LA PANHARD ET LEVASSOR X46 : LE JUSTE MILIEU
Au Salon de 1925, la principale nouveauté se situe en bas de gamme avec l’introduction de la X44, une 10 chevaux modernisée munie d’une direction à droite remplaçant le X37 avec direction à gauche.
Et si le haut de gamme est la célèbre 35cv type X54, nous retrouvons le juste équilibre avec la X46, une 16 chevaux qui n’est que l’évolution de la X40 de l’an passé, mais équipée d’une dynastart et d’un châssis légèrement remanié dont le poids atteint 1350 kg.
Millésimée 1926, cette voiture restera inchangée jusqu’en 1928.
C’est donc le modèle de 1926 que nous allons examiner.
PRESENTATION
Le châssis, 16 chevaux, 4 vitesses, transmission à cardan, présentent les particularités suivantes : comme dans la 15 chevaux, le moteur, l’embrayage et le changement de vitesses sont réunis et ne forment qu’un bloc, disposition assurant un centrage rigoureux des divers organes et les regroupant en un ensemble qui ne peut être influencé par les déformations que le châssis subit forcément en circulant sur les routes de l’époque, plus ou moins cahoteuses.
En outre, la connexion avec le pont arrière est assurée par l’intermédiaire d’un organe composé de toile et de caoutchouc dit « flector », qui donne une grande souplesse à la transmission.
Tous les organes de transmission sont renfermés dans des carters étanches et sont ainsi soustraits aux actions nuisibles de la poussière et de la boue.
LE CHASSIS
Le châssis est en acier embouti.
Il est rétréci à l’avant, ce qui favorise le braquage des roues directrice, et relevé à l’arrière, tandis que la partie correspondant aux entrées latérales de la carrosserie est aussi basse que possible, de manière à donner à la voiture une grande stabilité.
Les ressorts AV sont droits, comme ceux de l’AR.
La maison Panhard et Levassor recommandait aux carrossiers qui allaient œuvrer sur ce châssis, d’éviter de percer des trous dans les ailes horizontales des plates-bandes des châssis et, d’une manière générale, tout ce qui peut affaiblir le châssis, en particulier dans le voisinage de la coquille. Panhard et Levassor se tenant prêt à fournir les schémas contenant toutes les indications nécessaires pour les dimensions des carrossiers.
Le moteur est du type « sans-soupapes ».
C’est un quatre cylindres fondus en un seul bloc.
Les culasses sont rapportées.
L’alésage est de 85mm, la course de 140mm.
La pompe et la magnéto, placées de part et d’autre du moteur, sont commandées par un arbre perpendiculaire à l’axe de ce dernier.
La distribution est réglée par des chemises cylindriques et animées d’un mouvement de va-et-vient qui assurent l’admission et l’échappement des gaz : elles reçoivent ce mouvement d’un arbre parallèle au vilebrequin du moteur portant autant d’excentriques qu’il y a de chemises ; chaque excentrique actionne une chemise à l’aide d’une biellette.
L’arbre de commande des chemises est relié au vilebrequin par une chaîne placée à l’avant du moteur : il tourne à une vitesse moitié moindre que ce vilebrequin et pour cette raison, il a été désigné sous le nom d’arbre de dédoublement.
Tous ces organes sont placés dans le carter qui les cache complètement.
Le réglage des ouvertures et fermetures de l’aspiration et de l’échappement est sensiblement le même que celui d’un moteur à soupapes.
Cette distribution n’est pas seulement silencieuse, elle permet de donner à l’aspiration et à l’échappement de larges ouvertures, permettant ainsi au moteur de mieux respirer ; de plus, elle est indéréglable.
Le principal avantage du moteur « sans-soupapes » réside dans la forme des chambres d’explosion presque sphériques, sans recoins ni saillies, au centre de laquelle se trouve la bougie.
Ce qui frappe le plus ce sont les qualités de souplesse et de rendement propres à cette disposition qui en plus, assure un fonctionnement d’une grande régularité et permet l’emploi d’une compression élevée.
Enfin, ce moteur est d’une grande simplicité par son aspect extérieur, ses réservoirs d’huile en fonte comme le carter et sa liaison particulière avec la boite de vitesse avec laquelle il forme un bloc unique absolument indéformable.
Ce moteur est alimenté par un carburateur dont le réglage se fait par un gicleur régulateur.
Son fonctionnement est le suivant :
1 – Pendant la mise en marche et la marche très ralentie, le gicleur débite de l’essence.
