PANHARD ET LEVASSOR ET LES MAGASINS PARISIENS 1896 A 1925
Panhard-Levassor fut le fournisseur automobile, non exclusif, de quatre grands magasins de Paris, à savoir le Bon marche, les Galeries Lafayette, les Grands Magasins du Louvre et le Printemps.
Les livraisons de véhicules aux services d’expédition de ces grands magasins débutèrent en 1896 et ne cessèrent qu’en 1939, a la veille de la seconde guerre mondiale.
La première voiture de livraison Panhard-Levassor aux Grands Magasins du Louvre
Le premier grand magasin qui fit l’acquisition d’un véhicule de livraison Panhard fut les Grands Magasins du Louvre.
C’est en 1896 que le service des expéditions reçût sa première voiture de livraison Panhard-Levassor.
Cette voiture fut sans doute un modèle 1895 avec roues artillerie et transmission par chaine, c’est la déduction que nous avons faite a la lecture du passage d’un article de P. Maisonneuve, intitule « I ‘Automobile Industrielle » et paru le 14 septembre 1902 dans le journal « La locomotion automobile ».
Dans cet article, P. Maisonneuve nous apprend, sans précision particulière à propos de la voiture, que « (…) la doyenne des voitures de livraison françaises, et peut-être même du monde, est une vieille Panhard en service depuis six ou sept ans aux Magasins du Louvre… Elle ne va, certes, pas très rapidement et la démultiplication considérable indiquée par les diamètres combien différents de ses pignons de chaines trahit la faiblesse du moteur; mais elle va toujours et roule tumultueusement sur le pavé de Paris, ses roues énormes à peine garnies d’un mince bandage plein. »
Ce modèle utilise par le Louvre le fut aussi par les Galeries Lafayette des 1899 et durant une dizaine d’années.
On note aussi un modèle plus petit et sur des roues de charrette, la M2F équipé d’un moteur de 6cv.
Sur ce véhicule, qui comptera 193 unités, les trois levier de commande (freins, boite de vitesses et marche arrière) ne sont plus séparés mais réunis sur un même pivot. La nouveauté est bien le montage, d’abord en option, d’une toute nouvelle direction à volant au lieu de la barre dite « queue de vache », qui disparaitra rapidement.
En 1902 , époque à laquelle P. Maisonneuve écrit cet article, deux autres grands magasins parisiens, les Galeries Lafayette et les Grands Magasins du Printemps, utilisent aussi des vehicules Panhard-Levassor pour livrer leurs colis dans Paris et en région parisienne, comme ce fourgon de livraison « Dubonnet » dont les modèles 8 /10 HP à 3 cylindres avec moteur sous le siège et roues garnies de pneumatiques.
Les voitures de livraison des Grands Magasins parisiens à l’honneur au Salon de l’Automobile.
C’est en 1907, cinq ans après la parution de cet article, que les Galeries Lafayette acceptent de prêter l’une de leurs voitures de livraison à la firme Panhard-Levassor qui l’expose sur son stand au Salon de l’Automobile qui se tient au Grand Palais.
Que Panhard transforme à son effigie.
On trouve également un fourgon PL pour le célèbre tailleur anglais au 12 boulevard des Capucines : une 10HP à moteur avant
Mais aussi le célèbre magasin le « Bon Marché »
L’étagement de la gamme reste la même qu’en 1906, mais la puissance nominale exprimée jusqu’ici en CV s’anglicise depuis le salon de décembre, en adoptant les lettres « HP » (Horse Power).
Un an plus tard, en 1908, les Grands Magasins du Louvre et le Bon marche jouent, à leur tour, au jeu du prêt pendant le Salon de l’Automobile de Paris pour la plus grande fierté de la marque Panhard.
Non content d’assurer la vente directe de ses véhicules utilitaires, le service commercial met également sur pied un service de location : plusieurs chaines de grands magasins feront d’ailleurs appel à ce service pour se constituer une flotte de fourgon de livraison.
