Souvenez-vous : « un derrick en plein Paris » !

C’est à travers ce slogan publicitaire que les médias du milieu des années cinquante annonçaient l’arrivée des Taxis Dyna Panhard à la Compagnie Française des Automobiles de Place dont le Siège se situait 2 Place Collange à Levallois-Perret.

UN PEU D’HISTOIRE

L’histoire des taxis commence au tout début de l’ère de l’automobile et Panhard y participât.

Le premier concours de fiacre automobile, dont le nom de fiacre (ancien nom des taxis) vient de la rue St Fiacre où ils étaient stationnés, eu lieu en juin 1898.

Il faut dire que le nombre de véhicules électriques engagés était plus important que le nombre de véhicules à pétrole et la société Panhard et Levassor y avait inscrit 5 véhicules.

Mais personne ne sait si les véhicules furent au départ, car aucun ne figure au classement à l’arrivée.

En 1908, le championnat du monde des taxis est organisé à Paris et Panhard sera présent par l’intermédiaire de M. Hervet qui se classe 4ème sur une 8 HP.

Des constructeurs français utiliseront des éléments mécaniques Panhard pour réaliser des taxis, comme la marque Sorex (marque crée par Mrs Lacoste et Blattman), qui utiliseront des boites de vitesses et des différentiels qui seront accouplés à des moteurs Gnome 10-12 HP.

Ces véhicules seront présentés pour la première fois à Londres le 27 octobre 1906.

La plupart des véhicules Panhard qui seront utilisés comme taxis au début du 20ème siècle, seront équipés des moteurs 2 cylindres 8 HP ou 2 cylindres 9 – 11 HP comme ceux qui seront utilisés par la Compagnie Générale de Voiture Automobile qui aura jusqu’à 60 véhicules en 1910.

Par la suite, Panhard s’étant orienté vers les grosses voitures et les voutures de luxe, les Panhard ne seront plus utilisées pour faire des taxis, car elles étaient trop chères à l’achat et à l’entretien.

Il faudra attendre le Salon 1952 pour voir à nouveau la société Panhard proposer des taxis qui seront réalisés à partir d’un break Dyna X, muni d’une glace de séparation chauffeur et équipée de 5 portes.

Hélas, les critères de sélection ne seront pas favorable : trop cher, trop exigus et trop fragile.

Mais c’est l’arrivée de la Dyna Z qui obtiendra tous les suffrages grâce à sa facilité d’utilisation et surtout par le volume de son habitacle par rapport à sa cylindrée.

LA DYNA Z « TAXI » RECUEILLE TOUS LES SUFFRAGES

Le premier prototype aménagé façon « Taxi » sera présenté au Salon 1954 :

La Dyna Z utilisée en version Taxi, est une berline de série sur laquelle quelques aménagements seront nécessaires comme nous allons le voir et que je vous ai compilé à partir du dossier de documents que j’avais rassemblés et issus des archives Panhard, toujours par un souci de vérité historique.

Les Dyna Z seront utilisées par les Compagnies G7 et G2 du fait de leur faible consommation de carburant (6 L aux 100 km) : 1700 voitures seront ainsi équipées en version taxis.

C’est sur cet argument de sobriété légendaire des Dyna Z vis-à-vis des Ford Vedette, Tractions Citroën ou Frégate Renault qui consommaient 2 fois plus, que la marque de la Porte d’Ivry l’emporta.

DES TESTS DES PLUS PROBANTS

Les choses sérieuses commencèrent au cours du 2ème trimestre de 1955 où 10 Dyna Z1 furent testées comme prototypes sur 30.000 à 35.000 km et mise en situation : en voici quelques photos.

Des modifications de carrosserie et de mécanique importantes seront apportées comme :

  • Rapport de pont 11 / 84
  • Bute d’embrayage à billes
  • Carburateur Solex à simple corps
  • Etc…

Satisfait de ces premiers essais, la Compagnie entreprit en novembre 1955 de passer à la Dyna mixte, acier/alu, pour équiper, début 56 ses 5 garages parisiens : 100 voitures par garage, pour arriver dans le courant de l’année à un total de 1.000 voitures.

La commande fut passée le 15 décembre et le 10 janvier commencèrent les réalisations au rythme de 8 voitures par jour ouvrable (au lieu des 10 prévues initialement).

La voitures sera livrée en bicolore noir et bordeaux, référence :

  • Noir : brillant Duco
  • Rouge autoplace Duco DL 19.669.

LES CONDITIONS GENERALES

Une remise de 30 à 35% sur les pièces détachées sera accordée.

La garantie sera établie sur les chiffres suivants :

  • Les Dyna en service font environ 4.000 km par mois en roulant 6 jours par semaine, c’est-à-dire sans conducteur de remplacement pour le 7ème jour, de ce fait, les voitures feront au moins 25.000 km en 6 mois.
  • Chaque garage disposera de 2 séries d’ensemble divers, moteurs, B.V. / pont, etc… soit 10 séries en tout.

Deux prototypes seront préparés, équipés d’un carburateur Solex sans pompe de reprise, l’une d’un pont de 10/24 et l’autre d’un 11/24.

Ils rouleront à partir du 25 novembre.

Les conducteurs ne seront pas prévenus de l’absence de ces éléments de reprise : la Compagnie ayant constaté que la suppression de cet organe sur les Citroën ont fait descendre leur consommation en dessous de celle des 203 alors qu’elle était supérieure auparavant.

