LE CONTEXTE

Comme je vous l’avais raconté, c’est après la Libération que Panhard s’intéressa au prototype AFG, car sa propre étude de la 350 cc n’était pas parvenue à maturité.

Pour gagner du temps, Paul et Jean Panhard rachetèrent le projet AFG et, à partir de là, ils firent dessiner une carrosserie « maison » à 4 portes au lieu de 2.

C’est le dessinateur Louis Bionier qui se chargea de redessiner l’AFG, car elle ne correspondait pas à sa conception et au besoin d’une future clientèle populaire.

Les techniciens de la Porte d’Ivry remplacèrent le châssis en Alpax, trop couteux à fabriquer et à réparer, et le remplacèrent par un tout acier.

Côté moteur, ils étudièrent un moteur flat-twin, n’ayant rien de commun avec celui de Grégoire sinon la position des cylindres.

Delagarde allait s’inspirer du 350 cc étudié pendant la guerre et prévu pour la petite 4 places.

Ce moteur tournait une page capitale de l’histoire de Panhard puisqu’il marquait le retour de la firme aux soupapes.

Celles-ci étaient disposées en tête et comportaient un ingénieux système de rappel n’utilisant plus des ressorts hélicoïdaux traditionnels susceptibles de s’affoler, mais des demi-barres de torsion jumelées indéréglables.

D’autre part, les cylindres ailetés refroidis par air formaient un seul bloc avec la culasse : cette dernière n’était donc plus rapportée et les risques de joint claqué, disparaissaient.

Enfin, l’embiellage du moteur Dyna supprimait le souci des bielles coulées : celles-ci se montaient en effet sur des roulements à rouleaux brevetés qui comportaient de petits rouleaux inverseurs, évitant tout frottement parasite des rouleaux porteurs.

La boite 4 vitesses était maniable, mais délicate et la direction à crémaillère assurait une grande précision.

Quant à la suspension, elle conservait à l’avant de classiques ressorts à lames transversaux tandis qu’elle faisait appel pour l’arrière à un système original avec essieu oscillant en V, bras longitudinaux et barres de torsin transversales.

Les freins à tambours des premières Dyna, conservaient pour l’arrière une commande mécanique par câble, ceux de l’avant étant hydrauliques.

Réalisée chez Facel en alliage d’aluminium, la carrosserie de la Dyna était très légère.

A partir du 1er janvier 1946, un plan quinquennal – dit plan Pons – réglementa l’industrie automobile française pour faciliter la reprise dans les difficiles conditions d’après-guerre.

Dans ce plan, la firme Panhard fut regroupée avec les fabricants de camion Somua et Willème pour former le groupe U.F.A. (Union Française Automobile).

De l’automne 1945 à l’été 1946, la Dyna poursuivit des essais intensifs dans ses versions d’avant-série, dont les ailes arrière recouvraient maintenant les roues.

Au cours de cette période, les services  techniques de l’usine comparèrent souvent leur Dyna à la 4cv Renault.

La Panhard pouvait soutenir aisément la comparaison au niveau de l’habitabilité et des performances…. Moins facilement au niveau des prix.

La Dyna définitive figura au premier Salon de Paris d’après-guerre an octobre 1946.

Cette voiture initiale s’appela Dyna 100, ce matricule correspondant à sa vitesse maximale = 100 km/h.

Lui succédera ensuite toute une série jusqu’à la 130.

LA DYNA 130 : LA PLUS ABOUTIE

Baptisée Dyna X87, elle se présente avec une cylindrée augmentée à 851 cc.

Ce moteur a été développé sans l’aide de Louis Delagarde, en congé maladie depuis quelques mois.

L’alésage a encore été augmenté à 85 alors que la course reste la même à 75.

Au chapitre des modifications, ce moteur adopte un nouveau carburateur double corps Solex, un ensemble qui permettra à la X87 d’afficher une puissance de 40 ch, devenant ainsi une 5 cv fiscaux.

Pourtant, si le modèle progresse, la mise au point n’est pas achevée.

Louis Delagarde, rentré de convalescence, a souhaité apporter de multiples modifications à la voiture qui consomme énormément.

Aussi, il faudra attendre le printemps 1952 pour pouvoir prendre livraison d’une Dyna X87.

Pour plus d’authenticité, écoutons Louis Delagarde nous en parler.

« J’ai été arrêté presque un an pour maladie en 1950. Quand je suis revenu à l’usine, je me suis aperçu que le moteur était passé à 850 cc.

J’ai eu la curiosité d’essayer la voiture qu’ils avaient préparée pour M. Jean Panhard.

Seulement à 850 cc, au lieu de boulotter 6 lites, elle en avalait 9 !

Alors, j’ai dit à M. Jean : « Ecoutez, votre truc, ce n’est pas une voiture, c’est un ivrogne ! Je vous la rendrai quand elle marchera ».

A ce moment, on a changé les rapports de pont et de boite pour que cela corresponde à la nouvelle cylindrée.

A ce moment là, elle a consommé 6 litres. »

Détaillons en maintenant les éléments techniques qui composent cette Dyna 130.

