RACER EN FRANCE : UN NOUVEAU SOUFFLE
Un air de renouveau semble souffler sur le sport-automobile historique en Racer, grâce à une poignée de passionnés irréductibles qui osent dire « NON » au destin malheureux que l’on nous promet en terme d’automobile et insistent sur le plaisir de conduire sans assistance où le pilote reste maitre de ses mouvements et de sa destinée, le tout pour une somme dérisoire !
A l’image de nos amis anglais du « 500 owners association » qui n’ont jamais rien lâché
et qui perpétuent la tradition du sport-auto populaire basé uniquement sur le plaisir, deux clubs en France se sont alignés sur cet état d’esprit en se dépensant sans compter pour relancer le mouvement des Racers, après la disparition du plateau des MEP-Monomill : Le Spirit Racer Club et le Racer Club France, je devrai dire le Fred Marquet Racer Club France !
Le Spirit Racer Club propose même de construire son propre Racer le CC21 pour un montant ne dépassant pas 3.000 €uros, et qui a été l’objet d’un article dans ma rubrique « Racer 500 ».
Ou des Racer construits par des indépendants comme le Racer M20 :
Ou celui de mon ami Christian Dionnet que je vous avais aussi présenté longuement :
Et, côté Racer Club France, l’infatigable Fred Marquet, véritable locomotive du renouveau des Racers en France, principalement des D.B.. La preuve :
CROIX EN TERNOIS ENFIN UNE VRAIE COURSE AVEC LES ANGLAIS
En apothéose de cette année, 4 français, des purs, des vrais, des tatoués, s’étaient inscrits au GP Historique pour un vraie week-end de course avec essais libres, qualifications chronométrée et 2 courses avec classement, comme au bon vieux temps et qui comptait pour le championnat des Racer 500 anglais :
Patrick Jamin sur Racer Boyer, Jean Luc Renard sur Monopole, Dominique Pascal (le journaliste) sur Cooper et Fred Marquet sur son DB, préparation Maison..
Ils allaient pouvoir se mesurer à nos amis du « 500 Owners Club » et leur Racers 500 gavés au Méthanol, qui les avaient accepté en catégorie « Invitation Class » : toujours Fair play ces anglais !
LES QUALIFICATIONS
19 pilotes en tout se présentaient pour les qualifications du samedi, après s’être dégourdis les rotules avec les essais libres.
Notre chauvinisme pour la marque de la Porte d’Ivry, nous obligeait à suivre les deux mécaniques Panhard : le DB de Fred et la Monopole de Jean-Luc Renard.
Fred Marquet sûr de son talent et des performances de son DB, part en tête et accomplit son meilleur chrono au 5ème tour ce qui le placera en deuxième position juste derrière l’intouchable Jamin et son galactique Racer Boyer (Bernard, si de tout là-haut tu me lis, je te salue !).
Fred n’insistera pas car ses tendres pneus commencent à perdre de l’adhérence : autant les préserver car insister ne servirait à rien que de les fusiller.
Jean-Luc Renard se familiarise avec le circuit et la Monopole : il se qualifie en 16ème position.
LA COURSE 1
Pour les courses de Racer 500 anglais, le départ est donné lancé.
Jamin et Fred se partage la première ligne.
Derrière, les ténors anglais qui savent tenir le manche malgré leurs 500 cc ont pour nom : Mike Fowler, Simon Dedman et Nigel Challis !
Le moteur de Fred hoquette à l’accélération et deux gars le doublent.
Il mettra cinq tours à comprendre ce qui se passe et surtout à réagir en se disant que quatrième en ayant été second aux chronos ce n’est pas supportable !…
A fond de partout, le couteau entre les dents, Fred attaque et arrive peu à peu à rejoindre Mike Fowler et son Cooper MK5 : là ce n’est pas le même calibre, lui c’est du très très rapide, c’est un habitué de la plus haute marche du podium !
