Tous les panhardistes connaissent les débuts de Panhard et Levassor en tant que créateur de la première voiture vendue en série à partir du moteur Daimler sorti de chez Panhard & Levassor en 1889 et qui va équiper la première voiture automobile Panhard & Levassor présentée en 1890.

Très vite la production d’automobile devient le fil rouge de la Maison, mais pas uniquement.

La politique de la maison Panhard & Levassor menée par le Conseil d’administration entre 1900 et 1914 consiste à développer un réseau commercial en France et souhaite diversifier les produits (sport, tourisme, utilitaires, bateaux, aérostation).

C’est ainsi qu’en 1901, Krebs crée un moteur puissant et léger (40 ch, 120 kg) qui est monté sur un dirigeable : c’est le premier moteur « aérien » de la Société.

Domaine dans lequel la Maison Panhard & Levassor, grâce à ses moteurs, va largement contribuer aux progrès de cette façon de se déplacer dans les airs et que peu de personnes s’en souviennent.

LES DIRIGEABLES « LEBAUDY »

Le travail de Krebs sur les moteurs aériens a débuté dès 1883 et s’est terminé en 1916 par la mise au point d’un moteur V12 de 350 ch (le V12 J) récompensé puisque les moteurs Panhard & Levassor équipent la plupart des dirigeables militaires à partir de 1906.

Premiers aéronefs militaires de la France, les dirigeables Lebaudy sont propulsés par des moteurs Panhard & Levassor de forte puissance (70 ch dès 1904).

Financé par les frères Pierre et Paul Lebaudy, à la tête de la plus grande industrie de raffinage de sucre française, construit par l’ingénieur Henri Julliot, le Lebaudy I (56,50 mètres de longueur) effectue ses premiers essais dès novembre 1902.

Il est offert à l’armée en décembre 1905. La machine effectue son premier vol en novembre 1906, motorisée par un 4-cyl Daimler de 40 ch dont la puissance a été portée à 50 ch.

Les quatre cylindres sont venus de fonderie par groupe de deux. Refroidi grâce à une circulation d’eau par thermosiphon, le moteur pèse 205 kg et tourne à 200 tours. L’Allumage se fait par une magnéto basse tension, une bobine se self-induction et deux électrodes disposées à l’intérieur de la chambre d’explosion des cylindres.

Le cycle d’allumage (quatre temps) est animé par la rotation de l’arbre (vilebrequin) agissant via une came qui écarte les deux électrodes l’une de l’autre, ce qui produit une étincelle de courant disruptif.

« LA PATRIE »

En février 1906, l’armée commande au même constructeur un second dirigeable (61 mètres de long) baptisé La Patrie.

Propulsée par un 4-cyl Panhard-Levassor 4 M de 70 ch , issu de la voiture de course qui a remporté Paris-Vienne,

la machine effectue son premier vol en novembre 1906. Le moteur dont les cylindres forment avec leur chemise à eau un bloc venu de fonderie pèse 190 kg et tourne à 400 tours.

Les deux soupapes par cylindre (admission et échappement) sont commandées par des cames et poussoirs disposés de chaque côté du bloc.

Cette machine se perd dans la mer d’Irlande le 30 novembre 1907.

« LA REPUBLIQUE »

Commandé à la même équipe, l’ingénieur Julliot et son mécanicien Georges Juchmès, La République reprend le dessin de La Patrie propulsé par le même moteur 4 M de 70 ch.

La machine effectue son premier vol à Moisson (Yvelines) le 24 juin 1908.

La machine acquiert rapidement une grande popularité.

Le 14 juillet 1909, le République participe aux festivités du 14 juillet en défilant au-dessus des troupes à Paris à Longchamp.

Le 4 août1909, commandé par un équipage formé du commandant Bois avec pour pilote le commandant Fleuri, le dirigeable remporte le prix Deutsch de la Meurthe (10 000 francs) offert au premier appareil aérien automobile capable d’accomplir autour de Paris un circuit de 200 km (Chalais-Meudon, Saint-Germain, Senlis, Meaux, Melun).

Malheureusement, le 25 septembre 1909, jour de l’ouverture au Grand Palais à Paris du 1er salon de la locomotion aérienne, le dirigeable s’écrase au sol au-dessus d’Avrilly près de Moulins (Allier) à la suite de la perte d’une pale d’hélice (métallique) venue crever l’enveloppe alors qu’il regagnait Chalais-Meudon, tuant son équipage, l’adjudant Réau, l’adjudant Vincenot, le lieutenant Chauré et le capitaine Marchal.