2 – Pendant la marche à vitesse de rotation réduite, et pendant les variations brusque de reprises, aucun débit n’a lieu par le gicleur.
3 – Pendant la marche de vitesse normale, ou pour les vitesses de rotation plus élevées, le gicleur débite de l’air.
Les variations de ce débit sont obtenues automatiquement par le seul jeu de la dépression produite par le moteur, et sans aucune obturation mécanique.
Pour la marche au ralenti, l’extrémité du gicleur de ralenti est soumise à la dépression du moteur par le trou d’équerre communiquant avec un canal circulaire et le trou Y disposé dans le boisseau d’admission, l’essence qui jaillit s’additionne d’air qui pénètre dans l’orifice Q et forme un mélange fortement carburé qui assure un départ facile du moteur.
Pendant les reprises ou marche à faible vitesse de rotation, le robinet d’admission est ouvert, le gicleur principal G fournit l’essence nécessaire à cette marche.
Lorsque la dépression augmente, elle se transmet en partie à l’extrémité du gicleur régulateur, celui-ci débite l’essence contenu dans le tube, puis l’air en quantité d’autant plus grande, que la dépression exercée sur le gicleur principal est grande.
Cet air, obligé de passer en même temps que le combustible par l’orifice du gicleur G, en limité la quantité et maintient le mélange convenable pour ces allures.
L’allumage se fait par magnéto à haute tension et bougies.
La magnéto produit directement le courant de haut voltage et porte également le distributeur d’allumage envoyant alternativement le courant aux cylindres. L’avance à l’allumage est automatique.
Le refroidissement se fait par circulation d’eau, assuré par une pompe centrifuge commandée par le même arbre que la magnéto. Un ventilateur actionné par le moteur et placé à l’AR du radiateur aide au refroidissement de l’eau.
EMBRAYAGE ET BOITE
L’embrayage est entièrement enfermé dans le volant moteur.
Le volant est formé de deux plateaux évidés, assemblés par des vis.
Au centre se trouve l’arbre d’embrayage réuni à l’arbre primaire du changement de vitesses par un assemblage à six cannelures ; il porte un disque en acier sur lequel est rivée une rondelle de fibre.
Une couronne mobile placée dans le volant peut, en se déplaçant entre les plateaux de ce dernier, exercer une pression sur la rondelle de fibre ou rendre libre celle-ci.
Cette pression est obtenue par douze ressorts placés dans les évidements du plateau arrière poussant la couronne avant, en pinçant le disque et assurant ainsi l’entrainement de l’arbre de la boite de vitesses.
Le débrayage s’obtient par l’intermédiaire de six leviers, commandés par la pédale et déplaçant la couronne mobile vers l’arrière ; il ne nécessite qu’un effort minime sur la pédale, par suite de la disposition et des rapports des bras de leviers.
La boite de vitesses comporte quatre vitesses et une arche arrière, la quatrième étant en prise directe .
Le changement de vitesses est à deux trains baladeurs, commandés chacun par un levier séparé, permettant de prendre à volonté une quelconque des vitesses.
La liaison de la boite de vitesses au pont arrière est assurée par un arbre de transmission.
Celui-ci est relié à la boite de vitesses, comme on la vu au début, par un organe flexible très résistant en toile et caoutchouc appelé flector, remplaçant le cardan et réalisant une transmission sans bruit ni choc.
Un dispositif de sécurité a été prévu pour permettre l’entrainement de l’arbre du pont AR en cas de rupture du flector.
Les manchons X2 portent des tenons et mortaises, dont les surfaces ne viennent en contact que lorsque le flector est brisé ou très fatigué à la suite d’un long usage.
Le pont arrière proprement dit et composé d’une partie centrale ou carter, en aluminium, renfermant le différentiel, la roue et le pignon d’angle, et les deux cônes transversaux en acier boulonnés su ce carter et contenant les arbre de commandes des roues.
Le tout forme l’essieu et peut osciller dans les supports à patins fixés aux ressorts de suspension.
Un troisième cône longitudinal fixé à l’avant du carter central et renfermant l’arbre de transmission, vient s’articuler par l’intermédiaire d’un manchon sphérique disposé à son extrémité avant, sur le support qui porte déjà la boite, et qui, est solidement fixé à la traverse centrale du châssis.
Le cône sert à transmettre au châssis la poussée produite par les roues motrices et en même temps à équilibrer le mouvement de rotation du pont AR autour de son axe.
Des tirants convenablement disposés viennent consolider et raidir le T ainsi constitué par ce cône et l’essieu.
