RALLYE DES ROUTES DU NORD 1955
Le 5ème Rallye des Routes du Nord qui s’est déroulé les 12 et 13 janvier 1955 dans des conditions météo épouvantables.
Traditionnellement, il ouvrait la nouvelle saison du championnat entre le premier week-end de février et celui du mois de mars.
Dans cette épreuve, courue une semaine après le Neige et Glace, il fallait boucler 1.000 km à 60 de moyenne.
Il comportait aussi trois épreuves complémentaires : 5 tours (16km) de vitesse sur l’autodrome de Cambrai-Niegnies, la course de côté du Cran d’Escalles (900m) et une épreuve de vitesse, sur 500m, départ arrêté et arrivée lancée à Roubaix.
On aurait pu penser qu’après Neige et Glace, avec sa boue et sa neige comme en témoigne cette photo d’un Junior presque pris au piège dans l’Alpes d’Huez, que cette épreuve nordique serait un jeu d’enfant !
Hélas, il fallait se rendre à l’évidence que le danger guettait à chaque tour de roue, tant le verglas sévissait dangereusement.
Pluie fine et flocons furent les compagnons de route de tous les concurrents durant 18 heures inoubliables de froidure, surtout dans une barquette DB de nos amis Cornet-Lecuyer !
Ce fut d’abord le premier tronçon Lille / Cambrai : 71 km, histoire de prendre la température de l’évènement.
Une première étape qui semblait courte mais qui a vu un concurrent s’enrouler autour d’un poteau télégraphique sans dommage corporel heureusement.
Sur l’autodrome verglacé de Cambrai, les concurrents répartis en deux groupes (Sport et Tourisme) effectuèrent une course de vitesse, chacun sur 5 tours.
Malgré ces conditions de boue et de neige, des milliers de spectateurs étaient venus assister à ce qui était devenu pour eux un Grand Prix, souligné en tant que Directeur de course, par la présence du pétulant Toto Roche !
Sur cet espèce de lac gelé, il fallait se frayer un chemin à travers les concurrents plutôt en travers que sur la bonne trajectoire : on était encore loin des Trophées Andros de nos jours !
Après cette séance de patinoire, dans la catégorie Sport qui nous intéresse, la barquette DB de Cornet était en tête, devant Delerue (Panhard), Sigrand (Peugeot) Boon (Porsche ) et Mme Simone (Panhard-Monopole).
Ce fut ensuite le départ pour plus de 900 km , d’un bout à l’autre du Nord.
Un Nord éclectique qui faisait bondir les concurrents de Charleville à Calais, en passant par Valenciennes, Douai, Bapaume, Labroye, Boulogne, Escalles, pour revenir à Roubaix tout en se faisant contrôler aux points de Cassel, Thérouanne, Saint-Pol, Arras, Roubaix et Lille : on ne pouvait pas s’échapper !
La route était hérissée de contrôles, comme aujourd’hui nos autoroutes, de radar ! Parfois tous les 30 km, souvent tous les 7 ou 8 km ! A peine reparti, il fallait s’arrêter pile ! L’enfer, quoi !
Le jour, la route se dérobait. La nuit, même manège avec la neige qui masquée en plus la visibilité. Sans cesse, les virages cachaient des traitrises insoupçonnées.
Devant les multiples contrôles, la salade des chronos, faisait mélanger les aiguilles et les trotteuses.
Fichus calculs qui faisaient souvent perdre de précieuses minutes.
Sur les 56 rescapés, seulement 5 ne furent pas pénalisés ! Et parmi ces phénomènes, notre équipage sur DB, Cornet-Lecuyer !
Tout le monde soufflait du froid et le visage de l’intrépide et jeune Loulou Cornet, le nez au vent par-dessus le saute-vent de sa barquette, était devenu fripé et noir comme un charbonnier !
LE CRAN D’ESCALLES : UN CAUCHEMAR
Le sommet de la souffrance fut atteint au Cran D’escalles. Le vent hurlait plus fort que le copilote.
Des paquets de neige s’abattaient sur les pare-brises ou les sautes vent, quand ce n’était pas directement sur les lunettes des pilotes de barquettes.
Les roues titubaient, les phares, pas halogènes du tout, tentaient de déchirer l’ouragan. Que venait-on faire dans cette galère ?
Pourtant, il fallait grimper jusqu’au sommet, où, parait-il, se trouvait un monument élevé à la mémoire de Louis Blériot, qui, de cet endroit, s’est envolé en 1909 pour la traversée de la Manche.
En bas, tout de suite à gauche, c’est parait-il… la mer !
Ce fut alors la descente que l’on devinait plus qu’on ne voyait.
Après correction de cylindrée, dans la catégorie Sport : c’est toujours Louis Cornet qui était en tête devant une Triumph et une Ferrari. Puis ce fut encore près de 250 km de slalom hérissés de contrôles un peu partout qui devaient mener les concurrents à Roubaix pour l’ultime épreuve des 500 m où l’on voit ci-dessous la barquette DB de Cornet prête à s’élancer.
La seule satisfaction viendra de Duval sur Monopole-Panhard qui terminera second de cette épreuve peu conventionnelle.
Mille kilomètre de cauchemar, mais une épreuve parfaitement organisée par l’Automobile-Club du Nord, qui honore tous ses vainqueurs, dont Louis Cornet et Lecuyer sur leur Barquette DB 1954 en catégorie Sport.
Charly RAMPAL (Photos Magazine L’Automobile)