Différentes grandes épreuves sportives internationales ont consacré dans les années cinquante les qualités mécaniques et la tenue de route des Dyna Panhard dans leur catégorie.

Sur le plan de la propulsion, son moteur de faible cylindrée et à haut rendement, très économique, a permis à la Dyna, puis à la PL17 et enfin à la 24, d’enlever la première place aux successifs « Economy Run », avec des consommations tournant autour des 5 litres aux 100 km, sur des parcours comprenant de nombreuses difficultés dont le passage des principaux cols des Alpes et des Pyrénées.

Succès qui a mis notamment en évidence les avantages apportés par le moteur aérodyne à turbine de refroidissement, perfectionnement marquant depuis le millésime « 58 » sur les Dyna de série.

Le rôle joué par cette turbine est particulièrement important. Disposée à l’avant des cylindres, elle projette sur ceux-ci un air pulsé, le moteur est ainsi puissamment refroidi en été et réchauffé en hiver, toujours maintenu à sa meilleure température de rendement.
Ce dispositif assure en outre à la mécanique des conditions de fonctionnement particulièrement favorables à sa longévité et au silence de marche.

Ce nouveau pas en avant de l’industrie automobile n’a pas été évidemment franchi sans créer des problèmes techniques délicats au stade de la production en série des moteurs.
Ils s’intégraient d’ailleurs dans l’évolution et la modernisation constante de fabrication aux usines Panhard de l’avenue d’Ivry à Paris, aujourd’hui en pleine reconversion en bureaux, d’où sortait la production Panhard : Dyna, 17 et 24.

La recherche d’une plus grande productivité, conséquente directe de l’accroissement régulier des commandes aux cours des années cinquante et début soixante, créait également des impératifs de production non négligeables.

Deux vastes ateliers furent donc totalement réaménagés pour abriter l’usinage et le montage des moteurs.
Conçus fonctionnellement, ils ont été équipés des machines et appareils les plus modernes, depuis la machine transfert effectuant l’usinage des cylindres,

Dans cet article nous nous focaliserons du la machine transfert. Un deuxième article sera consacré au montage des moteurs.

Les machines spéciales usinant les carters et chemises, jusqu’aux engins de manutention facilitant les opérations de montage.

C’est donc à travers ce dédale de postes où vont aussi être réalisé les contrôles sur bancs d’essai que je vous propose de déambuler pour vous montrer l’exemple marquant d’organisation rationnelle d’une production de série qui a permis dans un même espace d’augmenter de plus du double le nombre de moteurs Panhard bicylindre fabriqués alors quotidiennement.

IMPLANTATION RATIONNELLE DES POSTES DE FABRICATION

L’implantation de l’atelier « 68 » a été étudiée pour réaliser la fabrication en ligne des carters, chemises et cylindres.

Le principe général adopté pour chaque catégorie de pièces est celui de leur stockage initial à proximité de la machine effectuant la première opération, puis de leur acheminement de machine en machine jusqu’au contrôle final.
La machine transfert est incluse dans le cycle opérationnel des cylindres.

D’autre part, dans l’élaboration de la gamme d’usinage, on a cherché à créer des opérations de durée équivalente. Lorsque cela s’est avéré pratiquement impossible, on a créé des emplacements tampon destinés à des stockages provisoires inter opérationnels.

La répartition des machines dans l’atelier a été effectuée de manière à faire aboutir en un seul point déterminé les différentes pièces usinées destinées à un même montage.
C’est ainsi que la ligne de fabrication des cylindres se termine au même endroit que celle des chemises, pour donner naissance à une chaîne de montage de sous-ensembles où est réalisé l’assemblage de la chemise, des guides et des sièges de soupapes.
Cette ligne se termine à quelques mètres de la chaîne de montage final du moteur, elle-même alimentée directement au départ en carters terminés d’usinage.

Il a été également adopté comme règle, pour répondre aux problèmes posés par l’augmentation de cadence, de remplacer les machines classiques (perceuses radiales, tours semi-automatiques) par des machines d’opération à cycle entièrement automatique. On évite ainsi les manœuvres coûteuses en obtenant un travail plus précis.

Par exemple, le perçage d’alésage des trous de départ sur la cylindre, réalisé sur perceuse à 2 broches demandait autrefois 3’30’’ de temps d’usinage. Ce travail a été remplacé par une machine automatique qui réalise cet usinage en 0’87. De mêmes 27 trous sont percés sur les carters moteurs en 1’6 par une machine spéciale alors que le même travail effectué par une perceuse ordinaire nécessitait un temps d’opération dix fois supérieur.

