Toujours préoccupé de représenter honorablement les couleurs françaises dans es grandes compétitions Sport ou Grand Tourisme, l’Ecurie Monopole, représentant officiellement la société Panhard, avait mis en lice en 1958 un nouveau moteur 750 cc.

Ce moteur a été le fruit de nombreuses études effectuées depuis quelques années.

En effet, dès 1954, Pierre Chancel avait idée de transformer le moteur Panhard en un double arbre à cames en tête (ACT).

En 1956, il décidait de réaliser le premier prototype qui fut essayé pour la première fois à Rouen en 1957, en accord avec la Maison Panhard qui avait grandement favorisé ce projet en fournissant de nombreuses pièces modifiées nécessaires.

Cet essai permis de se rendre compte que la puissance du moteur était déjà suffisante pour lutter à armes égales avec les voitures étrangères.

Monsieur Plantivaux ayant été tenu au courant de ces résultats, Monopole-Course obtenait de la B.P. (British Pétroleum), un appui financier qui permettait de prendre la décision de développer ce moteur.

Sur la base des éléments essentiels du robuste moteur Panhard, soit carter moteur, système d’embiellage, etc… un système de distribution à ACT fut entièrement dessiné.

Ceci obligeait évidemment à modifier les dessins des cylindres et culasse.

Ce gros travail fut demandé par Monopole à Monsieur Picard qui le réalisa en collaboration technique avec Pierre Chancel.

La Maison Panhard, comme toujours, continua à apporter à Monopole-Course tout son appui pour la réalisation de ses moteurs.

Les dessins des modifications furent entièrement terminés en Mars 1958 et le premier moteur tournait au banc début Mai.

Les essais ont été satisfaisants et le régime des 7.500 t/mn était atteint sans difficulté.

En dehors de son intérêt en compétition, ce moteur donnait à la Maison Panhard, pour tout le système d’embiellage, vilebrequin et boite de vitesses – ainsi qu’à la Maison Monopole-Poissy qui évidemment a fourni les pistons et les soupapes _ le moyen d’expérimenter leurs pièces avec une puissance accrue et un régime beaucoup plus élevé, le moteur pouvant tourner à plus de 8.000 tours.

Ce moteur participa au 24H du Mans sur la Panhard-Monopole n°50

Et son moteur :

LE MOTEUR DE 1959

Pierre Chancel fut donc le maitre d’ouvrage et chargé de réaliser ce moteur.

On connait Pierre comme un excellent pilote, mais ses idées mécaniques bouillonnaient continuellement dans sa tête qu’il mettait ensuite en pratique en technicien méticuleux qu’il était.

Equipier de l’Ecurie Monopole qui représentait alors officiellement Panhard sur les circuits, c’est lui qui a eu le premier l’idée de transformer  le flat-twin, bien connu de nous autres panhardistes sportifs, en double arbre à cames en tête !

Sa première réalisation fit appel à des éléments Norton, qui écumait les courses de Racer 500, mais dans sa version « longue course » : culasse, distribution et commande d’ACT qu’il réussit à adapter sur le moteur Panhard.

Ce moteur avait été créé par Joe Craig, le sorcier de la firme Norton et champion du monocylindre vertical.

Les résultats furent satisfaisants (plus de 70 ch) mais l’ensemble s’avérait encombrant, sujet à des vibrations difficiles à éliminer et à des ennuis de graissage (poussoirs et cames) provenait du fait que la distribution initialement prévue pour être montée verticalement se retrouvait placée horizontalement, ce qui annulait les lubrifications partielles par gravité prévues à l’origine sur les éléments précités.

Les culasses une fois montées sur le bloc Panhard, ce mixte était équipé d’un double allumage

  • 1-comme à l’origine
  • 2- en bout de l’ex-arbre à cames

Pierre Chancel ne pouvait s’en tenir là et avec obstination rechercha une meilleure solution.

Il pensa à un système desmodromique qui non seulement permettait un régime supérieur sans risque d’affolement de la distribution mais encore diminuerait la sensible perte de puissance provoquée  par le tarage très élevé des ressorts de soupapes utilisés sur les moteurs à haut régime.

Cependant, la réalisation d’un tel projet demandait beaucoup de temps : notamment pour le dessin et l’usinage des basculeurs.

L’idéal était que la conception d’origine de cette nouvelle distribution puisse se satisfaire dans l’immédiat du rappel classique par ressorts.

Le seul moyen de concilier les deux formules était de faire appel à un double arbre attaquant les culbuteurs et c’est la solution à laquelle Pierre Chancel se rallia après avoir examiné bon nombre de réalisations existantes et notamment le système de la BMW RS.

Entouré de ses deux mécaniciens de chez Monopole, José à gauche et Mérigaud à droite : le double ACT allait naitre.

Bien des efforts furent nécessaires, et la mise au point s’avéra laborieuse, notamment en ce qui concerne le système d’échappement.

Il fallait faire disparaitre un « trou » important à mi-régime… et les initiés comprendront quand ils sauront que la distribution ouvre sur près de 340° à l’admission, presqu’autant à l’échappement, avec un croisement de l’ordre de 150°.

DETAILS DU MOTEUR ACT

Le système desmodromique se fait par basculeur double à fourchette.

La queue de soupape est filetée pour recevoir le manchon de fixation.

Le système précédent par double arbre à cames actionnant les basculeurs : les arbres à cames  sont entrainés par arbre et pignons d’angle.

Le couple conique situé dans le carter est lui-même solidaire de l’ex-arbre à cames d’origine entrainé par le vilebrequin.

Sur le schéma ci-dessous ont distingue :

  • 1 le vilebrequin
  • 2 l’arbre de commande
  • 3  et 4 les couples coniques
  • 5 couple conique de culasse
  • 6 pignons de cames
  • 7 basculeurs
  • 8 – soupape

Notez  que la dimension des ailettes de refroidissement a été augmentée, la turbine de refroidissement a été supprimée et seuls deux conduits débitent, à partir de la calandre, l’air frais sur les culasses.

Le graissage s’opère par carter sec, avec pompe d’envoi et pompe de récupération dans le carter moteur.

Le vilebrequin reste le Panhard d’origine.

Le moteur, qui dans les meilleures conditions au banc accusait 76 ch à 7.500 t/mn, a vu sa puissance réduite à 72 ch à 6.800 tours pour augmenter le coefficient de sécurité.

CONCLUSION

Financièrement, ce travail être mené à bien grâce à la compréhension de B.P., comme je l’ai écrit plus haut, qui subventionna, de Monopole qui mit à disposition l’outillage, la main-d’œuvre et les bancs d’essais et de Panhard qui, entre autres, accepta de fournir le moule de fonderie du carter afin qu’il fut dûment renforcé et nervuré pour donner naissance au nouveau carter du moteur de course.

Mais en cette année 1959, l’écurie Monopole abandonnait la compétition et la firme D.B. devenait l’écurie officielle Panhard.

Pierre Chancel obtint que les moteurs soient mis à la disposition de René Bonnet et il faut souligner la sportivité des dirigeants de la firme Monopole, qui acceptèrent par ailleurs que les essais se poursuivent jusqu’à  conclusion, dans leur atelier du service des courses.

LE DOUBLE ACT EN CHAIR ET EN OS

Aujourd’hui, il nous reste un exemplaire que l’on avait pu admirer sur le stand du DCPL à Rétromobile où nous avions exposé tous les moteurs Panhard.

Charly RAMPAL    (Doc. MONOPOLE-PANHARD et P.R.T.)