Personnage égaré d’une pièce de Courteline, on imagine mal Paul DEVIL s’enthousiasmant sur le cintrage parfait d’un bout de tuyau, même si sa moustache à la Dali et son regard un peu diabolique, laissent supposer que l’on est en présence d’un personnage peu commun.
Paul DEVIL a choisi de dompter les décibels, ou plutôt, de les asservir pour le plaisir de tous ceux qui aiment entendre respirer un moteur.

Fils de menuisier, Popol DEVIL n’avait pas 14 ans que déjà, les habitants de Cluses, jouissaient bon gré mal gré de la platine mélodieuse de son 50cc, très trafiqué !
La Panhard de papa DEVIL fut bientôt équipée elle aussi d’un échappement « spécial fiston »
En gagnant des années, Paul gagna de l’ambition. Il assouvit sa passion des moteurs 2 temps en pratiquant le karting. Mais qui dit 2 temps, dit aussi.. échappement !

L’idée de commercialiser des pots d’échappement et de faire la pige aux « marmites Abarth » qui détenait le marché, fit rapidement place à la réalité.

Il fallait apporter des idées nouvelles en matière d’échappement, et surtout, lui donner un rôle autre que celui de mélodieux : en faire sortir des chevaux ! Ce fut fait en 1966 avec la création de la marque.

Dans les années 70 Abarth avait pratiquement disparu du marché des échappements, DEVIL en est alors devenu le maître incontesté.
A cette époque, ne pas avoir « son Devil » quand on possède une voiture à caractère sportif est presque un acte contre nature. Moi-même, à cette époque j’équipais ma Fiat 128 Rallye de cet accessoire à la fois mélodieux et efficace qui tout de suite me transforma en pilote de course !

Mais quel était donc le secret de ce succès ?

Pour Paul, il n’y a pas de secret, mais seulement des lois physiques fondamentales qui servent de base à l’étude d’un pot d’échappement.
Mais elles sont la plupart du temps inexplicables dans leur totalité, car, on ne construit pas une voiture autour d’un pot d’échappement, mais un échappement à partir d’une auto et d’un moteur donné. Cela veut dire qu’il faut sans arrêt interpréter et chercher le meilleur compromis.
Une seule méthode s’est révélé efficace jusqu’à maintenant pour nos voitures historiques : essayer un maximum de solutions !
Le problème se complique lorsqu’il s’agit des voitures de courses, car on ne fait pas le même échappement pour un moteur selon qu’il est utilisé en course de côte ou en circuit. La solution retenue est celle qui donne le meilleur résultat au banc d’essai.
Tous les collecteurs d’échappement DEVIL subissent ces tests au niveau de leur prototype. Ensuite, DEVIL met la série en fabrication.
Il suffit alors de veiller à ce que le montage soit fait le plus soigneusement possible, car de lui va dépendre la qualité et la longévité de l’échappement. Il ne faut pas oublier que les gaz circulent à une vitesse moyenne de 120 m/seconde et que toute aspérité va perturber la trajectoire de ces gaz et les ralentir !
Autre point important, c’est la constance dans le diamètre du tube, même, et surtout dans les endroits cintrés. L’aide des cintreuses à programmation électroniques des rayons de cintrage, qui vaut une petite fortune, assure un travail absolument parfait.
C’est donc de l’attention et des moyens technique adaptés qui encadrent un peu d’imagination au niveau de la planche à dessin…

LA COMPETITION ET DEVIL

La compétition a tout d’abord permit à DEVIL de se faire connaître lorsqu’on fait des produits de bonne qualité. Quand on sait ce que coûte une préparation moteur, il faudrait être fou pour perdre une partie des gains de puissance à cause de l’échappement.
La compétition renforce aussi l’image de marque, mais aussi un fantastique terrain d’essai.
DEVIL a même été plus loin que de vendre des échappements pour la compétition, il a voulu aussi aider les préparateurs et les constructeurs en mettant à leur disposition les moyens techniques dont il disposait.

C’est ainsi que le service d’assistance course DEVIL est né. Il assurait au début uniquement une assistance à ses clients de la Coupe R8 Gordini. Les pilotes étaient sous contrat avec DEVIL, moyennant quoi, il remplaçait gratuitement leur échappement en cas de casse et ils étaient prioritaires pour qu’ils profitent des derniers perfectionnements. Cette démarche sera ensuite reconduite sur la Formule Renault.

L’autre avantage de la compétition et pas des moindres, est la stimulation qu’elle apporte au sein de l’équipe. Enfin, les bénéficiaires au final sont bien les clients.
Enfin, le rôle de la tubulure d’échappement dans un moteur et en particulier un Panhard est essentiel.

Une menace cependant : le resserrement de la réglementation concernant le bruit émis par les échappements.
C’est en effet problématique pour ceux qui possède un pot piste. Déjà à l’époque des R8 Gordini, DEVIL avait proposé un embout pour une utilisation routière.

Au fil des ans, DEVIL s’est diversifié et s’est penché sur les arceaux de sécurité. C’est ainsi que le « virilbar » a été lancé sur le marché et pour lequel un challenge réservé aux possesseurs de cet arceau a été instauré.

Des châssis de karting ont aussi été produits
Aujourd’hui la marque DEVIL a étendu sa fabrication aux motos dont le marché est florissant. Son usine est implantée à St Pierre en Faucigny en Haute Savoie.
De cette usine sortent des échappements hautes performances développées spécifiquement pour chaque moto.

Puis au fil des années, DEVIL s’est spécialisé dans l’échappement adaptable pour uniquement consacrer sa production dans ce domaine.

Aujourd’hui, 60 personnes travaillent à la conception, à la fabrication et à la commercialisation d’échappement auto et moto. L’entreprise possède 3 sites : le siège et l’unité de production des échappements se trouvent à St Pierre.
La fabrication et la conception des lignes compétitions se font à Annecy.
Enfin, la commercialisation des produits auto se fait à la Roche-de-Glun, dans le 26, par la société Ultimate.

Un reportage spécial lui avait été consacré au printemps 2011 sur Direct 8 dans l’excellente émission « Direct-Auto » diffusé tous les samedis vers 18h40.

Comme quoi, ce sont les petits ruisseaux qui font les grandes rivières.

Charly RAMPAL