D’après les clubs Panhard, la Dyna X serait fortement demandée dans la hiérarchie de la production Panhard d’après-guerre.

Quand était-il vraiment à son époque ? C’est ce retour d’expérience sur mon vécu avec ce modèle qui a été notre première Panhard de famille, pour affirmer certaines vérités.

POURQUOI UNE DYNA X

Je venais d’avoir mes 10 ans quand mon père eu cette idée folle de vouloir acheter sa première voiture, une occasion bien entendu, car flic à Marseille et ma mère employée à la Mairie sous l’ère « Gastouné », vénéré par tout le Vieux Port, nous ne roulions pas sur l’or en cette année 1955.

Lui était porté par une 4CV Renault, mais ma passion assumée pour les Panhard, m’avait poussé à lui démontré les qualités et avantages de se tourner plutôt vers la Dyna X.

Devant mes arguments chiffrés et cette fièvre pour le bicylindre et le sport-auto, il céda à ma demande et devint le propriétaire d’une berline de 1952, bleue marine intérieur en tissu côtelé marron, façon sac de jute, et jante jaune. J’étais aux anges !

LES ARGUMENTS

Cette voiture était très ingénieuse et à mon jeune âge, on était friand de tout ce qui bousculait la hiérarchie établie : la petite voix qui dit « NON » !

Si le résultat était extrêmement discutable sur le plan esthétique, je luttais contre les détracteurs assis sur leurs convictions de bien pensants qui la reléguait au style Louis XV !

Pour moi, elle était vraiment belle et se démarquait des modèles trop sages de l’époque et puis, techniquement, elle fourmillait d’idées avant-gardistes.

Comme on le sait, c’est Louis Delagarde qui doit être considéré comme le père et le metteur au point du petit bicylindre à plat refroidi par air, sans turbine, contrairement à la VW.

Il l’attela à une boite 4 vitesses plus ou moins synchronisée.

La suspension avant était assurée par un ressort à lames transversales tandis que l’on trouvait à l’arrière des barres de torsions dont la tension était très aisément réglable, ce qui permit à tout un chacun de procéder à de nombreux essais (parfois couronné de succès) tendant à modifier l’assiette et à améliorer la tenue de route.

Ces barres de torsion, on les retrouvait d’ailleurs là ou personne ne les attendait, à savoir en rappel des soupapes.

Là aussi, le système autorisait de jouer sans difficultés sur les tensions, de manière à permettre au moteur, d’atteindre des régimes particulièrement  élevés pour l’époque.

QUELQUES VERITES : DU PIRE ET DU MEILLEUR

Les 6.000 ts/mn n’étaient pas interdits mais, de temps à autre, les malheureuses barres de rappel cassaient comme du verre, même si on avait pris la précaution de les radiographier…

Je conserve toujours ce souvenir particulier de cette première Dyna, d’abord parce qu’il s’agissait d’un engin extraordinaire dans tous les sens du terme et aussi parce qu’elle fut la première d’un longue lignée de Panhard !

A cette époque la Dyna nous emmenait partout : du chaud soleil de Marseille au froid glacial des Hautes Alpes du côté d’Orcières-Merlette.

La petite Dyna 120, nous fit une démonstration complète de tout ce dont elle était capable, du pire et du meilleur !

Accrochée magnifiquement à la route – pas une seule autre voiture ne pouvait suivre la Dyna sur la neige – notre bruyante Louis XV, allait jusqu’à une suite de givrages de carbu absolument incroyable, transformant cet organe d’alimentation en véritable sorbetière !

Autre point noir, son manque d’étanchéité au vent (et Dieu sait que notre bon Mistral ne nous a pas épargné !) qui nous transformait en véritable statues de glace et à la pluie, souvent torrentielle.

A dire vrai, les problèmes d’étanchéité ne furent jamais résolus et lorsque nous en avions parlé avec la concession Panhard au Bd Michelet, ils nous avaient conseillé de faire quelques trous sous le tapis de sol, de façon à permettre à l’eau de s’évacuer rapidement, sans former de flaques trop révélatrices : on ne doutait de rien.

Mis à part ces menus inconvénients, la voiture était sensationnelle à conduire.

Et, à cette époque bénite où le mot « Liberté » avait son vrai sens, je pus la conduire dès mes 10 ans, sans avoir peur des « bleus » et goûter aux qualités routières de cette Dyna qui était vraiment « autre chose » sur la petite départementale de Gap à Orcières, qui part au pied du col Bayard !

Son petit moteur de 750 cc qui développait 33 ch à 5.000 t/mn me rendait fou de joie en s’associant à ma conduite sportive… J’imagine aujourd’hui, l’étape supérieure avec la version 130 et son 850 cc encore plus souple !

