RAPPEL DES FAITS

C’est en janvier 1962, que Panhard apprend par la Presse la rupture survenue entre Charles Deutsch et René Bonnet et le choix par ce dernier de moteurs Renault.

MM Panhard assistés par Etienne De Valance prennent alors contact avec Charles Deutsch en vue de construire des voitures pour les prochaines 24H du Mans, épreuve phare que Panhard ne pouvait manquer étant donné la valeur des résultats déjà obtenus.

Charles avait justement préparé avec l’ingénieur aérodynamicien Romani un projet de voiture de Grand Tourisme à moteur Panhard qui devait succéder à la DB HBR 5.

Paul Panhard donne enfin son feu vert fin janvier et une équipe technique s’attelle de toute urgence à la réalisation de cinq voitures prototypes (n° 101 à 105) avec le concours des ingénieurs motoristes et aérodynamiciens de la société Le Moteur Moderne et des carrossiers Chappe et Gessalin (futurs constructeurs des CG), chargés plus précisément de la fabrication des carrosseries en plastique stratifié, l’usine Panhard fournissant les organes mécaniques.

Par ailleurs, il faut compléter les contrats avec le pétrolier BP, chercher des fournisseurs d’équipements les mieux adaptés et surtout constituer une solide équipe de pilotes. La sélection a lieu les 7 et 8 avril à Montlhéry et huit noms sont retenus.

Toutes les tâches sont menées à bien en moins de deux mois parallèlement au suivi de la construction des voitures.

En moins de 70 jours, et grâce à l’équipe de Bernard Boyer, une voiture carrossée en acier (châssis 101) est prête pour des essais A Montlhéry au début avril 1962, où l’on voit Bernard Boyer, à droite, au plus près de la voiture pour sa mise au point.

Puis ce sera les tests grandeur nature au Nurburgring qui donnait l’occasion à la voiture et à Etienne De Valance d’entrer totalement dans sa fonction de responsable sportif de l’équipe Panhard.

Cette épreuve a toujours été validée comme le véritable juge de paix avant Le Mans.

Les deux voitures disponibles avaient été engagées : le proto en acier vu à Montlhéry qui sera pilotée par Alain Bertaut et Guy Verrier et la version définitive en « plastique » pour Guilhaudin et Boyer.

Les résultats ne seront pas brillants : le CD léger sera contraint à l’abandon à cause d’une fuite d’huile et celle en acier, pénalisée par son poids excessif, terminera l’épreuve, très loin, mais apportera de précieux enseignements, dont une forte consommation d’huile.

La fiabilité étant l’arme maitresse pour gagner une course d’endurance, l’équipe technique se concentra sur le sujet.

Les carrosseries et la peinture terminée chez les Chappe, Panhard livra les boites de vitesses à temps et ce n’est que la dernière semaine que l’équipe technique de Revel arriva du Moteur Moderne avec les trois moteurs définitifs et le renfort de deux mécaniciens.

A force de travail et sans compter les heures, les trois voitures furent prêtes pour le pesage du Mans.

2 OBJECTIFS : L’indice de performance et énergétique

La grande semaine commença dès le dimanche 16 juin.

C’est un transporteur qui emmena les 4 voitures dans l’enceinte du circuit pour être prèt pour les vérifications techniques prévues à 14h.

Les trois Panhard CD firent sensation au pesage par leur présentation, mais aussi parce que bien des sceptiques pensaient qu’elles ne seraient pas prêtes à temps.

53 Guilhaudin — Bertaut : objectif indice de performance

54 Lelong Hanrioud : objectif optionnel en cours d’épreu

55 Boyer — Verrier : objectif indice énergétique

La n°70 de Bob Neyret et Robert Mougin, était la remplaçante de l’équipe et ne prendra part qu’aux essais

Boyer et JF Robin alors technicien chez Zénith, chercheront,  les meilleurs réglages de carburation, en faisant des essais sur route ouverte, à la recherche d’une portion d’un kilomètre à parcourir à fond pour comparer les consommations en fonction des réglages. Jusqu’au dernier moment Bernard Boyer tournera autour des voitures pour dépister la moindre anomalie.

