La 5ème Coupe des Musées de l’Automobile évoque irrésistiblement pour les collectionneurs de voitures anciennes, la grande course organisée par l’Automobile club de France en 1896 sur l’itinéraire Paris-Marseille-Paris.

Cette compétition faisait suite au mémorable Paris-Bordeaux-Paris de 1895, dont le premier prix avait été remporté par une Peugeot, puisque la voiture Panhard-Levassor, magistralement pilotée par Emile Levassor pendant plus de 48 heures consécutives et victorieuses en temps réel (plus de 6 heures d’avance), ne pouvait pas concourir pour la première place, celle-ci devant être réservée à une voiture transportant quatre passagers.

Préparée longuement et de main de maître par le Comité de ‘Automobile-Club de France, la course Paris-Bordeaux-Paris a été courue en plusieurs journées consécutives afin d’éviter les parcours de nuit jugés trop dangereux du fait de l’éclairage médiocre des voitures de l’époque.
Levassor avait déclaré à son arrivée : « Maintenant que j’ai gagné, j’ai le droit de dire que la course de nuit est une folie ! »

C’est donc en 10 jours que s’est déroulée l’épreuve de 1.711 km qui avait réuni une cinquantaine d’engagés, dont seulement 32 se présentèrent au départ donné, comme l’année précédente, de la Place d’Armes à Versailles, alors que le rassemblement avait eu lieu à Paris au Rond-point de l’Etoile, aux alentours des 8 heures.

1896 DEPART-VERSAILLES-Paris-Marseille-Paris

Après vérification des numéros, poinçonnage de certaines parties des véhicules (roues, caisses, châssis, etc…), M. Berlier donne le départ au premier concurrent à 11 heures précises.

La foule très nombreuses se bouscule pour mieux voir le premier départ et un spectateur imprudent est renversé par le premier véhicule, n°33, phaéton 4 places monté par M. Fisson et deux passagers.

L’incident n’est pas grave et après une petite confusion, l’ordre des départs est repris avec un retard de quelques minutes.

C’est en effet la voitures n°41, une Dalahaye, qui prend le départ à 11h08 au lieu de 11h01 ! Elle est suivies par 2 Benz engagées sous le nom de « Maison Parisienne ».

C’est ensuite le n°6, une Panhard-Levassor, conduite par Mayade,

1896-DEPART-PL-MAYADE-VERSAILLES-Paris-Marseille-Paris

une Peugeot n°44 pilotée par M. Doriot qui deviendra plus tard constructeur de voitures automobiles.

Le n°5, réservé à Emile Levassor, en souvenir de sa victoire de l’année précédente, accompagné par le fidèle D'Hostingue.
Ensuite, nous trouvons une Delahaye, une Panhard, une Amédée-Bollée du Mans, et toute la série des autres concurrentes qui serait trop long à décliner.

La première journée amène les concurrents de Versailles à Auxerre, et cette étape accomplie sous un très beau temps, est marquée par un accueil chaleureux du public enthousiaste tout au long du parcours.

La journée n’a pas été marquée par de graves incidents, sauf pour les voitures à vapeur qui ne pourront pas suivre la course.

Cette première étape est brillamment remportée par la voiturette tricycle Léon-Bollée qui, partie la dernière de Versailles, est première à Auxerre avec une vitesse moyenne de 32 km/heure.

La deuxième journée qui devait amener les concurrents à Dijon, est marquée par une pluie torrentielle et un véritable ouragan.

La voiture Amédée-Bollée n°20 projetée contre un arbre, est brisée et mise hors d’état de continuer la route.

La voiture n°8 a sa toiture arraché par l’ouragan.

Un des concurrent est littéralement déshabillé, ayant déchiré son pantalon en descendant de voiture, la bourrasque lui enlevant les derniers morceaux !

Le n°42 de M. Delahaye est arrêté pendant plusieurs heures par des arbres déracinés par le vent, tandis que le n)28 de M. Rossel, poussé à bras dans une côté, échappe aux mains de ses conducteurs et termine sa course dans un ravin où il se brise contre un arbre.

C’est la Panhard n°5 qui, par addition des temps prend la tête des concurrents.

Après avoir passé la nuit en parc fermé, les voitures sont regroupées le lendemain matin et le premier départ est donné à 7h 32 dans l’ordre suivant : les 4 Panhard n° 5, 6, 7 et 8, la Peugeot n°44, la Rochet-Schneider n°43 et une Benz n° 29…etc…

Le temps est plus acceptable et les concurrents ne souffrent plus des bourrasques de la veille.

