En ce dernier dimanche d’avril 1954, Monthléry connut la foule des grands jours.
En effet, les Coupes de Paris, organisées par l’A.G.A.C.I., avaient attiré en cette année 1954, un public particulièrement important.

Il est juste de préciser que figurait au programme de cette manifestation, la première présentation en course des Monomill de René Bonnet, et ceci explique sans doute cela.

Les coupes de Paris, proprement dites, sont une série d’épreuves ardemment disputées et dont l’intérêt sportif est certainement indéniable pour les concurrents.

Malheureusement, ils échappaient un peu au public, car la complexité de ces épreuves, où s’affrontent simultanément des voitures de catégories et de classe de cylindrée extrêmement diverses, rend la compréhension de la course particulièrement difficile.

Le spectateur est donc amené, soit à ne s’intéresser qu’à quelques voitures, soit à se livrer à un pointage rigoureux des passages et à apprécier les performances après-coup, soit à s’abandonner à la pacifique distraction qui consiste à contempler, purement et simplement, le passage des voitures.

Pourtant on pouvait suivre avec intérêt les performances de ces voitures de sport, et particulièrement la belle course de Blaché sur tank Renault-Ferry, qui couvrit 12 tours du circuit à la moyenne de 119,852 km.

Dans la deuxième course, Olivier, de l’Amicale Sportive du Nord, qui fit preuve d’une parfaire connaissance du routier et s’octroya la première classe de la catégorie de 750 à 2 litres, à la moyenne de 129,827 km, et, enfin, dans la troisième course, réservée aux voitures de 2 litres à 4,5 litres, le belle tenue de la Jaguar, pilotée par l’anglais Hamilton (non, pas celui qui court aujourd’hui en F1 !) qui porta la moyenne à 150,151 km.

Tout le monde attendait avec impatience l’exhibition des Monomill.

MONOMILL PREMIERE

On sait qu’un circuit spécial avait été aménagé à leur intention, circuit qui était celui de 3,333 km, mais qui comportait, en outre, un très fort virage artificiellement créé par des bottes de paille, disposé devant les tribunes.

Ce virage avait le mérite de rendre la course pus spectaculaire par les risques qu’il créait.

Les Monomill jouèrent parfaitement leur rôle et un grand nombre d’entre eux firent connaissance avec les bottes de paille, à la grande satisfaction du public, qui, si sportif qu’il soit, semble vouer aux stock-cars, un amour refoulé.

Que dire des voitures bleues de René Bonnet, sinon qu’en dehors de leur incontestable qualité de tenue de route, elles témoignaient, entre elles, d’une disparité fâcheuse.

La course se disputait en deux manches et une finale.

Les véhicules étaient tirés au sort entre les coureurs avant chacune des épreuves.

La loyauté de ce procédé devait confirmer l’inégalité des voitures, inégalité qui est excusable pour cette première sortie, mais qui ne saurait persister dans l’avenir sans compromettre gravement le destin de la formule.

Il est incontestable que si certains Monomill atteignaient en vitesse de pointe environ 160 km/h, d’autres avaient bien des difficultés à dépasser le 130 !

Quoi qu’il en soit, la combattivité des pilotes n’étaient pas feinte, et, faute de pouvoir lutter tous ensemble à égalité de moyens, les trois manches donnèrent lieu à un certain nombre de duels passionnants.

Notons quand même que c’est Jo Schlesser qui remporta cette épreuve : il deviendra plus tard pilote de F1, avant de se tuer à Rouen sur la monoplace Honda dont le bloc moteur était en magnésium (j’y étais).

On peut considérer que cette première épreuve reste une épreuve de rodage d’une formule qui cherche encore sa voie et sa place.

On ne pouvait donc souhaiter que pour leur prochaine sortie, les Monomill témoignent d’une mise au point mécanique un peu plus précise, et, nul doute que dans ce cas, qu’ils donneront leurs chances à quelques nouveaux pilotes et apporteront au public l’élément spectaculaire qui lui manque trop souvent.

Charly RAMPAL