Peu à peu Fred s’en approche et leurs roues se font une première bise à l’épingle !
Fred l’analyse et prépare son coup en bout de ligne droite après un freinage d’enfer.
Peu à peu Fred creuse une petite avance pour terminer 3 secondes devant !
Viril, mais correct les deux belligérants tomberont dans les bras l’un de l’autre : c’est ça la vraie course avec de vrais pilotes, pas des foldingues sortis d’un asile régional !
De son côté, Jean-Luc Renard commence a prendre la mesure de sa Monopole et termine à la 12ème marche.
COURSE 2
On prend les mêmes et on recommence.
Mais cette fois, Fred a retenu la leçon de ces départs lancés et faisant bien cirer son embrayage pour rester en contact avec Fowler et sa bombe badgée, Norton Manx.
Tandis que Le Racer Boyer de Jamin s’envole, Fred met en application sa stratégie de départ et reste collé au capot arrière de la Cooper de Fowler pendant un tour pour profiter de l’aspiration.
Il terminera de nouveau second avec 6 secondes d’avance sur le champion anglais.
Pendant ce temps, Jean-Luc n’arrête pas sa progression et il terminera à une belle 8ème place et Dominique Pascal un peu moins bien, avec la 12ème place sur l’authentique Cooper MKIV ex. Harry Schell que Gilbert Lenoir lui avait prêté.
Un week-end de rêve total. Une amitié Franco / Anglaise comme on l’aime, l’ensemble ponctué par un apéro du Club, avec discours du «Chairman» Nigel Challis pour saluer notre venue, mais aussi annoncer que quelques chose se tramait du coté de la France au niveau des Racers….
Je vous l’ai annoncé en titre : le renouveau, quoi !
Et je suis sûr que tout là-haut, Alain Gawski est heureux de voir une nouvelle équipe avancer dans le chemin qu’il avait tracé avec les MEP-Monomill en VHC ! Salut l’artiste… une nouvelle génération arrive !
ATTENTION : NE VOUS LAISSEZ PAS ENFLAMMER PAR LES « DEMONSTRATIONS »
Justement, mon ami Fred Marquet m’avait signalé que l’année dernière à Bressuires, il avait fait les frais de ces types de « roulage » en se faisant pousser par « un pilote du village » qui n’acceptait pas avec sa voiture de 150cv de se faire taper par un DB Panhard de quasi 3 fois moins !
Le Racer de Fred monté sur ses pneus de mobylettes, comme toutes nos DB et lui sur sa monoplace équipée d’un train de slick neuf !
Fred avait quitté ce circuit après cette poussette, bien dégoutté, se jurant de ne plus jamais y remettre ses roues.
Le pire de cette attitude foireuse, était que cet énergumène « pour se donner bonne conscience », était en plus parti se plaindre à la « direction de course », disant que c’était de la faute de Fred !
Ben voyons c’est lui qui l’avait tapé à l’arrière en « oubliant » de freiner !! Souvenez-vous des paroles d’Audiard : « les Cons, ça osent tout, c’est à ça qu’on les reconnait » !
Mais cette année la bêtise a encore franchie une étape supplémentaire, ce ne sont pas moins de 5 autos qui ce sont accrochées assez violemment.
Pas d’autres mots que celui « d’insupportable » comme genre de comportement pour une démonstration… de connerie quoi !
En fait le problème, dans ces démonstrations, vient souvent des « pseudos pilotes « du cru ».
Ils y prennent tous les risques, et bien sur là, devant toute la famille « Tata Simone, Tante Huguette et le cousin Louis » ils se doivent de « briller » et d’étaler leur talents incroyables, ce sont des vrais dangers que nous ne croisons jamais ailleurs, mais qui prennent vos roues pour des quilles.
Cette année, c’est Michel Labarde, le Président du RCF qui en a fait les frais ! Une roue arrière arrachée sur son DB, cela fait d’autant plus mal que son auto et une rare authentique : ex Michel Aunaud.
