1991 : LES 24 HEURES PANHARD A DREUX
Nous sommes le 20 avril 1991. Il est 16 heures. Pour la trosième fois, Christian Panhard consulte sa montrer et au passage de la Dyna Z1 n°5 (équipage Ulmann, Buffart et Dichamp), il brandit le drapeau à damiers : c’est gagné !
La victoire à tout prix, c’est vrai, mais comment ? Joies et amertumes étaient au rendez-vous…
Le Dynamic Club à l’époque où j’en faisais parti et rédacteur du Panhard-Magazine, avait aligné deux voitures de type Z1 pour enfin pouvoir détrôner les équipes du Fan club créatrice de cette magnifique épreuve en leur terre de Dreux, pour prouver enfin la fiabilité de nos mécaniques et faire taire avec preuves à l’appui, tous les détracteur de notre bicylindre.
PREPARATION – STRATEGIE - AMBIANCE
Les deux équipes du DCPL avaient donc opté pour cette bombe du salon 1953 : les Dyna Z1 tout alu, garante d’un rapport poids / puissance sans équivalence en voiture de tourisme.
Pour la mécanique, elles étaient équipées de moteur M5 T (Tigres de la première série de 59 à 62) un peu moins puissant que les S mais tellement plus pointus.
Vu le décalage des relais au stand, les deux équipes d’assistance décident de conjuguer leurs efforts pour éviter toute perte de temps lors des changements de pilotes… Je mets en place une stratégie des relais, l’équipe est attentive à mes explications :
A l’heure H moins une minute, 9 Panhard à mécanique Delagarde sont alignées en épis sur « le grill » de départ : 2 CD, 2 24CT, 1 24BT, 2 PL17 et nos 2 Z1.
Un froid glacial s’était abattu sur le petit circuit beauceron, aujourd’hui rebaptisé « circuit de l’Ouest parisien » et complètement réaménagé.
La neige qui tombe depuis 15h30, commence à blanchir la piste.
Après un bien tristounet spectacle de majorettes, dû à ces fichues conditions météo qui avait marbré leur belles guiboles, le speaker invite l’ensemble des engagés ainsi que le public à observer une minute de silence en la mémoire de notre vénéré Louis Delagarde, Papy Pougenq (dont je pilote aujourd’hui le Monomill) et Olivier Meston, responsable de la section Ile de France, récemment terrassé dans la fleur de l’âge par une terrible maladie.
LA COURSE
C’est Etienne de Valance, ancien directeur sportif de la marque, qui abaisse le drapeau tricolore : il est 16h01, c’est parti pour la ronde infernale.
2 tours suffisent aux 2 pilotes du DCPL, moi-même, Charly Rampal, sur la Z1 n°10 et Francis Ulmann sur la n°5, pour s’emparer de la tète de la course.
Au stand, nos mécanos n’en croient pas leurs yeux quand ils constatèrent que, malgré ce temps pourri et le peu d’adhérence, je tournai en 47’’ au tour !
C’est du délire, les CD, pourtant nés pour la piste, n’arrivent pas à suivre. Les 24 et PL, handicapées par un poids plus élevé, sont entrainées vers l’extérieur de la piste lorsqu’il s’agissait de passer la fameuse épingle au bout de la ligne droite, leur faisant lever la patte dite « du chien qui pisse !
Il est bientôt minuit, la neige s’est heureusement arrêtée depuis 18 heures.
Par leur rythme infernal, les deux Z1 sont toujours largement en tête : la N°10 de Charly à 5 tours devant la N° 10 de Francis qui elle-même à plus de 20 tours du peloton.
Il faut dire que le circuit est très court, ancienne piste d'essai Kléber, on en fait vite le tour. Appelé à cette époque le circuit de Dreux-Bois-Guyon, les chevaux ne signifient rien, seuls l'agilité et l'empattement créent une différence. Il fallait donc jouer du volant et des freins pour y faire un bon temps.
Jean Favarel, alors secrétaire Général du DCPL, propriétaire et 2ème pilote de la Z1 n°10, murmurer à qui voulait l’entendre « on va faire le doublé.. » !
