LA TENUE DE ROUTE

L’étude de la tenue de route a mis en évidence l’importance de deux ordres de facteurs ; les uns, agissant sur les forces aérodynamiques perturbatrices en les réduisant, comme nous venons de le voir, par la recherche de formes très arrondies ; les autres exerçant leur action sur les forces mécaniques par une haute rigidité de la voiture, une parfaite tenue de la suspension en virage et une grande précision de l’épure de direction.

Il est indispensable que les roues soient reliées entre elles par une charpente n’introduisant, aucune déformation sensible en torsion. La démonstration de cette nécessité est facile à faire. Soulevons une roue arrière : le train pivote autour de la roue restée au sol, l’axe de la voiture est légèrement déporté latéralement.

Deux éventualités peuvent alors se produire.

Si le châssis ou la coque se tord, le déplacement de l’arrière entraîne, transversalement, celui du train avant ; une roue avance, l’autre recule, un virage est amorcé et l’on appelle cet incident une « embardée ».

C’est ainsi, bien souvent, que l’on entre dans le décor.

Mais si le châssis est hautement rigide en torsion, le soulèvement d’une roue arrière n’amène que le soulèvement de la roue avant correspondante, sans que la trajectoire soit perturbée.

Les roues ne doivent pas être influencées par les battements de la suspension.

Elles doivent monter et descendre toujours dans le même plan et retomber dans la même trace.

C’est pourquoi la précision de l’épure de direction présente une aussi grande importance ; en particulier, la biellette qui s’attelle sur le piton à boule de la fusée ne doit pas braquer la roue lorsque celle-ci se débat verticalement.

On retrouve l’influence de la rigidité en torsion du châssis dans la tenue de route en virage.

Sur la Dyna Z1, les roues sont indépendantes à l’avant et semi-indépendantes à l’arrière ; l’essieu cintré admet les petits déplacements, mais transmet à l’autre roue les mouvements de grande amplitude provenant, par exemple, de la force centrifuge qui couche la voiture dans un virage.

S’il n’y a pas de déformation de châssis, le train arrière peut servir de compensateur et tenir le train avant.

Ce besoin d’une liaison aussi étroite que possible des roues entre elles a d’ailleurs conduit les coureurs à préférer les suspensions dures.

Mais une confortable voiture de tourisme doit présenter les mêmes qualités de précision de direction et de stabilité de trajectoire avec une suspension douce et bien amortie. La solution, nous savons que c’est la rigidité en torsion.

Comment l’obtenir avec une construction qui doit être légère ?

UNE VOITURE EN TROIS PARTIES

Le châssis classique est très lourd ou trop déformable ; par contre, il offre l’avantage de permettre de modifier facilement le type de carrosserie.

La coque à revêtement travaillant répond mal à cette dernière exigence.

De plus, elle présente un point faible dans la zone où se débattent les roues avant, entre la partie rétrécie qui supporte le moteur et les parois latérales de l’habitacle.

Malgré de copieux, lourds et coûteux renforts, il se produit une torsion à cet endroit.

M. Bionier pensa alors que le maximum de rigidité pour le minimum de poids serait obtenu par une transmission aussi directe que possible de la charge aux roues ainsi que des réactions de ces roues entre elles.

D’où l’idée d’une mince plateforme, sorte de clé de voûte, disposée entre les roues avant et les roues arrière et recevant ultérieurement une carrosserie, laquelle ne sera plus qu’une enveloppe ne devant résister qu’à la pression de l’air et surtout aux efforts extra-fonctionnels.

Ce dispositif présente les mêmes avantages que le châssis qui permet de modifier facilement le type de carrosserie sans alourdir la construction.

On pourra, de la sorte, obtenir un cabriolet sport, dont les reprises seront au moins aussi brillantes que celles de la berline.

D’autre part, la réalisation d’un toit ouvrant, si souvent demandé, ne posera plus de problème constructif.

Ce dessin divise la voiture en trois parties bien distinctes, assemblées par onze boulons au total et seulement à la fin de la construction.

On trouve deux ensembles mécaniques :

— Le train avant (traction avant) avec le moteur, l’embrayage, la boîte de vitesses, le pont, la transmission, la suspension, les roues, tous les organes annexes et la traverse support, l’ensemble étant fixé par six boulons.

— Le train arrière avec la suspension, les freins, les roues et les organes annexes, l’ensemble fixé par cinq boulons.

