CAMION-ELECTRIQUE-P&L-K47
RECIT : CAMION-ELECTRIQUE-PL-K47
Depuis le début du 21ème siècle, on nous pousse autoritairement vers le véhicule électrique pour lutter contre le dérèglement climatique, l’automobile électrique doit rapidement remplacer la voiture à moteur thermique.
Contrairement aux idées reçues, la voiture électrique ne date pas d’aujourd’hui !
Le premier véhicule électrique a fait son apparition aux alentours de 1830 (1832-1839).
La première personne à avoir inventé une voiture électrique est Robert Anderson, un homme d’affaires écossais. Il s’agissait plutôt d’une carriole électrique.
En 1891, l’américain William Morrison construit la première vraie voiture électrique
En 1897, on peut apercevoir les premiers taxis électriques dans les rues de New York.
En 1899 en Belgique, une société construit « La Jamais Contente » la première auto électrique à dépasser les 100 km/h (elle atteindra les 105 km/h). L’auto était pilotée par le belge Camille Jenatzy, et munie de pneus Michelin. Elle était en forme de torpille.
Dès 1900, la voiture électrique connait ses beaux jours. Plus du tiers des voitures en circulation sont électriques : ce type de motricité ne cessera jamais, même si elle fut mise en veilleuse face au pétrole.
Pas question ici d’évoquer le pour et le contre, équilibre naturel qui gère notre système solaire, mais, suite au prototype d’Henri André sur base Junior qui fut l’objet d’un article, une affirmation me fut posée concernant l’étude chez Panhard et Levassor d’un véhicule électrique.
Le doute subsistant, je me suis mis à la recherche de documents sur le sujet dans les archives Panhard…
Eh bien, qu’elle ne fut pas ma surprise de découvrir que OUI…
ETUDE D’UN CAMION ELECTRIQUE CHEZ PANHARD ET LEVASSOR
P. et L. y avait donc déjà pensé, mais seulement vers le milieu des années vingt.
Assez curieusement d’ailleurs, car, à l’époque, ce technique n’était pas à la mode.
Alors qu’aux débuts de l’automobile, et jusqu’aux années dix, la propulsion électrique était testée et considérée comme une alternative assez crédible, au début des années vingt, la question semble entendue et la piste enterrée. Pourtant, au Salon de Paris, en octobre 1926, Panhard exposait sur son stand dédié aux véhicules utilitaires le prototype d’un camion à moteur électrique…
Même à l’époque, l’affaire n’avait pas fait grand bruit.
Seul, un entrefilet dans le compte-rendu du Salon publié dans la revue Omnia , effleure le sujet, accompagné des deux photos ci-dessous :
Sinon, rien d’autre, à part un tout petit dépliant conservé aux Archives Panhard, qui décrit sommairement « La camionnette électrique Panhard & Levassor — Oerlikon (accumulateurs Dinin) ».
Bien que ce document soit annoté à la main « 1928 », il décrit le même véhicule, et on peut penser qu’il a pu être édité en 1927, voire pour le Salon 1926.
Panhard se serait donc associé à une société suisse pour concevoir ce prototype de camion électrique, donné pour 2.000 kg de charge utile.
La vue avant montre la batterie et le contrôleur.
La seconde vue montre la disposition originale du moteur, de type tétrapolaire : il est boulonné vers l’avant sur le carter du pont arrière et suspendu à l’arrière par un ressort à boudin fixé sur une fausse traverse.
Les accumulateurs au plomb sont groupés en deux demi-batteries de 20 éléments chacun.
D’après le dépliant, ils sont enfermés dans deux coffres placés au centre du châssis, un treuil permettant la mise en place.
La capacité est de 400 Ah.
Cette disposition diffère de celle vue sur le camion exposé au Salon.
Ce camion qui pèse 5 tonnes en ordre de marche atteint 35 km/h maximum, pour une vitesse de marche moyenne de 20 km/h.