Cette politique porte ses fruits puisque, à la fin de l’année, la livraison des utilitaires a atteint 42 unités, dont une vingtaine de 10HP et 15 18HP, soit 3 fois plus qu’en 1907.
En 1909, c’est la gamme de l’année précédente qui continue sans changement notable.
Avec la production de 58 exemplaire, dont deux grands camons type V à moteur 18HP, elle se maintient par rapport à l’année précédente.
Au Salon Automobile de 1910, on peut admirer sur le stand Panhard-Levassor trois voitures de livraison du même type, 15 HP a 4 cylindres : la première aux armes des Grands Magasins du Printemps, la seconde aux armes du Bon Marche et la troisième à celles des Galeries Lafayette.
En 1911 le stand de la firme de l’avenue d’Ivry n’accueille qu’un seul véhicule de livraison des Grands Magasins parisiens, c’est une voiture 15 HP à 4 cylindres du Bon Marche. Dans un article de la revue « Le Poids Lourd », intitule « S.A.A.E. Panhard et Levassor » et signe par un certain André Laguarrigue, il est rappelé que « …les voitures de livraison de Panhard représentées sont destinées a des grands magasins de nouveautés et qu’elles sont parfaitement appropriées au service rapide et sur qu’elles doivent assurer « .
La gamme des utilitaires n’évolue guère cette année. La production reste stable avec 61 unités.
En 1912, trois voitures 12 HP à 4 cylindres aux armes des trois mêmes Grands Magasins parisiens ont exposées sur le stand de la marque.
Cette voiture le type K7 à chaines est remplacé pendant l’été par le typa K9 à cardan.
Suivant les usages et la carrosserie, le moteur de ces camions est à l’avant ou sous le siège.
L’agencement intérieur d’une voiture de livraison du Bon Marche
Un article, paru dans l’ » Auto-Carrosserie » en 1911, intitule » Voitures de livraison (nouveautés) sur châssis Panhard-Levassor 12 HP à cardan « , décrit l’aménagement d’une voiture de livraison du Bon Marché.
La caisse est construite en bois et en métal et la rigidité de l’ensemble est assurée par des traverses entrecroisées aux montants.
Comme dans bon nombre de voitures de livraison des grands magasins parisiens, deux pochettes de moleskine, placées sous les glaces des cotes, servent de rangement pour les factures, lettres de voiture et avis de livraison du livreur.
Le conducteur du vehicule est assis sur le seul siège fixe du vehicule, le livreur n’ayant droit qu’a un strapontin, toutefois garni de cuir. Le livreur accède à l’intérieur de la caisse en tirant un petit rideau de cuir fixe a une tringle posée sur la courbe du pavillon ou par l’arrière du vehicule, par une porte à un seul battant qui entraine le déploiement automatique d’un marchepied » portefeuille « .
Le conducteur peut aussi de son siège ouvrir la porte arrière à l’aide d’un ingénieux jeu de câbles et de poulies.
A l’intérieur et a mi-hauteur de la caisse, des planches fixées sur des fers cornière permettent de monter une surface de rangement intermédiaire pour entreposer les colis volumineux.
Deux strapontins sont prévus à l’arrière de la caisse pour des livreurs supplémentaires, si nécessaire.
En 1913, conséquence des nécessités du moment et d’un investissement croissant de la société dans ce domaine, la production des véhicules utilitaires, prend de plus en plus d’importance avenue d’Ivry, pour atteindre environ 160 exemplaires.
Cette même année la gamme s’étoffe d’un utilitaire léger dérivé de la 10HP qui garde le type des Mines de la version tourisme : la X19.
Parmi les clients des Grands Magasins on trouve : Le Grand Magasin du Printemps, les établissements Charles Gervais et les Galeries Lafayette.
1914 : L’armée réquisitionne les voitures de livraison
Lorsque survient la Première Guerre Mondiale, l’armée réquisitionne une très grande partie des voitures de livraison Panhard et Levassor des grands magasins parisiens.