Ces quatre noms seront attribués à des dirigeables militaires, selon une pratique en vigueur dans la marine.

Cette catastrophe fait une mauvaise publicité à la société Panhard & Levassor dont le Conseil d’administration décide, sur proposition de Krebs, de faire don à l’armée d’un nouveau moteur.

« LA LIBERTE »

Aussitôt après la perte du République, les frères Lebaudy offrent à l’armée son « sister ship », baptisé La Liberté, un grand dirigeable (65 mètres de longueur) propulsé par un moteur Panhard & Levassor 4 M de 120 ch. La machine effectue son premier périple le 27 août 1909.

Son moteur Panhard & Levassor est un 4 M est de la troisième génération, avec des cylindres en acier, des chemises en cuivre rouge soudées, une culasse en fonte.

Le circuit d’eau traverse une partie étanche du carter inférieur pour venir refroidir l’huile du moteur.

Les dirigeables Lebaudy et Astra suivants utilisent la même technique.

« LA RUSSIE »

Du même type que La Patrie et La République, La Russie (61 mètres de longueur) est commandé à Lebaudy par le tsar Nicolas II en 1908.

Propulsé par un moteur Panhard & Levassor 4 M de 70 ch, le dirigeable effectue à Moisson son premier vol le 29 mai 1909 avec un équipage de sept hommes.

Après ses essais de réception en France à Moisson en juin, la machine est convoyée à Saint-Pétersbourg en Russie. Il sert à l’instruction des aérostiers russes.

Un nouveau moteur de 125 ch est créé en 1909.

« LE MORNING-POST »

Le dirigeable Morning-Post commandé en juillet 1909 aux frères Lebaudy par le journal britannique, à la suite d’une souscription auprès de ses lecteurs, est propulsé par deux moteurs Panhard & Levassor 4 M de 70 ch de troisième génération.

Avec une longueur de 103 mètres et une enveloppe de 10 000 mètres cubes, il est à ce moment le plus grand dirigeable fabriqué en France.

Seule l’Allemagne (Zeppelin) a fait mieux dans le monde. Le monstrueux croiseur du ciel effectue sa première ascension dans l’air le 14 septembre 1910 à Moisson.

Au cours de son 5ème vol, il gagne Adelshot en Angleterre, le 26 novembre 1910.

Après plusieurs sorties couronnées de succès, il est détruit dans un crash provoqué par Louis Capazza, son pilote, les équipiers au sol ayant laissé filer les guideropes.

« LE CAPITAINE MARCHAL »

Offert à l’armée française par les frères Lebaudy, le dirigeable est un croiseur aérien de 85 mètres de longueur naviguant dans le ciel à près de 45 km/h, grâce à la puissance de ses deux moteurs Panhard & Levassor 4 M de 70 ch placés de part et d’autre d’une nacelle en tubes métalliques d’une vingtaine de mètres de longueur et capable d’héberger une dizaine d’hommes à ses deux extrémités. Au moment de sa mise en service, il est le seul engin volant capable de déposer des bombes à 300 km des frontières.

Les moteurs et leurs rechanges sont offerts par l’industriel parisien à l’armée.

Le dirigeable qui effectue son premier vol à Moisson le 24 mars 1911 est d’un dessin semblable au Morning-Post, mais homothétiquement plus petit.

Utilisé par le Génie en août 1914, il est vite retiré du service, les artilleurs français ayant tendance à tirer sur tout ce qui ressemble à un dirigeable, spécialité allemande.

« LE LIEUTENANT-SELLE-DE-BEAUCHAMP »

D’un dessin comparable au Capitaine-Marchal, le Lieutenant-Selle-de-Beauchamp, long de 89 mètres, cube 10 000 m3 comme le Morning-Post, de manière à pouvoir emporter 300 kg de bombes sur l’Allemagne avec cinq hommes de bord.

La Troisième République veut reprendre l’Alsace et la Lorraine.

La nacelle est d’un type différent, le lest disposé latéralement, les réservoirs d’essence montés sous la nacelle.

Propulsée par deux moteurs Panhard & Levassor de 80 ch, la lourde machine effectue son premier vol le 29 octobre 1911 à Moisson avant de rejoindre l’armée.

Son destin est semblable à celui du Capitaine-Marchal.

TABLEAU RECAPITULATIF DES DIRIGEABLES LEBAUDY A MOTEURS PANHARD ET LEVASSOR

Charly RAMPAL (Informations et Documentation Musée de l’Air et de l’Espace. Photos des journaux cités en légende)

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