La différence de comportement de la voiture à l’accélération n’étant pas bien sensible.

Suite au constat très positif, le contrat fut signé et la Dyna G7 apparait avec les transformations suivantes :

  • Batterie Fulmen 12 volts – 60 Amp S 405.
  • Mise en place des romaines de fixation de la séparation, par la Société Chausson.
  • Mise en place sur la porte AVG d’un rétroviseur CIPA type 1817 CE.o
  • Pas de poignée au couvercle de coffre AR : l’ouverture se faisant par une tirette sous le siège du chauffeur.
  • Plafonniers livrés en vrac avec fils à la longueur permettant de les disposer comme suit :
  • Un en avant et au centre de la séparation.
  • Un en arrière et au centre de la séparation.

Le premier sera contrôlé par son propre interrupteur.

Le second sera contrôlé par un interrupteur supplémentaire (fourni par la Compagnie) et disposé en avant de la séparation de façon à être manœuvré seulement par le chauffeur.

Ce plafonnier conservera naturellement son propre interrupteur qui restera en position « allumage ».

Les branchements seront faits par la Compagnie après montage de la séparation.

Autres éléments :

  • Le réservoir d’essence :
  • Aucune jauge électrique
  • L’orifice de jaugeage, à la jauge rectiligne, sera disposé dans le fond.
  • Du puits de la jauge électrique, à la place de celle-ci, il sera : prolongé par un tube guide-jauge et obturé par un bouchon vissé ne dépassant pas le plan horizontal tangent aux bords du puits de façon à ne pas être accroché par un colis glissé dans le coffre arrière au-dessus du réservoir.
  • Commande de clef du couvercle de goulotte de remplissage du réservoir d’essence, remplacé par un petit bouton fixé sur l’orifice de la serrure (par P.L.).
  • Pneus : des Michelin X 145 x 400 au lieu des 145 x 400 ordinaires noirs.
  • Charnières permettant d’augmenter l’ouverture des portes avec un système d’arrêt immobilisant celles-ci en différentes positions.
  • Modification de la tôlerie destinée à faciliter le montage de la commande du compteur taximètre.
  • Coffre AR : commande de son ouverture par tirette à manette disposée à portée du conducteur assis à sa place.
  • Taximètre et horodateur : les supports de ces appareils seront fournis, à peindre et à monter : taximètre à gauche et horodateur à droite.
  • Sièges et garnitures : en plastique monocolore. Cordonal C1 gris marbré, coloris 563. Du Nash au pavillon. Ils sont du type « Nosag » à pression répartie, comportant une couche de Dunlopilo.
  • Le siège AV : de série, 2 fois 3 plis de 60 millimètres sur le siège, pas de plis au dossiers et décor piqué.
  • Le siège AR : dossier de série, siège moins profond de 40 mm que celui de série de façon à augmenter l’accessibilité. 2 fois 3 plis de 60 mm. Pas de plis au dossier et décor piqué.
  • Siège AV réglable par levier.
  • Pochette à papier de circulation de 25 cm de longueur (rapporté sur la porte AVG ).

LE TABLEAU DE BORD

LES PANHARD DEMANDE UNE CONDUITE APPROPRIEE

Mais Panhard n’y trouve pas son compte, car les chauffeurs de Taxi ne sont pas des tendres au volant de leurs voitures, plutôt style routiers !

Et les Dyna qui demandent des gants de velours et une écoute de la mécanique de tous les instants et qui ne supporte pas l’à peu près, ne pourra rien contre cette habitude prise  à des mécaniques rustiques : elle va être fatale à nos Panhard.

Ainsi, la succursale Panhard de la rue de la Tour du Pin ne chôme pas et les révisions aux 500 km particulièrement complète, embouteillent le garage.

Puis ce sera au titre de la garantie que de nouveau, un flux ininterrompu de Dyna se présentera.

On commence à déceler la fragilité des boites de vitesses, tout comme les plans de joints des cylindres !

La mauvaise réputation des Panhard commence à faire le tour de la région parisienne, une réputation tenace qui suivra Panhard jusqu’à sa fin.

En dehors des soucis mécaniques, la qualité de fabrication n’est pas au rendez-vous et le client aura à subir les désagréments de voir leur bagages dans le coffre tachés par de l’essence qui perle au niveau de la vis de déjaugeage !

Les agrafes qui fixent les « snaps-on » d’entrées de porte déchirent souvent les robes des parisiennes et l’image de Panhard en prend un sérieux coup, même au niveau de la conception !

Les chauffeurs habitués à des moteur coupleux, ne changeait pas de vitesses et malgré le petit carbu et un arbre à came favorisant la souplesse, que voulez-vos que notre bicylindre puisse avoir la même utilisation qu’un quatre cylindre ?

Alors, pour manifester sa mauvaise humeur, il se mettait à cliqueter d’autant que l’essence de cette époque n’avait pas l’indice d’octane appropriée.

Malgré des améliorations qui iront dans le bon sens, le mal était fait et Panhard perdra la bataille des Taxis, face aux Ariane et autres 403, bien mieux adaptées et beaucoup plus solides.

 QUELQUES PHOTOS DES DYNA Z TAXI G7 EN SITUATION

En 2010 au Salon Rétromobile, nous avions exposé sur le stand du DCPL, un modèle taxi authentique parfaitement restauré à l’identique.

Charly  RAMPAL