Le « contrôleur » est commandé par un levier à main et donne la marche avant, le point mort et la marche arrière. Une pédale, à droite, commande également le contrôleur.
Le démarrage a lieu sur résistances.
Contre toute attente, il a malgré tout existé une fiche des Mines pour ce camion électrique, qui a reçu le type K47 dans la nomenclature Panhard ; bien qu’il n’ait pas été présenté officiellement, on peut estimer que cette fiche a été établie au début de 1930.
Preuve, s’il en était, que le sujet est resté à l’ordre du jour au moins jusqu’au début des années trente !
Voici la description faite par ce document :
Description d’une voiture électrique type K47 construite par la S.A.A.E. Panhard & Levassor
Moteur : moteur électrique tétrapolaire — excitation série — puissance 5 CV
Pont AR : le pont AR est oscillant et fait corps avec le moteur ; il est suspendu à l’AR à une traverse du châssis.
Le couple de torsion s’équilibre sur la traverse, et la poussée se fait par les ressorts AR de suspension.
Le pignon d’angle calé sur l’arbre d’induit attaque une roue d’angle montée sur le différentiel.
Les roues sont montées à billes sur les tubes du pont.
Leur entraînement est assuré par des cannelures ménagées à l’extrémité des arbres de différentiel.
Châssis : en tôle emboutie.
Poids du châssis AV : 1.200 kg
Poids du châssis AR : 1.700 kg
Poids total : 2.900 kg
Charge utile maximum . 1.500 kg
Diamètre des roues motrices : 895 x 135
Les accumulateurs : d’une capacité de 400 Ah, 40 éléments (voltage moyen : 74 volts) sont placés à l’intérieur des longerons.
Direction : à vis fixée sur la tige de direction, agissant par un système de bielle et de levier par écrou.
Fusée d’essieu : articulée sur pivots verticaux armés de leviers reliés entre eux par une bielle ; le rapport de démultiplication est d’environ 1/16.
Freins :
1° Un frein à segment extensible agissant à l’intérieur de deux tambours solidaires des roues AR, réglable à volonté.
2° Un frein identique au précédent, extensible, agissant à l’intérieur de deux tambours montés sur les roues AV, réglable à volonté. Diamètre du tambour : 450 — Largeur des segments : 50 ; chacun de ces deux freins est commandé : a) par une pédale à portée de pied du conducteur (rapport des bras de levier : 90/1) et b) par un levier à portée de la main du conducteur (rapport des bras de levier : 87/1).
Les organes de commande de ces deux freins sont disposés de telle façon qu’en cas de rupture en un point quelconque, le freinage soit toujours assuré par deux roues.
Marche de la voiture :
Il n’y a pas de changement de vitesse mécanique, ni d’embrayage.
Les variations de vitesses sont obtenues électriquement au moyen d’un contrôleur par couplage des éléments de la batterie, en parallèle ou en série, et par shuntage des inducteurs.
Un levier à main donne la marche AV, la marche AR ou le point mort en inversant ou en coupant le courant d’induit.
Le démarrage et le réglage de la vitesse sont faits à l’aide d’une pédale accélératrice commandant le contrôleur.
Vitesse en km/h sur terrain plat : démultiplication du moteur au différentiel : 8/61
Conclusion :
Des essais ont certainement été faits, mais aucune trace aux Archives de Mulhouse;
En tout état de cause, quatre camions répondant à ce type K47 ont été fabriqués : le châssis n° 15.042, sorti le 18 mars 1930, puis les châssis n° 15.158 à 15.160, sortis le 23 avril 1930.
Ils ont tous été vendus à la Société pour le Développement des Véhicules Electriques, avenue de Messine à Paris.
Le poids élevé de ce camion et ses performances modestes réduisaient naturellement son utilisation à des usages bien particuliers.
Charly RAMPAL (D’après les archives Panhard et les informations de Bernard Vermeylen)