Soulignons encore que pendant le cycle de travail de cette dernière machine, l’ouvrier en conduit une seconde dont le temps d’usinage s’inscrit dans le précédent.

Enfin, chaque poste de travail est équipé de moyens de self-contrôle qui permettent à l’ouvrier de contrôler son travail par prélèvements plus ou moins fréquent suivant l’importance et les tolérances de l’usinage.
Dans ce domaine du contrôle, l’élimination des erreurs est obtenue et la précision augmentée par le remplacement des tampons et des fers, par des comparateurs de haute précision.

USINAGE DES CYLINDRES SUR MACHINE TRANSFERT

L’effort réalisé par la Société Panhard dans le domaine des machines automatiques, s’illustre clairement par l’installation d’une imposante machine transfert de très grande capacité, spécialement étudiée pour la réalisation des différents usinages des cylindres du moteur.

Cette machine décrite par le schéma précédent, mesure 11m de longueur sur 8m de largeur. Son poids est de 80 tonnes. Elle comprend notamment 8 têtes mécaniques, 12 têtes hydrauliques, 55 broches, 73 outils et 8 bacs hydrauliques d’une capacité totale de 1.800 litres d’huile.

Elle possède en outre un bac d’arrosage de coupe d’une capacité de 200 litres.
Deux pompes d’un débit de 200 litres/minute, assurent l’alimentation des différentes têtes d’usinage.

Une goulotte d’évacuation des copeaux par flottaison est aménagée à l’intérieur des bâtis. Un élévateur à rackettes assure l’élimination de ces derniers.

On voit ci-dessous la machine automatique effectuant certains usinages sur les cylindres de moteur :

Cet énorme engin possède une puissance de 140 cv répartis sur 46 moteurs.
Six armoires électriques, 450 relais et 35 minuteries assurant l’automaticité des opérations successives d’usinage.

Il faut en outre souligner que cette machine transfert travaille en circuit fermé, ce qui permet un chargement et un déchargement continus des pièces en un seul point, tout en réduisant au maximum les manutentions afférentes.

Dans le cycle opérationnel seule la mise en place des cylindres dans le montage est réalisé e manuellement. Ils sont ensuite serrés dans le bâti par télécommande.
Les pièces étant destinées aux montages droite et gauche, sur le moteur et donnant donc lieu à un usinage inversé, elles sont automatiquement sélectionnées par un palpeur qui détermine le positionnement d’une came sur le bâti support.

La position de la came déclenche la mise en route et la suite des opérations, des têtes d’usinage automatique devant œuvrer sur les cylindres gauches et les cylindres droits.

Cette sélection, ainsi que l’usinage progressif des pièces se reflètent sur un tableau synoptique placé au droit du poste de charge qui permet un contrôle constant de l’avancement des usinages.

Après avoir subit toutes les opérations d’usinage, chaque cylindre est desséré automatiquement de son bâti qui, alors revenu au point de départ du cycle d’usinage, est prêt à recevoir une nouvelle pièce brute.

28 opérations sont exécutées par cette machine transfert ultra-moderne dans le temps record de 1’50.

Chaque tête automatique est équipée d’un système de sécurité déclenchant immédiatement l’arrêt de cette tête en cas de rupture d’outil.
D’autre part, un totalisateur de pièces permet de connaître la volume de la production réalisée dans la journée.

Le déplacement d’un poste à un autre des bâtis supportant les pièces est assuré par deux barres de transfert munies de doigts, commandées hydrauliquement et fonctionnant à des cadences différentes suivant un cycle déterminé, elles permettent la mise en place des supports de pièces en des points très précis.

Après avoir été ainsi positionné automatiquement face à une tête d’usinage, le bâti est maintenu par une série de doigts commandés hydrauliquement, qui le fixe pendant toute la durée de l’opération.

Ci-dessous, un aspect de la machine transfert. Au premier plan un bâti support portant le cylindre va passer automatiquement à l’opération d’usinage suivante dont la tête porte-outil est située à droite de la photo :

Précisons qu’une telle machine assurant un travail de haute précision et ne demandant que l’intervention manuelle d’une personne, a permis d’atteindre une production intensive : elle usine plus de 400 cylindres par jour !

A suivre : « Le montage des moteurs »

Charly RAMPAL