Si les Panhard ont toujours eu leurs fanatiques, souvent subjectifs et aveugles sur les défauts de nos voitures, il n’en reste pas moins vrai que certaines faiblesses deviennent criantes au fil des ans.
Mon objectivité naturelle ne me permet pas de passer sous silence certaines vérifications à faire avant l’achat d’une 24.

Les « 24 » s’identifient, tout d’abord, en vérifiant les indications de la carte grise à l’aide de la plaque du constructeur, rivée à droite de l’auvent, sous le capot.
Cette plaque comporte 3 cadres, à l’intérieur desquels sont poinçonnés, respectivement de haut en bas : le type des Mines, le code voiture, le numéro de série.

SAVOIR CONDUIRE UNE PANHARD

Si les « 24 » restent les modèles les plus aboutis de la marque avec un effort certain de qualité, il n’en reste pas moins vrais que quelques défauts subsistent.

Les « 24 », si faciles à conduire sur le plan de contrôle de la trajectoire par la sécurité et du confort qu’elles offrent, réclament une conduite un tantinet spéciale, due aux caractéristiques de ce petit 5cv de 848 cc à deux cylindres et haut rendement, que l’on doit mener un peu comme un moteur 2 temps. A savoir par une conduite coulée exempte de toute brusquerie, avec un pied de velours sur l’accélérateur et un œil rivé sur le compte-tour.
Ce moteur tourne relativement vite, entre 4.000 et 6.000 t/mn, ce qui sous-entend l’utilisation judicieuse du levier de vitesse.

Ce moteur prenant son régime lui-même, moins on pèsera sur l’accélérateur, plus il accélérera, et réciproquement.
Ce genre de conduite n’a que des avantages : performances meilleures obtenues au prix d’une consommation minimale, d’une longévité mécanique accrue, d’un confort de conduite décuplé.
Une fois adopté, il concourt à créer un véritable courant de charme entre le pilote et la « 24 ». La réciproque est vraie également. Rare qualité dans le premier cas, grave défaut dans le second, les « 24 » ont en quelque sorte une âme et le prouvent.

L’idéal est de trouver une « 24 » dont ont connaît le « pédigrée » des propriétaires successifs, comme « sachant » piloter une Panhard.
De là provient toute la différence qu’il peut y avoir, plus que pour n’importe qu’elle autre type de voiture, entre deux « 24 » ayant le même kilométrage, mais qui ont été conduites différemment.

Cela dit, si vous avez la chance d’avoir la notice d’entretien du constructeur qui était livrée avec la voiture, vous pourrez alors y lire comment se servir du compte-tours, de l’accélérateur et comment utiliser le levier de vitesses pour obtenir une conduite rapide en souplesse.

Certaines constations n’entraient pas systématique la condamnation de l’organe examiné.
C’est ainsi qu’il peut arriver qu’en troisième, sous faible accélération ou sus faible retenue, le levier de vitesses bouge légèrement d’avant en arrière et inversement. Cela provient de son extrême sensibilité au jeu latéral idéal de la boite prévu par le constructeur.

De même, une sensibilité certaine au ralenti aux conditions atmosphériques (carburation) peut provoquer une certaine impression de claudication ou d’étouffement si, au ralenti et au point mort, on accélère trop brutalement, en particulier sur les modèles BT ou CT (carburateur double corps) sensibles à l’engorgement et aux variations d’hygrométrie.

LES ORGANES DENONCIATEURS D’USURE

En tout état de cause, on peut limiter à quatre points essentiels le comportement particulier à l’usure de la « 24 »

LES TRANSMISSIONS

Le profane le plus allergique à la mécanique est à même de constater instantanément l’état des cardans : la voiture étant sur un pont de graissage.
Se munir d’un chiffon et imprimer à chaque cardan une rotation d’avant en arrière et réciproquement. Le jeu normal toléré est de 2 à 3 mm.
L’usure des croisillons de cardan est mise en évidence par des craquements secs lors de brusques changement de rapport et, sous réserve du graissage efficace des « mains » de ressorts transversal supérieur, lors des démarrages, roues braquées.

L’EMBRAYAGE

Un procédé classique et efficace, qui n’arrange pas l’embrayage, consiste à embrayer en accélérant, levier de vitesses en première et frein à main serré. Si le moteur ne câle pas immédiatement, l’embrayage patine.
Tout à fait exceptionnellement, si le précédent conducteur a accumulé les fautes de conduite, l’embrayage peut brouter (aucune progressivité).
Ce phénomène peut également provenir d’une fuite d’huile ou palier AR de vilebrequin ou au couple de transmission.

LA BOITE DE VITESSES

Rien à signaler sinon, en cas de kilométrage important ou de brutalité du précédent propriétaire, une synchronisation moins fidèle.
Rappelons cependant que ces boites à vitesses ont été calculées à l’origine pour supporter un couple de l’ordre de 4 mkg et qui supporte très mal une valeur doublée. Sa conception est complètement délirante avec 9 roulements sous-dimensionnés dont il faut régler l’emplacement séparément par des cales d’épaisseur, roulement extraits à chaque fois par chauffage et refroidissement du carter…
A manipuler donc avec délicatesse et précision. Et pour la réparation, s’adresser à des spécialistes, garanties de longévité.

