C’est à l’occasion du Tour de France de septembre 1959 que l’on voit apparaître un coach DB fortement surbaissé au niveau du pavillon.

Cette modification importante effectuée sur un coach d’origine, est du à l’ingéniosité toujours débordante de notre champion de France 1962 et vainqueur des 24 Heures du Mans de la même année : André Guilhaudin.

Toujours à la recherche de meilleures performances, André avait cette année là, décidé de s’attaquer au maitre-couple en le diminuant pour avoir un gain non seulement aérodynamique, mais aussi en abaissant de ce fait le centre de gravité, gage d’une meilleure tenue de route.

D’autres améliorations restaient cependant « cachées » notamment au niveau des suspensions arrière et du dessous de la voiture.

Les supputations de notre champion prouvèrent leurs biens pensés et la voiture se montrera ainsi plus rapide que les coachs de série.

Ses résultats positifs donneront l’idée à René Bonnet de répercuter cette avancée sur quelques uns de ses coachs.

Une étude de faisabilité sera menée avec Jacques Hubert aérodynamicien « maison ».

Après validation René Bonnet va donner son accord et va créer un premier proto à partir du coach d’un industriel parisien, Max Azoulay, tout heureux de participer à cette aventure.

Cette première réalisation permettra ainsi d’en dégager les coûts dont l’amortissement serait amorti au bout de dix réalisations.

Mais ceci est une autre histoire et revenons au surbaissé de Guilhaudin.

Notez que cette voiture sera plus tard surnommée « le monstre » par Robert Sobeau, peut-être qu’à ses yeux, il défigurait la ligne de « ses coachs » !

Cette voiture existe toujours et s’est retrouvée en parfait état de marche, car elle a été entièrement restaurée par un spécialiste qui connaît par cœur les DB : Roland Roy (historien D.B.) pour en garder toute son authenticité.

SON HISTORIQUE

Tout d’abord, son propriétaire était Jacques Rey, autre savoyard passionné de course automobile.

La voiture, n° de série 1110, carrosserie n° 381, fut achetée en 1959.

Coach standard au départ de son achat, l’objectif premier était de faire de la compétition, en moteur 745 cc, donc 4 chevaux fiscaux d’où HBR4 et non 5.

Quant à parler moteur, autant dire qu’en 4 ans de compétition (de 1959 à 1962) celui-ci a été changé plusieurs fois pour, entre autres, adapter la cylindrée aux règlements des épreuves afin de viser les victoires de catégories ou indice de performances…

Voici la liste des évolutions des moteurs qui l’on entrainé :

  • Tour Auto 1959 = 747 cc
  • Tour Auto 1960 = 760 cc
  • Tour Auto 1961 = 695 cc
  • Le Mans 1961 = 848 cc
  • Tour Auto 1962 = 695 cc
  • Aujourd’hui elle est montée avec un 848 cc

Venons en maintenant aux modifications les plus importantes : celles de la  carrosserie.

Si la voiture appartenait à Jacques Rey, il n’en était ni le préparateur, ni le pilote n°1.

LES PRINCIPALES MODIFICATIONS

C’est à André Guilhaudin que revenait ces rôles et c’est lui qui a imaginé les modifications à faire pour rendre ce coach plus performant que les autres et que les de précédents déjà utilisés par cet équipage.

Ces modifications ont été réalisées par le carrossier Chalmette de Grenoble et bien sûr, André y a participé.


La caisse a été découpée aux pieds de montants du toit et jusque dans le coffre arrière dans le but de l’abaisser de 12 cm.

Si on descend ainsi que le toit, il ne reste devant le pilote qu’une meurtrière pour voir clair.

Tout l’avant est alors « basculé » en pivotant sur le point le plus haut de l’axe des roues avant : les débattements de roues sont dons conservés, de même que le capot moteur et les bulles de phares, mais pour cela il faut couper horizontalement les ailes (sous les ouïes de sortie d’air latérales) et les joues d’aile intérieures… et supprimer le bloc tableau de bord, devenu trop haut par rapport à ces modifications.

La calandre est donc un peu plus haute qu’à l’origine et la face d’appui des phares n’est plus verticale, ce qui a entrainé un réglage adapté afin de ne pas éclairer la cime des arbres.

Le pare-brise choisit pour remplacer l’original est une lunette arrière de Dyna Z1 avec son encadrement en alu et le départ de l’arrière du toit.

L’inclinaison est plus forte que celle du coach d’origine et même accentuée par rapport à celle de la dite lunette sur la Panhard…

De ce fait, le toit est reculé de 4 cm qui sont pris sur la longueur du couvercle de coffre arrière.

Les portières devenues trop hautes, elles ont été refaites en aluminium avec une pente prolongeant celles qu’on prit les ailes, leur raccordement avec les ailes arrières inchangées fat l’objet d’un ressaut dans le plus style des Ferrari 250 GT de cette époque.

Ceci n’est l’objet que des premières modifications  (mais les plus importantes) réalisées avant de pouvoir participer au Tour de France Auto 1959 que « la bête » terminera en remportant l’indice de performance en catégorie Grand-Tourisme.

