A la déclaration de guerre, puis avant l’avancée allemande, c’est d’abord l’exil du bureau d’études à Tarbes, après juin 1940.

Louis Delagarde et Louis Bionier mettent en route l’étude pour une petite voiture économique, menée parallèlement à une étude de voiture de gabarit moyen destinée à prendre la suite des sans-soupapes Dynamic : la VP 4 dont je vous ai raconté l’histoire dans un article du 12 mai 2022.

Mais pas seulement, car pendant l’occupation, Louis Delagarde met aussi au point les gazogènes destinés aux voitures particulières, aux camions, aux autobus parisiens et même aux autorails.

C’est donc en même temps, qu’il conçoit un moteur révolutionnaire pour Panhard et Levassor, un flat-twin refroidi par air de 610cc, innovation radicale par rapport aux voitures Panhard d’entre les deux guerres.

C’est ce moteur qui équipera la petite Dyna X présentée au Salon de Paris de 1946 et qui équipera toute la gamme des voitures particulières Panhard de l’après-guerre, les D.B. et une multitude de dérivés.

Ce moteur va se développer de 22 à 75ch de 610 cc à 1.000 cc. Il sera même équipé d’un compresseur sur certains modèles de compétition.

L’IDEE D’ORIGINE

Durant cette période de guerre, Louis Delagarde a commencé par mettre au point un autre bicylindre à plat, d’une cylindrée de 250 cm3.

Les premiers prototypes de ce moteur étaient refroidis par eau.

Cependant, dans l’esprit de l’ingénieur, possesseur et passionné de moto et de cycle à moteur, il s’entendait que les moteurs à venir se devaient d’être refroidis par air.

Ci-dessous la dernière moto de Louis Delagarde, une Motobécane B1V2 de 1936 que sa fille Anne, m’a donnée et que j’ai entièrement restaurée et garde précieusement.

Une seconde version du même moteur vit le jour, cette fois-ci avec une cylindrée supérieure augmentée à 350 cm3.

Puis enfin une nouvelle version fut prévue, à 610 cm3.

Louis Delagarde s’en souvient : « Le 610 cm3, nous l’avons fait tout de suite refroidi par air.

Et nous en avons tiré tout de suite 28 chevaux, et toujours sans joints de culasse.

On pouvait rentrer les soupapes par l’intérieur.

A ce sujet, il y avait deux façons de faire.

Il y avait le système du fameux Grégoire, qui rectifiait ses chemises une fois emmanchées.

D’ailleurs, lui avait un joint de culasse.

Nous, on enfilait la chemise complète.

Mais il fallut trouver un alliage qui ne travaille pas.

Le plus simple était le 6% de cuivre.

Quand le moteur est froid, la chemise se rétracte.

Le piston lui aussi est froid.

Le jeu reste à peu près le même.

Tandis que ceux qui faisaient des moteurs chemisés, ce n’était plus pareil du tout.

La chemise ne respire pas en même temps que le cylindre.

D’emblée, là, nous avons fait le moteur 28 chevaux.

Le premier moteur est sorti avec deux ventilateurs.

Mais ce moteur-là, il était génial car il avait un rendement étonnant, digne d’un bon diesel, et c’est pour ça que la consommation des Dyna X était tout à fait faible.

Parce que le CX de la Dyna X… n’insistons pas !

Après ça, il y eut la Dyna Z qui, elle, avait un CX de 0,27, donc déjà bien plus économe.

Ne parlons pas de l’horrible bâtarde d’après… (PL 17).

Le premier embiellage de la 610 cm3 n’était pas à galet.

C’est encore un truc de la moto.

Qu’est-ce-qu’il y a de plus simple comme galets que des aiguilles ?

On a donc collé des aiguilles.

Seulement il faut voir ce qui se passe à 6 500 tours.

Vous avez des forces centrifuges qui vous multiplient le poids par 1 000 ou 1 500.

Chaque aiguille qui pesait 2 à 3 g, eh bien elle arrivait à peser 20 kg !

Une trentaine d’aiguilles qui passent par là et chacune tourne en sens inverse mais en étant appuyée par un effort qui peut faire 20 kg.

Alors qu’est-ce qui se passe ?

Eh bien, ça les râpe un petit peu, puis ça les transforme en cigarettes, enfin ça perd sa forme humaine, puis en confiture et c’est foutu.

Ce qui fait que le premier embiellage de la Dyna X tenait 2 000 km.

Ça vous dit rien, çà ?

Première opération, il a fallu analyser le problème.

En tournant à l’envers, et en se frottant, ça se bloque.

Pour le résoudre, c’est très simple, il suffit de mettre un galet inverseur et il y a une cage qui empêche le galet inverseur d’aller se balader et qui correspond à la différence d’épaisseur, donc il n’y a aucun glissement.

Et on s’est arrangé pour avoir une composante qui annule la force centrifuge.

Vous n’aviez aucun frottement ! Et ça, c’est un brevet que nous avons vendu, tenez-vous bien, à S.K.F. »  

Le second moteur de la Dyna X85 abandonnera les deux ventilateurs réputés fragiles, pour un seul ventilateur central qui entrainera la modification de la face avant.

Ce moteur porte le numéro PL 317747 indique une fabrication en fin d’année 1949 et donc un type GM600SS2.

Cylindre monobloc en aluminium, chemisé en fonte spéciale.

Culasse non détachable.

Vilebrequin à deux paliers, monté sur roulements à rouleaux cylindriques.

Bielles montées sur roulements spéciaux sans frottement, système Panhard.

Distribution commandée par engrenages à taille chevron.

Graissage par circulation d’huile avec une pompe à engrenages.

Charly  RAMPAL  (souvenir de mes échanges avec Louis Delagarde)