Ironie du sort, sur le point de terminer mon relais après m’être craché dans les gants pour contrer les attaques du CD de pilotes avertis comme Laferrerrie, Colibet et le double champion de France Eric Van de Vyver, aujourd’hui créateur et responsable du Trophée V de V (voir mon article dans la rubrique « LES HOMMES », qui revenait à coup des 42’’5 au tour sur une piste enfin sèche, la scoumoune va de nouveau être au rendez-vous !
A l’approche de l’épingle, ayant dépassé les limites, je partais en plusieurs têtes à queue. La voiture s’immobilisa.. Ouf, elle ne s’est pas retournée..
Je réussis à la remettre en route et m’arrêtais au stand. Inspection des mécanos, dont le talentueux Bertrand Hervouet qui avait préparé la mécanique. Bilan : un bruit de frottement sourd dans le moteur et la roue avant droite qui frotte sur le pare-choc, conséquence d’une touchette lors de mes toupies !
La casse est minime mais le choc semble vicieux.
Il est minuit et Jean Favarel doit prendre le relais. Le « docteur » Hervouet suggère l’abandon, soupçonnant un bris mécanique à venir ! C’est très dur pour l’équipage…
L’autopsie du lundi à l’atelier, révèlera qu’à la suite du choc, les deux tubes de tiges de culbuteur du cylindre gauche se sont retrouvés défoncés par le tube support de proue.
Désormais, tous nos espoirs reposent sur la Z1 n°5.
Elle tourne toujours régulièrement, motivée par le soutien moral et mécanique de l’équipe du DCPL.
L’assistance accentue encore la rapidité des interventions, si bien qu’au petit matin, bien rodée, les changements de pilotes, ravitaillement en carburant et changement de roues, ont lieu en moins de 2 mn…
Tout semble baigner dans l’huile et pourtant..
Nous sommes dimanche 21 avril, il est 11h, la neige et le froid ont fait place à un beau temps ensoleillé aux portes d’un printemps encore balbutiant.
Buffart vient de terminer son relais et un nouveau spectre vient hanter les troupes du Dynamic : il ne reste plus que 35 litres d’essence pour les 5 dernières heures de course (la quantité de carburant étant limité pour l’ensemble de l’épreuve).
Chacun connait le sobriété de nos chers bicylindres, mais continuer à ce rythme et à des régimes toujours proches des 6.000 t/mn, auront vite eu raison des 35 litres qu’ils nous restent.
La seule solution est de chasser le gaspi en gérant au mieux les 45 km d’avance que nous avons sur la suivante : un PL17 Tigre blanche n°1 du Fan Club, victorieuse en 1989…
Pour nous, pas question de perdre l’épreuve pour pane sèche, alors si prés du but…
Un dernier changement de roues, une vérification du niveau d’huile et Ulmann repart, avec pour consigne impérative : une conduite souple tout en maintenant un écart significatif avec notre poursuivante (le CD ayant abandonné aussi).
Francis Ulmann n’est pas un conducteur du dimanche, c’est un homme intelligent et fin pilote, qui connait les tactiques de la course pour un but avoué.
Aux yeux du public, les deux dernières heures de course de notre n°5, ressemblent plutôt à une promenade de santé qu’à une grande épreuve d’endurance.
Peu importe leur ressenti, il faut maintenir un écart nous permettant d’arriver en tête.
La PL17 blanche accélère, connaissant notre handicap. Menée de mains de maitre par Thébeau, Lemercier et Jérome Harmel, elle reviendra à 15 tours, mais ce ne sera pas suffisant.
Pour la première fois depuis 1988, date de création de l’épreuve par Claude Piquet et l’équipe du Fan Club Panhard, la plus haute marche revient à une équipe du Dynamic.
BILAN
Bravo à Ulmann, Buffart et Dichamp et à leur Dyna Z1 qui a parcouru 1800 km en 24 heures, sans le moindre souci mécanique.
Même si ma déception fut grande, toute l’équipe du DCPL sut m’entourer et me féliciter pour le spectacle offert pendant 8 heures en tête de l’épreuve et devant des adversaires de taille.
Un grand merci à Claude Piquet, pilote et organisateur de l’épreuve, qui, lors du mécontentement et des revendications de ses équipes, a su faire preuve de beaucoup d’autorité pour que notre victoire ne fasse l’objet d’aucun doute possible.
Charly RAMPAL
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