Difficile en 1962. Impensable aujourd’hui.

Samedi 23 juin, toute l’équipe Panhard est sur le circuit dès 9h.

Vers 10h ce fut la mise en place devant les stands.

A 11h, une dizaine de mécanos badgés Michelin arrivèrent pour changer les pneus des 3 voitures qui allaient prendre le départ.

Car, la firme de Clermont-Ferrand avait élaboré en secret un pneumatique adapté tout spécialement pour cette épreuve si difficile.

C’est pour ne pas alerter la concurrence qu’ils avaient décidé de les monter au tout dernier moment.

Comme d’habitude, le départ fut donné à 16 heure précises : les voitures  en épis.

COMMENT RESUMER LA COURSE ?

Hanrioud se mis la voiture sur la tête.

Verrier et Boyer ont percé un piston après 13 heures de course alors qu’ils étaient en tête du classement de l’indice énergétique.

Guilhaudin et Bertaut ont remporté le classement de l’indice de performance.

C’est cette victoire anniversaire que nous fêtons aujourd’hui pour ses 60 ans, d’autant qu’elle fut obtenue aux dépens de la voiture construite par Bonnet, plus rapide, mais handicapée par un arrêt d’environ 35 minutes suite à un incident dans le mécanisme de freinage.

Une fois de plus, le résultat s’était joué sur la fiabilité et non sur la vitesse pure.

Un principe que Charles Deutsch ne comprendra jamais !

Les CD rouleront de plus en plus vite, mais plus jamais l’une d’entre elles ne terminera la course du Mans.

A l’issu de cette belle et dernière victoire, Paul et Jean Panhard invitèrent l’ensemble des acteurs à un diner à l’hôtel de la Boule d’Or, à Noyen sur Marne, situé à 32 km au sud du Mans.

SE SOUVENIR ENCORE ET TOUJOURS

Cette victoire a bien entendu été exploitée par la Presse et Panhard en retira tous les bénéfices, car face aux René Bonnet, elles n’étaient pas favorites.

Une fois encore, l’esprit Panhard qui nous anime a permis de relever ce défi incroyable en seulement quelques semaines, et insufflé à tous les acteurs de Boyer à Haenel, en passant par Chappe et le Moteur Moderne.

En 1992, nous avions fêté les 30 ans de cette dernière victoire au Mans, sur le circuit Bugatti.

Aujourd’hui 30 ans après ce premier anniversaire, peu de personnes le pourrait encore, mais ce souvenir restera indélébile dans l’histoire de Panhard.

ENFIN LA MECANIQUE PANHARD RECONNUE ET MISE A L’HONNEUR AU MANS-CLASSIC

La Fédération Française des Véhicules d’Epoque (FFVE) et Peter Auto s’associent de nouveau dans le cadre du Mans Classic 2022 afin de rendre hommage au moteur flat-twin Panhard, indissociable de l’histoire des 24 Heures du Mans de 1950 à 1964.

L’édition 1962 des 24 Heures est à marquer d’une pierre blanche avec l’ultime victoire à l’Indice du vaillant petit bicylindre dans la Sarthe.

Profondément attachés au devoir de mémoire, Peter Auto et la FFVE, accompagnés des historiens de la marque, se devaient de célébrer le 60ème anniversaire de cette victoire.

Florilège de plus de vingt-cinq autos historiques, dont une quinzaine ayant physiquement disputé les 24 Heures du Mans ou aux essais de cette mythique épreuve d’endurance, cette exposition met également en exergue quelques voitures ayant disputé d’autres grandes épreuves telles le Bol d’or, les Mille Miglia ou les 12 Heures de Sebring.

Bienvenue dans l’univers de cette mécanique aux 1600 victoires où l’alliance du poids plume et d’une aérodynamique particulièrement poussée ont fait flotter au plus haut le pavillon français à travers le monde.

Charly  RAMPAL