Lancée dans un bruit de crécelles qui virait dans les graves entre les parois rocheuses, la Dyna X était une montagnarde née.

Sa maniabilité était pour l’époque, incomparable et elle avait une manière de passer les épingles en levant la roue intérieure accentuée par son caractère sous-vireur, mais il fallait  déjà aller loin pour déclencher le phénomène malgré l’étroitesse des Michelin X 135/400 que mon père remplaça plus tard par des 145.

En descente, c’était le festival, en particulier grâce à ses freins inépuisables.

Aussi bien sur la route qu’en compétition, la Dyna X se retrouva immédiatement opposée à la 4cv Renault et ce fut le début d’une longue rivalité dont les périodes se développèrent aussi bien sur la route qu’en circuit… ou devant un Casanis au son des cigales !

Si, au point de vue tenue de route, la Dyna était incomparablement plus facile à conduire – au point que sur la neige, les meilleurs pilotes de 4cv étaient incapables de lutter – et ils avaient beaux accumuler les chevaux grâce à Ferry ou Condriller, la voiture n’allait guère plus vite que les 125 de la petite Dyna.

Hélas, chaque médaille a son revers et au point de vue robustesse, les contrôles en bout de chaine n’étaient pas d’une grande sévérité.

A l’époque, la demande était tellement forte qu’en dépit de la rareté et de la mauvaise qualité des matières premières : il fallait produire !

Quantité ou qualité ? Il fallait choisir…

 Le déchet était donc important mais, généralement, les gros pépins se manifestaient sans attendre : trous dans les pistons et boites cassées, étaient les incidents les plus fréquents.

En ce qui concerne notre Dyna, c’est le vilo qui avait perdu quelques rouleaux sur l’autoroute entre Aubagne et Marseille, compteur bloqué : tout se paye !

Auparavant, suite à un choc arrière, mon père l’avait fait repeindre en vert ce qui lui donnait une jolie particularité.

Je me souviens également de la fragilité des pare-chocs en aluminium qui se pliaient au moindre choc ou s’accrochaient au moindre contact d’une pèlerine ou d’une robe longue.

Aussi nous les remettions en forme pendant les vacances.

Un fois démontés, mon père badigeonnait de savon de Marseille la partie à redresser, puis la mettait sur le feu du fourneaux à gaz pour la chauffer et lorsque le savon devenait brun, c’était le signal de la bonne température pour les redresser au marteau (l’âme de la mécanique me disait-il) et comme par magie, il redevenait ce bijou de protection fort esthétique !

En rallye, conscient de ces soucis, les pignons de boite étaient plus gros… mais sans synchros.

Ce qui obligeait de faire le double débrayage à 100 tours près, mais deux  doigts seulement pour pousser le petit levier sortant du tableau de bord et hop, en souplesse !… Quelle élégance… !

Quant aux pistons cassés, ils se remplaçaient assez facilement en sortant un cylindre et bien des moteurs Dyna ont tourné des milliers de kilomètres durant avec les débris d’un troisième piston épars au fond du carter, sans que personne ne s’en soucis !

Quant à la facilité de démontage, elle était telle qu’un spectateur des 24Heures du Mans eut un matin, la surprise de retrouver sur le pare-brise de sa Dyna un petit mot l’informant que, l’équipe officielle D.B. ayant été contrainte dans la nuit de changer un cylindre sur un tank qui allait gagner à l’indice, deux mécanos avaient pris la liberté (toujours elle !) de se glisser sous la voiture pour démonter l’élément qu’ils n’avaient pas sur place !

L’infortuné était prié de se rendre au stand D.B. pour y sabler le champagne dans un cylindre neuf, ce qui fut fait dans la bonne humeur : la classe quoi !

En fait la Dyna ressemblait beaucoup aux belles motos anglaises de la même époque.

Tout comme une Norton Manx, une Panhard pouvait se montrer incroyablement robuste, à la seule condition de tomber sur un bon numéro ou de se livrer à un remontage soigné à la main.

Les Dyna de compétition étaient ainsi traitées et les 1000 Miles italiens – la plus belle course sur route du monde – virent ainsi d’impitoyables duels entre les deux marques françaises, l’une jouant sur la vélocité et l’autre sur la fiabilité, tout cela pendant que les italiens éberlués restaient littéralement sur place au volant de leurs Topolino gonflées dont les bielles et pistons passaient parfois à travers le capot !

Mais je vous ai raconté ces exploits de nos Dyna en compétitions en large, mais jamais de travers !

Charly  RAMPAL et ses souvenirs d’enfance.