Présentée en janvier 1954, le roadster STERA avec carrosserie en matière plastique résulte en fait d’une démarche entreprise près d’un an auparavant par le journaliste et ingénieur : Jean Bernardet.

Pour l’Exposition de la Chimie, organisée à Paris en juin 1953, ce dernier avait en effet préparé une coque ultra légère susceptible de s’adapter sur un châssis de Dyna Panhard.

Il s’agissait d’un prototype réalisé en deux exemplaires qui avait surtout pour but de découvrir tous les secrets et de surmonter les aléas inhérents à la fabrication de carrosseries dans cette nouvelle matière appelée « stratifiée de verre et polyester », encore pratiquement inconnue en France à cette époque.

Pour Jean Bernardet, il n’y avait rien de tel lorsqu’on veut faire connaître nouvelle que de prendre le problème au début et de procéder soi-même à toutes les phases qui amènent au résultat.

La technique des carrosseries moulées taquinait Jean Bernardet. Après s’être informé des procédés américains, il a dessiné, puis réalisé lui-même les gabarits en bois.

La première phase consiste à réaliser une maquette grandeur nature qui servira de modèle pour mouler la voiture. Elle consiste à reconstituer couple par couple, la voiture entière. :

Cette première carcasse destinée à recevoir une toile de support du staff, est rendue plus exacte quant aux contours par la pose de nombreuses baguettes destinées à mieux faire suivre les profils :

Lorsque la forme est assez précise, on procède à l’entoilage général. Cette toile servira de support au plâtre et à la filasse pendant la prise :

La forme destinée à être transporter, il fallait ancrer le plâtre. Un deuxième enrobage de grillage cette fois clouté sur les couples et légèrement écarté de la toile, remplira cet office.

La préforme terminée, le plâtrier modeleur commence son enrobage d’abord à épaisseur constante en respectant le modèle de la préforme.

Ensuite, en reprenant d’après les dessins originaux les détails d’ornementation et en perçant les orifices de refroidissement, le moule est prêt pour le polissage.

Ler moule a été transporté dans l’étuve. Il y sera soigneusement mastiqué, repoli et enfin ciré.
Toutes les tâches visibles sur la photo, indiquent les raccords effectués pour obtenir du glacé parfait.

Le premier contact avec la résine et le tissu de verre passe inaperçu. La transparence du tissu de verre est telle qu’il est absolument invisible sur le moule et que seule la partie qui dépasse sur l’échancrure de roue est perceptible :

Couches sur couches, les épaisseurs de tissu de verre imprégnées ont constitué petit à petit une carapace très solide qui va servir de moule femelle pour les carrosseries définitives :

Le carnage commence : le beau moule en plâtre est délibérément sacrifié et les ultimes morceaux de plâtres qui adhèrent encore sont décollés à grands coups de masse.

Si en sacrifiant la forme on a pu sortir un moule entier, il faudra fractionner celui-ci en trois parties pour démouler les carrosseries. On procède alors au découpage des côtés.

L’intérieur du moule est débarrassé du plus petit morceau de plâtre encore adhérent. Il sera poli de nouveau et encore une fois ciré pour éviter l’adhérence des nouvelles couches de tissu :

Couches sur couches vont de nouveau prendre place dans ce nouveau moule, la carrosserie définitive, que l’on voit ci-dessous, en sera le résultat. Cette pièce de 8m2 d’un seul tenant ne pèse que 30 kg.

Puis par la suite, ce qui devait être la première voiture en matière plastique construite en France. Ça se passait au printemps 1953. En peu de temps, si la technique n’avait pas changé, l’expérience a prouvé que l’on pouvait beaucoup mieux faire et que le chapitre prix de revient est celui qui devait être surveillé de près. Il est, par exemple, des solutions qui paraissent simples à priori, mais qui, par la suite, oblige à reprendre le produit obtenu, pour le parfaire quant à son aspect et sa présentation.

Tout cela s’appelle l’expérience et en matière de moulage de carrosserie, rien ne vaut d’avoir sur ce point une bonne avance sur les concurrents éventuels.

Si la réalisation de cette carrosserie, qui a coûté à Jean Bernardet plusieurs centaines d’heures de travail, n’a été réalisée qu’à deux exemplaires, elle lui aura permis de tirer de précieux enseignements qui seront mis en pratique sur deux nouvelles voitures qu’il réalise pour le compte de la société STERA.

Après avoir rencontré quelques problèmes lors des premiers démoulages, Jean Bernardet ne se découragea pas pourtant et il remit un autre prototype en chantier qui deviendra au début 1954 le roadster présenté par STERA.

Cette seconde voiture a une caisse plus épaisse que la première baptisée Gazelle.

et la seconde, un coupé sport 1500, dans le courant de l’hiver.

Il s’agit là avant tout de gagner du poids au maximum et par des solutions personnelles de limiter le prix de revient très souvent prohibitif pour ce genre de voiture d’exception.

En fait, elle adopte des formes plus réalistes qui correspondent mieux aux critères d’un roadster à deux places appelé à être commercialisé.

Des portières facilitent l’accès et un capot permet d’accéder au moteur Panhard choisi pour animer l’engin dont le poids ne dépasse pas 560 kg.

Sur la caisse brute de démoulage visible ci-dessous, ont été noyés des éléments métalliques dans le polyester afin de permettre la fixation des charnières de portières et de capot.

Réalisée comme la première avec le concours d’une équipe de St Gobain, cette seconde STERA ne dépassa pas le stade du prototype.

Charly RAMPAL