Jean Faure a débuté la compétition vers 1961 avec un coach DB HBR5 à moteur Panhard 850 cm3 . En 1962 il plie ce DB .

Il récupère toute cette mécanique à haut rendement qu’était ce moteur à l’époque et
décide de construire une monoplace .

Il est persuadé qu' une auto hyper légère et maniable, équipée de cette mécanique performante, devrait faire un malheur en côtes et pourquoi pas en circuits .

Jean Faure attaque donc la réalisation, tout seul au fond de son garage rue du chemin du Bouquet à Montélimar dans la Drome. Il a 27 ans.

Aux heures où les gens « raisonnables » sont autour de leur téléviseur (il faut dire qu’au début des années soixante, c’est encore un luxe), Jean Faure lui essaye de faire bon ménage avec cette passion qui le ronge.
Mais toutes ces heures passées à construire son bijou sont pour lui des moments de détentes : alors, ne le plaignons pas !

Car Jean Faure est représentant pour une grande marque de produits agricoles.
Dans la tranquillité de son atelier il élabore avec un soin infini SA voiture.

Même le volant a été fait main, un peu comme les Gayraud pour la Trouis, il est parti d’une plaque de noyer qu’il accouple avec l’indispensable duralinox.

Pour la carrosserie en polyester, Jean Faure n’a pas craint de commencer par l’ABC en se rendant dans un atelier spécialisé afin de fabriquer lui-même ces moules qui servent à couler les quatre éléments de ce carénage : l’avant, les deux côtés et l’arrière. Le déshabillage pouvant s’effectuer en un temps record par un système d’attaches rapides.

Le moteur Panhard de son DB est bien entendu le 850 cm3, qu’il a étudié avec soin et bien mis au point et qui peut rivaliser avec « le maximum autorisé » dans cette catégorie et qui est toléré à 1.000 cm3.

Il travaille aussi à fond sur les suspensions en essayant plusieurs types d’amortisseurs pour donner à son engin son équilibre indispensable : Jean Faure est un perfectionniste.

PRIORITE AUX COURSES DE COTE

Il est bon toutefois de préciser que Jean Faure n’en est pas aux balbutiements.
Déjà, il y a deux ans, il est passionné de courses de Formule 3 et de côte en particulier.
Il est vrai que la région s’y prête et il a peu d’affinité pour les circuits.

Pour lui, le tracé mythique reste le Ventoux, mais il commencera par celle du Pin aux portes de Valence.
Comme bien souvent pour mettre au point une monoplace, il doit se rendre sur un circuit. Ce sera celui de Miramas, alors en pleine activité.
300 km aller/retour, avouez qu’il faut avoir la foi ! Mais c’est le prix à payer pour éliminer les principales déconvenues et se mettre la voiture bien en mains : « comme un chausson » dirait Hakinen à Monaco.

Il réalise même sa remorque pour transporter sa FAURE-Spéciale, tube par tube, ce qui explique encore la minutie de son travail !

On le voit, Jean Faure essaye de mettre tous les atouts de son côté tout en restant un « pilote du week-end »,

En 1963 il présente sa voiture au départ de la course de côte du Pin .
Les commissaires sportifs ne veulent pas le laisser partir .

Il faut dire quelle était brut de décoffrage et, il faut bien le reconnaître , pas belle du tout . Aziomanoff et Granjon passant par là soutiennent Faure dans son plaidoyer .

Il obtient finalement l'autorisation de partir !

C’est à ce moment là qu' Aziomanoff a persuadé Granjon de faire eux aussi une monoplace en lui disant : tu te sens capable d'en faire autant ?
Et Granjon de répondre : oui et mieux ! Je tiens ça de Granjon lui même.

Par la suite Jean Faure a pas mal tourné et galéré en cotes et circuits avec cette voiture en 1964 , tout en côtoyant la GRAC MT1 .

Pour 1965 GRAC lui a proposé le volant de sa MT2 .

Jean Faure démarre donc comme pilote officiel de la GRAC MT2 à moteur Holbay .
Il commence la saison en fanfare avec le record de la course de côte du Pin et continue avec une magnifique 4ème place au GP de France en F III sur le circuit de Charade .

