Né en 1913, Jean Panhard a aidé son père Paul à gérer l’entreprise familiale à travers 3 décennies.

Voici bilan et témoignages racontés par Jean Panhard lui-même au journaliste John Pressnell.

C’est en 1937 que Jean Panhard, frais émoulu de l’Ecole Polytechnique, rejoint la maison Panhard, en tant que directeur technique.

«  En 1937 Panhard n’allait pas bien, ca c’est clair. Je savais ce qui m’attendait.

Mais ce fut pire que ce que je pensais : les voitures se vendaient mal.  

Les machines à bois, à l’origine de l’entreprise, puisqu’on avait débuté avec ça, étalent de bonne qualité, mais le marché était très petit et les marges très étroites.

En ce qui concerne les poids lourds, grâce à Dieu, Panhard avait obtenu une très belle commande de l’armée française… et cela à un prix tout à fait convenable.

Ca nous a permis de passer un cap extrêmement difficile.

Quand aux engins militaires, les marges étalent bonnes, mais ce n’était qu’une petite fraction de la production.

La situation était très difficile.

Panhard avait des productions extrêmement variées, ce qui posait des problèmes de fabrication très difficiles.

On avait énormément d’ouvriers qualifies qui passaient d’une machine à une autre.

Les séries étaient trop petites, donc les ouvriers devaient être très polyvalents.

Et puis Panhard avait beaucoup vieilli au point de vue des machines-outils.

Nous essayions de faire trop de choses nous-mêmes, avec du matériel obsolète.

Mon père tout de suite s’est beaucoup appuyé sur mol .

C’est grâce à mol que nous avons pu avoir très vite une commande d’affûts de DCA qui nous a permis d’acheter des machines outils aux Etats-Unis

C’était une très grande commande qui a permis & Panhard de traverser une période très difficile ».

LA MALHEUREUSE DYNAMIC

Une des raisons des problèmes chez Panhard est la mévente de la Dynamic, avec son moteur sans-soupape.

Les moteurs avaient deux défauts, selon Jean Panhard

« Ils coûtaient abominablement cher et les chemises étaient difficiles à faire.

Soit ils fumaient- les Panhard partaient dans un nuage de fumée bleue – soit les chemises grippaient.

Il fallait les réaliser au micron : il entait nécessaire que les jeux soient extrêmement respectes.

On était pris entre, avoir les cotes trop serrées, et ca grippait, ou pas assez, et ça fumait ».

Ayant le malheur d’être lancée en plein Front Populaire, la Dynamic souffre de plus de son esthétique un peu particulière.

« La Dynamic était incontestablement une voiture extraordinaire, par beaucoup de points de vue – une caisse tout-acier, pas de châssis, six vraies places très confortables.

La suspension était très bonne, la tenue de route excellente et le moteur sans-soupape donnait beaucoup de chevaux.

Mais la forme choquait énormément – elle était totalement différente des autres voitures.

Elle avait été conçue par Bionier, et celui-ci faisait vraiment ce qu’il voulait à cette époque-là.

Et en plus, ce qui contribuait à notre embarras, c’est d’avoir mis la direction au milieu.

Ca paraissait très logique, mais quand vous voulez faire monter deux personnes et que le conducteur est au milieu, ce n’est pas commode du tout.

Ca a détourné énormément de gens et nous avons du mettre la direction sur la gauche. .

Face à cet échec, Panhard pense a rééquiper la Dynamic d’un moteur Hotchkiss,

Nous avons aussi entamé des pourparlers avec Mercedes-Benz en vue de la fabrication sous licence de la Mercedes 170 »

Mais finalement, après avoir envisagé sérieusement la fabrication d’une berline à caisse Hotchkiss, le choix d’une voiture censée remplacer la malheureuse Dynamic incombe, encore une fois, à un véhicule hybride, doté d’un nouveau moteur Panhard à soupapes en tète

 » Le moteur avait été esquissé.

Elle n’avait pas une caisse de Hotchkiss mais de Matford.

Comme nous n’avions pas d’atelier d’emboutissage, l’idée était de prendre une caisse existante.

Donc le problème de la carrosserie réglé, nous n’avions qu’à mettre un bon moteur sous le capot, ce que Panhard était capable de faire »

PENDANT LA GUERRE

Ce projet ne va pas très loin : la France est en pleine occupation allemande

« Nous sommes sortis de cette période avec tous les honneurs », constate Jean Panhard.

