LA 753 SALON PARIS 1950

C’est le jeudi 5 octobre 1950, que le Salon de Paris a ouvert ses portes. Un 37ème Salon sauvé par les petits constructeurs qui sont venus au Grand-Palais avec de nombreuses nouveautés.

Parmi eux, Charles Deutsch et René Bonnet, encouragés par les brillants résultats en compétition, envisagent dès 1950 d’orienter leur marque D.B., vers une production plus commerciale de voitures de sport à vocation routière.

C’est ainsi qu’un nouveau cabriolet dessiné par Jean Antem, le fils du carrossier, visible à gauche, sur la photo ci-dessous.

C’est sur ce stand d’ANTEM que la D.B. 753 fut présentée pour la première fois.

Le moteur est un 745 cc et reprend les principaux organes de la Dyna X 120 Panhard.

L’ensemble est posé sur un châssis qui comporte une poutre centrale de section carrée associée à des longerons et traverses perforées en tôle pliée.

Ses principales dimensions sont les suivantes :

  • Empattement : 205 cm
  • Voie : 122 cm
  • Longueur hors tout : 375 cm
  • Largeur hors-tout : 145 cm
  • Hauteur avec capote : 110 cm

COMMENT EST-ELLE DEVENUE LA DB ANTEM DE SERGE MACE ?

C’est au début de l’année 1963 que Serge Mace croisa la route d’un moniteur d’auto-école passionné de compétitions  et qui possédait un Monomill et un DB de 1950 dont il voulait se séparer.

Serge ne connaissait pas encore grand-chose sur les DB, même s’il avait eu l’occasion d’en voir un coach HBR dans une des nombreuses casses  qui peuplaient alors la N7 au sud de Paris.

Trop de travail sur la carrosserie en plastique, dont la réparabilité était encore méconnue, lui fit passer son chemin.

Mais ce monogramme synonyme de victoires françaises avait marqué son esprit et celui de son frère, pour que tous les deux bloquent une rencontre pour  découvrir cette D.B. de 1950.

Le rendez-vous fut pris avec le propriétaire et c’est dans la remise d’un petit pavillon de la banlieue Est de Paris, qu’ils purent découvrir cette nouveauté, pour laquelle ils furent emballés au premier coup d’œil par ses formes avant et ses ouïes sur le capot, façon Jaguar E !

Pourtant, elle n’était pas dans un état propice à attirer les foules ! 

Son pare-brise était cassé, le pot d’échappement troué, la peinture fade, style gris vert camouflage de l’armée, avec une large bande bleue partait de l’avant jusqu’à l’extrême arrière.

Le tour de la voiture faisant, Serge découvrait peu à peu toute son originalité ;

Le tableau de bord :   extrêmement simpliste ,sans compteur de vitesses, juste 2 cadrans ronds placés derrière le volant, un compte tour et un cadran regroupant tout le nécessaire pour suivre le comportement du moteur, c’est-à-dire des indicateurs de pression et température d’huile, ampèremètre ,jauge à essence , le tout complété par quelques boutons commandants contact ,ouverture capot ,starter, démarreur, essuie-glace.

Enfin un tableau de bord synonyme de compétition, d’après ses références photographiques d’époque.

Côté moteur / boite : la voiture était équipée 850 type S5 sans RJH , carburateur double corps de 32 NDIX , accouplé à une boite type RS avec longue queue arrière.

Péniblement, le moteur se fit entendre, mais il tournait.

Le dessous de la voiture paraissait en bon état et le deal fut scellé en novembre 1963 où elle regagna avec toutes les précautions nécessaires, un box de  la RN3,pas très loin de l’Eglise de Pantin.

MAIS D’OU VENAIT CETTE VOITURE ?

Serge et son frère, commencèrent leur enquête pour connaitre l’origine de cette découverte atypique.

Comme beaucoup de modèle de sport de l’époque ,elle a participé à diverses courses , rallyes plus ou moins connus, elle a été utilisée par les frères HAMPE,  Garagiste à Romainville, et grands spécialistes de la mécanique Panhard, pour participer sans doute à  quelques courses ou tout simplement pour pétarader autour de leur garage .

Quelques années plus tard, Serge rendit visite aux frères Hampe en leur montrant une photo de la DB.

Ils ont été très heureux de revoir cette auto.

L’un des frères a souri en s’exclamant  «  Oh, le chien qui pisse ».

Comme beaucoup de Panhard une des roues arrière avait tendance à se lever lors d’un virage pris à vive allure.

REMISE EN ETAT DE MARCHE

C’est dans ce petit box, dans des conditions que connaissent beaucoup de passionnés de cette époque ayant plus de cœur que d’argent et de moyens mécaniques (c’est du vécu !), que commença la remise en route de la DB Antem .