LE MOTEUR

Le moteur de la Dyna 130 est évidemment le frère en conception du moteur classique de ses ainées.

Deux cylindres opposés à refroidissement à air. La cylindrée a été portée de 750 à 850 cc par augmentation de l’alésage, comme je vous l’ai expliqué.

Ce procédé est assez courant, car c’est celui qui permet de sortir un nouveau modèle, avec le plus grand nombre de pièces communes en fabrication, les embiellages notamment, n’ont pas été modifiés.

La cylindrée unitaire de 425 cc figure, à cette époque, parmi les plus élevées.

La puissance annoncée par la Maison est de 40cv à 5.000 tours, ce qui représente un chiffre record pour une voiture courante de 47cv au litre (dans le contexte des années cinquante bien entendu !) et une puissance au litre-1.000 tours, de 9,4 cv : chiffre d’autant plus remarquable qu’il est obtenu à un régime déjà élevé.

Le couple maxi annoncé de 6,5 mkg à 3.500 tours est, lui aussi, bien placé en valeur eu égard à la cylindrée, bien que l’on puisse regretter que son régime soit un peu élevé.

Au régime de 5.000 t/mn, la vitesse de piston est de 12,5 m/s, ce qui est très raisonnable.

Le taux de compression de 7,25 est un peu fort comme toutes les Panhard ce qui demande du super-carburant. Ce qui de nos jour avec le 95 et encore mieux avec le 98 ne pose aucun problème, bien au contraire.

LA BOITE DE VITESSES

La boite de vitesses est une quatre vitesses à quatrième surmultipliée, la seule vraie que l’on rencontrait à cette époque.

C’est la troisième que l’on trouve ici avec un rapport de 1.

Le pont donne un rapport de démultiplication de 6,14 à 1 et, en quatrième surmultipliée, le moteur doit faire 4,71 tours pour un tour de roue .

La boite présente la suite des rapports :

– 0,38 en 1ère

– 0,668 en 2ème

– 1 en 3ème

– 1,305 en 4ème

La progression géométrique respectant la 1ère et la 4ème nous aurait donné la suite :

– 0,38 en 1ère

– 0,573 en 2ème

– 0,865 en 3ème

– 1,305 en 4ème

Ce qui, dans une conception  classique, représente des remontées de seconde et de troisième considérables.

En fait, par rapport à la boite de la Dyna 120, la maison Panhard s’est écartée résolument de la solution classique et, tandis qu’elle remontait la seconde, elle redescendait assez nettement la quatrième vers la troisième.

Les trois les plus grandes se trouvent donc particulièrement resserrées.

Les multiplications adoptées entrainent des vitesses au km/h aux 1.000 de :

  • 25,5 en quatrième, ce qui, à 122 km/h, donne environ 4.800 t/m au moteur.
  • 19,55 en troisième, ce qui limite la vitesse à 98 à 5.000 t/mn
  • 13 en seconde, ce qui à 5.000 t/mn nous entraine à 65 km/h
  • 7,4 en première, ce qui limite cette dernière vitesse à 37 km/h, toujours à 5.000 t/mn.

LES ACCELERATIONS

LE CX

A 110 km/h, une puissance de 22,5 cv et nécessaire.

Ces 22,5 cv se traduisent par une résistance à l’avancement de 55kg.

Nous voyons que selon la formule d’Andreau, que la résistance au roulement absorbe, dans ces conditions, une poussée de 30,5 kg à la tonne pour une pression de gonflage de 1,300 kg à l’avant et à l’arrière, soit de 23 kg pour la voiture pesant en charge 753 kg.

Il reste donc 55 -23 = 32 kg utilisés contre la résistance de l’air.

Si nous écrivons ½ ρ (Rho de l’alphabet grec) SCxV = 32 kg, nous en déduisons SCx = 0,55 avec les conditions de 27° et 748,4 mmHg. Pour S = 1,75.

Le Cx est donc = 0,32.

LA CONSOMMATION

A 120 km/h : la voiture demande pour son entrainement 28,3 cv.

On consomme 11 litres aux 100 km, soit 13,2 litres à l’heure, soit 453 cc au CVH, soit 331 gr au CVH (Chevaux Vapeur Heure).

A 100 km/h : la voiture demande pour son entrainement 17,7 cv.

On consomme 7,4 litres aux 100 km, soit 7,4 litres à l’heure, soit 418 cc au CVH, soit 305 gr au CVH.

A 80 Km/h : la voiture demande pour son entrainement 10,4 cv.

On consomme 5,25 litres aux 100 km, soit 4,2 litres à l’heure, soit 403 cc au CVH, soit 295 gr au CVH.

A 60 Km/h : la voiture demande pour son entrainement 5,7 cv.

On consomme 4,5 litres aux 100 km, soit 2,7 litres à l’heure, soit 474 cc au CVH, soit 346 gr au CVH.

A 40 Km/h : la voiture demande pour son entrainement 2,8 cv.

On consomme 5,6 litres aux 100 km, soit 2,24 litres à l’heure, soit 800 cc au CVH, soit 584 gr au CVH.

Charly  RAMPAL  (documents : Bureau des Etudes P.L. et doc. d’époque)