 » Nous nous sommes battus avec le STO comme des lions pour envoyer le moins de personnel possible en Allemagne, quelques centaines seulement étalent partis chez Borgward,

L’occupant nous avait passé une commande pour mille autochenilles Borgward.

C’était censé être l‘essentiel de notre fabrication, avec des patins de char pour ces engins.

Or, à la fin de 1944 nous n’avons sorti qu’un prototype, c’est tout.

Et nous avons vécu sur des avances .

Finalement, les Allemands n’étalent pas tous mauvais.

Nous avions eu la chance d’avoir eu un gauleiter pour l’usine qui était un ingénieur de Borgward.

ll cherchait a avoir le moins d’ennuis possible, et il a accepté toutes les demandes d’acompte…

ll y avait des pièces partout, mais on n’a même pas sorti un seul véhicule.

Heureusement que le garçon était sympa, sinon ça aurait été le désastre pour mon père et moi… « 

Pendant la guerre, Panhard commencé l’étude d’une petite voiture bicylindre à traction avant, mais en 1944 la maison change de cap et s’engage à fabriquer la voiture Aluminium Français Grégoire conque par Jean-Albert Grégoire – l’aluminium étant censé être un matériau français.

Mais à la Libération l’entreprise se trouve exclue du Plan Pons, et restreinte a la production des poids lourds.

« Pour nous c’était une catastrophe épouvantable » . souligne Jean Panhard.

« Avec les allocations de l’Etat, on ne pouvait pas avoir de matière première. On ne pouvait rien avoir. » De l’AFG à la Dyna X Panhard trouve dans l’AFG le moyen de sortir du Plan Pons, en profitant de la construction en aluminium de la voiture.

 » Effectivement, ça a marché et nous avons eu l’autorisation de fabriquer des voitures faites entièrement en aluminium »

Au salon de 1946 appareil donc la Dyna X.

« Du prototype Grégoire il ne restait pas grand-chose » reconnait Jean Panhard.

« Le moteur était un moteur différent, la boite de vitesses était différente, la suspension différente, la carrosserie différente aussi, mails il avait toujours un châssis avec de l’aluminium coulé, et les tôles en aluminium. « 

Malgré les différences entre la Dyna et l’AFG, il y a assez de points de similitude pour que Grégoire intente un procès contre Panhard.

« Le prototype de la voiture Grégoire était proposée par l’Aluminium Francais, qui est venu me voir avec Grégoire.

Ce n’était pas forcement cette voiture qu’on était censé construire – pourvu que ce soit un véhicule employant l’aluminium » remarque Jean Panhard, « La Dyna avait certaines caractéristiques de la voiture de Grégoire, mais ce n’était pas une Grégoire.

Pour ce qui est du procès – que nous avons gagné d’ailleurs – il faut dire que j’aurais pu être plus conciliant.

Mais aussi bien pour Delagarde que pour Bionier, Grégoire était le diable. ..

Grégoire avait apporte l’idée, sans aucun doute.

La voiture de Grégoire était l’idée à partir de laquelle on a fait la Dyna.

Mais Grégoire avait été paye pour ce qu’il avait fait.

On ne lui devait rien.

Mais Grégoire égale « Je » avec une énorme «  J »

C’était « C’est moi Grégoire. Je suis le plus fort. Je suis le plus intelligent « .

Pour les autres ingénieurs c’était très agaçant qu’il dise tout le temps  » Je fals ceci, je fais cela, je suis le meilleur ».

 « ll y avait Grégoire, et il y avait les autres.

Les gens n’aimaient pas beaucoup ca.

La conception de la Dyna X est assez chère avec tout son aluminium, et la rentabilité est

Moyenne », cela Jean Panhard l’admet.

 » Par rapport à l’avant-guerre, la production de la Dyna X était un énorme saut.

Malheureusement un de mes regrets – et j’en ai pas mal – est qu’elle aurait été incontestablement plus profitable si elle avait été fabriquée dans une usine de montage en dehors de Paris.

Vu après-coup, c’était une erreur d’être enterré dans Paris.

Les conditions à l’avenue d’lvry étaient acrobatiques.

Le montage se faisait dans un bâtiment à étages – dans l’un on fabriquait les moteurs, dans un autre on faisait la peinture – cela en plein Paris.

On crachait de la peinture sur Paris. »

Pendant ce temps, Panhard s’engage dans la compétition, en collaboration avec la firme DB

 « Sans aucun doute, sur le plan commercial, les victoires on course étaient quelque chose d’extrêmement intéressant » constate Jean Panhard.

