Après la Dyna X qui nous avait laissé en rade sur l’autoroute d’Aubagne à Marseille, aujourd’hui la A50, mon père sous ma pression de continuer dans la gamme Panhard, se rendit à la succursale Panhard de Marseille au 256 Avenue du Prado (aujourd’hui occupé par un Bricorama) dans l’espoir d’y trouver une Dyna Z d’occasion : nous étions en 1960.

La toute récente PL17 était bien trop chère pour le budget de mes parents : il n’était donc pas question de voiture neuve.

Dans un hall jouxtant la succursale, des voitures d’occasion de toutes marques étaient alignées attendant d’y trouver un nouveau propriétaire.

Une opportunité s’offrit à lui sous la forme d’une Z6 de 1956, dont je ne me souviens plus du kilométrage, mais en excellent état.

J’étais heureux qu’elle reçut l’approbation de mon père qui avait toujours tendance à lorgner vers Renault et sa Dauphine cette fois, que mon Parrain avait acheté neuve.

LE TOUR DU PROPRIETAIRE

De couleur grise, elle était équipée de visières de phares ce qui la classait dans le modèle BLS.

Son intérieur semblait immense par rapport à notre X.

Il était gris à parement rouge, tout comme les deux banquettes qui me paraissaient largement prêtes à accueillir les 5 personnes qui composaient ma famille d’alors, grand-mère et soeur comprises.

Je fus surpris par le bruit très métallique au premier claquement des portières avant et des deux crans sonores qu’il fallait franchir pour bien la fermer.

Après étude, je me rendis compte que c’était le modèle mixte avec la coque réalisée en acier et les éléments mobiles (portes et capots) restaient en Duralinox.

Je la trouvais très belle d’autant qu’elle n’arborait plus sur ses pare-chocs, les deux gros bubons en guise de butoirs, ce qui affinait nettement sa ligne et ses rondeurs.

J’appréciais aussi la façon d’accéder à son coffre : enfin, nous à l’arrière, n’avions plus à descendre de voiture pour y accéder !

Et j’étais fier d’être le responsable de son ouverture qui se faisait par une tirette juste en bas et à gauche de mon assise,

car ma place était derrière mon père, le conducteur, pour me familiariser déjà avec la vision de la route telle que je l’aurai avec mon futur permis.

Le coffre me paraissait aussi immense et son capot était maintenu ouvert par deux tiges dont l’une coulissait dans la principale et se goupillait par un petit clip monté sur ressort : ingénieur et solide si on se souvient des vents violents de ma région.

A l’arrière, se trouvait les feux de stationnement ronds sur les ailes arrière, le phare de recul intégré à l’éclairage de la plaque de police et des voyants de stop, l’ensemble surmonté du monogramme « Panhard » qui enchantait mon chauvinisme de Panhardiste.

Avec cette voiture, malgré son âge, je me sentais entré pleinement dans ce nouveau monde des sixties qui collait avec mon blouson noir et la musique qui roulait des épaules.

A l’avant, je pouvais enfin admirer sa belle mécanique qui se découvrait totalement et m’ouvrait ses bras pour de futures interventions dont je pourrai voir tous mes geste et ses conséquences.

Hélas, elle n’avait pas de turbine comme les dernière Dyna, mais simplement deux tôles noires embouties qui entourait un ventilateur à deux pales : du déjà vu sur la X.

Le code de la route interdisant l’antibrouillard unique au centre, mon père l’avait enlevé et remplacé par une plaque d’alu. 

Au volant, la position de conduite ne me satisfaisait pas trop avec cette longue colonne qui certes regroupait astucieusement toutes les commandes, mais te posait le volant sur la poitrine, alors j’étais éduqué aux bras tendus de la conduite sportive du moment !

En plus, la banquette côté conducteur était un peu avachie et allait obliger mon père et moi (je n’avais encore atteint les 1m76) à nous rehausser à l’aide d’un coussin.

Malgré tous les accessoires de portes et du tableau de bord à grand renfort de plastique gris, l’ensemble était accueillant, surtout en venant de la Dyna X.