Quelques incidents cependant :

Le grand break Panhard-Levassor n°7 fait une embardée pour éviter une charrette de briques et s’est reversé brisant son toit et une roue, blessant sans gravité d’ailleurs, un de ses passagers

La Rocher-Schnetder n°43 ne peut terminer le parcours par suite d’une collision avec une bête à cornes.
M. Schneider est légèrement blessé à la jambe et la voiture, bien classée jusque là, ne peut malheureusement poursuivre sa route.

La Panhard-Levassor n°5, conduite par Levassor, est toujours en tête avec une avance de près de 2 heures sur sin concurrent immédiat, le n°8 de la même Maison.

C’est le tricycle de Dion n°13 qui tient la troisième place.

La quatrième journée, de Lyon à Avignon, commence par le départ à 7h22.

Le temps est beau, mais le mistral souffle dans la vallée du Rhône et la vitesse des concurrents en est améliorée.

Un peu avant Orange, entre La Palud et Mondragon, la voiture de Levassor fait une embardée pour éviter un chien, les deux passagers sont projetés hors du véhicule.

L’accident ne parait pas tellement grave puisque les deux réussissent à remettre la voiture sur ses roues, et après une réparation sommaire chez un charron de La Palud, le véhicule reprend sa route pour arriver à Avignon à 21h30.

Toutefois, Levassor fut obligé d’abandonner la conduite de sa voiture et fut ramenée à Paris. C’est son mécanicien, Dhostingue, qui le remplaça pour la fin du parcours.

Il faut ajouter ici, que le choc ressenti par Levassor eut des conséquences l’année suivante en disparaissant subitement.

La cinquième journée, Avignon-Marseille, est l’une des plus courtes : 120 km.

Le départ est cependant donné à 7h37, le premier à partir est la Panhard-Levassor n°8, suivie du tricycle de Dion n°13.
La troisième place étant cette fois occupée par la Peugeot n°44 de Doriot.

La réception à Marseille est particulièrement enthousiaste, et la foule est telle dans les grandes artères de Marseille que la circulation est pratiquement interrompue sur la Canebière et dans les rues St Férréol avoisinantes.

1896-Arrivée Marseille Mayade PetL

Le lendemain, les départs sont donnés à 12h16 précises aux concurrents n°6 Panhard-Levassor, n°44 Peugeot, n°46 Peugeot, n°15 de Dion-Bouton, n°41 Delahaye, etc…

Les journées suivantes se dérouleront sans faits majeurs.

Enfin, la dixième et dernière journée de ce périple est marquée par un temps magnifique, et le premier concurrent prend la route à 7h20.

C’est toujours la Panhard n°6 qui tient la tête du classement, suivie par la Panhard n°5 et la Panhard n°8.

Notons que la nuit de Sens fut assez difficile, certains concurrents ayant du coucher dans des omnibus d’hôtel !

A Paris, le boulevard Maillot, où se trouve le contrôle d’arrivée, est noir de monde et des milliers de curieux attendent les rescapés de cette longue expédition.

C’est le tricycle Michelin-de Dion qui franchit le premier la ligne d’arrivée à 12h18’34’’, suivi par une Panhard n°8, puis une autre Panhard n°5, par un tricycle de Dion-Bouton n°13 et par un tricycle Michelin-Bollée, suivi lui-même de la Delahaye n°41, à 12h31.

Finalement, c’est la Panhard n°6, pilotée par Mayade, qui remporte cette course à la vitesse moyenne de 25, 260 km/h,

1896-Paris-Marseille-Paris-Mayade Vainqueur

suivie par la Panhard-Levassor n°8 avec 25,100.

1896-PL-N8-Paris-Marseille-Paris-DEUXIEME

La n°5 de Levassor est troisième avec une vitesse moyenne de 23,920.

Le tricycle n°13 de Dion avait lui-même réalisé la superbe moyenne de 24,080, montrant ainsi la solidité de ce léger engin et aussi le bon résultat de l’allumage électrique jugé trop délicat par la plupart des constructeurs de voitures… On connait la suite.

Exposition de la voiture :

1896-PL-VOITURE-Paris-Marseille-Paris-EXPO

Classement final étape par étape.

PARIS-MARSEILLE-PARIS-1896-CLASSEMENT

Charly RAMPAL (Photos Usine et récit des Doyennes P et L)

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