1905 CHEZ PANHARD ET LEVASSOR : DU DESSIN A LA LIVRAISON AU CLIENT,COMMENT CA MARCHE ?
A cette époque, personne ne doutaient des qualités des voitures Panhard & Levassor, et tout le monde en apprécie, en même temps que la simplicité du mécanisme, la perfection et le fini de leur construction.
Mais il est peu de gens a qui il ait été donne d’assister à la fabrication de ces voitures.
J’ai voulu aujourd’hui combler en quelque sorte cette lacune, et essayer de montrer au public l’histoire d’un châssis automobile depuis le moment ou, le type une fois conçu, les dessins sortent du bureau d’étude, jusqu’au moment ou le châssis est livre au client.
Les dessins exécutés, les pièces sont commandées dans les premières fonderies et acieries de France.
A leur arrivée à l’usine, elles sont soumises à des essais qui permettent d’en contrôler la qualité.
Les pièces brutes doivent alors être transformées en organes finis et prêts a être montées.
A cet effet, deux immenses ateliers ont été aménagés : l’un chargé de la fabrication des moteurs, l’autre de celle des mécanismes (boites à engrenages pour le changement de vitesses, embrayage, freins, etc.).
LE PRINCIPE DE FABRICATION EN SERIE
Le principe de la fabrication en série est celui qui est appliqué pour la fabrication des voitures Panhard & Levassor.
Il consiste à faire exécuter à une même machine un très grand nombre de pièces du même modèle, et à outiller cette machine de façon que les pièces ainsi produites soient toujours absolument identiques à elles-mêmes, et que leurs dimensions soient scrupuleusement celles indiquées par les dessins.
On est sûr que les pièces ainsi fabriquées seront interchangeables.
De cette façon deux organes qui doivent être montes l’un sur l’autre peuvent être assemblées, sans nécessiter aucun ajustage, et lorsqu’on a une pièce a remplacer, ce remplacement se fait instantanément sans avoir besoin du concours d’un ajusteur expérimenté.
OUTILLAGE SPECIAL ET » MONTAGE «
Pour arriver à ce résultat, il a fallu créer un outillage spécial à chaque sorte de pièces a fabriquer, et étudier ce qu’on appelle en terme d’atelier » un montage « .
C’est un procède qui permet à l’ouvrier de placer la pièce brute sur sa machine sans qu’il ait de tâtonnements à faire pour la centrer, et cela le plus rapidement possible.
La pièce étant montée, il met sa machine en mouvement et une fois l’opération terminée, la machine s’arrête d’elle-même.
Dégagé de toute autre préoccupation, l’ouvrier consacre toute son habileté et toute son intelligence au parfait entretien de sa machine et de ses outils et en assure le bon fonctionnement.
Aussitôt que les dessins d’un type nouveau sont remis aux ateliers, ils passent au service spécial de l’outillage.
Ce service comprend un bureau des études et un atelier dans lesquels sont étudiés, fabriqués et essayes les outillages et montages.
SERVICE DE VERIFICATION ET ATELIER D’ESSAI DES MOTEURS AVEC LE DYNAMOMETRE
Un tres important service de vérification contrôle I ‘exécution des pièces après chacune des opérations.
La vérification est faite au moyen de calibres comparateurs et autres appareils spéciaux appropries à chaque pièce.
Les pièces ne sont emmagasinées qu’après avoir subi cet examen sévère.
Des deux ateliers précédemment décrits sortent d’une part des moteurs, de l’autre des boites à engrenages.
Les moteurs sont diriges vers l’atelier d’essai.
Jusqu’a ces temps derniers, on mesurait la puissance des moteurs, à la Société Panhard & Levassor, comme presque partout ailleurs, au moyen du frein de Prony, très précis, mais ayant l’inconvénient de chauffer très rapidement, et de ne permettre que des essais de tres courte durée.
Depuis environ deux ans, la Société a adopte le dynamo-dynamomètre pour mesurer la puissance de ses moteurs.
Cet appareil permet de suivre le fonctionnement d’un moteur de la façon la plus précise, en faisant varier à volonté sa vitesse et la charge à laquelle il est soumis.
C’est un véritable frein de Prony, dans lequel les frottements sont remplaces par des réactions magnétiques.
Les indications de l’expérience sont donc absolues et peut être prolongée indéfiniment, puisque loin d’être accompagnée d’un dégagement de chaleur nuisible (comme dans le frein de Prony) 90 % environ du travail produit sont transformes en électricité qu’il est facile de recueillir.
La supériorité du dynamo-dynamomètre a été reconnue telle, que la Société n’ emploie plus que cet appareil pour l’essai de tous ses moteurs.
CEMENTATION ET TREMPE
A cote de l’atelier d’essai des moteurs, se trouve celui de cémentation et de trempe. Cet atelier renferme 6 fours à cémenter et 2 fours à tremper au plomb marchant de jour comme de nuit.
Les températures y sont réglées par les appareils les plus perfectionnés, permettant ainsi de donner à chaque pièce le degré de cémentation voulu.
