RETROMOBLE 1987 : RETOUR DE PANHARD DANS LE TOP TEN DES GRANDES MARQUES
C’est le 14 février 1976, que Marc Nicolosi et Jean-Pierre Jouët lancèrent le premier salon Rétromobile sur le site désaffecté de la Gare de Paris-Bastille.
Le salon se déroule pendant neuf jours (14 au 22 février 1976), et de nombreuses voitures sont exposées dont une partie est fournie par l’ASAVÉ (Association Sportive Automobile des Véhicules d’Époque) fondée par son ami Serge Pozzolii (grand collectionneur d’automobiles anciennes).
Après cinq éditions, au vu de l’accroissement continu de l’événement et du manque de place à la Bastille, le salon déménage au Parc des Expositions de la Porte de Versailless pour l’édition de 1981, et Marc Nicolosi en est le directeur.
Dans les années 70, j’étais revenu à mes premiers amours : Panhard avec l’achat d’un 24 CT de 1967 à plaque Citroën.
Et bien évidement pour la faire rouler et ne pas me sentir isolé, j’adhérai au seul grand club français du moment : Le Club Panhard France avec le n° 180.
Dès cette date et vivant en région parisienne, le point de chute des panhardistes étaient la famille Demantes à Pantin qui étaient les responsables de la région parisienne.
Immédiatement, le courant passa entre nous et fort de notre union, je commençai à m’impliquer dans la vie de ce Club à travers toutes ses manifestations.
C’est ainsi que pendant 5 années, je les accompagnais et tenais avec eux le seul stand de la marque à La Bastille, façon stand de pièces détachées, comme on peut le voir aujourd’hui dans les provinces.
Puis, il y eu cette cassure propre à chaque gros club, entre les « pour » et les « contre », et après une année sabbatique, un peu dégoutté, je rejoignais le DCPL (Dynamic Club Panhard et Levassor) pour y suivre les Demantes.
La famille Demantes jeta l’éponge de la direction de la section et c’est le tout jeune et talentueux Olivier Meston qui en pris la responsabilité en ma compagnie.
Après des années de pénuries de 1981 à 1986 où les panhardistes cherchaient désespérément une représentation « Panhard » à Rétromobile, nos dirigeants nationaux furent contactés par Nicolosi pour répondre au thème de 1987 qui a fait la réputation de Panhard : l’aérodynamisme !
En effet, chaque année, Marc donnait un thème au salon et ceux qui y répondaient avec application et modèles adaptés, pouvaient bénéficier d’un stand à la hauteur des ambitions médiatiques et planétaires de ce salon alors installés à la Porte de Versailles au Palais des sports.
C’était l’occasion rêvée de renouer avec le prestige de la doyenne des marques automobile et de lui donner le rayonnement qu’elle méritait.
C’était aussi l’occasion de faire revivre et de rassembler tous les acteurs prestigieux de la marque avec à leur tête Jean Panhard et tous ses ingénieurs.
LA PREPARATION :
Pour répondre à la demande de Marc Nicolosi et faire briller nos couleurs, il nous fallait apporter du lourd en aérodynamisme.
Le choix se porta sur la Dynavia
et pour le côté sportif auquel je tenais : le CD de 1962, mais pas n’importe lequel, il nous fallait celui qui avait gagné au 24 Heures du Mans, afin d’attirer les anciens pilotes et surtout l’équipage vainqueur : Guilhaudin / Bertaut.
Motivé par ce challenge, ce fut la mobilisation générale non seulement à la tête du Club, mais sur le terrain de Rétromobile avec la tenue du stand que l’on voulait exemplaire.
C’est ainsi qu’avec mon ami Olivier Meston nous allions nous défoncer en posant 10 jours de sur notre quota de congé professionnel : mais que ne ferait-on pas pour Panhard !
Et il en sera ainsi pour moi chaque année, jusqu’en 2010 à ce haut niveau des stands siégeant dans le hall d’entrée : un bail ! Le regretté Olivier nous quittera début 1991 à la suite d’une très grave maladie (merci Olivier, mon ami..).
Pour cette ouverture dans cet espace prestigieux, il nous fallait trouver les moyens financiers pour couvrir les dépenses à engager.
