C’est en janvier 1954 que nous apprenions par le journal L’Equipe que D.B. construisait une nouvelle monoplace appelée « Monomill ».

Déjà, les premières indiscrétions sur une future Formule 1 qui en serait le prolongement, apparaissent sous la fore de dessins réalisés par le célèbre Gedo et c’est dans presse allemande qu’apparait la première silhouette :

Puis en France dans la revue L‘Action Automobile Touristique (AAT) :

Et, c’est au salon de l’Auto de 1954 que sera confirmé cette réalisation fut présenté la monoplace de Formule 1 qui faisait suite au nouveau règlement de la CSI (Commission sportive Internationale) : pourquoi pas tenter un coup sur les circuits en ville ?

Cette monoplace D.B. de Formule 1 répondait donc au règlement de la Commission Sportive Internationale, qui avait produit un règlement stupide pour les Formules 1 : 2.500 cc ou 750 cc à compresseur.

René Bonnet s’y engouffra pour le GP de Pau en avril 1955, croyant que le légèreté et la maniabilité de ses monoplaces extrapolées du Monomill seraient à la hauteur sur un circuit tourmenté en ville.

La construction de 3 monoplaces pouvait commencer.

Le moteur compressé développait presque 90 chevaux.

Le châssis est celui des Monomill en tôle pliée et ajourée,

mais renforcé aux points d’effort.

La carrosserie est en aluminium :

Des réservoirs supplémentaires sur les deux côtés permettront une autonomie plus grande pour les GP.

Montage de la carrosserie :

Le poste de pilotage est le plus complet possible pour une monoplace :

Dès les deux journées d’essai des 11 et 12 Avril 1955 sur le circuit de Pau, il sautait aux yeux que les deux D.B. à compresseur n’étaient pas à leur place ! Mais comme le ridicule ne tue pas, alors pourquoi pas…

TEMPS DES ESSAIS ET GRILLE DEPART :

Dans le journal L’Equipe on pouvait lire sous la plume de Charles Faroux : « je ne m’expliquerai jamais comment la Commission sportive internationale a pu commettre une aussi lourde erreur que de considérer comme équivalente une 750 suralimentée et une 2.500 normalement alimentée. L’erreur était monumentale entre le simple et le double, cat il n’est nullement certain qu’une 1.500 suralimentée atteindraient la puissance de certaines 2.500.

A-t-on voulu tuer le compresseur, qui cependant connait de plus en plus d’applications ?

On aurait pu avoir la main moins lourde.

En fait, il s’agit plutôt d’une de ces décisions de passion où l’équité n’a rien à faire.

Ainsi D.B. voulait quand même disputer sa chance, a pris un moteur qui, pour bien traité qu’il soit, n’arrive cependant pas à la moitié de la puissance des autres, encore que sa consommation kilométrique soit de même ordre. 

Dès les premiers essais, il apparut que ces deux voitures ne joueraient aucun rôle.

Leurs meilleurs temps sur un tour de circuit entre les mains de pilotes habiles, Martin et Armagnac, sont nettement moins bons que ceux accomplis il y a 9 ans par Jean-Pierre Wimille sur une simple 1.100 non suralimentée, une Simca-Gordini.

Celle-ci n’avait cependant que 60 cv , alors que les D.B. en disposaient d’une centaine au bas mot.

Tout ceci ne semble pas aisément conciliable. On dira peut-être que l’excellent constructeur Bonnet a montré ses voitures trop tôt. Il ne saurait à mon sens être blâmé de venir ici poursuivre son travail.

Nous le retiendrons surtout comme victime d’une formule incroyablement fausse due à on ne sait qui. Le tems est bien loin où la Commission sportive internationale s’entourait de conseils techniques autorisés ».

A la suite de ces journées d’essais, René Bonnet, quia du refaire le moteur de la n°24 a décidé de retirer cette voiture à Eugène Martin et de la confier à Claude Storez.

