Le GP automobile de La baule était disputé selon une formule handicap pour plus d’équité entre les 750 cc et les 1100 cc (OSCA et Gordini), les 1500 (OSCA), les 2 litres (Masérati et Gordini), les 2,5 litres (Gordini), les 3 litres (Aston Martin), les 3,5 litres (HWM et Jaguar), et enfin une 4,5 litres Talbot.

Le rôle du handicapeur était d’amener sur la ligne de départ, les catégories les unes après les autres dans un intervalle de temps bien défini.

C’est ainsi que les 1100 cc partaient 11’16 après les 745 cc, les 1500 cc (Collange et Descollonges) respectivement 17’22 et 17’53 après les premiers, les 2 litres, après 22’22 et 22’28, les 2,5 litres partaient après un handicap de 24’56, etc… pour terminer avec la Talbot 4,5 litres qui partait avec un handicap de 27 mn ! Compliqué tout cela…

Sans aucun doute, cette formule handicap partait d’un bon sentiment en voulant une valeur intrinsèque des véhicules en fonction de leur cylindrée, mais c’était sans compter sur la valeur des pilotes, moins encore du tracé du circuit d’Escoublac dont les nombreuses courbes successives favorisaient les voitures de faible cylindrée alors que les plus puissantes n’avaient qu’une ligne droite pas suffisamment longue pour qu’elle puisse leur permettre de combler une partie de leur handicap.

Par ailleurs, la route n’était pas assez large pour autoriser les dépassements faciles qui devaient se multiplier lorsque les 18 voitures furent libérées.

DES ESSAIS QUI ANNONCAIENT LA COULEUR…

Dès la première séance d’essais, la cause était entendue.

On savait par le temps qu’avait réalisé Elie Bayol au volant de la petite DB de l’Ecurie Jeudy-Bonnet que ni Duncan Hamilton avec la Jaguar victorieuse au Mans en 1953, ni Jacques Pollet avec la 2 litres Gordini Sport ni pourraient rien.

Pourtant Jacques Pollet avait approché de 2’’ le record fixé en 1952 par Albert Ascari au volant d’une 2 litres Ferrari au Grand Prix !

Pierre Levegh affirmait que pour rattraper les 27 minutes de handicap qui lui avaient été généreusement octroyées, il aurait du début à la fin à batailler sans pouvoir le combler.

A la vérité, le handicap avait surtout été établi sans tenir compte des progrès considérables qui avaient été réalisés en cette année 1954 sur les DB et sur les Panhard qui en faisaient des voitures rapides et sûres, bien suspendues, maniables de surcroît.

Mieux, ces voitures semblaient être les seules à être munies des rapports de boite bien adaptées à ce circuit.

Toujours est-il qu’à l’exception de Duncan Hamilton qui joua le jeu jusqu’au bout, aucun autre concurrent ne livrera réellement la chasse aux pilotes des DB et des Panhard qui auraient probablement enlevé les premières places avec plusieurs tours d’avance si Elie Bayol qui contrôlait les opérations avec Louis Cornet dans son sillage n’avait, dans son dernier tour, été victime de ses pneus et si Robert Chancel n’avait pas perdu une roue !

Duncan Hamilton avait beau rattrapé 18 mn sur les 28 imposés et battu le record du tour en le portant à 128,878 km/h, en prenant un maximum de risques, aucun de ses rivaux ne purent ou ne voulurent combler une partie de leur handicap.

Si bien que si les concurrents étaient partis en ligne, Hamilton aurait gagné avec 2h 29’ 13’’, Tonny Gaze, second en 2h 30’ 28’’, Charles Rinen, troisième en 2h 34’ et Louis Cornet, quatrième en 2h 38’ 9’’, Jacques Peron, cinquième en 2h 42’ 29’’ etc… Bayol terminant quant à lui, septième, malgré sa belle prestation, il a vu la victoire lui échapper et a partagé la photo du vainqueur.

Ce classement qui n’a d’autres significations qu’à titre indicatif, pour montrer combien les petites cylindrées étaient sur ce circuit légèrement avantagées.

De la course elle-même, on ne peut guère tirer d’enseignement, sinon que le circuit d’Escoublac, tel qu’il était dessiné en 1954, constituait pour les pneus une véritable râpe qui provoqua les principaux incidents de course.

LE CLASSEMENT

Cette chance insolente dont a bénéficiée Louis Cornet avait commencé la veille de l’épreuve, car il avait été refusé par Raymond Acat, dont la mission était de sélectionner les pilotes, avait bien sûr une excuse très valable, dans le sens où il avait déjà retenu l’engagement de 3 DB (Elie Bayol, Jean Lucas et le régional de l’étape, Héry)..

En 745, il avait également retenu l’engagement de deux Panhard avec Robert Chancel et Beaulieux.
Ajoutés aux 5 autres véhicules de 745 cc, il avait estimé, avec juste raison, que la catégorie des voitures partant scratch était suffisamment fournie.

Et si, finalement, Louis Cornet fut remis dans le jeu, c’était bien parce que Mike Sparken ne pouvait plus faire réparer à temps le moteur de sa Masérati 2 litres, complétant ainsi le plateau !

Enfin, quand la chance ou la malchance vous tient, elle ne vous lâche plus !
Dans ce cas, et par chauvinisme, c’est une victoire de plus pour notre mécanique qui ne se refuse pas !

Alors pourquoi ne pas en profiter : l’histoire ne retiendra que la victoire…

Charly RAMPAL (D’après le compte rendu de Georges Fraichard du journal L’Equipe et ma Photothèque)

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