Nous avons du faire appel à Jean Panhard qui partagea immédiatement notre enthousiasme. Et c’est grâce à lui que nous avons pu présenter la Dynavia sur notre stand.
En effet, les démarches qu’il poursuivait sans relâche depuis des années auprès du Conservatoire National des Arts et Métiers ont trouvé un heureux dénouement le 20 novembre 1986 à 14 heures précises !
La Dynavia entrait donc dans notre camp et partie se faire une toilette dans les ateliers du Musée de Mulhouse d’où elle sera transporter jusqu’à notre stand.
C’est aussi le Directeur de ce fabuleux Musée, Monsieur Delerm, qui nous prêta également le CD victorieux du Mans 1962 à l’indice.
Nous contactions de ce fait les deux icones qui la pilotaient : André Guilhaudin et Alain Bertaut, pour nous assurer de leur présence.
INAUGURATION DE NOTRE STAND A RETROMOBILE
13 février 1987 : une date qui marquera notre club et tous les panhardistes.
C’est bien ce jour là qu’eut lieu l’inauguration de notre stand par le Président Jean Panhard.
C’était surtout le couronnement de tous les efforts que nous avions déployés pour le grand rayonnement de la marque, afin qu’elle conserve, ou plus exactement retrouve au sein de Rétromobile la place qui doit revenir au plus ancien constructeur de voitures automobiles.
La Dynavia a été le clou du Salon et c’est elle qui était à la base de notre prestation et à cause d’elle, tout pouvait s’effondrer.
Jusqu’au dernier moment le stress nous habita de façon maladive.
Aussi, quand au petit matin du jeudi 12 février nous vîmes se pointer le camion de Mulhouse, où trônait sur le pont supérieur la Dynavia et le CD n°53 du Mans 1962… nous avons poussé un grand ouf de soulagement et un bonheur incommensurable nous envahi de les avoir à nous seuls, après une nuit blanche Antée par tant de démons !
Le top départ était donné et décuplait nos forces et entrain pour l’aménagement du stand.
Il ne restait plus que la présence des personnalités que nous avions invitées pour le vendredi 13 (Eh oui, comme un signe du Cosmos !) pour 11h.
Et lorsque vers 10h30 les invités commençaient à arriver en nombre, nous savions que la deuxième manche était gagnée !
LA FRATERNITE PANHARDISTE
Il nous semblait tout à fait logique que les anciens de l’Avenue d’Ivry se retrouvent sur notre stand à cette occasion, et qu’ils puissent mesurer combien l’esprit Panhard était toujours vivant, et que l’œuvre créatrice à laquelle ils avaient contribuée, n’avait pas été altérée par le temps.
Tous avaient répondu à notre invitation, échangeant souvent avec une grande émotion, des souvenirs d’antan !
Nous avions même invité des membres du S.C.M.P.L. le secteur militaire qui appréciait à cette époque l’efficacité et la maitrise technique du savoir faire Panhard.
Enfin, toute aussi normale et grandement souhaitable était à nos yeux la présence des autres clubs et Associations Panhard de France et de l’étranger : tous les Présidents de ces groupements répondirent présents.
Car notre stand était bien celui de TOUS les panhardistes.
Il était donc le lieu privilégié pour que le Président Jean Panhard y fasse son discours d’inauguration et le termine par l’annonce officielle de la naissance de la Fédération des Clubs Panhard.
Cette Fédération doit aller dans le sens de ce que nous souhaitions depuis longtemps : l’Union pour plus d’efficacité afin que les panhardistes de plus en plus nombreux, puissent s’y retrouver en dehors des querelles de personnes et penser à notre crédibilité auprès des fournisseurs en matière de politique rationnelle de re-fabrication de pièces essentielles à la maintenance en état de marche de nos voitures.
C’est donc Jean Panhard qui en prendra la Présidence et sera efficacement aidé dans sa tâche par Robert Panhard et Etienne De Valance, amis aussi de Monsieur Dumont Directeur des relations publiques de la S.C.M.P.L..
Grace à cette Dynavia, nous allions faire le connaissance de Monsieur Jouan qui était le bras droit de Louis Bionnier et grand ami de Louis Delagarde.
C’est précisément Monsieur Jouan qui, dès 1944 avait été chargé de l’étude de ce prototype expérimental.
