule 2 qui sera l’épreuve vedette et les Trois heures internationales d’Auvergne en Grand Tourisme qui seront la dernière manche du Trophée Total disputé sur trois épreuves : Pau et Reims.

Je m’attacherai donc à cette dernière course qui voyait un grand nombre de participant en Panhard et DB en particulier.
Citons :
DB coupé de Laureau qui partira en 15ème position avec un temps aux essais de 4’41’’4
Panhard X86 d Vinatier / Lefourel qui partira en 23ème position avec un temps de 4’51’’8
DB HBR5 alu de Fraissinet / Armagnac qui partira en 7ème position avec un temps aux essais de 4’27’’3
DB HBR5 de Bouharde qui partira en 24ème position avec un temps aux essais de 4’52’’1
Panhard X86 de 1954 de Lucien Pailler qui partira en 36ème position avec un temps aux essais de 5’17’’8

DB HBR5 de Michaux qui partira en 35ème position avec un temps aux essais de 5’17’’7
Panhard X87 de 1954 de Georges Miller qui partira en 40ème position avec un temps aux essais de 5’31’’5
DB HBR5 de Charles Greiner et Frank Bonnafy qui partira en 41ème position avec un temps aux essais de 5’33’’5
DB HBR5 alu de René Bartholoni qui partira en 18ème position avec un temps aux essais de 4’44’’4
Panhard X86 de 1957 de Pierre Hémard qui partira en 27ème position avec un temps aux essais de 4’59’’
DB HBR5 de Jacques Baudon qui partira en 32ème position avec un temps aux essais de 5’04’’4
Panhard X86 d’Henri Quefelant qui partira en 25ème position avec un temps aux essais de 4’54’’5

Ce qui caractérise ces premiers essais, c’est la découverte du circuit de Charade, car personne n’y avait encore roulé en course. Et là, la surprise est grande. Charade se révèle comme un circuit « d’hommes » avec dés les premiers tours de roue des écarts considérables entre pilotes et les premières « figures » sur la piste. Pilotage et maniabilité de la voiture sont les critères pour réussir sur le circuit d’Auvergne.
C’est ainsi que Paul Armagnac a tourné en un extraordinaire 4’27’’6 sur la DB de Georges Fraissinet (mais il partira avec Laureau sur une autre DB).
Notons également qu’il y aura aussi un classement par catégorie : c’est Jean Vinatier qui réalise le meilleur temps de la classe 500 à 750 cc (4’58’’9).

LA COURSE :

Après l’inauguration officielle, la première épreuve des 3h d’Auvergne débute à 14h. Le directeur de course, Toto Roche, donne le signal du départ « type Le Mans ».

On reconnaît sur la photo ci-dessous : Les DB de Georges Fraissinet (20) René Bartholoni (22) Gérard Laureau (24) Robert Bouharde (26) l’Alpine de Maurice Michy (16) les Alfa de Jean Estanger (36) Raoul Martin (46) les Lotus de John Dalton (32) Jean Claude Vidilles (40) Jacques Lefebvre (42), le bâtiment Dunlop et la tour de Chrométrage.

Si Da Silva gagne le sprint, c’est Gendebien qui s’élance en tête suivi par la meute des Ferrari.
Je laisserai de côté la course des gros cubes pour me tourner vers les Panhard.
Au 9ème tour abandon de Baudon et son HBR sur sortie de route.

Ci-dessous, la Ferrari de Jean Guichet en difficulté en tapant le talus : témoin privilégié, la Panhard X87 n°18 de Miller.

Au 22ème tour, c’est au tour de Pierre Hémard de se retourner dans la descente avec sa Panhard X86. Se plaignant de douleurs au bassin et saignant d’une oreille il est évacué par hélicoptère (une fracture de l’os iliaque sera diagnostiquée).
Quand à Bartholoni, il fait un tonneau avec son DB au 34ème tour. La voiture prend feu mais les commissaires interviennent rapidement pour sortir le pilote de la voiture avec seulement une blessure à l’épaule.

Ci-dessous : Une splendide vue du premier virage de la remontée vers Thèdes après le virage du petit pont. On voit les DB de Bonnafy (104) René Bartholoni (22) l’Alfa de Marcel Stern (52) et la Ferrari de Willy Mairesse (72).

La course a été extraordinaire aussi bien dans le classement scratch (remportée par Maurice Trintignant et sa Ferrari) que dans les diverses classes : victoire de Laureau/Armagnac en classe 751 à 1.000, et de Jean Vinatier en classe 501 à 750 cc.

Une vidéo cette première course de 1958 a été retrouvée : la voici dans sont intégralité avec les commentaires d'époque .

Charly RAMPAL