— L’infrastructure surmontée de la caisse, réunissant l’ensemble de la tôlerie.

Cette carrosserie peut être complètement équipée, aménagée et peinte à part, puisque l’opération finale de montage des trains s’effectue de l’extérieur, toutes portes fermées et que les branchements des circuits électriques et du tableau de bord sont assurés avec des fiches spéciales à broches multiples.

Il résulte de ces dispositions que la longueur des chaînes de fabrication a pu être réduite de 200 in, ce qui permet de doubler les cadences de sortie pour une même surface d’ateliers.

D’autre part, en cas d’incident ou d’accident grave, le remplacement de l’un des ensembles mécaniques est simple et rapide sans que la réparation nécessite des démontages et des remontages inutiles des pièces et des tôleries environnantes, sans salir non plus l’intérieur de la voiture.

 Enfin, la concentration de la résistance dans le plancher permet d’avoir peu de matière à la partie supérieure, donc d’abaisser le centre de gravité, ce qui, joint à la disposition des sièges près du sol, réduit dans une très grande proportion les effets de la force centrifuge dans les virages, que l’on peut aborder, sans risque, à vive allure.

LA CONSTRUCTION DE L’INFRASTRUCTURE

La pièce essentielle de la Dyna Z1 est donc l’infrastructure qui, rappelons-le, doit être rigide, mince et légère avec un fond sans saillie.

Mesurant 1,880 m de long sur 1,560 rn de large, entièrement en alliage léger de la classe A-G5, elle est constituée d’une ossature tubulaire : deux- bases latérales hautes de 175 mm et trois traverses solidement encastrées, disposées respectivement entre les roues avant et les pieds du conducteur, sous la banquette avant et entre la banquette arrière et les roues arrière ; l’ensemble peut être comparé à un tronçon d’échelle.

Le fond est garni avec une tôle raidie par des ondulations transversales largement espacées, ce qui donne le minimum d’épaisseur à l’endroit des occupants.

Chaque base latérale est constituée de deux éléments longitudinaux accolés et soudés pour former un corps creux ; la partie intérieure, le longeron, en 25/10 mm, comporte les amorces des renforts des encadrements de portes et du pied milieu ; elle reçoit, au droit de la traverse avant, un long renfort triangulaire en 20/10 mm qui reporte sur une grande surface le moment de flexion dû surtout au porte-à-faux du moteur par rapport à l’axe des roues.

La partie extérieure emboutie, renfort de longeron, également en 25/10 mm, est soudée sur le longeron par son aile verticale en haut et son aile horizontale en bas.

Cette disposition particulière résulte du désir de ne pas placer, comme première fibre travaillante tendue, une partie métallique que le découpage mécanique aurait pu denteler, cause de déchirures ultérieures possibles.

La traverse avant est un tube de 135 mm de diamètre, cintré dans le plan horizontal pour dégager le milieu de la voiture.

Elle appartient au support moteur et est fixée, de chaque côté, par trois boulons sur la base latérale.

Ces boulons ne travaillent pas au cisaillement ; la pression qu’ils exercent est telle qu’il se produit un véritable embrayage des deux surfaces métalliques en contact, sans aucune possibilité de jeu.

La traverse centrale est un demi-tube en tôle roulée de 15, 10 mm d’épaisseur et 200 mm de diamètre, soudé par ses extrémités relevées sur les bases latérales et par ses génératrices sur la tôle plancher proprement dite.

Des renforts intérieurs d’embouts, se terminant en pointe, répartissent régulièrement les efforts.

Au droit des deux supports de glissière portant la banquette, on a disposé des cloisons intérieures de 6/10 mm d’épaisseur. La traverse arrière est une pièce très intéressante par sa technique constructive.

Elle se compose d’un tube filé de 110 mm de diamètre en 20/10 mm d’épaisseur, garni à ses extrémités de deux fourrures en tôle roulée de 20/10 mm taillées en bonnet d’évêque pour éviter un changement brutal de section et soudées par points sur le tube.

Ces fourrures assurent une transmission correcte des efforts entre les supports des bras de suspension des roues arrière, qui encastrent en outre les barres de torsion, et les longerons de l’infrastructure.

Au centre de la traverse, se trouvent les supports de l’articulation élastique de l’essieu coudé. Supports de bras et oreilles d’articulation sont soudés à l’argon sur la traverse.