« Dans son domaine Panhard fut le roi pendant des années.

Panhard a gagné pratiquement toutes les courses dans lesquelles il s’est engage

Ca ne nous a pas couté très cher.

Comme rapport qualité-prix c’était un rendement tout à fait extraordinaire.

Avec peu de moyens, on avait une service compétition très réussi ».

 Dans l’intervalle la petite Junior est arrivée, conçue par Di Rosa, un carrossier de la région parisienne mieux connu pour ses carrosseries poids-lourds.

« Di Rosa nous a montré cette voiture, qui était la simplicité même.

On a du cependant surélever le pare-brise.

Dans les premières voitures on ne pouvait pas conduire.

C’était ma tête qui supportait la capote. »

Les rapports avec Di Rosa se dégradent assez rapidement : un jour on voit Di Rosa qui sort en pleurs après une réunion avec Paul Panhard : « Ca c’est mal passe avec Di Rosa » confesse Jean Panhard.

« Les premières voitures étalent invendables, donc nous avons décidé de faire les carrosseries à Orléans, ou nous avions un excellent atelier.

Les formes étalent très simples et à Orléans ils formaient les emboutis et faisaient le montage des carrosseries à partir de ces emboutis. Mais le volume n’était pas suffisant. Ce n’est pas avec ça qu’on peut vivre. »

VERS UNE FUSION ?

C’est à cette époque, en 1951-1952, que Jean Panhard fait des tentatives de fusion – avec Ford-SAF et ensuite avec Peugeot.

« ll y avait François Lehideux, le gendre de Louis Renault, qui gérait Ford-France.

J’ai eu l’idée d’essayer de faire un accord avec Lehideux parce que, à ce moment-là, Ford avait une usine de montage – celle qu’il nous fallait – et nous, nous avions des moteurs dont la conception était bonne.

On aurait pu résoudre le probleme de Panhard, et faire le montage de voitures dans des conditions normales.

J’ai eu beaucoup de pourparlers avec Lehideux mais tout d’un coup il a disparu- il a ete renvoyé.

On n’est pas allé très loin, mais on avait commencé à ébaucher un plan.

Lui devait être président, et moi directeur-général.

Mon idée était que Panhard ne pouvait plus exister avec sa taille, par rapport à d’autres concurrents.

Sinon, nous courions au désastre.

La rentabilité de Panhard n’était pas suffisante.

Avec Peugeot c’était [Maurice] Jordan, et il ne voyait pas ce que Panhard pourrait apporter a Peugeot. Ca ne l’intéressait pas.

Ca, c’était clair.

Effectivement, les voitures que Panhard sortait étaient plutôt des concurrents pour Peugeot, mais il n’appréciait pas ce que Panhard aurait pu apporter à Peugeot – à savoir un bureau d’etudes tout a fait performant ».

LA DYNA 54

La preuve de ce dynamisme, ce fut la Dyna 54, chère au cœur de Jean Panhard.

« Sur le plan technique c’était une révolution tout à fait remarquable – au point que deux années plus tard Jean-Pierre Peugeot m’a dit:  » Vous savez, quand vous avez sorti cette voiture nous avons eu peur ».

C’était vraiment une voiture très réussie, et très en avance sur son temps.

Une voiture qui roulait à 130 km/h, avait six places, et consommait 6 litres aux 100 km, mais qui ne pesait que 630 kg, c’était vraiment quelque chose.

Tout était logique dans sa construction.

Nous avons eu beaucoup de discussions, Bionier et moi, et nous avons rédigé le cahier de charges de cette voiture tous les deux.

Mon idée c’était que comme nous n’avions pas de moyens il fallait prendre la mécanique précédente, et à partir de là, essayer de faire une voiture beaucoup plus importante avec un très bon aérodynamisme – et de la faire la plus légère possible.

La Dyna 54 était fabriquée par Chausson, qui avait un atelier d’emboutissage tout à fait correct, avec des gens de qualité, et le prix de revient de la carrosserie était presque de grande série.

Avec cette voiture, nous pensions avoir réussi à nous inscrire parmi les fabricants de voitures de grande série. On aurait peut-être pu.

Mais nous étions coincés en tout cas par le montage.

C’était inhumain, quand on y pense.

 On pout s’habituer à tout, mais quand même,. .

Bionier – qui était vraiment un type génial – avait conçu cette voiture de façon à ce que la partie avant et arrière se montaient séparément.

Donc on pouvait avoir une chaine moins longue.