Le châssis est muni de deux freins agissant tous deux à l’intérieur de tambours de grand diamètre solidaires aux roues AV.
Cette disposition présente l’avantage de soustraire aux efforts de freinage les organes de transmission de mouvement (pignon et roue d’angle, différentiel), efforts atteignant dans les arrêts brusques, une importance tellement considérable qu’elle expose ces organes à subir des avaries.
Les freins sont actionnés, l’un par la pédale e droite, l’autre par le levier à main.
Chaque frein se compose de deux mâchoires et d’une came qui produit l’écartement de celle-ci et amène les segments en contact avec le tambour.
LA DIRECTION
La direction se compose d’un tube d’acier portant le volant de direction.
Ce tube est solidaire d’une vis d’acier qui actionne un écrou de bronze, se déplaçant dans une glissière formée par les flasques de la boite.
Le mouvement de rotation de la vis se traduit ainsi par un déplacement longitudinal de l’écrou suivant son axe.
Le mouvement de cet écrou est transmis par l’intermédiaire de deux biellettes à l’arbre excentrique qui porte le levier de commande et le fait osciller.
Ce levier est terminé par une rotule emprisonnée dans la bielle de commande entre deux grains cémentés venant s’appuyer sur deux ressorts servant à amortir les chocs brusques subis par les roues AV pendant la marche de la voiture.
La position horizontale de l’axe de cette rotule a pour but, dans une certaine mesure, de mettre en garde contre la chute de la bielle de commande, lorsque l’entretien n’étant pas fait de manière convenable et celle-ci n’étant pas accompagnée d’un examen attentif des organes de direction, on ne s’est pas mis en garde contre l’usure de la rotule.
L’extrémité AV de la bielle de commande est réunie également par rotule et grains au levier fixé sur la fusée de la roue droite, un deuxième levier fixé également fixé sur cette fusée, commande la roue gauche par l’intermédiaire de la bielle d’accouplement et du levier simple calé sur la fusée de la roue gauche.
ALIMENTATION EN CARBURANT
Par suite de la position élevée du carburateur, le réservoir d’essence (placé sous le siège du conducteur ou à l’AR du châssis sous la carrosserie) doit être du type « sous-pression ». Le moteur actionne lui-même une petite pompe à air placée sur le carter et chargée de fournir la pression nécessaire pour alimenter régulièrement en carburant.
Le dispositif est constitué essentiellement par un piston à galet, ce dernier étant maintenu en contact avec un excentrique faisant partie de l’arbre à cames.
Dans ses déplacements, le piston aspire l’air à l’extérieur par les ouvertures et le refoule dans un tuyau qui communique avec le réservoir d’essence, les billes jouant le rôle de soupape automatique.
On trouve également un raccord pour la pompe à main en vue de donner la pression initiale lors de la mise en route du moteur.
LE GRAISSAGE AUTOMATIQUE
Le graissage du moteur est caractérisé par un barbotage avec circulation d’huile (sans pompe ni clapet) destiné à maintenir constant le niveau de l’huile dans chaque compartiment du carter inférieur, quel que soient l’inclinaison du moteur et la quantité d’huile brûlée dans les cylindres.
L’huile arrive dans le compartiment du 4ème cylindre, elle est projetée par la bielle dont la chapeau porte une petite cuiller ou écope, jusqu’aux organes supérieurs : cylindre, chemise, piston, arbre excentriques et biellettes.
L’huile qui remonte sur les parois est recueillie en partie par une gouttière qui la conduit dans le compartiment voisin.
La pente en a été calculée de façon que le fonctionnement ne soit pas troublé par les inclinaisons du châssis.
La même circulation conduit l’huile du troisième compartiment au deuxième et du deuxième au premier.
Dans ce dernier, la gouttière est remplacée par une poche, placée dans le carter supérieur, d’où l’huile, par simple gravité, retourne au réservoir.
On aperçoit d’ailleurs par le bouchon du réservoir ce retour d’huile qui indique que la circulation fonctionne normalement.
Cette 16cv restera un bon milieu de gamme.
Le prospectus de la Maison propose des modèles carrossés en torpédo, en conduite intérieure « bois et tôle » et en conduite intérieure Weymann.
Mat Binder reste le carrossier favori.
Neuf modèles sont donc proposés de la 10cv à la 35cv, dont 7 à 4 cylindres.
Le prix des châssis s’échelonnent de 31.000 F à 99.000 F.
En cette fin des années 20, si les 6 cylindres arrivent en force, les 4 cylindres s’en sortent encore à leur avantage.
Charly RAMPAL d’après la documentation usine