Toutefois, il a fallu prendre certaines précautions pour éviter les déformations : dans ce but, on a adopté le principe des soudures compensées.

Aussi, les oreilles enserrent le tube, mais ne sont soudées que par des arcs égaux et diamétralement opposés.

Les supports de bras sont des coquilles embouties et leur ligne de soudage est équilibrée par la soudure de fermeture de la fourrure, disposée sur la génératrice opposée du tube traverse.

La traverse arrière, ainsi équipée, est enfilée et soudée sous argon sur chaque longeron ; puis la même opération est effectuée sur les renforts de longerons emboutis. L’infrastructure est complétée par le plancher des pédales, le plancher avant et le plancher intermédiaire avec le support de banquette ; deux bandes longitudinales nervurées sont soudées sous les planchers. Une infrastructure complète pèse 33,6 kg.

LE MONTAGE DE LA CAISSE

Le montage de la caisse comporte l’assemblage des différents éléments de la superstructure sur l’infrastructure.

On place d’abord, de chaque côté, l’encadrement des portes qui comprend les renforts supérieur, de pied milieu et inférieur arrière ; ces renforts en tôle mince permettent de fermer les profils et d’obtenir dans la superstructure des sections tubulaires à forte inertie. L’encadrement des portes est une grande pièce emboutie en A-G3 de 11/10 mm ; longue de 2,2 m, elle ne pèse que 3,6 kg.

Elle recouvre la partie inférieure de l’infrastructure au nu de la carrosserie ; n’étant qu’un habillage, elle intervient très peu dans la résistance des longerons.

La baie de pare-brise, avec ses renforts supérieur, inférieur et de montants, réunit les deux encadrements de porte et forme, avec la cloison de proue et la cloison d’habitacle, une traverse en caisson très résistante qui isole l’intérieur de la voiture du moteur.

La cloison d’habitacle reçoit le support de direction.

L’ensemble de cette partie avant pèse 8,9 kg. La poupe, ou partie arrière, se compose de la baie de lunette avec ses renforts supérieurs, inférieur et de montants, du plancher arrière avec le plancher du coffre, des passages de roues et leurs renforts, des côtés de poupe, de l’encadrement de malle, des bandeaux latéraux et de la tôle arrière formant traverse de poupe.

Cet important ensemble, qui ne pèse que 17 kg, est accroché en porte-à-faux sur les extrémités des longerons de l’infrastructure et sur les encadrements des portes arrière.

Une plage de lunette ferme la partie supérieure de cette poupe.

La superstructure reçoit ensuite le pavillon embouti d’une seule pièce en A-G5 de 12/10 mm (poids 5,4 kg).

Dans cet état, la caisse, prête à être livrée à la chaîne de garnissage, pèse 83 kg.

Elle est complétée par les portes, articulées l’une et l’autre sur chaque pied milieu et formées d’une paroi extérieure et d’un coffrage intérieur.

Ces portes, très larges, sont à glaces descendantes avec déflecteurs à l’avant, serrures de sécurité à rattrapage de jeu automatique, ouverture par poignées encastrées et verrouillage côté conducteur. Une porte avant, complètement équipée, pèse 9 kg ; une porte arrière 8,5 kg.

La proue, qui constitue le capot moteur et se lève d’une seule pièce, est articulée sur la cloison de proue ; elle se compose d’une partie centrale avec renforts et charnières, et deux flancs de proue, en A-G3 de 12/10 mm.

Il y a également deux passages de roues, une partie inférieure de proue, le pare-choc avec ses deux butoirs.

A l’arrière, on trouve le couvercle de malle avec ses renforts, supports et charnières, le pare-choc et ses deux crosses.

Le réservoir d’essence de 40 litres est encastré dans le plancher, derrière les passagers ; il est formé d’une coquille emboutie et d’un couvercle nervuré.

Avec la totalité de sa tôlerie, la caisse complète, en blanc, pèse 98,5 kg.

Une telle construction n’a été rendue possible que par une technique d’emboutissage et des procédés d’assemblage adaptés aux alliages d’aluminium et compatibles avec une production mécanisée.

LA TECHNIQUE D’EMBOUTISSAGE DES ALLIAGES LÉGERS

La question préjudicielle qui se posa tout au début de l’étude des carrosseries automobiles en tôle d’alliage d’aluminium, vers 1934, fut de savoir si le métal léger pouvait permettre d’obtenir de grandes pièces fortement embouties sur des presses mécaniques ou hydrauliques.