Vous partez de la carrosserie, vous montez le train avant et le train arrière sur une petite longueur, pour occuper le moins de place possible, puisqu’on travaillait en étages.

Si on avait mis un châssis dessous on n’aurait jamais réussi.

En ce qui concerne la soudure de la tôle d’aluminium, c’est Bionier qui a réussi, en collaboration avec les fabricants, à mettre au point les pinces des postes de soudure.

C’était un génie.

ll a tout conçu sur cette voiture »

UNE ERREUR MONUMENTALE

Mais la réussite de la Dyna 54 se trouve menacée par un faux-calcul dans la comptabilité

« D’une part les moyens de production nous manquaient, et d’autre part le prix de l’aluminium a failli tout faire capoter » précise Jean Panhard.

« C’est le bureau des méthodes qui a établi le prix de revient de la voiture.

Le prix de revient provisoire qu’avait établi un compilable prenait en complet le même prix pour l’achat de le tôle et pour la reprise des déchets.

Personne n’a vu ca.

C’était une erreur monumentale. On s’en est vite aperçu quand I’Aluminium Français a repris les déchets; il les prenait à un prix équivalent à 20 % de ce que nous avions calculé.

Cette erreur représentait au moins la marge de la voiture.. ».

« Quand on fait une porte, par exemple, il y a au moins la moitie de la tôle qui git par terre.

Avec la Dyna Z il y avait des déchets très importants, comme dans toutes les voitures.

Avec l’acier cela n’a pas d’importance, puisqu’il n’est pas cher.

Mais l’aluminium nous était vendu très cher par I’Aluminium Français.

Au point de vue prix de revient ca nous faisait des prix presque insupportables.

Par conséquent, la coque de la Dyna est faite en acier à partir du millésime 1956, et pour l’année-modele 1957 les portes, le capot et la porte de malle ne sont plus en aluminium.

« On aurait du essayer de se maintenir avec l’aluminium plus longtemps, peut-être en décidant de monter les prix de vente  » réfléchit Jean Panhard.

« Rester sur l’aluminium, on aurait pu réussir à le faire.

Avec une carrosserie en acier, la voiture n’avait plus l’intérêt qu’elle avait précédemment « .

L’ARRIVEE DE CITROEN

Pendant ce temps, Panhard se dégage progressivement de la fabrication des poids lourds.  

Ils prennent beaucoup de place, et à quelques unîtes par mois, ils ne sont plus rentables ; donc après 1954 la production se limite à des modèles spéciaux sur commande avant de prendre définitivement fin en 1962.

En revanche, les véhicules militaires deviennent un gagne-pain important.

Cela n’empêche pas la crise financière, et en 1955 Citroën prend 25 % du capital de Panhard, participation qui s’élève à 45 % en 1958

« Notre idée à nous c’était que Citroën deviendrait le leader de Panhard » constate Jean Panhard.

« Nous pensions que Citroën avec nous, imaginerait pour l’avenir une liaison intelligente, répartissant les fabrications entre nous deux.

Mais cela n’est pas du tout ce qui s’est passé.

Citroën n’a vu dans cette absorption que le moyen de fabriquer des fourgonnettes 2 CV à des cadences assez importantes et avec des conditions de prix de revient très serrés.

Citroën a dit que Panhard se débrouillerait pour le reste.

Mais Panhard ne pouvait pas se débrouiller C’est tout à fait ça.

D’autant plus que sur le plan commercial, quand Citroën a conclu cet accord, les voitures Panhard s’intégraient bien dans la gamme Citroën, avec la 2 CV d’un côté et la DS de l’autre.

Entre les deux la Panhard pouvait s’intercaler et se vendre assez bien.

Mais Citroën a continué ses études et avec I’Ami 6, a sorti une voiture en concurrence avec Panhard.

Comment voulez-vous que Panhard s’en sorte ? C’était impossible.

L’Ami 6 était tout à fait en concurrence avec Panhard, mais évidemment avec un prix de revient très différent.

« Ca marchait bien au début. Tant qu’il n’y avait pas d’Ami 6, le réseau Citroën était content de vendre des Panhard.

Apres, le réseau Panhard a pratiquement disparu, parce qu’il était concurrencé par les agents et les concessionnaires Citroën »

Selon Jean Panhard, la fabrication chez Panhard de la 2 CV Sahara et des premières Ami 6 n’arrangeaient guère les choses : « Les Ami 6 nous ont causés de terribles problèmes – ça n’a pas rapporte de l’argent.