Les pare-chocs et passages de roues n’ont pas eu le temps d’être transformés.

Pour la saison1960, et par la suite, les transformations visibles suivantes ont été apportées :

  • Suppression de 90% des pare-chocs : n’est conservé que l’extrémité arrière qui protège efficacement les feux arrière de 403.
  • Dégagement généreux de l’arrière des passages de roues avants avec raccordement en alu aux joues d’ailes intérieures pour faciliter la circulation d’air dans cette zone et supprimer l’effet d’écope du coach originel. Ceci a entrainé la suppression des ouïes latérales remplacées par… des aérateurs de bâtiment en tôle d’acier (sans dote pas disponible en alu ou en plastique à l’époque) fixés sur le dessus des ailes après perçage d’n trou.
  • Enfin, toujours pour améliorer l’écoulement de l’air, les roues arrière sont cachées en partie par des carénages démontables… en contre-plaqué.

Toutes ces transformations sont du domaine du visible, mais regardons les transformations cachées.

De l’avant jusqu’au plancher, un carénage en tôle d’aluminium très fin et fixé par vis et ne laisse apparaitre que le carter moteur et le strict débattement des roues en suspension et braquage.

Le creux qui correspond au « siège » arrière est aussi bouché, évitant les remous qu’l provoque, mais gênant le débattement de suspension et imposant  un échappement central et droit.

Pour la suspension, des fentes dans les tôles rendent celle-ci mobiles et leur retour en position est assuré par de longs et fins ressorts.

Et le poids dans tout ça, comment malgré vis et collage a-t-il pu, sinon réduire, au moins ne pas augmenter ?

  • Tous ces collages sont minimums et poncés
  • Les sièges sont des baquets en alu rembourrés au strict minimum et fixés directement au plancher sans possibilité de réglage.
  • Il n’y a plus la moindre garniture
  • L’échappement, dès le raccord au court « Y », et en tube d’aluminium droit (donc plus court et plus léger) avec un silencieux du même métal.
  • Les portières n’ont plus de levier de mécanisme d’ouverture : vis poêlier et tirette en câble de vélo le remplacent.
  • A part le pare-brise, toutes les vitres sont en plexiglass.
  • Pas de chauffage bien entendu et, selon que le moteur était équipé d’un ou de deux  d’un ou de deux carburateurs double-corps, il y avait la possibilité d’adapter un antibuée…

Le confort n’était pas le souci du moment : pour gagner, surtout en indépendant, il faut admettre de souffrir et être doué en mécanique et en pilotage et le tout en forme de battant et André Guilhaudin en avait à revendre ! N’a-t-il pas été sacré champion de France en 1962 ?

Voici la voiture au moment de sa mise en vente et donc avant un accident qui l’endommagea fortement, avant que Roland Roy ne la restaure.

Roland est un travailleur acharné, souvenez-vous de mes 3 articles sur la barquette Junior à moteur arrière de 1961… aussi, il passa tout un mois, soirées et week-end compris !

Ce spécialiste du polyester a ainsi « refondu » complètement la carrosserie : le nez a été coupé et remplacé, il en sera de même pour l’arrière. Le problème sera de raccorder les morceaux provenant d’un moule « standard » avec la base modifiée.

 Evidemment la peinture a été décapée, il faudrait plutôt dire « des peintures », pour aller jusqu’à la toile et repartir sur de bonnes bases.

Côté performance, malgré son couple réduit de 10% par rapport aux coachs standards, « Le Monstre » ne pouvait bien sur pas faire mieux que les tanks D.B. !

Il n’était que meilleur des coachs standards… et même le Super-Rallye.

Mais la partie la plus intéressante de nos véhicules historiques de compétition est d’en connaitre le palmarès.

LE PALMARES

1959

  • Rallye des 10 cols
  • Rallye des Lavandes
  • Coupe des Alpes  = 1er au général GT
  • Rallye du Mt Blanc = 2ème au général 1er de classe
  • Rallye des Cévennes = 1er de classe
  • Tour de France = 1er à l’indice

1960

  • Rallye Lyon-Charbonnières
  • Tour de France = 4ème en GT

1961

  • Tour de France = abandon
  • 24 Heures du Mans (Guilhaudin-Jaeger) = 20ème  au général, 12ème à l’indice et 3ème à l’énergétique.

Vu en course :

1000 km de Paris = abandon

1962

  • Tour de France
  • Tour de Corse = 1er de classe
  • Rallye des Cévennes

Après avoir passé 20 ans entre de bonnes mains, elle a été mise en vente à l’occasion de Rétromobile 2020 et vendue 168.200 €uros !

La reverra-t-on dans nos sortie ou au Mans Classic ? Rien n’est moins sûr… Placement ou passion ?

Tchao Roland…

Elle ne te sera plus qu’un bon souvenir…

Charly  RAMPAL     Sur des informations d’André Guilhaudin et de Rolland ROY.