Une simple comparaison des caractéristiques de la tôle d’acier et de la tôle d’aluminium ou d’alliage léger conduisit d’abord à conclure à une impossibilité puisque l’on constatait une diminution de 50 % sur les allongements.

Mais si la théorie disait « non », la pratique répondait « oui ».

Depuis longtemps, on emboutissait l’aluminium et l’on produisait des pièces fort difficiles.

La raison de cette contradiction apparente, c’est que les critères usuels, allongement et indice d’Erichsen, n’enveloppent pas tout le problème de l’emboutissage qui, ne l’oublions pas, reste encore un art, c’est-à-dire renferme une forte proportion de phénomènes difficilement mesurables.

Pour les emboutisseurs d’acier, l’interprétation de ces critères est facilitée par plus de trente années d’expérience, ce qui leur permet de juger à l’avance, avec le maximum de certitude, les possibilités de réalisation d’une pièce en fonction de la qualité du métal.

Les emboutisseurs d’aluminium n’ont pas encore cette expérience ; mais ils savent qu’en jouant sur la plasticité particulière de l’aluminium — qui permet, en particulier, des rétreints impossibles avec l’acier — ils arrivent très souvent à d’aussi bons résultats, parfois même de meilleurs.

On peut citer une pièce d’automobile difficile à emboutir en acier inoxydable de 8/10 mm demandant des allongements de 35 %, qui nécessitait 15 mn de retouches de chaudronnage pour effacer les plis ; la même pièce en alliage aluminium-magnésium de 10/10 mm, n’ayant pourtant que 25 % d’allongement, a pu être emboutie mécaniquement sans retouche manuelle avec un simple recuit au chalumeau d’une durée de 5 mn…

Il ne s’agit donc pas de la simple transposition de méthodes connues, mais de la mise au point d’une technique nouvelle.

Ces travaux ont d’ailleurs débuté avec la première version de la Dyna qui posa, pour la première fois dans le monde, le problème de la construction en série d’une carrosserie automobile en métal léger.

Le choix de l’alliage est dicté par diverses considérations.

En premier lieu, les exigences de la fabrication en série interdisent pratiquement l’emploi des alliages à traitement thermique qui doivent être emboutis dans un très court laps de temps après la trempe (emboutissage sur trempe fraîche) ou, lorsqu’ils sont emboutis sur métal recuit, nécessitent, après trempe, une opération supplémentaire de calibrage.

De plus, les alliages à traitement thermique, s’ils permettent, sur le plan opératoire, la réparation des pièces fortement déformées, nécessiteraient, pour restituer aux pièces réparées leur résistance initiale, de leur faire subir un nouveau traitement thermique ultérieur, ce qui est impossible dans la grande majorité des cas.

Il convient donc de se tourner vers les alliages sans traitement thermique.

Parmi ceux-ci, le plus apte à satisfaire aux conditions imposées par la construction de carrosseries est l’alliage à 3 % de magnésium.

Cet alliage présente, en effet, des caractéristiques particulièrement intéressantes.

Si sa charge de rupture et sa limite élastique sont inférieures à celles de certains alliages à traitement thermique, elles s’établissent néanmoins à un niveau considérablement plus élevé que celui de l’aluminium ou de l’aluminium-manganèse, jadis utilisé dans les carrosseries de voitures de tourisme.

En outre, cet alliage, comme tous les alliages Al-Mg, est particulièrement sensible à l’écrouissage.

En d’autres termes, une faible déformation a pour effet d’augmenter très nettement sa limite élastique et, à un degré moindre, sa charge de rupture ; comme, d’autre part, l’allongement de rupture de cet alliage et son aptitude au rétreint lui permettent de réaliser à l’échelle industrielle les emboutis présentant des difficultés d’exécution analogues à ceux que l’on exécute en acier, l’A-G3 constitue un matériau de choix pour la fabrication de pièces de carrosserie automobile qui sortent des presses avec des degrés d’écrouissage pouvant atteindre des valeurs très élevées. L’expérience montre qu’en pratique, avec l’A-G3, il suffit de majorer de 20 % par rapport à l’acier l’épaisseur de la plupart des pièces pour obtenir la même tenue en service, tant en ce qui concerne la rigidité locale que la résistance aux vibrations.