Mais ce n’est pas tout, un autre copain, Daniel Heurton s’est violemment fait percuter la veille par le même « pilote zouave » qui sera responsable du carambolage du dimanche. Pas impossible vu la violence du choc que son châssis n’est pas pris un bon pet.
Un bon conseil évitez ces endroits, et laissons les jouer entre eux…. Allez plutôt avec nos amis britanniques, de vrais pilotes que j’ai pu apprécier dans de vraies courses : la classe quoi !
UN REMAKE DES ANNEES 45 / 50
Mis à par ces « Trophées de village », ce renouveau, me rappelle la situation de l’Europe au sortir de la deuxième guerre mondiale qui commençait à panser se plaies et que la frénésie de la compétition, réprimée pendant six longues années, saisissait à nouveau, les vrais amoureux de l’automobile sportive.
Pourtant, le monde automobile de cette triste époque se réveillait sur des ruines et des larmes.
Les voitures de course étaient rares, chères et dataient d’avant 1939.
Ce sont les anglais (encore ? Eh oui !) qui allaient prendre l’initiative du renouveau du sport-automobile en Europe, en créant dès 1946 un mouvement que l’on pourrait résumer par « faites votre voiture de course vous-mêmes » !
En quelques années, des monoplaces simples et légères utilisant toutes sortes de moteurs de motos ou de voitures, déferlèrent sur l’Europe, au point que la Fédération Internationale de l’Automobile, leur attribua, à partir de 1950, le statut de « Formule Internationale III ».
LA NAISSANCE DU MOUVEMENT 500
C’est donc, dès 1945 en Grande Bretagne que l’intérêt se porte sur les voitures de courses 500 cc sans compresseur, permettant ainsi d’utiliser de nombreux moteurs de motos, mis au rebut.
Une première réunion à la « Bristol Aéroplane » groupa près de 80 constructeurs !
Un projet de règlement fut établi à Filton le 25 mars 1946 devant une cinquantaine de représentants de divers clubs.
Dans une première définition, on spécifia un poids minimum de 250 kg avec carburant, huile et pneus, carburant libre, capacité du réservoir maximum de 5 litres, marche arrière non obligatoire, carrosserie libre.
La vitesse estimée étant environ 135 km/h pour des puissances prévues aux alentours des 35 ch.
Fin 1945, Lord Howe accepta la présidence du club 500, Raymond Mays la vice-présidence, ainsi que J.F. Findon, commentateur des sports mécaniques à la BBC.
Le club décida la création d’une formule 500 nationale dont l’entrée en vigueur devait être effective dès 1947, validant une réglementation basée sur les critères suivants :
- Moteur maximum 500 cc sans compresseur
- nombre de cylindres libres
- carburant libre
- capacité du réservoir maximum = un gallon
- poids à vide 500 livres minimum
- quatre roues
- écartement minimum 3 pieds
- marche arrière non obligatoire
- freins sur les 4 roues
- Carrosserie souhaitée mais non indispensable
- Barrière anti feu recommandée
En 1947, naissance du magazine IOTA entièrement consacré aux Racers 500 et édité par Adrian Butler.
Un premier rendez-vous le 28 juin avorta par manque de concurrents qui n’avaient pas pris au sérieux cette réunion sur le circuit improvisé du Blackburn Aircraft Compagny’s Airfield, à Brough, le Vintage Sports Car Club et le Cambridge University Automobile Club , organisèrent le 31 juillet une épreuve sur la piste d’envol de l’aérodrome de Gransden Lodge.
A la fin de saison1947, à Brighton, à l’occasion de la victoire de John Cooper dans la classe 500, un débutant nommé Stirling Moss, conquis par la vélocité de ces petites monoplaces, décida sur le champ de passer commande de la nouvelle Cooper dont la commercialisation était prévue au début de l’année suivante.