Par contre, je notais avec fierté que le compteur de vitesse annonçait 160 et positionné juste en face du champ visuel du conducteur et que l’aiguille se terminait par une forme de rondelle qui englobait bien le chiffre de la vitesse du moment. 

AU VOLANT

Comme vous l’avez lu pour notre Dyna X, nos vacances d’été se positionnaient au pied du Dévoluy dans les Hautes Alpes, aussi nos ballades étaient rythmées par les escalades quotidiennes de divers cols ce qui n’étaient le terrain de jeu de notre Z, surtout en montée et à cinq !

Combien de fois, il nous fallait passer la première en sortie d’épingle : je souffrais pour elle, mais je me consolais en me disant qu’elle allait se venger dans les descentes !

Oui, mais il y eut un mais… le frein moteur n’existant pas et surtout pour ne pas utiliser trop la boite qu’on savait fragile, ce sont les freins qui faisaient le boulot de ralentissement.

Et les différences brutales et successives, firent qu’un jour au terme de ces circonvulssions, nous avons entendu un grincement à chaque tour de roue : un tambour de roue alors en fonte, s’était fendu !

J’ai appris par la suite que c’était une des maladies de la Z6 ! En effet L’Auto-Journal avait alerté ses lecteurs et j’ai retrouvé cette indignation dans mes archives du 15 octobre 1956 :

Autre désagrément : une sorte de jeu dans le train avant et beaucoup de shimmy en sortie de braquage, comme si les roues étaient carrées : les sillent-blocs de direction s’étaient rapidement usés et le guidage du train avant, pas terrible !

Il faut dire qu’avec les Houdaille, nous n’étions pas gâtés, mais je ne l’ai su que plus tard !

Corollaire de ces défauts, sur routes planes, autoroutes et même en courbe, elle était transformée et la vitesse des 130/compteur vite atteinte et une fois lancée, rien ne pouvait l’arrêter tant son confort nous donnait une illusion de sécurité.

La voiture semblait légère, mais l’amortissement pas fameux et à l’arrière, le moindre dos d’âne ou cassis nous élevé façon montagnes Russes !

La mauvaise position de conduite, pour moi trop rapprochée, ne me permettait pas de jongler dans les épingles de la route allant de Gap à Orcières–Merlette : mes coudes bloqués par mon buste.

A l’arrêt, la direction était lourde, bien plus que sur la X dont je sortais. Et là, mon père marquait un point avec ses Dauphine Renault !

Par contre aucun flou et beaucoup de précision : là je reprenais l’avantage ! Mais toujours ces satanées réactions au volant en sortie d’épingle.

A souligner une superbe visibilité sous tous les angles nous avantageait pour que nous puissions admirer ces beaux paysages montagneux.

Bon, je ne parlerai pas du chauffage, pourtant en nette progression par rapport à la X et puis, dans le sud, ce n’est pas une contrainte.

Quant au Mistral, il n’avait de sens que pour la Dauphine de mon parrain, car avec la Dyna Z nous ne sentions rien, au point de l’oublier au moment d’ouvrir les portes, surtout celles avant qui étaient difficiles à retenir, la poignée étant tout au bout sous le déflecteur : il fallait avoir le bras long !

Au niveau sonore, rien à dire si je me réfère à précédente Panhard et paradoxalement, ce sont les places arrière qui sont les plus exposées aux bruits : vous avez dit « échappement » ?

Ah, j’y pense, je vous avez parlé de l’étanchéité illusoire de la X et son côté baignoire qu’il fallait vidanger par un trou au plancher, eh bien avec la Z, c’est nettement mieux : il semble que Panhard ait retenu la leçon !

CONCLUSION

Notre seconde Panhard a bien évoluée par rapport à la Dyna X au niveau de l’espace à vivre, du confort, de l’étanchéité, de la visibilité, mais pas de la maniabilité et du freinage.

Ce ne sera pas pour moi la meilleure des Panhard « de mon père », elle reste à venir : la PL17. Mais ce sera une autre histoire…

« Tu peux refermer la porte, frangine… !»

Charly RAMPAL