Après avoir triomphé de sa modestie, nous avons pu apprendre que cette voiture absolument révolutionnaire, était le fruit de milliers d’heure de travail passées par l’équipe de Louis Bionnier sur leur planche à dessin en dehors des heures syndicales, car il n’y avait pas d’ordinateur à cette époque, mais beaucoup de foi et d’abnégation !
Aussi, après la guerre, chacun avait à cœur de relancer la machine : ils avaient donc décidé que les heures consacrées à cette étude seraient prélevées sur le temps de repos.
Nous étions encore loin de nos surprises et le dimanche 15 février nous vîmes débarquer les caméras de FR3, alors que nous avions eu celles de l‘A2 la veille pour le journal national !
Mais encore Europe 1 qui, dans ses communiqués de la matinée, avait incité les visiteurs de Rétromobile à venir nombreux sur notre stand pour admirer la Dynavia.
D’où la présence des caméras de FR3 qui, préparant une série télévisée sur l’automobile, avait décidé de commencer par Panhard… Ce qui a tout de même demandé plus de trois heures de tournage, dans une ambiance des plus sympathiques : le journaliste ayant eu une Dyna Z1, ça ne s’invente pas !
Mais encore sur les ondes d’Europe 1, Jean Panhard ne tarissait pas d’éloge notre travail et la tenue de notre stand parmi les plus grandes marques de l’Histoire automobile.
LES RETROUVAILLES
Tellement satisfait qu’il allait revenir à nouveau sur notre stand le jeudi 19 à 16h… Pour le remercier, nous voulions lui faire une surprise : le faire accueillir sur notre stand par Messieurs Delagarde,
Jouan, Gulhaudin et Bertaut !
Marc Nicolosi, le grand patron de Rétromobile, fut mis dans la confidence de ce projet nous proposa spontanément d’organiser une petite réception en l’honneur de toutes ces personnalités dans le salon du commissariat du Palais des expositions.
C’est moi qui avais eu l’immense joie et privilège d’aller chercher Louis Delagarde chez lui au pied du Parc de Sceaux en banlieue sud de Paris.
J’avais à cette époque une PL17 1962 que j’avais fait repeindre en deux tons selon mon goût personnel : bordeaux et toit crème.
Il avait été heureux de pouvoir rouler en Panhard d’époque et de voir combien son oeuvre a été appréciée et prolongée à ce jour.
Depuis, à l’occasion des Rétromobile suivants, j’étais devenu son chauffeur jusqu’à ce que ses forces l’abandonnent.
Une fois rassemblés, ce n’est pas sans une certaine émotion que Jean Panhard venait de retrouver Louis Delagarde du haut de ses 88 ans : un homme extraordinaire.
Aussitôt, tous deux se plongèrent dans la résolution du théorème de Fermat qui, en mathématique, est un résultat de l’arithmétique modulaire qui peut aussi se démontrer avec les outils de l’arithmétique élémentaire, sur lequel travaillent les « matheux » du monde entier depuis 3 siècles, et que vient de trouver Louis Delagarde sans l’aide d’un ordinateur bien entendu .
Ne soyons pas surpris alors, que nos voitures soient les plus intelligentes du monde !
Et jusqu’au bout, Louis Delagarde consacrera toute son énergie à la résolution de problèmes les plus ardus, à inventer un système de transmission intégrale absolument révolutionnaire, penché sur sa table à dessin…
Vous pouvez ainsi vous imaginer toutes ces conversations entre anciens de Panhard entourés de tous ces passionnés qui n’en revenaient pas d’avoir approché de si près et d’avoir partagé avec eux ces moments inoubliables.
De mon côté, comment ne pas porter haut et fort cette marque automobile que nous aimons quand ce capitaine d’industrie qu’est Jean Panhard vous tient dans ses bras à chacune de nos rencontres, pour me remercier de ce que je faisais pour sa marque !
Comme toutes les bonnes choses ont une fin, nous allions néanmoins vivre les trois derniers jours, la tête pleine des ces merveilleux souvenirs et fiers d’avoir remis Panhard sur l’orbite des 10 plus grandes marques automobiles du monde, grâce à Rétromobile et Marc Nicolosi, un grand Monsieur !
Charly RAMPAL (souvenirs et photos d’époque)