Devant la débâcle aux essais, René Bonnet avait déjà compris, il racontait : « mes carburateurs se désamorcent dans les virages, disait-il, et voilà que Martin a cassé. Nous avons du travail sur la planche avant le départ… que nous prenons sans illusion : nos 90 cv ne peuvent rien contre les 250 cv des autres. La formule d’équivalence est parfaitement injuste. Il faudrait faire des courses de Formule II plutôt qui réunissent des 1.500 et des 750 à compresseurs. En attendant, je continue à travailler pour concourir sur un circuit plat où nos D.B. seront moins désavantagées».

Le 18 avril 1955 au sortir du GP de Pau, le journal L’Equipe fait le bilan avec un parfum d’optimisme.

« Certains se demandent si la première apparition des D.B. 750 à compresseurs ne serait pas aussi la dernière ? »

Peut-on porter un jugement après une première sortie ?

 Mais qu’en pense le constructeur lui-même par la bouche de Charles Deutsch : « Nous ne pouvons avec nos 750 à compresseur, avoir la prétention de lutter à armes égales avec les 2.500 cc.

La formule 1 actuelle est une hérésie technique contre laquelle nous sommes désarmés.

Mais également avec nos « traction avant » nous ne pouvons espérer avoir au démarrage, une accélération supérieure à 0,4 G soit environ quatre mètre par seconde. Avec la formule orthodoxe, on réalise 20% de mieux. Il ne peut donc être question pour les D.B. de rivaliser avec des 2.500 cc ».

Pourtant, les plus optimistes pensent que des progrès son réalisables, comme l’écrivait Pierre Allanet dans le journal L’Equipe :

« Est-ce à dire qu’il faut renoncer au départ des Grands Prix ou, au moins, de certains d’entre eux ? Nous ne le pensons pas pour diverses raisons :

Les voitures elles-mêmes seront nettement améliorées, au moins sur trois points importants :

  • Les freins à disque, pour lesquels Messier assure la mise au point est maintenant achevée
  • La suspension et la tenue de route par un allègement des masses non suspendues
  • La puissance du moteur.

Les pilotes des D.B., Armagnac et Storez, sont, certes d’excellents conducteurs, mais ils prenaient à Pau, pour la première fois, le départ d’un Grand Prix.

Il suffit d’interroger tous ceux qui sont passés par là, pour savoir que les premières expériences ne se déroulent pas sans une certaine appréhension.

A chaque épreuve, ces pilotes s’amélioreront certainement et sauront tirer un meilleur parti de leurs voitures.

On peut admettre que l’amélioration des voitures et l’expérience des pilotes permettraient de réduire de plus de moitié l’écart qui existait à Pau entre la Masérati de Jean Behra et la D.B. D’Armagnac.

Dans ces conditions, le comportement de nos petites voitures ne serait plus du tout ridicule, comparé à certaines 2.500 cc d’indépendants.

Or, et c’est le dernier point sur lequel nous voulons attirer l’attention, les constructeurs paraissent vouloir limiter sérieusement le nombre de sorties des voitures d’usines : Ferrari ne fera sa rentrée qu’à Monaco et il n’est pas du tout certain que Lancia soit présent à Bordeaux.

C’est une nouvelle chance pour D.B., car il faudra tout de même chercher à meubler le plateau.

Nous souhaitons que cette chance leur soit donnée, car nous sommes persuadés que les prestations de ces voitures ironts en s’améliorant à chaque sortie et que Bonnet ; comme Deutsch sauront tirer de nombreux enseignements de ces compétitions ».

Mais, malgré ces appels du pied, l’échec retentissant de Pau n’a pas été digéré et René Bonnet a conscience que ses F1 n’ont rien à faire dans le championnat du monde sinon de se discréditer. Aussi, il renoncera à les aligner même dans la foulée, au GP de Bordeaux.

L’accident du Mans cette année 1955 ne va pas arranger les choses et stoppera toutes les manifestations françaises jusqu’en 1956.

La carrière des D.B. F1 est terminée.

Les voitures ont été conservées jusqu’à nos jours par de particuliers passionnés et sportifs ; dont les plus célèbres resteront : Berton, Lumbroso, Coural. Ils l’utiliseront en courses de VHC.

Celle de Kiki Lumbroso sera exposée à Rétromobile sur notre podium du DCPL où JP Beltoise s’est gentiment prêté à une séance de photos.

Charly  RAMPAL  (Documents d’époque et archives D.B. et P.R.T.)