Mais la belle entente tourne court . Tous ces gens là ont une très forte personnalité et l'entente ne va pas sans heurts .
Gérard Gamand nous en parle dans son livre sur les GRAC .

Jean Faure reprends donc son indépendance.

Il renfile son bleu et passe ses nuits au fond de son garage, toujours chemin du Bouquet à Montélimar, plus déterminé que jamais à faire triompher ses théories concernant la conception de sa voiture .

Il reprend sa mécanique Panhard et créé sa propre marque : JEFA , contraction de ses initiales JEan FAure .

La voiture est belle et n’a plus rien à voir avec la FAURE SPECIALE de 1963 .

Cette voiture est de type F IV ou Nationale, formule soutenue par M. Castagnon président de l' ASA Armagnac Bigorre.

Freins à disques de R8G - Moteur boite Panhard 4 vitesses , 70 cv minimum - Empattement 2 mètres - Voies 1,28 mètres - Poids 300 kg .

Cette même année, il présente son nouvel engin qu’il doit piloter à la course de côte du Colombier. Il réalise 2’50’’ lors de son premier essai, alors que le record du moment est de 2’47’’.

Mais son morceau de bravoure au volant de SA monoplace restera le record au Pin.

Grace à un excellent départ et sur un parcours qu’il connaît autant que son jardin, il se joue des difficultés et bât le record de Maublanc (un spécialiste) de 3/10ème en 4’34’’6/10 ! A plus de 92 de moyenne.
C’est une performance remarquable face aux Porsche Carrera et autres Abarth.

Dans la région Rhône Alpes c’est un engouement formidable, JEFA ... GRAC ... Tout le monde rêve et cela déclenche des vocations.

Jean Faure n’est pas avare et partage sa production avec des copains : Jean-Luc Cluzel 26 ans, mécanicien à Annonay et Jacky Buffa, 26 ans, tourneur de métier.

Chacun veut construire sa voiture et c’est Jean Faure qui leur passe ses plans et ses moules pour ce « copier/coller » : elles seront labélisées « JEFA » en son honneur.

Toujours équipées du moteur Panhard, elles atteindront les 200 km/h.
On voit ici celle de Cluzel au départ de la course de côte du PIN :

A force de travail, de courage et de persévérance, ils sont parvenus à satisfaire leur passion, participant eux aussi aux courses de côte régionales

Deux autres voitures JEFA sont donc construites par Jean Luc Cluzel et Jacky Buffa .

Seul Cluzel persistera et fera plusieurs saisons avec Faure.
On les voit ici côte à côte à Nogaro :

La JEFA à moteur Panhard n’a jamais été une formule bleue . Elle aurait pu l’être .
C’est une autre histoire ….

La formule bleue était monotype et les autos étaient les MEP X2 puis X27, comme vous le savez : je vous les raconte à longueur d’articles..

La JEFA au départ correspondait à une tentative de formule 4 ou nationale préconisée par M. Castagnon président de l' ASA Armagnac Bigorre en 1966 si mes souvenirs ne me jouent pas des tours .
Elle a duré une saison et c’est la formule bleue qui a pris le relais suivie par la FF un cran en dessus.

Quant à la JEFA ex-Trémouilhac (construite en 1968 ), elle s' est retrouvée en formule libre de 0 à 850 cm3 .

En épreuve internationale, elle a participée au Ventoux en 1969 pilotée par Richard HUGUES donc pas de problème pour l’homologation.

Toujours aux mains du même pilote, elle a tournée en côtes deux saisons : 1968 - 1969 : le Pin , le Colombier , le Mont Dore , Chauffailles , Minier , les Limouches ... etc ... Richard HUGUES a été le dessinateur de Jean Faure pour les FF JEFA .

Elle était encore présente au Ventoux lors du jubilé de Maurice Trintignant en 1982 pilotée par Oswald Fantosi

Aujourd’hui 2 JEFA de cette époque sont encore sur leurs 4 roues : celle du Loiret (Ex-Trémouilhac), vous la connaissez

et une autre en cours de restauration chez un ami belge à Bruges.

2 autres sont : une dans l’Ain et l’autre en région parisienne, mais loin d’être opérationnelles.

Charly RAMPAL sur des informations et documents de mon regretté ami : Gérard Trémouilhac