ATELIER DE MENUISERIE POUR LA FABRICATION DES ROUES ET DU CADRE EN BOIS
Dans un même atelier, est réuni tout ce qui est relatif au travail du bois, d’une part la fabrication des modèles de fonderie, d’autre part la fabrication des roues et des chassis en bois.
Enfin une troisième partie de l’atelier est réservée au travail de menuiserie proprement dit.
C’est là qu’on fabrique les planches de « garde-crottes », les boites pour magnétos et pôles, les coffres à outils, etc.
Toutes les machines-outils de cet atelier sont fabriquées par la Société anonyme des anciens Etablissements Panhard & Levassor.
L’origine de la Maison remonte d’ailleurs à la fabrication de ces machines qui occupe encore une place très importante à la Société Panhard & Levassor.
LES DEUX ATELIERS DE MONTAGE DU CHASSIS
Toutes les pièces ou groupes de pièces entrant dans la composition d’un châssis étant prêtes, on procède au montage.
Ce travail s’exécute dans deux ateliers différents :
Dans l’un se fait le montage proprement dit : assemblage des essieux et des ressorts avec le châssis; fixation du moteur, de la boite de changement de vitesses, des leviers de manœuvre, en un mot le montage de toutes les pièces mécaniques.
Dans le second atelier, on dispose les tuyauteries d’aspiration et d’échappement, les appareils de graissage, les organes d’allumage, les réservoirs, le pot d’échappement, etc.
Le châssis est alors fini.
C’est également dans cet atelier que se fait la pose de la carrosserie, dans le cas ou ce montage doit être fait par les soins de la Société.
ESSAI PRATIQUE DE MISE AU POINT
Avant d’être livré, le châssis est soumis à un dernier examen et on s’assure par un essai pratique que son fonctionnement est parfait.
Cette opération, appelée mise au point, est faite dans un atelier spécial et confié à un personnel de choix.
On commence par faire tourner le moteur sur place, afin de revoir bien exactement son réglage ; puis le châssis, muni d’une caisse provisoire, est essayé d’un bout a l’autre de la grande avenue qui traverse l’usine et ensuite sur la route.
Le châssis est alors prêt pour la pose de la carrosserie exécutée soit par les soins de la Maison, soit par un carrossier.
Une mise au point finale et un dernier réglage sont encore nécessaires.
Ils sont exécutés par le personnel de la Société Panhard & Levassor dans leurs ateliers et sur les routes, et sont l’objet des plus grands soins.
LES ATELIERS DE REPARATIONS
Les ateliers de réparations de la Société Panhard & Levassor sont installés en dehors de son usine principale, sur un terrain d’environ 8 000 m2, autour desquels une piste d’essai a été aménagée.
La voiture qui arrive pour réparation, est aussitôt examinée par un personnel expérimenté qui commence par diagnostiquer le mal.
Elle est ensuite remise entre les mains d’ouvriers qui vont exécuter le travail prescrit.
Il faut autant que possible que l’atelier de réparations se suffise à lui-même, et par conséquent qu’il soit outillé de façon a pouvoir travailler à nouveau certaines pièces ayant subi quelques avaries.
Une partie de l’atelier est réservée aux machines-outils indispensables pour tourner un coussinet, percer un trou, fraiser une portée, etc.
Une autre partie est destinée aux essais des moteurs.
En effet, si le moteur a subi de grosses réparations exigeant le remplacement de pièces, il doit à nouveau être soumis à des essais et des mises au point, comme s’il était neuf.
Enfin la voiture terminée est essayée sur la piste aménagée autour de l’atelier, puis soumise, s’il y a lieu, sur la route à un essai prolongé.
L’HISTORIQUE DE LA VOITURE PANHARD DANS L’ATELIER DE REPARATIONS
L’atelier de réparations de la Société anonyme des anciens Etablissements Panhard & Levassor présente continuellement une collection de voitures qui constituent un historique complet de la Voiture Panhard.
C’est à qu’on peut, de temps à autre, revoir les glorieux ancêtres qui constituent la meilleure » réclame » pour la maison.
On y retrouve également les premières quatre chevaux Phénix avec leur direction à barre, hautes sur leurs roues caoutchoutées ou même ferrées.
Enfin d’un âge plus avancé encore, quelques antiques voitures Daimler à cylindres en V, vieilles de plus de dix ans, font de temps en temps leur apparition.
Cependant ces voitures roulent toujours et font leur petit service journalier depuis nombre d’années.
Tous les deux ou trois ans, elles reviennent à l’usine pour se faire resserrer un coussinet qui a pris du jeu ou changer une pièce cassée.
Ces résultats sont dus aux traditions des ateliers de la Société Panhard & Levassor.
C’est en employant des matériaux de toute première qualité, en usinant et traitant suivant l’usage auquel chaque pièce est destinée, qu’on obtient ce résultat dont la Société peut s’enorgueillir et qui lui assure la fidélité de sa clientèle.
Charly RAMPAL (Article composé qui se référent aux informations contenues dans le catalogue du 50ème anniversaire de la Société Panhard et Levassor édité en 1905). Car c’est en 1845 que remontent les origines de Panhard et Levassor quand deux menuisiers Perrin et Pauwels, s’associent pour fabriquer des machines à travailler le dans un atelier du Faubourg St Antoine à Paris.