En plus des compétitions sportives dans les divers championnats nationaux ou mondiaux, Panhard s’est taillé une belle réputation et à engrangé de multiples victoires à la chasse au gaspi, patronné par Mobil pour l’Economy Run, traduisez par « concours d’économie ».

Réputée « sobre comme un chameau » , le moteur Panhard ne pouvait pas en démontrer la véracité dans ses épreuves où la moindre goutte d’essence perdue peut avoir de grave conséquences !

Rappelons que cette épreuve est organisée conjointement par la société Mobil-Oil France et l’Automobile-Club basco-Béarnais.

Elle se déroule sur 2200 km que l’on doit parcourir en 4 jours, entre les villes de Deauville et d’Hyères, en passant pas St Jean-de-Luz. Cet itinéraire étant bien entendu secret jusqu’au départ.

Les consommations doivent être les plus faibles possibles, permettant à chacun de jouer sr les astuces de la roue libre, de conduire sir le couple et avoir le pied léger comme une ballerine !

Au niveau des classements, les vainqueurs sont répartis en 5 classes de cylindrée.

La formule mise en place, tient compte de la consommation, du poids de la voiture et de la distance parcourue.

Pendant des années et presque tous les ans, Panhard était sur la plus haute marche du podium dans sa classe.

Débuté avec la Dyna, puis la PL17, il était normal que la 24 dans sa configuration la plus basse, le modèle C, termine cette saga de l’économie.

Pour ne pas raconter une nième fois l’histoire, relisons ce que Yann Le Lay et Bernard Vermeylen (les historiens de la marque) avaient écrit dans un numéro d’Automobilia, sous le titre « La petite dernière ne déçoit pas ».

« Du fait de son espace intérieur lus réduit, la Panhard 24 s’adresse à une autre clientèle que les Dyna et PL17.
Animée par la même mécanique, elle n’entend cependant pas se priver de l’économie comme argument commercial.

A côté des 24 CT et BT dotées en série du moteur Tigre, la gamme comprend toujours des modèles à moteur normal : le coach 24 C, puis berlines (versions allongées) 24 B et BA.

Ici encore, ce sont ces versions moins sportives que l’in va engager dans les concours d’économie.

Pour son baptême au Mobil français, en mai 1964, le nouvelle venue a fort à faire car les organisateurs ont durci le règlement afin de donner au concours une valeur incontestable : des temps sont imposés pour la partie « montagne » du parcours routier et, lors de l’épreuve d’efficacité, courue sur le circuit d’Albi, les concurrents subissent des pénalisations très dures (un centilitre d’essence par seconde de retard).

C’est une 24 C qui emporte d’une tête sa catégorie aux mains d’André Parayre et de Lucien Pineau, avec une consommation d’à peine plus de 5 litres.

Panhard doit concéder la seconde place à une… Dauphine.

Vient ensuite la PL17 de Georges Molina et Claude Courbe,

puis une seconde 24 C conduite par Jules Favières.

Le Drouais qui a maintenant le modèle bien en main renoue avec le succès en gagnant le Mobil autrichien la même année.

Gavé par son carburateur double corps, le Tigre sur lequel ont misé Hubert et Gérard Aublet a trop d’appétit et leur 24 CT arrive en 8ème position.

L’année suivante, la victoire est incontestable.

La 24 C ayant disparu du catalogue, ce sont plusieurs 24 B qui s’engagent.

Le parcours entre Strasbourg et Saint-Jean de Luz, emprunte des routes sinueuses et détrempées.

A l’épreuve d’efficacité (sur le circuit de Charade en Auvergne) s’ajoutent 7 spéciales chronométrées sur divers tronçons routiers et au circuit d’albi ; les moyennes imposées sont élevées, ce qui récompense les voitures dont la tenue de route permet d’avaler les virages sans ralentir.

Le succès des Panhard va être d’autant plus net qu’au cours des épreuves, 17 des 35 voitures se disqualifient.

A côté de spécialistes comme Philippe d’Espouy (moins chanceux sur Fiat que naguère sur Panhard), de nouveaux concurrents défendent les couleurs de l’avenue d’Ivry, dont le coureur cycliste breton, Jean Robic, vainqueur du Tour de France 1947.

Son coéquipier, Pierre Lelong, lui prodigue ses conseils et le tandem amène une 24B à la victoire absolue tant en consommation qu’en efficacité.

On trouve deux autres 24 B aux 3ème et 4ème places de leur catégorie.

Jean Robic s’st découvert une véritable vocation et s’engage l’année suivante sur un coupé Opel Kadett, mais sans pouvoir s’imposer.

De son côté, pour deux ans encore, Pierre Lelong reste fidèle à Panhard et bien lui en prend.

Avec Guy Jouanneaux, il offre en 1966 à une 24, une double victoire de classe, tant en efficacité qu’en rendement énergétique ; les épreuves sur routes sont abandonnées et les voitures subissent durant 20 heures sur le circuit du Mans une éprouvante course de fond aux règles draconiennes (aucune neutralisation de temps n’est possible, même pour les changements de pilotes).

Pour 1967, Pierre Lelong se contente d’une victoire au rendement, sa 24 devant s’incliner en consommation devant deux coupé Fiat 850.

REVANCHE SUR L’ADVERSITE

Quelques mois plus tard, la marque doyenne disparait du paysage automobile.

Mais Panhard triomphe encore de l’édition 1968 du Mobil, qui se déroule au Mans pour la 3ème année consécutive : la 24 D’André Parayre et de Hubert Aublet s’impose comme la plus sobre de toutes les voitures engagées !