On était un service de démarrage de production pour Citroën, qui s’est beaucoup servi de nous – de cela il n’y a aucun doute.

C’est pour ça que nous n’avons pas gagné de l’argent. »

Ce n’était pas ainsi que Panhard avait envisagé la venue de Citroën.

« Nous avions une vision de l’intégration des deux entreprises

Nous pensions que Citroën avait compris » dit-il.

Mais ce qui se produit, c’est plutôt un rapport semblable à celui existant entre serf et maitre.

Le seul moyen d’en tirer quelque chose, c’est la 24, fait par Bionier sous la direction de Jean Panhard.

LA DERNIERE PANHARD

« Pour la 24, Citroën était d’accord. Mais comme voiture de créneau.

Nous n’avions pas beaucoup de solutions. Nous étions prisonniers de notre mécanique.

Nous n’avions pas les moyens d’en sortir une nouvelle.

Techniquement, nous aunions pu sortir un excellent moteur et une très bonne boite de vitesses.

Donc la seule possibilité était de faire une voiture avec une carrosserie renouvelée et dans un créneau non-occupé par Citroën.

Je me rappelle Cadiou, le directeur d’études mécaniques chez Citroën, qui m’avait dit:  » En tout cas, je vous interdis de faire un nouveau moteur. Non, non, vous utiliserez votre mécanique ». 

Mais pour Panhard la 24 allait beaucoup plus loin : il voulait faire d’elle son Cheval de Troie.

« Elle était conçue pour sortir aussi, par la suite une quatre-portes.

Nous avons préparé une quatre-portes et on pensait mettre le moteur quatre-cylindres.

C’était ça l‘idée. Mais nous n’en avions pas les moyens. On n’avait pas les moyens du tout ».

Faire la 24, cela constitue déjà un véritable défi, et l’accueil accordé à la voiture à son lancement en 1963 en témoigne, comme le rappelle Jean Panhard.

« Je vois encore Roland Peugeot quand il est venu à la présentation de la voiture. Il a dit :

 » C’est vraiment extraordinaire. Vous êtes arrivés à faire ça avec vos ingénieurs à vous. Nous ne sommes pas fichus de le faire. Par rapport aux vôtres, les voitures que nous faisons sont des camions »

Mais les ventes n’ont pas suivi. On ne pouvait pas avoir une voiture deux-portes : ça ne correspondait pas au besoins de marketing de l’époque ».

Avec l’effacement de la PL17 et la mévente de la 24, le dénouement ne tarde pas : en 1965 vient l’absorption totale de Panhard par Citroën, en 1967 la fabrication de la dernière voiture Panhard.

« Ce que je reproche à Citroën c’est qu’ils ne nous ont pas assez pris en main » dit Jean

Panhard avec le pragmatisme qui lui est typique.

« Ils se désintéressaient totalement de la marche de leur filiale. Mais quand ils ont aperçu que le désastre était arrivé ils n’étaient pas contents. Ils furent obliges de reprendre l’usine en main.

Ils ne pouvaient pas faire autrement. Je ne suis pas Machiavel. Je n’avais pas prévu ça, mais ils ne pourraient pas laisser tomber la filiale ».

Si l’histoire de Panhard dans le domaine de la voiture de tourisme se termine ainsi, le nom survit par intermédiaire de la SCMPL, la Société de Constructions Mécaniques Panhard et Levassor filiale de Citroën, et ultérieurement du PSA, qui s’occupe des engins militaires.

Gérée par Jean Panhard jusqu’à sa retraite en 1978, et avec Louis Delagarde comme ingénieur en chef jusqu’à en 1975, la SCMPL, qui sera vendue à Auverland, ont longtemps figuré parmi les producteurs de matériel militaire les plus respectés

Quant à Jean Panhard, il devient président du Salon de l’Automobile de 1967 à 1989 et président de la Chambre syndicale de l’Automobile de 1979 à 1981; de plus, on lui doit la création du salon Equip’Auto, et un rôle déterminant dans la transformation de la collection Schlumpf en musée national de l’automobile.

S’il peut revendiquer une certaine fierté, ce patricien foncièrement modeste la manifeste rarement, si ce n’est en songeant que, 114 ans après que son père se soit fait photographier dans la première voiture Panhard et Levassor, le nom Panhard existera toujours dans nos mémoires et dans nos cœurs de panhardistes comme la première marque au monde.

Ce n’est pas la moindre des réussites.

Merci Monsieur Jean…

Charly  RAMPAL  d’après l’interview réalisé par John Pressnell dans les années 1990.