LE MOTEUR PANHARD : Animations Serge MACE

Rien ne permet au profane de constater le degré d’usure de l’embiellage sur une « 24 » fatiguée sinon, à l’approche imminente de la panne irrémédiable, un « clac-clac » dont la période varie avec le régime moteur.

Il est possible de prévoir la rupture imminente du pignon de distribution (en céleron) en plaquant l’oreille contre la turbine, à l’avant du moteur, l’on perçoit alors un « gloc-gloc » sourd significatif !

Précisons que, sur n’importe quel type de voiture, rupture d’un pignon de distribution est totalement indépendante du kilométrage et de l’état du véhicule en question.

Quelques points faibles cependant : on peut citer des pistons appariés à des cylindres coniques et donc non interchangeables.

Rattrapage de jeu hydraulique des soupapes inefficace et donnant lieu à des fuites meurtrières par la canalisation extérieure et exposée aux pierres.
Roulement de bielles graissées par projection à travers des larmiers qui se bouchent.

Un carter moteur trainant littéralement par terre (attention aux ralentisseurs qui prolifèrent de nos jours à côté du championnat du monde des ronds-points).

Attention aux tubulures d’admission prenant l’air à chaque démontage.

SEQUELLES D’ACCIDENTS MAL REPARES

A ce chapitre, la « 24 » se révèle d’une franchise totale en matière d’accidents maquillés, mal réparés ou non réparés, qui pourrait rendre la voiture vicieuse, donc dangereuse par des réactions mal contrôlables.

– Choc de face ou transversal à l’avant : la tare est visible sur le champ par le premier venu. On supposera la voiture soulevée par le pont élévateur.. En arrière du moteur, sous le carter de la boite de vitesses passe la traverse avant. Si celle-ci est plissée, on doit voir le jour entre cette traverse et le ressort à lames transversale inférieur appliqué juste en-dessous d’elle. Sur une Panhard saine, il n’y a aucun espace entre le sommet des lames et le dessous de la traverse.
– Choc par l’arrière ou transversal arrière : L’essieu arrière est fixé en son centre à la plate-forme par l’intermédiaire d’un silent-bloc, entre les tubes d’échappement. Si ce silent-bloc tend à sortir de l’épaulement à l’intérieur duquel il est logé, l’essieu AR est faussé.Un autre indice certain de voiture « boiteuse » consiste à constater avec la main si l’espace entre le bord de l’aile et le pneu diffère sensiblement à droite et à gauche. Même procédé à l’avant.

ENTRETIEN COURANT

Bien que la notice d’entretien conseille d’opérer la vidange d’huile tous les 3.000 km, on ne dira jamais assez qu’il ne faut pas lésiner sur l’huile, surtout en usage porte à porte ou en utilisation intensive : le carter ne contenant que 2,2 litres.

Idem pour la boite si on use intensément du levier de vitesses : on peut vidanger tous les 4.000 au lieu des 6.000 prescrits, et de vérifier le niveau tous les 2.000 km. A noter que les boites Panhard se régalent d’huile molygraphite.

Le graissage a lieu tous les 3.000. Dans les régions poussiéreuses, le faire tous les 2.000.

MESURE DES TEMPERATURES

Dans le cas des moteurs refroidis par air, les différences de températures entre les divers emplacements à considérer existent : les ailettes sont étudiées en nombre et profil pour dégager l’excès de chaleur dans l’air ambiant.
Mais il n’est pas un point où une indication serait plus valable qu’ailleurs, en admettant qu’une prise de mesure de chaleur soit possible.

La culasse sera toujours plus chaude que la bas de cylindre et pour cause, et même pour une ailette considérée, sa température n’est pas uniforme sur toute sa surface : élevée près de la source de chaleur, elle est probablement moindre aux extrémités plus éloignées.

Quel point serait à choisir, plus particulièrement, pour donner une indication utile dans le cas d’un refroidissement par air ?
L’expérience des constructeurs, les références de l’industrie motocycliste, ont démontré que ce contrôle n’est pas indispensable.
D’autres se posent la question d’adopter un thermomètre d’huile. L’expérience a montré aucun résultat valable, car l’huile également circule et sa température est variable selon les points où on ausculte son comportement. Par contre, ce qui est indispensable, c’est la présence d’un témoin ou indicateur de pression d’huile qui confirme le fonctionnement normal du moteur.

En conclusion, la mécanique Panhard, efficace quand elle marche, n’est guère fiable ni facile à réparer et comme le disait Maurice Trintignant : « les Panhard sont de belles maîtresses qui ne se donnent qu’aux initiés » : ça veut tout dire !

Charly RAMPAL