1990 : LES 24 HEURES PANHARD A DREUX
Une course d’endurance de 24 Heures rien qu’avec des Panhard ? Voilà la bonne idée qu’avait eue Claude Piquet, Président du Fan Club de cette époque.
A cette époque, le circuit n’avait pas encore le nom de « l’Ouest parisien » et encore moins ses structures et ses différentes configurations qu’il a aujourd’hui, mais un tracé des plus simplistes et des plus courts ! Mais avec de bons dégagements et une vitesse assez limitée. Le point noir restant l’épingle destructrice de pneus AVG et la courbe 2 qui se prend à grande vitesse…
Notre fibre sportive en Panhard ne pouvait rater cet événement que nous avions déjà entamé en 1989 pour « tâter le terrain ».
Notre bonne prestation et la qualité du plateau comme de l’organisation avaient encouragé ce nouvel engagement d’autant que le niveau avait grimpé d’un cran avec la participation d’un coach DB et la direction de course confiée à Etienne de Valance, le label rouge de toutes nos prestations.
C’est donc avec Jean Favarel et Jean Pagès (oui, le pilote des années cinquante) que je formais l’équipe qui allait représenter le DCPL. J’y intégrais aussi deux mécanos : Gérard Dantan et Georges Landais.
Jean Favarel avait préparé et mis à notre disposition une Dyna Z1 tout alu, équipée d’un M10S, au rapport poids/ puissance prometteur !
Quant on sait que l’ennemi de la vitesse est le poids, nos espoirs n’étaient pas sans fondement, même devant un HBR !
Hélas, aux essais déjà, l’action ne valait pas nos intentions : impossible de prendre des tours ! Cette Z1 n’avançait pas…
Après avoir examiné toutes les causes suspectes, le verdict tomba : les gicleurs étaient trop petits et l’échappement pas du tout adapté.
Pas de « Y » après la sortie des cylindres, des silencieux bidouillés, enfin rien de mathématique quand on sait l’importance que joue, dans nos moteurs en particulier, l’écoulement des gaz.
On ne s’improvise pas Chancel, Charles Deutsch, Coural ou Georges Philippe !
Trop tard pour tout changer, nous devions faire avec.
Un soleil palissant était au rendez-vous à 16 heures ce samedi 7 avril 1990 au moment du départ, dans le plus pur style du Mans : excusez du peu !
Le programme du week-end avait été établi : 3 pilotes obligatoires pas voiture, dans l’ordre des relais, Charly Rampal, Jean Favarel et Jean Pagès. Côté ingrédients autorisés : 10 roues montées + essence et huile à volonté.
Chaque relais devait durer 2h30, sauf celui de nuit réduit à 2 heures, bien suffisant vu le faible développement du tracé qui nous faisait tourner en bourrique !
En tout, 8 heures de conduite chacun.
Je pris donc le départ, pas très confiant au vu de notre voiture, car en face, l’opposition faisait figure d’épouvantail, jugez plutôt :
Deux 24CT, une PL17 (le vainqueur de l’an dernier), une autre Z1 (magnifique) et le performant DB HBR5 (ex. François Jolly) de JP Cartier, Robert et Christian Panhard,
Enfin une Panhard 17B.
C’est Etienne de Valance qui allait baisser le drapeau français pour libérer la meute. Pendant 24 heures le circuit du Bois Guyon allait résonner du bruit de nos bicylindres, enfin l’espérait-on ! Les écolos n’ayant pas encore fait leur apparition…
Je fus le plus prompt à m’élancer et j’entamais un rythme soutenu au maximum des maigres possibilités de la voiture.
Je plafonnais à 6.000 tours sur les intermédiaires. Impossible de passer la 4ème et d’accélérer à fond, car le moteur s’étouffait.
Dans ces conditions, seuls la tenue de route, le freinage et le pilotage seraient les atouts dans notre jeu.