Il semble opportun de signaler qu’au cours de ces dernières années l’aptitude de l’A-G3 à l’emboutissage a été accrue à la suite d’études qui ont porté, d’une part, sur le processus d’élaboration des tôles et, d’autre part, sur leur composition.

En ce qui concerne la mise en forme proprement dite, il est évident que chaque métal s’accommode mieux d’un dessin particulier.

C’est ainsi que, pour les alliages légers, les meilleurs résultats sont obtenus avec des formes suffisamment galbées ne comportant pas de grandes surfaces presque planes.

Ces conditions sont justement celles qu’impose aujourd’hui l’aérodynamisme aux carrosseries automobiles.

D’une façon générale, les emboutisseurs d’aluminium prennent soin de « balancer » leurs pièces de telle façon que le contact entre le poinçon et le flan s’établisse sur la plus grande surface possible ; cette remarque, vraie pour l’acier, est une obligation encore plus impérieuse pour les alliages légers.

Les outils doivent présenter un excellent état de surface.

L’emploi de flans plus grands, la réduction de la pression des serre-flans et une étude particulière de la ligne de ceux-ci permettent, par des glissements et des allongements conjugués, de nourrir les parties les plus déformées des pièces ; ces glissements sont freinés dans les autres parties par des bourrelets extérieurs de travail qui disparaissent au détourage.

Un préformage, constitué par une forme amortie, donne aussi d’excellents résultats pour les emboutissages présentant des protubérances marquées.

Nos photographies montrent aux spécialistes de l’emboutissage que les alliages légers fournissent d’aussi belles pièces que l’acier.

Les Usines Chausson, qui fabriquent la caisse de la Dyna Z1, ont effectué dans ce domaine difficile un remarquable travail de mise au point d’outillage. (Voir mes articles sur l’usine Chausson)

PROGRÈS SENSATIONNELS DU SOUDAGE PAR POINTS

Après avoir mis en forme les pièces, il faut les assembler, les réunir en sous-ensembles, infrastructure, proue, poupe, etc., puis effectuer le montage général.

Le soudage électrique par résistance répond aux exigences de la construction automobile : rapidité de travail et faible prix de revient.

Les machines modernes de soudage par points permettent, en effet, d’obtenir une haute cadence de production et un faible encrassage des électrodes.

Deux qualités complémentaires doivent, en outre, être recherchées pour les postes à pinces utilisés sur les chaînes de montage pour les parties inaccessibles aux machines fixes : un faible poids et une grande maniabilité, l’une étant en partie la conséquence de l’autre.

Or, il faut bien reconnaître que le matériel mobile était pratiquement inexistant il y a quelques années.

On avait atteint ce stade où la réalisation de sous-ensembles était relativement aisée alors que leur assemblage l’un à l’autre était irréalisable en soudage par points.

Le mérite des constructeurs français de machines à souder, Sciaky et Languepin, a été de s’attaquer à ce problème et de proposer des solutions remarquables, mais dont il faut retenir quelques caractéristiques dominantes.

En ce qui concerne les équipements fixes, les machines triphasées présentent des avantages nombreux sur les machines à accumulation utilisées jusqu’alors ; en particulier, elles donnent des cadences d’encrassage qui, à décapage égal, atteignent dix fois les cadences antérieures et cela pour des vitesses de soudage de l’ordre de 80 à 100 points à la minute.

Pour le matériel mobile, la solution proposée est une pince-transformateur monophasée à contrôle électronique ; son encombrement et son poids sont réduits.

Cette disposition dispense de câbles secondaires lourds, dont les réactions électromagnétiques sont toujours importantes ; les câbles primaires qui arrivent à la pince-transformateur sont, au contraire, de très faible section, ce qui accroit la maniabilité du matériel et évite toute réaction parasite.

Une pince-transformateur destinée à souder 1,2 + 1,2 mm sur la carrosserie pèse 40 kg environ; celle qui soude, par exemple, la partie inférieure des longerons d’infrastructure et dont la capacité est de 2,5 + 2,5 + 1,1 mm, soit plus de 6 mm au total, ne pèse que 60 kg.

Là encore, on a recherché une cadence de soudage atteignant 60 points à la minute, sans que cela soit préjudiciable au bon comportement des pointes d’électrodes dont l’encrassage demeure faible.

