C’est au Pavillon Dauphine que Panhard a convié la Presse pour présenter le dernier de ses produits : le moteur Tigre.

Ce moteur n’est pas inconnu des passionnés de sport automobile, puisque c’est à travers les épreuves d’endurance et particulièrement au Mans que tous les ingrédients de ce moteur ont été testés.

Plus particulièrement sur les voitures de l’écurie officielle Panhard-Monopole.
L’arbre à cames date de 1954 par exemple.

Ce moteur baptisé M5T sera disponible sur le haut de gamme des Dyna Z16 et d’office sur le cabriolet Z17.

PANHARD FAIT SON CIRQUE

Côté vitrine, c’est vers le cirque Bouglione que Panhard se tourna pour une mise en scène où la séduisante Pascale Audret tiendrait le rôle de vedette au côté d’une tigresse et de ses trois petits.

Les séances de photos peuvent commencer. Pascale Audret est restée gantée pour prévenir des griffes d’jà acérés des petits qu’elle tient dans ses bras.

Paul et Jean Panhard sont là. La séance a été écourtée, car le bébé Tigre n’apprécie pas. Néanmoins, les photos sont dans la boite et Jean Panhard peut faire sont discours de présentation.

En plus des informations sur le véhicule, il en profite pour lancer la saison sportive en annonçant que la mécanique Panhard serait désormais défendu par une seule écurie : DB-Panhard.

La journée se termine sur un terrain plus favorable à notre nouveauté : Monthléry.

Cette présentation va se poursuivre encore quelques jours dans la magasin Panhard des Champs Elysées.

Dans un décor qui aurait plu à Indiana Jones, deux Tigres sont mis en cage : une plate-forme de Dyna Z et un magnifique tigre royal, adulte cette fois, dont le poids imposant obligera de poser la voiture sur des cales en bois.

Des morceaux de viande judicieusement disposés sur le filtre à air fera croire à une affection particulière entre ces ensembles de chairs et…. D’aluminium.

Bien entendu, le succès…. De curiosité dépasse les espérances.
Les Médias sont présents et le public nombreux en fait un but de promenade.

Hélas, cette mise en situation est bientôt écourtée par des dépôts de plaintes de riverains agacés par les rugissements du félin appelant sa femelle. Cet enfer mécanique étant loin de le satisfaire !

Néanmoins, l’opération est un succès, preuve en est que Panhard, comme ESSO seront à jamais liés à cet animal, comme Peugeot à son lion.

Le félin sera par la suite remplacé par des hommes déguisés et des peluches garniront bientôt la plage arrière.

LE TIGRE COTE PISTE

Comme annoncé plus haut, c’est sur la piste de Monthléry que les journalistes pourront se faire une idée des progrès apportés par la présence du moteur Tigre sous le capot des Dyna Z.

Née à la fin de 1953, la Dyna Z a relancé définitivement Panhard dans la production automobile française.

Depuis l’abandon de l’aluminium, la Dyna avait perdu sa vocation de berline aux performances brillantes : elle était rentrée dans le rang, par la force des choses.

Ainsi pour reconquérir un marché perdu et pour contrecarrer Renault avec sa Dauphine Gordini et l’émergence de versions gonflées, Panhard a décidé de lancer en mars 1959 ce moteur qui va équiper une version de la gamme Z et le cabriolet.

Sui l’architecture du moteur de la berline normale est repris, la nouveauté consiste essentiellement dans un allègement de près de 20% de l’équipage mobile – pistons légers – et des culbuteurs, dans l’adoption d’un nouvel arbre à cames et enfin d’un montage d’un gros carburateur Zénith double corps, placé sur des pipes d’admission de fort diamètre.

Dans ces conditions et avec la turbine de refroidissement de série, ce moteur dispose d’une puissance annoncée de 50 cv à un régime qui se situe vers les 6.000 tours /minute.

Dès son utilisation, la puissance est perceptible et l’augmentation des performances est très nette.
La vitesse de pointe atteint facilement le 140,7 km/h chrono.
Les accélérations également ne sont pas en reste, puisque 6’’ ont été gagnés au 1.000 m départ arrêté : 40’’ 2/5 contre 46’’ 3/5.

Même s’il faut atteindre les 3.000 t/mn, la voiture reste agréable à piloter et les montées en régime n’ont rien à voir tant elles sont impressionnantes pour l’époque.

Heureusement (sic ! ) que la voiture n’est pas équipée d’un compte-tours car les 7.000 tours doivent être atteint sur les rapports intermédiaires, tant se moteur est vivant et ne demande qu’à envoyer…

Bien sûr, l’oreille avertie du panhardiste habitué à la conduite particulière de son bijou, est là pour éviter la casse que le néophyte ne manquera pas de faire, grisé par de telles respirations.

Avec une telle cavalerie, on pourrait craindre pour la consommation… et bien, la légendaire sobriété des Panhard n’est pas bafouée ! En cravachant comme un forcené, on ne consomme que 9,5 litres aux 100 km. En conduite plus « baba cool » on pet tabler sur 7,2 litres !

Evidemment, le cheval de course n’est pas à l’aise dans les champs ! C’est ainsi qu’en ville, le pied droit doit être extrêmement souple et progressif.
Même si la puissance à bas régime est toujours disponible, il ne faut pas ouvrir en grand les deux papillons , le moteur vous fait alors comprendre son mécontentement par des hoquets et des toussotements que certains vont atténuer en caressant de leur pied gauche l’embrayage !

Attention, cet accessoire n’est pas un amortisseur, une telle pratique entrainerait rapidement sa détérioration d’autant que nous savons que ce n’est pas le point fort des Panhard !

Quant au bruit , il ; est à peine perceptible dans l’habitacle, c’est à l’extérieur que l’on note la plus grande différence : son plus grave et plus plein, un rugissement de Tigre, quoi !

Tout le reste est inchangé : boite, freins, tenue de route confort supporte largement ce surcroit de puissance.

Seule la suspension a été modifiée. Equipé de roues de 380 et d’amortisseurs adaptés, le voiture se trouve surbaissée.

Dans ces conditions, on tire parti de ce surplus de puissance.

En ligne droite, la tenue de cap est parfaite et il n’y aucune réaction désagréable.
En virage, la Z Tigre se couche et s’accroche avec une belle ténacité, alors qu’à la limite et sur trois roues, c’est l’arrière qui commence à glisser, ce qui est rare pour une traction avant, mais qui fait la joie des sportifs et des pilotes adeptes du contre-braquage.

Les autres, habitués à « se faire tirer » (n’y voyez aucune allusion sexuelle !) et à ne connaître que le sens du rayon de braquage, seront paniqués !

Mais ils n’arriveront jamais à ces extrêmes, leur instinct de survie les aura mis depuis longtemps sur le chemin de la raison.
Equipée de Michelin XZX ou de rares XAS, cette limite est lointaine.

Par contre, en virage serré, lorsqu’on applique la puissance, le train avant flotte sur quelques mètres, comme si la voiture cherchait sa route.
Mais n’y voyait aucun caractère de gravité : c’est surprenant, c’est tout.

Alors, où est la faille ? Il n’y en a pas, sauf cette hypothétique fiabilité que Panhard traine depuis l’après guerre sur ses modèles poussés : il faut savoir ce que l’on veut !

Charly RAMPAL