Apparue au début de l’année 1959, la Formule « Junior » fut immédiatement un succès colossal !
Cette Formule étudiée en 1958 au cours de réunions techniques dont les animateurs étaient côté anglais : anglais John Cooper, Colin Chapman et pour le côté italien (initiateurs de l'idée) Vittorio Stanguellini et Paolo Volpini.

Partout, les constructeurs lancèrent la fabrication de ces monoplaces, dont la cylindrée ne devait pas dépasser les 1.100 cm3, pour un poids de 400 kg (ou 1000 cm3 pour un poids de 360 kg).

En France, courageusement, certains se lancèrent dans l'aventure... Il s'agit parfois de modèles uniques, parfois de petites séries.
Les marques sont : BALSA 1960, BLANC 1959, BSP 1961, DAGAN 1959, DALBOT 1960, DB 1959, EFAC 1959, FERRY 1959, HB 1961, JOURDAN 1959, JULIEN 1959, MOLTENI 1959, RBS 1960, RISPAL 1959, SERVAL 1961, SGN 1960, SIRMAC 1959.

Cette Formule Junior ne va durer que 5 ans, entre 1959 et 1963. Elle sera remplacée par la Formule 3 1000 cc.

Comme ce site ne concerne que la mécanique Panhard, je vais m’attacher plus précisément à la DB Junior.

On se souvient tous que dans les années précédentes, DB avait brillamment réalisé deux formules de promotion avec les Racer et les Monomill.

Mais avec la formule Junior, la nouveauté prend de l’importance, puisque René Bonnet décide de placer le moteur Panhard à l’arrière : c’est donc l’abandon de la traction avant et une complète révolution pour la firme de Champigny.

En quelques années, la technique de la monoplace a beaucoup évolué. Ce qui était qu’une exclusivité Cooper, est désormais adopté par tous.
Au départ des épreuves, les monoplaces à moteur avant seront montrées du doigt.
Mieux que quiconque René Bonnet a analysé les causes des succès anglais : moteur arrière, profilage, légèreté, suspension à grand débattement, etc… le salut est dans ces solutions, encore fallait-il posséder les moyens de passer à la réalisation concrète.

Les moyens de D.B., entreprise artisanale, sont connus, mais l’enthousiasme efface bien des difficultés. La tâche la plus ardue consistant à adapter aux nouveaux travaux la longue expérience du « tout à l’avant ». La construction de cette voiture, autorise à penser qu’une telle assimilation est possible, les mérites de tous n’en sont que plus importants car le Junior sera avant tout le résultat du travail d’une équipe ce qui rend l’entreprise encore plus sympathique, même si la réussite ne sera pas au rendez-vous.

CHASSIS ET SUSPENSION

Si l’on veut situer ce modèle, il faut oublier tout ce qui fut construit à ce jour par D.B., on chercherait vainement, moteur mis à part.
Le châssis est à structure tubulaire. Sur deux tubes principaux de fort diamètre est soudée une charpente de faible section allant en s’évasant à la hauteur du siège du pilote. L’arrière tronqué permet l’installation complète du flat-twin sans qu’aucun élément de celui-ci ne déborde de l’ensemble comme les précédents modèles à moteur avant.

La suspension fait appel à l’avant à un triangle inférieur épaulé dans le haut par un bras unique sur lequel vient s’appuyer une bielle de poussée destinée à corriger les effets dus au freinage.

Disposition semblable à l’arrière avec cette fois une jambe de guidage style Lotus et elle aussi unique. Le tout étant complété par des amortisseurs télescopiques à ressorts hélicoïdaux co-axiaux.

Reprenant une technique très à l’honneur chez les constructeurs anglais, on a prévu la possibilité de modifier la géométrie du train arrière en fonction du profil des différents circuits, l’opération est facilitée, le changement de position pouvant s’effectuer très rapidement.
Pour les freins, René Bonnet a repris les tambours Alfin qui équipent tous les modèles sport de la marque, aucune inquiétude à ce sujet puisqu’au Mans, par exemple, l’expérience a prouvé que l’efficacité d’un tel système était comparable au freinage par disque.
La direction est à crémaillère et la batterie d’accumulateurs se trouve placée dans le nez de la voiture.
Pour abaisser au maximum le maître couple, les réservoirs de carburant seront fixés entre la charpente latérale du châssis tout au long des jambes du pilote. Le poids de l’ensemble ne dépasse pas les 360 kg.

MOTEUR ET BOITE DE VITESSES

Pas de nouveau moteur, le groupe 954 cm3 équipé pour l’instant de deux carburateurs Zénith est prévu. Il a fourni jusqu’ici 75 ch mais les 80 sont espérés.
Notons que le moteur repose sur 5 points d’ancrage, deux silent-blocs situés derrière le siège, à droite et à gauche, une attache en dessous du groupe et deux autres silent-blocs reposant sur le tube extrême du châssis.

La commande de boite à 4 vitesses a posé de nombreux problèmes qui ont été finalement résolus grâce aux idées émises par tout l’équipe de Champigny.

Le levier placé à droite du pilote commande une tige droite jusqu’à la hauteur du cylindre. Là un cardan, renvoie le mouvement longitudinal à la base de la boite où un dispositif très astucieux commande les déplacements grâce à un étrier et une came.

La sélection s’effectue latéralement, l’enclenchement des vitesses par une poussée arrière. Le refroidissement est assuré par deux conduits latéraux guidant l’air frais prélevé à l’avant vers l’orifice de la turbine situé à la base du siège.

Ce siège d’ailleurs causa beaucoup de soucis à René Bonnet, car sur ce modèle, on a beaucoup sacrifié au profilage, ce qui implique de placer le pilote dans une position très effacée. Le principe Lotus où le conducteur est à demi couché est à priori séduisant. Mais Bonnet constructeur s’est souvenu de Bonnet pilote, or si la position semi allongée peut-être envisagée dans les lignes droites, en est-il de même lorsque le circuit devient sinueux et que le constructeur se sent attaqué à droite et à gauche.
On voit que cette période est une transition entre la position assise des Monomills, à la position allongée des monoplaces modernes : un fois encore ce sont les anglais qui auront raison ! Mais la question s’est posée avec acuité et il a été difficile de trouver une bonne position en course, habitué qu’on été à la « chaise à papa ».

DU PLASTIQUE POUR LA CAISSE

La dernière bonne surprise est la finesse et la pureté de la ligne de la carrosserie. Vu de l’avant, on a l’impression d’un énorme squale, animal, comme chacun le sait, possède un Cx avantageux. L’absence de radiateur de refroidissement a permis cette comparaison. La première carrosserie sera en aluminium, mais ensuite elle sera en plastique une fois que le moule sera terminé.

C’est en mai 1959 que la version définitive apparaîtra. C’est Gérard Laureau qui en fera la mise au point et dégrossira les premiers défauts.
Et des défauts, il y en aura ! Gérard Laureau jugeant sa conduite dangereuse ne fera que le GP de Rouen !

Dommage, 3 ou 4 voitures avaient été prévues et au début des années soixante, la charge de travail était trop importante pour se consacrer à une Formule dominée par les anglais et sans retombées médiatiques comme les 24h Du Mans.

Mais cette réflexion avortée servira à réaliser la barquette à moteur AR du Mans 1961. Mais cela est une autre histoire que je vous ai déjà raconté.

Charly RAMPAL