Des machines à points multiples, analogues dans leur principe à celles qui sont utilisées en construction acier, ont été mises au point pour le soudage par points simultanés, les pièces étant préalablement disposées dans un montage ; l’application la plus importante de ces machines à points multiples consiste à assembler entre eux les panneaux intérieurs et extérieurs des portes.

Enfin, le soudage entre « carotte pneumatique » et sommier a également fait l’objet d’études qui ont été suivies de la réalisation d’un montage permettant de souder sans les déplacer les trois éléments emboutis constituant l’ensemble de la proue.

Signalons au passage que l’assemblage de la Dyna Z1 se caractérise par une importante diminution du nombre des points par rapport à la construction normale des caisses en acier.

 On ne compte au total que 3 000 points de soudage contre plus de 7 000…

Ce résultat est dû à une étude méticuleuse de la structure qui a conduit à réduire le nombre de pièces, donc le nombre de points d’assemblage ; de plus, les points, placés aux endroits nécessaires, n’ont pas été multipliés inutilement.

La parfaite tenue de cette construction a été longuement éprouvée sur le banc d’essais d’endurance à secousses, et sur la route.

Enfin, restent les assemblages qui ne doivent pas, ou qui ne peuvent pas être réalisés par soudage par résistance ; il faut alors utiliser un procédé de soudage par fusion rapide, ne donnant que peu de déformations et qui ne soit pas assujetti à certaines conditions restrictives, comme les flux décapants en imposaient autrefois aux chalumeaux.

Le soudage à l’arc sous atmosphère d’argon, maintenant bien connu en France, répond à ces conditions; son aptitude à réaliser des cordons de soudure en toutes positions en fait un auxiliaire très précieux.

Nous avons présenté son emploi pour la traverse arrière.

Une expérimentation avec des strain-gauges, par la connaissance des taux de travail réels de la matière dans de nombreuses sections, a permis d’obtenir une déformation générale homogène de la structure.

Ce résultat a été atteint parfois par l’augmentation de certaines épaisseurs, le plus souvent par leur réduction ainsi que par la recherche d’une bonne diffusion des efforts. Ainsi, à un certain endroit, un renfort court et épais a été remplacé par un autre long et plus mince, évitant une localisation des contraintes, ce qui a augmenté paradoxalement la résistance au moyen d’un allégement.

ASTUCE FIXATION PARE-BRISE L’étanchéité du pare-brise et de la lunette est assurée par l’emploi d’un profilé creux en caoutchouc dans lequel se loge la glace de sécurité ; ce profilé est collé dans un logement prévu sur la carrosserie ; la pression nécessaire à l’adhérence est obtenue par une aiguille hypodermique à travers laquelle on injecte de l’air dans le profilé qui se gonfle, appuie sur son montage et remplit exactement la forme du logement

DES SOLUTIONS SIMPLES A DES PROBLÈMES PRATIQUES

Sur la Dyna Z1, on s’est efforcé d’apporter des solutions simples a tous les problèmes pratiques que posent l’usage, l’entretien et la réparation d’une voiture.

C’est ainsi que des emplacements latéraux pour le cric permettent un changement de roue rapide et propre.

La conception de la jante à oreilles évite, en outre, le démontage de l’enjoliveur qui reste sur le moyeu. La proue se lève d’un bloc, dégageant complètement tous les organes mécaniques qui se présentent à portée de la main.

Eclairage automatique du moteur et du compartiment à bagages, celui-ci très spacieux puisqu’il peut contenir trois grandes valises.

Toutes les commandes et appareils de bord ont été réunis sur le support de volant fixé sur la cloison avant.

Le tableau de bord complet, avec indicateur de vitesse, le compteur bi-totaliseur, l’ampèremètre, les indicateurs de pression d’huile et de niveau d’essence, se monte de l’extérieur avec un seul branchement électrique à fiches multiples.

Le support de volant reçoit également la commande de la boite de vitesses, celles des avertisseurs de ville et de route, des phares, des indicateurs de virage, le frein à main, le robinet de batterie, le contact, le démarreur, le starter, l’antivol.

Des contacts basculants contrôlent les phares de stationnement, l’antibrouillard, le phare de recul, l’éclairage du tableau de bord, le lecteur de carte, le dégivreur, les essuie-glaces et les lave-glaces.

On trouve également le réglage du dispositif de chauffage.