Après avoir remis des échappements corrects, pas trop bruyants, (pas facile) et grossièrement remis la voiture sur pied pour être conforme au code de la route, Serge et son frère étaient impatients d’essayer  cette auto.

Alors, un samedi en fin d’après-midi du mois de Novembre 1963, ils ont décidé de sortir l’auto du garage, pour se jeter sur la Nationale 3 en direction de Meaux.

Même bien couverts, Il ne  faisait pas chaud, surtout sans pare-brise !!! Et même de légers flocons allaient les accompagner.

Satisfaits de leurs premiers pas avec cette auto, il rentrèrent au bercail avec des idées pleins la tête.

LE PROBLEME DU PARE-BRISE

La grosse difficulté fut de trouver un pare-brise.

Les mesures prisent pour en faire des plans, les deux frangins partirent écumer les casses, modèle carton sous le bras, pour essayer de trouver un modèle identique ou acceptable.

Mais rien du tout, alors ils décidèrent d’en fabriquer un en plastique.

Le plastique n’aimant pas trop les essuies glace, ils durent de nouveau se mettre  en quête d’une adaptation provenant d’une voiture moderne (de l’époque).

Apres multiples recherches, leur choix se porta sur un pare-brise de Dauphine.

Un modèle fut trouvé chez un casseur du pont de  Bezons qui a mis en marche une grosse cisaille pour nous vendre un ensemble complet pare-brise muni de son entourage en tôle.

La dimension de ce pare-brise étant légèrement plus grande, ce qui les obligea à l’adapter en l’inclinant légèrement, ce qui les conduisit à rajouter de petits  éléments triangulaires de chaque  côté et à déplacer les essuies glaces.

COMMENT APPRONFONDIR SES CONNAISSANCES SUR CETTE D.B.

A cette époque de l’oubli, il n’existait pas de documents relatifs à l’époque D.B. , pas de bibliographie , pas de livres.

Alors,  de temps en temps, Serge se rendait au siège du journal « l’automobile » du côté de Saint Cloud . pour consulter les revues du début des années 50, à la grande surprise de l’hôtesse d’accueil, très étonnée que quelqu’un  puisse s’intéresser à ce type de  revues, si lointaine pour l’époque (pas de Rétromobile et tous ses marchands et encore moins de clubs !).

Mais cela permit à Serge de les consulter et de trouver quelques documents sportifs relatifs à la course de Sebring 1952 aux USA.

Même au niveau mécanique, il n’y avait pas de pièces en circulation et il fallait très souvent acheter un voiture complète pour la cannibaliser pour quelques organes à transférer.

C’est ainsi que les deux frères achetèrent une Dyna X qui avait fait un tonneau mais roulante.

Pour travailler dans de meilleures conditions qu’en région parisienne, ils décidèrent de l’emmener dans une ferme de famille située dans la Mayenne.

EN ROUTE POUR LA MAYENNE

Un vendredi, après le travail, Serge au volant du D.B. et son Frère à celui de la Dyna X, le départ est lancé pour la province mayennaise.

Arrivés près de la gare de Montfort l’Amory sur la N12, le moteur de la DB s’arrête.

Capot ouvert, caisse à outils sortie, lampe de poche allumée, ils passeront une grande partie de la nuit pour comprendre la panne afin de la réparer.

Mais désillusion, impossible de réparer sur place : le pignon céleron venait de lâcher.

Seule solution : tracter la DB avec la Dyna X chez un garagiste de la ville pour réparation.

Dès le samedi après-midi, travaux terminés, fatigués mais heureux d’en être sortis aussi rapidement,  ils purent repartir plein pot. 

UN JUNIOR COMME BANQUE D’ORGANE

Un jour son  frère en passant devant un garage du sud de paris, remarqua un junior à vendre.

Equipé d’un moteur tigre mais aux roulements de vilebrequin HS il faisait un bruit énorme.

Il l’achète dans le seul but de récupérer le moteur, le réparer et équiper leur DB.

Après les 300 kms sur des oeufs pour le conduire dans leur ferme de Mayenne, ils arrivèrent enfin à destination dans un bruit de plus en plus aigu : il était temps !  

LES REPARATIONS MECANIQUES

Pour les réparations cela n’a pas été sans problème car leurs moyens techniques étaient ridicules, sans aucune mesure avec ce que l’on peut trouver aujourd’hui.

En cette année 1964 et malgré la revue technique Panhard, l’expérience manquait.

L’ensemble moteur/boite du junior déposé, les chemises seront prélevées pour les mettre en lieu et place sur le moteur de la DB sans se soucier d’autres considérations techniques, la boite RS sans queue arrière et le nouveau carburateur 38NDIX complétait la modification.