Le 21 mars 1914, quatre mois avant l’ouverture des hostilités, Monsieur Noubens, alors Ministre de la Guerre, signe la loi de réquisition des véhicules pouvant être utilises pour le service des armées.
Les vehicules sont classes en deux grandes catégories :
– la première comprend les voitures de poids lourds : camions, autobus, sanitaires, camionnettes, tracteurs, etc…
– la deuxième toutes les voitures de tourisme.
Les véhicules des grands magasins parisiens entrent naturellement dans la première catégorie et sont diriges vers le centre de réquisition de Versailles.
De nombreuses voitures Panhard du Bon Marche sont affectées au secteur de l’artillerie alors qu’un grand nombre de celles du Printemps sont versées au service de santé des armées et a la Croix Rouge.
Toute réquisition entrainait le versement d’une indemnité par le Ministère de la guerre :
1 200 francs de l’époque pour un camion et 1 500 francs pour une voiture.
A l’issue des hostilités et en raison de leur état, la plupart des vehicules des grands magasins de Paris qui avaient été réquisitionnes, ayant été vendus ou détruits, il a fallu renouveler les flottes de véhicules de livraison.
En 1919, la reprise est lente après la guerre, néanmoins on note quelques fourgonnettes X19 carrossée par Breteau, comme celles du Tailleurs Old England au boulevard des Capucines, que l’on déjà vu en 1907.
La politique commerciale et publicitaire de Panhard-Levassor et des grands magasins parisiens
C’est ainsi qu’au cours des années 1920, un grand nombre de fourgons de livraison type SK sont achetés par le Bon Marche et les Grands Magasins du Printemps.
La gamme ne change pas : seuls les châssis 12HP de 1500 kg et 16HP de 2500 kg restent au catalogue.
En 1921 : Evolution logique pour les utilitaires de 1500 kg qui troquent leur vieux moteur SU-4E de 2815cc pour le SU-4D2 de 2275cc apparue sous le capot de la 12HP type X31.
Ce nouveau type K18 dérive pour le reste de l’ancien modèle.
L’utilitaire 10HP disparait définitivement au début de l’année.
En 1922, la gamme des utilitaires reste stable avec les 12HP et les 16HP.
Avec à peine 86 unités dans l’année, la production est en chute libre : il est important de réagir.
Et ce ne sont as les entreprises de a région parisienne qui pourront combler ce déficit comme cette 16HP de la manufacture de caoutchouc.
En conséquence, pour la première fois cette année, la préfecture de police de Paris équipe ses services de véhicules utilitaires Panhard de 1500kg type K18, qui seront suivis de beaucoup d’autres modèles.
1923, sonne la fin du moteur à soupapes.
Les derniers utilitaires à l’utiliser seront les 1500kg type K18.
Entre 1924 et 1925, le Bon Marche acquiert les modèles SKC-4 et SK-D et en 1929 les modèles SK-4F qui sont décores de manière très spéciale : il s’agit de « vagues » ou si l’on veut, de vibrations parallèles en trois tons, du rouge au brun, placées en diagonale sur le caisson de la voiture.
Le nom du magasin () est inscrit en haut du caisson.
Les Grands Magasins du Printemps adoptent une double politique commerciale vis-à-vis de Panhard Levassor : d’une part ils achètent en propre des camionnettes et des fourgons de livraison(S) et d’autre part ils font appel aux services de la compagnie de louage de la marque pour les fourgons SKC-412, carrosses par Breteau.
La gemme s’articule toujours sur 3 moteurs : le 10 CV qui existe en camionnette de 500 kg, puis de 750 kg à partir du mois d’août et garde le type X47, le 12 CV de 2,5 tonnes qui évolue en fin d’année et enfin le 16 CV de 4 tonnes (K19).
Les utilitaires de la arque seront très appréciés en Afrique du Nord et en particulier au Maroc, premier marché avec 81 exemplaires.
Charly RAMPAL (Documentation archives Panhard et de Jean-Damien LEVEAU)