En mars 1954, Alain Bertaut, journaliste automobile avant de copiloter au Mans 1962 le CD-Panhard victorieux à l’indice de performance avec son amis André Guilhaudin, avait eu cette phrase à propos de la sortie d’une GT à moteur Citroën : « Il est toujours intéressant de parfaire ce qui existe ».

Rien ne peut mieux illustrer cette philosophie, lorsqu’il se retrouva à bord du coach D6 qu’Emile Pezous, le père de nos MEP, avait réalisé.

Maurice Emile Pezous, le père de nos X2 et X27, est un ingénieur touche à tout et c’est dans son important garage à Albi qu’il se fit une belle réputation.

Modeste au début :

Une vue aérienne montre l’évolution des bâtiments et de sa superficie dans les années soixante :

Concessionnaire Citroën, il se pencha tout naturellement sur une 11 cv, modèle qui n‘est pas portée sur le sport automobile, dans ces années cinquante, pour servir de base à son rêve de GT.

C’est sur le circuit de Monthléry qu’Alain Bertaut fut invité par l’albigeois pour présenter sa voiture et en prendre le volant .

Pour Alain quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’il se trouva    devant cette voiture qu’il qualifia de magnifique au vue de ses lignes de Grand Tourisme, comme on les qualifiait à cette époque : lignes harmonieuses et bien équilibrée dans ses proportions.

Ce coupé de 2 ou 3 places donnait une impression de puissance et de vélocité que seules certaines voitures étrangères savent procurer.

Equipée du moteur de la 11 cv dont la vocation sportive est loin d’être perçue, cette robe à la mode albigeoise respirait la vitesse.

Confortable au premier abord, cette traction-avant rassure par sa sécurité absolue et la puissance des reprises.

AU PLUS PROCHE DE LA SERIE

Selon les initiales de son constructeur comme nos X2 et X27, le nom de cette GT les reprend : M.E.P..

Mais écoutons ce que furent les objectifs du constructeur :

« J’ai voulu que ma voiture soit à la traction-avant de série, ce qu’est la Porsche à Volkswagen, toutes proportions gardées, bien entendu.

Mon but était de réaliser une voiture remarquable quant à ses performances, mais «en « serrant » le plus possible la fabrication d’origine, de façon à n’en pas trop augmenter le prix de revient.

Connaissant parfaitement les possibilités du moteur 11 cv Citroën, à condition de l’améliorer, et la tenue de route de cette voiture, j’ai, du point de vue strictement mécanique, apporté des modifications plus que des transformations à proprement parlé.

Je me suis fixé des impératifs, mais j’ai cependant été bien obligé de modifier le modèle de série pour obtenir de bonnes performances. »

LES AMELIORATIONS

Sous le capot :

LE MOTEUR :

Les pièces essentielles du moteur ont été conservées. Cependant l’embiellage, monté sur coussinets minces, a été allégé et la contenance du carter d’huile portée à 7 litres.

La culasse d’origine a été modifiée (agrandissement des conduits et des sièges de soupapes).

Pistons et chemises normaux.

Le vilebrequin et l’arbre à cames sont d’origine.

Le rapport volumétrique de compression a été porté de 6,5 à 7,8.

Le refroidissement par eau se fait par un radiateur spécial moins haut (toutefois, le volume du circuit d’eau est le même) et la pompe d’origine.

La pièce intermédiaire entre la pompe et la culasse est changée.

Quant à l’alimentation, elle se fait par deux carburateurs Weber, simple corps horizontaux.

La pipe d’admission est rectiligne, le collecteur d’échappement est d’origine. L’allumage n’a pas été modifié.

 Transmission : Embrayage de série. Boite E.R.S.A. à 4 vitesses dont les rapports de démultiplication sont :

– première = 0,315

– deuxième = 0,470

– troisième = 0,655

– quatrième = 0,933

Rapport du couple conique = 10/31. Pour 1.000 tours moteur avec ses pneu 155×400, la vitesse est de 34,7 km/h.

Le levier de changement de vitesse est au tableau de bord comme toutes les Citroën.

SUSPENSION :

Les quatre roues sont indépendantes. La suspension AV est toujours à barres de torsion, mais avec triangulation des bras inférieurs.

Le train AV est d’origine, mais les rotules inférieures sont montées sur roulements à billes (brevet Pezous).

A l’arrière, les barres de torsion sont conservées et la suspension est à triangle indépendant (brevet Pezous).

Amortisseurs Houdaille, réglables de l’intérieur du coffre arrière.

LE CHASSIS :

 Le châssis est tubulaire (tubes et profilés à froid) à caisson central extrêmement rigide et à grand moment d’inertie.

Il porte : à l’avant, deux pyramides rejoignant le berceau. A l’arrière, une très forte traverse tubulaire sur laquelle sont insérées les attaches des triangles de la suspension AR.

La direction à crémaillère est d’origine. Les freins hydrauliques Lookheed sont montés avec un maitre cylindre tandem donnant deux circuits indépendants AV et AR.

Les tambours sont d’origine mais les trains AV sont ventilés par un procédé spécial.

La carrosserie a été réalisée par M. Pezous. Elle est en tôle d’acier et certains éléments en alliage léger : tel le capot et les portières. 

Enfin, les dimensions sont :

  • de 252 cm pour l’empattement, voie AV
  • de 140 cm pour la voie AV
  • de 137 cm pour la voie AR
  • de 137 cm pour la hauteur
  • de 420 cm pour la longueur

Poids à vide : 920 kg

La visibilité est excellente grâce à son pare-brise panoramique et l’accès à l’intérieur facilité par de larges portières latérales.

LES PERFORMANCES :

Les performances de la voiture ont été appréciées par Alain Bertaut sur l’autodrome de Montlhéry.

Il accomplira son meilleur tour en 59’’ 2/10, soit à la moyenne de 154,960 km/h.

Si l’on tient compte des 2% qu’il convient d’ajouter en raison du « freinage » de la piste, la performance réelle est donc de 158,059 km/h.

Au niveau des accélérations, les temps ont donné :

– 500 mètres départ arrêté : 22’’ 5/10

– 1000 mètres départ arrêté : 37’’ 6/10

Par comparaison avec d’autres voitures sportives, la MEP D6 se trouverait dans la bonne moyenne.

Comme quoi, avec un moteur de série amélioré sans grandes modifications et une carrosserie adaptée, on peut arriver à un bon compromis entre fiabilité/plaisir et élégance.

La MEP D6 donnera ensuite naissance à la D7,

encore améliorée, notamment au niveau des freins qui adoptent des disques à l’avant.

Conclusion : une photographie de la production des MEP sorties des ateliers d’Albi.

Charly  RAMPAL