Au fil des tours, je pris la mesure de mes adversaires, parvenant même à les doubler 5 fois au cours de ces 2h30.
Mais le plus coriace fut Christian Panhard au volant du DB, ce qui donna lieu à de belles empoignades, pleines de virilités, mais également de correction.
Quel régal de voir évoluer ce pur produit de Champigny à quelques centimètres de votre pare-chocs, toujours à la limite, les 4 roues collées au sol contrairement au autres voitures toujours sur 3 pattes à l’épingle !
Pourtant, notre brave Z1, privée de quelques chevaux valait mieux que 47’’ au tour (42’’ l’an dernier avec une PL17).
18h30, je passais le relais à Favarel qui repartait avec 2 tours de retard dus aux changements de pilote, plein de carburant et vérifications d’usage.
Le couteau entre les dents, Jean essaya de tenir le rythme mais hélas, au bout d’une heure, la Z1 repassa défigurée : Il avait fait un « toit » à l’épingle, heureusement à basse vitesse.
Remise sur ses 4 roues, il passa par les stands pour une réparation de fortune : pare-brise, phares,… Ce qui nous permis d’admirer le travail de nos deux mécanos et Favarel put terminer son relais avec le courage qu’on lui connaît !
21h sonnait aux oreilles de Jean Pagès, prêt à prendre son relais dans une nuit noire et glaciale, avec un phare qui éclairait la lune et l’autre les pieds du pilote !
Pilote courageux qui en avait vu d’autres au cours de ses Mille Miles avec sa barquette DB 54, il partit sans rechigner et s’élança dans ce trou noir en essayant de prendre la roue d’un voiture pour améliorer sa visibilité.
Hélas, vers 22h30, sur un circuit désert, je fus alerté que Pagès avait fait 3 tonneaux dans la grande courbe 2.
Nous accoururent sur place muni d’une simple lampe de poche, le spectacle était impressionnant : la nuit, les arbres, des morceaux de carrosserie (on reconnaissait là, un pare-brise, là une porte, la lunette arrière, des gants..) puis la voiture sur ses 4 roues, à 50m de la piste, une vraie sculpture de César et toujours pas de Pagès.
La battue s’organisait, pensant qu’il avait été éjecté (nous n’avions pas de ceinture !).
Fossés, talus, grillage, tout fut examiné en vain : Jean Pagès avait disparu !
L’inquiétude grandissait jusqu’au moment où un témoin nous dit qu’il l’avait vu sortir et regagner les stands à pieds.
En somme, plus de peur que de mal. Mais je garderai à jamais cette émotion mêlée de joie que j’ai eue à le retrouver serein au restaurant, nullement impressionné !
A partir de là, plus question de continuer.
Quoique…voulant terminer l’épreuve et être classés, nous décisions de tout tenter pour refaire partir le voiture.
Un travail énorme de nos mécanos Gérard Dantan et Georges Landais qui permirent à Favarel de tourner le dernier quart d’heure pour passer la ligne d’arrivée, salué par toute une foule qui n’avait jamais assisté à une telle ténacité, même si l’esthétique de la Z1 défigurait un peu l’image de Panhard .
L’épreuve fut très dure cette année là, puisque les deux 17 durent abandonner.
La moyenne fut très élevée grâce au rythme imposé par le DB de la famille Panhard, menée de main de maître par Christian, Cartier et un Robert déchaîné (un chrono de 46’’).
Ils sortiront vainqueurs sous les yeux de Jean Panhard venu encourager sa « production ».
Une fois encore nos Panhard sortent grandies de cette épreuve d’endurance pas comme les autres.
Cette épreuve 90 à Dreux a été une véritable course, car tenir 24 heures à 60 de moyenne, tout le monde sait faire, mais à 80 sur un tel petit circuit, on y laisse des plumes.
Saluons encore l’organisation et l’accueil de la famille Piquet, dévouée et infatigable.
Charly RAMPAL
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