En 1948, c’est la consécration du Club des Racers 500 avec le parrainage du Royal Automobile Club qui met à son programme, en lever de rideau des différentes épreuves : une course réservée aux racers 500 !
Ce n’est qu’en 1949 que les 500 vont prendre une place appréciable dans l’ensemble des programmes sportifs automobiles britanniques.
En 1950, le Daily Télégraphe (un million de lecteurs) appuie le mouvement des 500 qui trouve la consécration auprès du grand public.
Quelques pilotes anglais vont courir en France, Belgique et Monaco.
Les 500 sont une sérieuse pépinière de pilotes et de constructeurs.
Parmi les marques anglaises les plus en vues, et dont certaines seront commercialisées, la plus importante étant Cooper, il faut aussi citer, dans le désordre : Kieft, Parker, JBS, Marwyn, Emeryson, Strang (un des pionniers) Trimax ; Bond, Smith, Iota.
Le mouvement 500 est bien lancé.
Pour la Belgique, en 1947, le docteur Jules Boucquet et Victor Van Den Brempt se rendent en Angleterre pour prendre connaissance du mouvement 500 anglais.
Enthousiasmés, ils reviendront avec la ferme intention de développer ce mouvement chez eux.
Sous leur impulsion, une demi-douzaine de racers 500 seront construits entre 1948 et 1952, les principaux étant Dofin, DMRA, Demesse, Gemco, Hanlet, Khan, Saro, Teina, VSM.
Le Luxembourg suit en produisant la Zigrand.
En Hollande, en novembre 1948, un nouveau club voit le jour : c’est le 500 club Nederland dont le président (pilote sur Cooper) est Piet Olyslager.
Les deux marques principales sont Gotten et Dush.
Le Danemark rejoint les autres pays avec les Alfa-Dana, Hansen.
La Suède n’est pas en reste : le principal constructeur, c’est Effyh. Suivront Lunberg, Suecia, Swebe (construite par Bengt Peterson, père du célèbre pilote de F1 : Ronnie Peterson).
La Finlande est représentée par Elhoo et KG.
L’Irlande avec Candless et Leprechaun.
En Ecosse, la JP.
La Suisse a vu l’éclosion de quelques racers de qualité tels que Kasa, Glückler, JKZ, Ultra, Wehrlin .
L’Allemagne a construit principalement les Monopoletta, Scampolo, Atlas-Bergmann, Condor, Flying, Frish, Haller, Juwel, Kondor, Tarpon, Weiss, LTE Brillant.
L’Italie dont la spécialité en petites cylindrées est la catégorie 750 cc, rejoindra un peu plus tard le clan des 500 avec des réalisations très réussies, telles que Volpini, Falconne, Urania, Moretti, Nardi-Danese, Branca, Fagioli, Giaur, ainsi que deux racers prévus pour des records divers Tarf et Nibio.
Tous ces constructeurs de diverses nationalités (il faut ajouter également les Etats-Unis, l’Australie et la Nouvelle Zélande) vont participer avec plus ou moins de réussite à ce que sera la Formule III 500.
En France, c’est le 14 avril 1948, dans le bar du siège de l’A.G.A.C.I. (Association Générale Automobile des Coureurs Indépendants) que s’est tenue la première réunion des 500.
La composition définitive de la commission en vue d’établir un règlement était la suivante :
-Président : Jean Bernardet, assisté de Serge Pozzoli, Charles Deutsch, Georges Boschetti, Jacques Rousseau, Maurice Mestivier, dynamique président de l’A.G.A.C.I. appuie fortement le projet de la commission des 500 qui lance, dès janvier 1049, le n°1 du bulletin « Racer 500) qui sera diffusé jusqu’au n°20 en 1951, et qui sont à la base de toutes mes informations sur ce mouvement.
Charly RAMPAL Pour Croix : Sur des infos de Fed Marquet et photos de Ludovic Boubet