Mais cette participation est un chant du cygne car l’épreuve n’est ouverte qu’aux voitures de moins de 2 ans.

Avec des règles du jeu durcies d’année en année, les concours d’économie sont devenus un banc d’essai très dur, et les nombreux succès glanés par les Panhard, tant dans le Mobil (rien qu’en France, 11 victoires absolues en 13 ans) que dans le concours concurrent organisé par la Caltex (3 victoires absolues en 6 ans), prouvent la validité technique de leur conception au même titre que leur palmarès en rallyes.

Ce n’est pas un hasard si les deux types d’épreuves sont confondus dans les ultimes campagnes de presse destinées à vendre les 24.

Il est bien dommage que, sur le plan commercial, cette dernière ait du se contenter de ce succès d’estime.

GALERIE DE PORTRAITS

Parmi les concurrents aux concours d’économie, Panhard a pu compter sur une bonne dizaine de fidèles qui lui ont permis, pendant 13 ans, de figurer aux places d’honneur.

– Aublet Hubert : né en 1934, cet exploitant agricole de Limoux (Aude) participe à son premier Mobil en 1960. On le voit à presque toutes les éditions suivantes jusqu’en 1968 (sauf en 1963 et 1967), dont plusieurs fois avec son frère Gérard (1961, 1964, 1965). Il remporte en 1968 la dernière victoire Panhard avec André Lapayre.

– Courbe, Claude : ce négociant en vins établi à Caudéran (Gironde) est né en 1923. On le retrouve à toutes les éditions du Mobil de 1957 à 1965, en tandem avec Georges Molina depuis 1961. Vainqueur des éditions 1957 et 1963. A gagné aussi le Mobil anglais en 1957, et s’est bien classé au Mobil italien en 1961 ainsi qu’au Caltex en 1959. En 1966 et 1967, participe au Mobil sur Peugeot 404 Diésel.

– D’Espouy, Philippe : né en 1919, il est agent commercial à la concession Panhard de Toulouse. Il participe au Mobil de 1958 à 1962, souvent avec André Parayre qui est son collègue de travail. Ses résultats les plus marquants ont lieu en 1961 et 1962. Il participe à de nombreux rallyes d’endurance sur des voitures de la marque. En 1964, il gagne sa catégorie au Mobil sur Fiat 1500.

– Favière, Jeanne : née en 1898, elle conduit depuis 1933. Elle participe au Mobil avec son mari en 1956 à 1959, au Caltex de 1959 à 1962, au Mobil italien de 1960 à 1962 (3 victoires). Ses robes à fleurs sont célèbres dans tous les concours d’économie !

– Favière, Jules : né à Courbevoie en 1896, il fait ses débuts chez De Dion en 1908. Il est agent Panhard à Dreux, rue Parisis, depuis 1930. Il a donc la soixantaine lorsqu’en 1956 il commence à participer au Mobil Economy Run, qu’il dispute jusqu’en 1964 sans autre interruption que l’édition de 1963. Si l’on ajoute ses victoires aux Mobil italiens et autrichien, et au Caltex Performance Test, il compte 7 victoires absolues à son actif !

– Lelong, Pierre : rallyman émétité, originaire de Compiègne, il a 4 éditions du Mobil Economy Run à son actif, sur Panhard, de 1964 à 1967… et il remporte les 3 dernières, chaque fois associé à un pilote différent. En 1968, on le retrouve au Mobil sur une Simca 1100.

– Molina, Georges : ce mécanicien bordelais est né en 1920. Sa première participation au Mobil remonte à 1960, mais il dispute le Caltex dès 1959, e, compagnie de Claude Courbe, avec lequel il fait le plus souvent équipe (sauf en 1966 avec Pineau). Il court sur Panhard jusqu’en 1966, y compris à l’occasion de certaines éditions des Mobil italien et autrichien. En 1967 et 1968, on le retrouve sur Peugeot 404 Diésel, comme Claude Courbe, mais associé à Grand.

– Parayre André : comme Philippe d’Espouy, il est agent commercial à la succursale Panhard de Toulouse. Né en 1926, c’est un vétéran du Mobil auquel il participe depuis 1957. Il y reste fidèle jusqu’à la fin : c’est lui qui remportera l’ultime victoire, sur une 24 B en 1968, associé à Hubert Aublet. Tant au Mobil qu’au Caltex, il a plusieurs victoires à son actif. Après avoir couru avec son ami d’Espouy jusqu’en 1962, il est ensuite associé à Lucien Pineau, à Pierre Lelong et Hubert Aublet.

– Pineau, Lucien : encore un Toulousain ! Né en 1913, ce représentant en matériaux de construction participe sur Panhard à plusieurs éditions du Mobil et du Caltex de 1959 à 1966, avec différents concurrents. Il remporte l’édition de 1964 du Mobil avec Parayre sur une 24 C.

– Robic, Jean : ce champion cycliste, vainqueur du Tour de France 1947. Il participe au Mobil de 1965 sur 24 B avec Pierre Lelong… et y remporte une victoire absolue. Pour la petite histoire, ce n’est pas le seul copureur qui se soit essayé aux concours d’économie puisqu’en 1961 Roger Rivière, alors âgé de 25 ans, s’était déjà essayé aux concours d’économie – mais avec moins de succès – au pilotage économique d’une Dauphine en compagnie de Pierre Grange.

Charly RAMPAL (Remerciements à Yann Lelay et Bernard Vermeylen pour leurs écrits – Photos : Archives Panhard)