LES ALLIAGES D’ALU CHEZ PANHARD
Si l’automobile a pu devenir accessible au grand public en dépit de sa grande complexité, elle le doit principalement à l’extraordinaire évolution de ses techniques de fabrication, mais aussi à une constante amélioration des caractéristiques des matériaux auxquels elle fait appel et à leur utilisation rationnelle.
Si les deux impératifs de base de la construction automobile restent la meilleure qualité et le bas prix de revient, nul doute que ces deux préoccupations apparemment contradictoires posent de nombreux problèmes difficiles à concilier dans le choix d’un bon matériel.
Panhard, toujours à l’avant-garde, a su trouver la place à ces matériaux en fonction de leurs qualités intrinsèques malgré souvent un prix de revient élevé et des avantages pratiques réels qu’ils apportent dans le fonctionnement des voitures.
Chez Panhard, les alliages d’aluminium ont occupé sans conteste une place importante.
D’une manière générale, que peuvent offrir les alliages d’aluminium à l’automobile ? Principalement :
• La légèreté
• Des propriétés physiques particulières
• La facilité de mise en œuvre
On a souvent mis l’accent sur la première de ces qualités, c’est à dire : la légèreté.
Certes, les alliages d’aluminium permettent de réaliser des gains de poids considérables partout où ils sont utilisés.
Après la guerre, Panhard, soucieux de la performance et de l’économie, a vite compris l’intérêt de ces alliages surtout au regard des travaux réalisés dans le passé par l’aluminium français Grégoire (AFG) où l’emploi des alliages d’aluminium était poussé au maximum.
Panhard, comme on le sait, réalisa les Dyna dont la caisse autoporteuse en aluminium atteignait 28% du poids total de la voiture !
Des études ont montrées que l’on pouvait aller plus loin encore dans le cadre des possibilités techniques pour atteindre plus de 42% du poids de la voiture (Dyna Z1).
Des calculs très serrés ont permis d’ailleurs de chiffrer avec une approximation suffisante le coût supplémentaire de l’opération et de montrer que celui-ci diminuait lorsque le pourcentage d’aluminium augmentait.
Ceci résulte en fait de « l’allègement secondaire » répercuté sur les différents organes de la voiture tel que : le moteur, tous les carters, les liaisons de suspensions, les tambours, les étriers de freins, la carrosserie toute entière, les pare-chocs, les moulures de décoration, etc…
Par quoi se traduit un allègement poussé aussi loin ?
D’abord par un accroissement des prix de revient. Mais en contrepartie, on a une économie substantielle de consommation, en même temps qu’une réduction de l’usure des pneus et des freins, une meilleure tenue de route et des performances élevées. Tout ceci pour le bonheur de l’usager.
L’opération à première vue semble payante et Panhard privilégiant l’usager si engagea.
Certes, sur le plan technique, il n’existe pratiquement aucune difficulté majeure pour construire une voiture contenant le maximum d’aluminium.
Sur le plan commercial, par contre, les difficultés sont sérieuses. Dans un marché aussi concurrentiel que celui de l’automobile, un constructeur qui sortirait, dans une catégorie déterminée, un modèle plus coûteux que ses concurrents, se heurterait à des déboires financiers, car l’expérience de Panhard l’a prouvé, les clients en grosse majorité sont insensibles à l’argumentation de l’économie à terme et que le prix d’achat immédiat compatit seul, en particulier pour les voitures de grande diffusion.
Seuls les puristes ont reconnu, dans la Dyna, le bien fondé de cette opération.
Ainsi, les applications des alliages d’aluminium qui sont vraiment intéressants sont celles qui sont obtenues sans augmentation de prix : l’alliage étant alors « donné » par-dessus le marché !
C’est ainsi que Panhard fit marche arrière en diminuant progressivement l’emploi des alliages d’aluminium pour les carrosseries (Dyna Z6), puis la PL17, pour arriver enfin, mais trop tard ( ?) à la 24 où les tôles et profilés sont relativement peu nombreux, mais où, par contre, les pièces de fonderie, par exemple, occupent une grande place.
On trouve les carters d’embrayage, les boites de vitesses, les boitiers de direction, les éléments arrière de suspension, bloc moteur, pistons, freins à tambours, étriers de freins : beaucoup survivant de la Dyna.
Ces applications, dont certaines sont très anciennes, ont toutes été rendues possibles grâce au progrès réalisés sur le plan de la fonderie et de l’usinage.
La fonderie sous pression permet d’obtenir des pièces brutes de fonderie plus précises encore et plus légères, à résistance souvent supérieures et surtout, nécessitant bien moins d’usinages, donc d’installations d’outillages.
Ces progrès ont permis de diminuer le prix de revient certes, mais aussi d’entrevoir la possibilité de réaliser des pièces plus volumineuses.
Le bloc cylindre est certainement l’application la plus importante où les propriétés inhérentes à l’aluminium ont joué un grand rôle.
Sur le plan de la fabrication, il a permis l’utilisation du moulage sous pression.
Sur le plan technique, les propriétés physiques de l’aluminium, notamment sa grande diffusivité thermique qui permet d’éviter les concentrations de chaleur, causes de déformations, tandis qu’une bonne conductibilité jointe à un coefficient de convention élevé contribuent à accélérer le refroidissement général du moteur et de l’huile en particulier.
Les essais sur route ont prouvé une baisse de température de 15° à 18° par rapport à un moteur correspondant en fonte.
Signalons également que le bloc cylindre en aluminium apporte par-dessus le marché un allègement substantiel de 65% par rapport au bloc semblable en fonte obtenu par les procédés les plus modernes de fonderie.
Cet abaissement de la température permet un accroissement du rendement, une meilleure tenue de route à pleine charge.
Au niveau des tambours de freins, Panhard a atteint la perfection par le procédé Al-Fin, étudié dans la rubrique « Technique » du Panhard Racing Team.
Le type retenu par Panhard est appelé « roues-tambours ». Il constitue une excellente solution pour conserver de bonnes conditions de freinage à chaud.
Mais Panhard est allé plus loin avec la solution appelée « moyeu-Tambours », constituée d’une pièce d’aluminium toujours, avec piste de frottement en fonte donnant des résultats exceptionnels en supprimant complètement le phénomène d’évanouissement (fading).
Sur le plan technique, le tambour en aluminium apporte des avantages indiscutables, en plus d’un allègement substantiel tant souhaité pour une pièce non suspendue.
Le bilan de l’opération marque un accroissement de prix sensible dans le cas d’un tambour moulé en coquille (Al-Fin), mais combien compensé largement par son efficacité.
Charly RAMPAL