MEP / MONOMILLS : LE PLATEAU QUI NOUS A FAIT REVER

C’est dans les années 80, au temps où le VEC (Véhicule d’Epoque et de Compétition) cherchait ses lettres de noblesse, que l’on vit peu à peu resurgir timidement quelques Monoplaces à moteur Panhard. Cette éclosion se résumait à quelques Monomills.
Les pionniers avaient pour nom : Coural, Lumbroso, Berton et Pougenq.

Hélas, à cette époque, il n’était pas question d’un plateau uniquement composé de monoplaces, et je me souviens qu’ils se battaient contre des Sport-Prototypes des années cinquante.
C’était des plateaux hétéroclites qui auraient été jugés très dangereux de nos jours où la surprotection est de mise !
En effet, et pour l’avoir vécu, la taille très basse des monoplaces ne les rendait guère visibles à bord d’une voiture de sport en pleine bagarre.
Mais c’était l’époque où le courage et l’inconscience dominaient : il fallait courir à tout prix.
Je me souviens d’une bataille homérique au Castelet entre « Kiki » Lumbroso sur son Monomill (ex-Formule 1) et Roland Hurban et son proto Jaguar tout en aluminium, du Mans des années cinquante.

Ces mélanges du genre n’avaient pas empêché ces « têtes brûlées » de remporter le championnat de France comme Bernard Coural par exemple.

Puis, peu à peu, cet appel d’air qu’ils avaient créé, en ont attiré d’autres : Janiaud, Philippe etc… ce qui permit de constituer un véritable plateau réservé aux monoplaces où se mélangeaient aux moteurs Panhard, des Lola, Lotus, Stanguellini, Cooper et autres F3 de l’époque, mais aussi des MEP X27 à moteur GS.

Mais c’est surtout grâce à Alain Gawski (voir son portrait dans la rubrique « les Hommes ») qui, en leader qu’il était, mis sur pied le fameux plateau MEP / Monomill qui rentrera dans l’histoire du VHC (Véhicule Historique de Compétition).
Peu à peu, on vit proliférer les Racer et Monomills DB, reconstruits du côté de la Côte d’Or. Pour étoffer le plateau et mettre sur pied un véritable championnat dans un esprit des plus amical, les MEP X2 (à moteur Panhard) et les MEP X27 (à moteur GS) seront les bienvenues.

Sous l’élan et les efforts constants de Gawski, le plateau devint phénoménal ! Je me souviens en 1995 à Monthléry nous pointions 30 voitures ! (voir ma vidéo ci-après).

Rapidement et devant le succès populaire de ce plateau, les MEP et les Monomills réussirent à « chasser » les monoplaces anglaises.

Les ténors Monomills du moment avaient pour noms : Gawski bien sur (plusieurs fois champion de France), mais aussi Farin, Leprince, Payen, Marpinard...

Chez les MEP X2 Mace et Billaud père et fils

Enfin en X27 les Gayraud, Pinseau, Fournier, Guerrier et les Dallois dont le fils est exceptionnel !

Il fallait aussi trouver un équilibre entre les moteurs Panhard et les moteurs GS, plus puissants.
Pour cela, le « Directoire » joua sur les pneumatiques : les MEP aurait des Michelin XAS classiques et les Monomills des Dunlop SP avec des gommes très performantes comme nous en avons l’obligation pour Le Mans Classic.

Si le résultat sur le sec donnait raison à ce choix judicieux, par contre sur le mouillé les Dunlop étaient des savonnettes dans un lavabo !
Mauvaise pioche aussi pour les MEP X2 qui cumulaient les handicaps d’un moteur Panhard et des Michelins XAS. Seul, Serge Mace eu droit à quelques rares coups d’éclats grâce à une préparation de top niveau (moteur poussé et boite adaptée aux différents circuits), son pilotage et des conditions de courses favorables. Résultat, peu de MEP X2.

De plus, une bagarre intense voyait le jour à l’intérieur même des Monomills, préparés essentiellement par Gawski et Coural.
Gawski, par exemple, en plus de travaux poussés sur les chambres de combustion, soupapes, piston, volant moteur, etc …avait 3 arbres à cames différents de sa conception qui faisait grimper la puissance à des niveaux différents.
D’autres augmentaient en cachette la cylindrée (954 ou 1.000)
Chez les MEP X27, le 4 cylindres Citroën évoluait aussi dans le même sens mais plus facilement.

Résultat, cette course à la puissance dégoutta les « raisonnables » qui abandonnèrent peu à peu le navire et dont la prestation se résumait à de la figuration : l’esprit de la « Formule bleue » de l’époque était galvaudée.

C’est ainsi qu’à partir de 2007, le nombre de participants à ce plateau diminua dangereusement au point de ne plus avoir le nombre nécessaire (15 au moins) pour batailler entre eux.
Comme au début et pour exister encore, les rescapés se trouvèrent de nouveau mélangés avec les Formules Ford par exemple qui faisaient leur apparition ou les « laissés pour compte » qui ne trouvaient pas de place ailleurs.

Et puis, certains sont partis au volant de barquettes pour connaître une autre ivresse.

La chute fut rapide et brutale : une saison suffit à plier les gaules ! Et les monoplaces se retrouvèrent recouvertes du manteau de l’oubli.

Il y avait bien de temps à autres des « sorties « avec le Club des Racers ou autres courses régionales, mais en individuel et le cœur n’y était plus ! Comment retrouver ce plaisir qui avait atteint de tels sommets ?
Et puis, il nous manquait un « patron » : la mort d’Alain mit un point final à nos espérance de résurrection.

Ce que nous avons connu sous sa férule et son enthousiasme communicatif ne pourra plus se reproduire auquel s’est ajoutée la disparition de nombreux acteurs : notre cœur a trop souffert pour battre à 10.000 tours.

Alors, de temps en temps on ressort les vieux couplets du « Il faut remonter le plateau des Gawski’s boys », mais beaucoup ont raccroché ou vendu leur monoplace.
On se prend à rêver pour nous tenir en vie.
Et puis, y aurait–t-il aujourd’hui encore une place dans le VHC pour un tel plateau ?

La question est posée, aura-t-elle une réponse un jour ? Si oui, il faudra faire vite, car le temps nous est compté à nous pauvres humains.

Charly RAMPAL