Le mercredi 19 août à 19 heures, 92 voitures étaient réunies dans la magnifique cour des Princes-Evêques de Liège prêtes à prendre le départ de Liège-Rome-Liège, organisé par le Royal Motor Union, véritable « épreuve de la peur », où le destin seul a la parole tout au long de ses 5.133 km…

Sur un signal de M. Garot, commissaire général de l’épreuve, les concurrents s’ébranlèrent en file indienne sous les applaudissements d’une foule immense en direction de Spa d’où allait être donné le véritable départ.

Ce défilé à 20 km/h allait permettre de chauffer les spectateurs mais aussi inutilement les moteurs peu enclins à tourner à un régime de trottinette !

Spa, la très calme station thermale des Ardennes avait revêtu ses beaux habits de gala, avec des drapeaux multicolores accrochés aux fenêtres et dans les arbres.

Et les valses de Strauss du romantique orchestre du Casino , étaient couverts par les bruits des moteurs de compétition.

A 23 heures, dans une atmosphère de kermesse, la première la première voiture fut lâchée : le Marathon de la route pouvait commencer.

Les Alpes, avec les cols de la Croix, de l’Isoard, d’Allos et autres seigneurs aux lacets très méchants, fournirent une première sélection.

A l’Escarène, après 1.234 km de course et avant l’attaque du parcours italien, 29 voitures avaient déjà capitulé et un très grand nombre avait récolté quelques centaine de points de pénalisation.

Mais cela était bien dans la tradition de ce rallye au cours duquel les concurrents tombent comme des mouches qui auraient eu la folle idée de vouloir traverser les Alpes…. A 60 km/h de moyenne !

Le col de Tende et les 900 km séparant l’Escarène de Rome firent encore 9 victimes, parmi lesquelles les « ténors » belges Strasse-Hermand, sur Porsche 1500, qui capitulèrent à Pise.

11 voitures seulement firent leur entrée, vierges de toute pénalisation, dans la ville éternelle, les 44 autres rescapées ayant entre 17’’ et 2 h 24’ de retard.

Le fait que 7 Lancia se trouvaient alors dans le groupe de tête, prouvait bien que la firme italienne avait soigneusement préparé et pensé cette épreuve.
Mais la performance qui étonnait le plus était celle des français Fabre-Cazon, sur Panhard 850, qui se trouvait à 4’ 41’’ seulement des grosses cylindrées.

3000 km restaient à couvrir et les jeux étaient loin d’être faits.

Le temps ne devait pas tarder à se gâter et, sur les routes, ou plus exactement les sentiers muletiers, la pluie, puis la neige fondue, se mirent à tomber, transformant le sol en patinoire.

Les concurrents vécurent un véritable enfer dans les cols du Stelvio et du Gavia : plusieurs allèrent même au décor, tel Polensky, le gagnant de l’an passé.
Mais les Lancia continuaient à mener la danse.

A Turin, après 3.468 km, 38 voitures seulement restaient en course et le duel Lancia – Jaguar dominaient la première catégorie, tandis que les Porsche 1500 et 1300 décevaient et que les Peugeot et les Panhard fournissaient une belle course d’ensemble.

Une autre terrible épreuve attendait les concurrents au retour : les Alpes françaises.

Et, dans ce rallye, chaque montée de col équivaut à une course de côte.

A Pontarlier, une nouvelle éclata comme un coup de tonnerre : les leaders italiens Christillin – Fiorio, qui étaient tombés en panne d’essence , avaient perdu 15 mn et rétrogradaient ainsi à la 4ème place du classement, la Jaguar passant en 2ème position et la Ferrari 2 L de Herzet – Bianchi, qui continuait à tourner comme une horloge, à la 3ème .

En tête, John Claes avait donc le redoutable honneur de défendre seul, les chances de Lancia.

Celui-ci, conduisit pendant 50 heures d’affilée sans dormir, se nourrissant à peine, suppléant à son coéquipier, vidé physiquement et moralement !
Sa victoire restera celle du courage et ne peut se situer qu’à l’échelle de la valeur humaine.

A Spa, une foule enthousiaste attendait les 28 survivants de ce championnat d’endurance, de régularité et de grand tourisme.

Ayant pris le sens de l’exploit réalisé, la foule envahie la ligne d’arrivée et le parc fermé, pour accueillir ces héros, débordant le service d’ordre et rendant le travail des journalistes bien difficile. Mais ce n’était que la rançon du succès.

A l’examen des performances des marques engagées, Lancia mérite de figurer en première place, groupant 5 voitures sur les 7 premières.

Avec sa cylindrée moyenne, la Lancia Aurélia a démontré qu’elle possédait toutes les qualités nécessaires pour aller très vite et très loin.

Jaguar n’a pas démérité, mais a été dépassé par la course d’écurie de la firme de Turin.

Les Porsche 1500 et 1300, pourtant bien armées pour cette épreuve, sont les grandes vaincues des Alpes et des Dolomites.

Aston-Martin était la 3ème marque à aligner une voiture d’usine qui n’a pas terminé ce rallye.

Ferrari a tiré son épingle du jeu en plaçant une 2 Litres en très bonne place.

Alfa-Roméo a montré le bout de l’oreille, prouvant ainsi qu’il faudra désormais compter sur elle.

Chez les français, le robustes Peugeot ont réussi une belle performance d’ensemble dans ce rallye à leur mesure.

Mais la palme d’or revient aux Dyna Panhard qui ont dominé largement leur catégorie dépassant les Renault d’une tête.

La petite Dyna X n°109 de Fabre-Cazon a étonné les Liégeois : les deux sympathiques pilotes ont eu droit à un véritable triomphe à l’arrivée.

Avec un 850 cc battre toutes les voitures de troisième catégorie et tenir tête à celles de deuxième et première catégorie, pendant les 5.133 km, est un exploit peu banal !

Pour le fun : cette voiture qui comptait parmi les plus petites, avait la plus grande et la plus confortable couchette = 1 m 90 !

Cette épreuve restera longtemps au firmament des rallyes prestigieux car elle constituait un banc d’essai d’une sévérité sans égale que seuls peuvent terminer des mécaniques et des pilotes de grande classe : Panhard était de celles là.

Le Junior-Pichon de Baathelier-Vigneron :

Le Junior-Pichon de Bousquet-Dubor :

Le Junior de Thys :

La Dyna spéciale de Meunier-Cornu :

CLASSEMENT GENERAL :

CLASSEMENS PAR CATEGORIES :

Charly RAMPAL