Les nouveaux cylindres montés, ils constatèrent une nette amélioration de puissance jusqu’à mi régime mais après … ça plafonne !

Après recherche ils s’aperçurent que le diamètre des tubes d’échappement d’origine était trop faible !! 

Effectivement, après le montage de l’ensemble des tubes d’échappement de diamètre plus gros du junior tout est redevenu normal, presque, car une autre surprise attendait : l’augmentation de puissance nous faisait patiner l’embrayage.

Donc obligation de le démonter et de le remplacer.

La nouvelle boite type RS sans queue de boite donc sans support arrière sur le châssis les obligea à rajouter une entretoise avec oreilles dites de Mickey et confection personnelle de supports adéquats.

Positionnement de ces supports faits « main ».      Entretoise dite oreille de mickey

fixés par un boulon d’étrier du ressort supérieur

Vue d’ensemble du nouveau compartiment moteur assemblé

 AMELIORATIONS DE LA D.B. ANTEM

Le moteur en pace, il fallait maintenant s’attaquer aux améliorations générales des performances.

Des tambours aluminium avant et arrière, furent  prélevés sur une Dyna 59.

Equiper le tableau de bord d’un compteur de vitesse provenant d’une Volkswagen, la maquiller de petits compteurs qui ne servaient à rien, mais qui amélioraient le look pour la faire ressemble à une grosse voiture de sport de l’époque,  une commande de vitesse par câble sur le longeron central, celui-ci s’est d’ailleurs révélé par la suite beaucoup moins pratique que la poignée pistolet d’origine.

Un pare-choc avant provenant d’une Dauphine avec tôle centrale perforée faite maison.

Pour l’anecdote à ce sujet : à la suite d’un contrôle de police à Ponthierry, un gendarme leur fit remarquer que, sans protection, le ventilateur pourrait aspirer, attirer, les jupes des demoiselles et ainsi créer de gros problèmes ! Mais bon, n’était ce pas le temps de la mini-jupe ?)

LA CARROSSERIE

La couleur d’origine genre gris/vert était horrible à leur gout, aussi, en échange de leur scooter Lambretta, des pots de peintures couleur bleue clair seront stockés en attendant un dimanche matin dans l’arrière-cour d’un magasin d’accessoires de la ville de Vernon tenu par  un copain de régiment du frère à Serge.  

C’était le temps de copains rappelez-vous que nous chantait la belle Françoise Hardy !

ET CA CONTINUE ENCORE ET ENCORE…

Pour encore augmenter la puissance du moteur, Serge va acheter une tubulure de R8  équipé de 2 carburateurs Zenith Stromberg. 

L’objectif était de les monter juste derrière les 2 cylindres, mais la synchronisation des deux carburateurs les poussa à revenir au montage d’origine.  Qui ne tente rien…

MAINTENANT, PROFITONS DE LA BELLE !

En plein travail à l’atelier de campagne (juillet 1965), Serge et son frère. Notez le pare-brise incliné provenant d’une Dauphine

Le tableau de bord modifié avec compteur de vitesse, levier de vitesse au plancher, compte tour additionnel au plancher, et différents témoins … température et autres….. La totale quoi !

Un jour, dans les faubourgs de Caen, une frayeur qui aurait pu mal tourner.

Sur une route bordée d’arbres qui séparent les villes de Falaise et Caen, alors qu’ils roulaient à vive allure, à 100 mètres d’un croisement pris à très faible vitesse, heureusement, les vis de maintien d’une corne de direction se sont cassés laissant les roues en forme d’éventai (un classique de la Dyna X !). La réparation faite, ils mesureront ce coup de chaleur !

Puis ce sera une escapade en Alsace durant l’été 1966

Puis, les vacances à JULLOUVILLE sujet du film joint à la fin de l’article. Sur la photo on voit Daniel l’auteur du film , jean Claude son frère et serge assis sur le pare choc.

La D.B. Antem sera ainsi leur compagne de toutes les sorties surtout en Normandie, Jullouville, Avranches jusqu’à la fin décembre 1966 ou elle sera stockée chez les parents en Picardie : les jours heureux.

Car, dans les années soixante, il fallait accomplir le service militaire et Serge parti en Allemagne.

Lors d’une permission, Serge découvrit la DB en position verticale, contre un mur, pendue par le train arrière, le but étant de tenir le moins de place possible dans la grange !

La fin d’une époque : la belle aurait-elle perdue ses attraits ? Vous le saurez dans un prochain article…

FILM « DB-ANTEM Vacances à Jullouville » :

Charly  RAMPAL à partir du récit et les photos de Serge Mace