Les feux clignotants de signalisation de direction ont été disposés sur la ceinture de la voiture et doublés, le premier se trouvant au niveau de la cloison de proue et le second, sur la poupe, après la porte arrière.

Cette disposition accroît la sécurité, car si un conducteur double et dépasse le signal arrière, le signal avant est alors pleinement visible.

Ces feux clignotants sont combinés avec un témoin sonore qui rappelle leur mise en fonctionnement.

Tout cet ensemble de dispositifs conduit à des circuits fort complexes.

On sait combien l’équipement électrique d’une voiture est, en général, délicat et peut réserver des désagréables et coûteuses surprises parce que trop souvent traité en parent pauvre.

Les créateurs de la Dyna Z1 ont repensé également ce problème.

Ils ont d’abord cherché à éliminer tous les incidents qui pourraient survenir du fait de courts-circuits ; dans ce but, la presque totalité des câbles conducteurs sont placés à l’extérieur de la voiture, hors du contact des matières combustibles ; seuls les fils alimentant les deux plafonniers passent à l’intérieur des pieds-milieu.

Les jonctions se font sur un tableau de distribution disposé sur le côté gauche de la cloison de proue au moyen de fiches en caoutchouc à broches multiples, maintenues en place par des crochets de sécurité.

Chaque fiche correspond à un circuit spécialisé ; on trouve le circuit du tableau de bord ; celui des essuie-glaces dont le moteur est fixé sur un panneau accroché par deux clips sur la cloison de proue ce qui rend son démontage facile de l’extérieur ; celui de la proue avec les lanternes, codes et phares (l’enlèvement des deux axes d’articulation, le débranchement de la fiche de contacts et tout l’ensemble avant se sépare de la voiture); celui de la poupe avec les deux stops, le phare de recul, l’éclairage de la plaque de police, les feux de signalisation, l’éclairage du coffre.

Le poste de T.S.F. se monte et se branche de la même façon.

On conçoit combien une telle disposition systématique peut rendre les réparations plus rapides et moins coûteuses.

Ajoutons que la cloison avant, sans saillie, largement arrondie, est rembourrée par un garnissage de caoutchouc formant amortisseur de choc afin de réduire les conséquences des collisions pour les occupants.

La dernière conquête, et non la moindre, des ingénieurs de Panhard a été le silence.

L’emploi de cames de distribution à levée progressive, la suppression des jeux de distribution par des poussoirs en alliage léger, le nouveau montage élastique du moteur qui augmente la souplesse des attaches tout en limitant le balancement, l’utilisation d’un double pot d’échappement ont permis de réduire les bruits, notamment aux bas régimes.

D’autre part, la caisse est bien isolée des diverses sources de bruit par le montage sur caoutchouc de toutes les articulations qui pourraient servir de cheminement aux vibrations.

Une exploration au magnétophone a montré que seuls subsistaient les bruits qui, suivant les parois de la caisse, montaient et se rassemblaient à la partie supérieure de la voiture comme dans le cerveau d’une cloche.

Le pavillon, par sa forme incurvée, joue alors le rôle de réflecteur et renvoie les bruits directement sur la tête des occupants.

Pour que cette réflexion intempestive soit complètement arrêtée, une couche de 20 mm de fibre de verre bakélisée a été collée contre le pavillon.

Le résultat a été de baisser de 12 décibels le niveau sonore de l’intérieur de la voiture, pourtant déjà peu élevé.

Une des conséquences du silence de la Dyna Z1 a été de changer complètement l’appréciation des vitesses.

L’excellente tenue de route, la précision de la direction, l’absence de sifflements de l’air coulant sans se déchirer font que l’on va très vite sans s’en rendre compte.

UNE VOITURE INTELLIGENTE

L’impression qui se dégage à la fin de cette étude, c’est que la Dyna Z1 est une voiture « intelligente », conçue en dehors des routines et des modes, en ne tenant compte que des réalités physiques qui, elles, sont impérieuses et éternelles.

Elle marquera sûrement une époque de la construction automobile.

Heureux — mais non étonnés — qu’elle comporte tant d’alliages légers, car cela aussi est inscrit dans le destin des choses.

M. Paul Panhard et ses collaborateurs sont à féliciter d’avoir montré qu’en France, on était capable de faire très simplement du beau et utile travail.

Charly  RAMPAL pour le montage à partir du texte adapté de Maurice Victor