Héritières de la grande tradition Panhard, la « 24 » est une voiture exceptionnelle à tous les points de vu.

En dépit de ses moyens financiers limités, coincé par le désir d’innover et la rigueur drastique de Citroën qui refuse de jouer le jeu en mettant son veto à la sortie d’une berline qui concurrencerait ses nouveaux produits et ceux en gestation, Jean Panhard n’hésite pas, il donne le feu vert à son bureau d’étude.

Pourtant les projets de berline étaient bien avancés.
L’urgence était de mise pour la survie de la marque doyenne, mais Bercot, le patron de la marque aux chevrons, ne voulait pas d’une « sœur » trop géniale, encombrante pour le prestige de la Maison du Quai de Javel, d’autant que la GS était dans les cartons.

Il ne restait qu’à se satisfaire d’un modèle marginal.
C’est dans la cour des coupés que Panhard décida de jouer.

On ressortit alors les dessins avant-gardistes de Ducassou réalisés en 1960 que Louis Bionier retoucha de façon géniale, pour en faire ce « chant du cygne » que l’on connaît.

Soutenu par Jean Panhard qui croyait avec juste raison à ce modèle, même si la carrière commerciale de la « 24 » ne durera que quatre petites années.

Audace, originalité, innovation, mais aussi efficacité remarquable, la voiture parait très futuriste à cette époque.
Il ne lui manque qu’un moteur digne de son plumage.

Aujourd’hui encore la 24 reste moderne.
Mainte fois copiée, mais jamais égalée, le génie éclectique d’un Bionier aux portes de la retraite, accoucha d’un authentique chef-d’œuvre.

Quant on sait qu’une étude d’esthétique industrielle doit se plier à des paramètres apparemment contradictoires et sans l’aide de PAO, on mesure le travail accompli.

Au bout de l’étude, la réussite est étonnante.

Les concepts artistiques du début épousèrent parfaitement les impondérables que furent : une mécanique vieillissante, l’économie de fabrication et d’utilisation, l’efficacité aérodynamique, l’anticipation des canons de la mode, la sécurité, le tout avec les plus petits moyens du monde…

Ce tour de force, seul Panhard pouvait le réussir… pour notre plus grand plaisir finalement.

Car la partie était perdue et Jean Panhard le sentait.
Le mérite de toute cette équipe en est que plus louable.

La « 24 » sera présentée comme un star qu’elle est, en juillet et depuis cet été 1963, plus aucun frisson ne viendra chatouiller la peau des panhardistes.

UN ESSAI INEDIT TIRE DE LA REVUE « LE CONCOURS MEDICAL »

La manière dont est décrite la 24, révèle bien la façon dont la voiture était perçue à l’époque.
Ajoutons que le corps des médecins et des pharmaciens fut à cette époque une clientèle des premières « 24 ».

LA PANHARD 24 CT EN VILLE ET SUR LA ROUTE

« Nous avons présenté à nos lecteurs, les Panhard 24 dans notre numéro de juillet 1963.
Il leur a fallu aussi un certain pour atteindre le stade de la production en série.
C’est maintenant chose faite et l’on commence à voir en circulation pas mal de ces voitures.

C’est le coupé 24 CT qui nous fut confié récemment pour essais et nous avons couvert avec lui 710 km, dont une centaine à Paris.

Il s’agit d’une voiture brillante, agréable à conduire, qui nous a laissé dans l’ensemble, une bonne impression, mais bien entendu, il y a toujours quelques critiques à faire…
Commençons par les compliments.

Tout d’abord, cette voiture est en progrès sensible sur celles que nous avons conduite au moment du dernier salon.

Elle offre toujours la même sécurité par sa tenue de route, ses aptitudes en virages, mais elle est beaucoup plus maniable grâce notamment à la commande de boite de vitesses par levier au plancher qui pourrait d’ailleurs, semble-t-il être encore un peu écourté (le précédent levier assez long et de forme courbe, avait une souplesse qui nuisait à la précision des manœuvres).

Elle a aussi gagné en silence bien que de ce côté, il y a encore des progrès à faire.

La 24 CT est certes, une voiture sportive, mais l’automobiliste ne se satisfera pas des vrombissements de moteur qui enchantent les jeunes pilotes de vélomoteurs.

N’allez pas croire que la 24 CT produit de tels bruits de bourdon en colère ! Non, fort heureusement, mais elle peut certainement être rendue moins bruyante encore et c’est une question que le constructeur ne négligera pas.

Nous avons débordé un peu sur un défaut… revenons aux qualités.

La 24 CT est extrêmement nerveuse (chargée de 2 personnes : c’est un coupé 2 + 2, mais la banquette arrière n’est vraiment pas faite pour accueillir des adultes).

Elle « tient » bien en côte, mais il est évident que si la boite a quatre rapports, c’est pour s’en servir et comme la synchronisation est bonne, il ne faut pas s’en priver.

A ce compte là, les accélérations sont brillantes : 0 à 100 en 22 secondes et même en 21 secondes dans des conditions favorables.

En vitesse pure, la voiture est très rapide. Le 150 km/h ne lui fait pas peur. Mais il y a un « mais » et nous allons encore retomber dans les reproches : le freinage à très vive allure est insuffisant.
Si l’on veut freiner un peu énergiquement – et c’est souvent le cas – il se produit un frémissement du train avant qui ne laisse pas d’inquiéter.
C’est sur ce point, d’un intérêt majeur, qu’un effort spécial du constructeur devra être fait.

Revenons aux compliments.
Pour ce qui est de la sécurité, outre l’excellente tenue de route (déjà dit), la visibilité est très large ; néanmoins le rétroviseur ne découpe qu’un mince rectangle vers l’arrière, mais la lunette arrière, bien que de grande surface, ne permet pas de faire mieux.

La direction est précise, très directe et avec un peu d’entrainement, elle permet d’avoir la voiture bien en main.

Le confort, d’autre part, est bon. La suspension est douce, même sur sol mauvais et les sièges d’accès très facile, sont extrêmement agréables.
Spacieux et moelleux, ils possèdent un système de réglage complet : en longueur, en hauteur, en inclinaison du dossier, ce que tout conducteur et tout passager ne peut manquer d’apprécier.

Enfin, l’équipement est très bien étudié et très complet lui aussi : compte-tours, montre électrique, éclairage du système de réglage de la climatisation, du coffret à gants, des portières à l’ouverture, etc…

Les phares doubles sont puissants et efficaces.

Le chauffage est vigoureux et le dégivrage de la lunette arrière comme du pare-brise est un avantage précieux (fort rare par ailleurs..).

Faut-il terminer pas quelques critiques encore ?
Oui, si l’on veut être objectif : la direction est dure à l’arrêt et rend le parking laborieux.
Le moteur manque de souplesse à bas régime et, en ville, il faut recourir constamment à la boite. L’embrayage est assez dur.

Tempérons ces critiques par un dernier bon point, et d’importance :la voiture est jolie, très bien dessinée et fort élégante.

Moyennant quelques améliorations, surtout en ce qui concerne le freinage, c’est une voiture sportive capable d’être une redoutable concurrente dans la gamme des coupés de petite cylindrée, d’autant plus qu’elle parait assez sobre : 7,45 l aux 100 km, moyenne de consommation ville encombrée et route très rapide. »

UNE VIDÉO DE PRÉSENTATION PAR JEAN PANHARD :

Charly RAMPAL

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