Le CD a été la voiture la plus rapide de toutes les Panhard commercialisée.
Je ne raconterai pas ici son historique : il fera l’objet d’un autre article en temps voulu.
Mais de vous faire partager les sensations obtenues à son volant et d’en faire tout d’abord une présentation générale du CD que j’ai possédé et que j’ai vendu par la suite à un adhérent du DCPL., section Centre-Ouest

Le moteur était un 954 réalisé par le sorcier de Dourdan : Bernard Coural.
Par de double carter, mais un filtre à huile extérieur qui occasionna la mis en place d’une pompe à double débit.
Avec deux double corps, le moteur montait allègrement à 7.000 tours au lieu des 6.600 en version « Rallye » d’origine, ce qui la prédisposait à atteindre le 190 au lieu des 180 annoncé par le constructeur à l’époque.

S’agissant d’un bicylindre et d’une carrosserie normalement équipée, ce sont là des chiffres qui laissent rêveur.
Extérieurement, cette Panhard apparaît particulièrement fine par rapport à un coach DB par exemple plus massif. L’étude aérodynamique très poussée a conduit Charles Deutsch à la doter d’une voie arrière réduite de dix centimètres par rapport à la voie avant.

Avec sa calandre ovale et sa ligne fuselée, le CD s’offre, sous certains angles, des faux airs de Ferrari « 500 Superfast », ce que personne songerait à lui reprocher.
Lorsqu’on ouvre les légères portes en polyester, il faut se baisser très bas pour entrer dans l’habitacle.

Mes sièges étaient en skaï rouge, mais le volant trois branches tulipées en alu et sa jante en bois, apporte une agréable note à la fois sportive et de confort.
La visibilité est excellente sous tous les angles, y compris vers l’arrière malgré la lunette en plexiglas.

Le tableau de bord est d’une conception très rationnelle et rappelle beaucoup celle du DB. L’instrumentation se limite à deux gros cadrans Jaeger : le compteur gradué jusqu’à 220 km/h, intègre l’ampèremètre et la montre.
Le compte-tours incluse pour sa part la jauge et le mano de pression d’huile.

Au centre de la planche, trois étages de boutons commandent les différentes fonctions. Une tige située à main droite actionne à la fois les appels de phare ( en la levant) et l’avertisseur (en l’abaissant).
Le passager dispose d’une poignée de maintien, pratique, mais particulièrement inesthétique.
Au-dessus du pare-brise fortement incliné, on retrouve les pare-soleil en plexi teinté, typique des années soixante.

Un espace arrière prétendant être deux places de secours, mais si deux enfants en bas âges peuvent à la limite trouver leur bonheur, il n’est pas question qu’un adulte s’y installe, d’autant que le pavillon s’affinant lui confèrerait une position couchée !

Je me souviens, au début des années 80 quand le l’ai acheté, l’émotion fut grande que de m’installer au volant d’un modèle dérivé de la voiture victorieuse des 24h du Mans 1962 (j’ai eu plus tard l’occasion de conduire la véritable voiture du Mans). Même dans une version assagie, c’est toujours impressionnant.

La position de conduite est bonne, le petit levier de vitesses tombe bien dans la main et son débattement est réduit au maximum : un régal.
Par contre, si on retrouve avec plaisir le pédalier des PL17, elles sont mal disposées : trop rapprochées les unes des autres.

Contact. Le bruit du flat-twin, nous est familier, mais ici, il est plus rauque : c’est un roulement sonore ininterrompu, particulièrement intense sur les intermédiaires, d’autant que l’insonorisation n’est pas son fort !

Si la souplesse n’a jamais été la qualité première de ce moteur (normal avec 2 cylindres), du fait de la légèreté de la caisse et du 954, on sent comme un léger mieux. Mais avec deux double corps, il se montre plutôt brutal dans les reprises à faible allure.

Comme le savent tous les panhardistes, le moteur ne s’exprime vraiment qu’à bonne température et dans les tours. Sa montée en régime est laborieuse jusqu’à 4.000 tours, seuil à partir duquel, le CD se métamorphose complètement. L’accélération devient soudain très sensible, et l’aiguille du compte-tours grimpe à une allure vertigineuse vers le 6.500 tours.
Le 160 est vite atteint dans un joyeux vacarme qui amène à émettre les plus sérieux doutes sur la qualité de l’insonorisation.

Mais ce bruit, fait parti de l’ambiance à bord et on l’oublie vite, car le CD procure un véritable plaisir de conduire. Sur routes tourmentées, le moteur ne manque pas de brio tant qu’on reste dans les hauts régimes. Dotée d’une très bonne tenue de route, elle reste quand même un cran en dessous de l’HBR de chez DB. La mienne, pourtant équipée de Michelin XAS sous-virait à la limite, alors que notre HBR équipé de Dunlop SP, est un véritable Kart.

Le 140 km/h peut être considéré comme sa vitesse de croisière sans autre soucis pour ses occupants que ceux occasionnés par les suspensions dures comme il n’est pas permis !
Le CD ne fait grâce d’aucune irrégularité du sol, et après une quarantaine de kilomètres seulement de ce traitement, vous reins implorent une trêve avec insistance…

Bien qu’étant parfaitement servie par le volant à fine jante en bois, la direction apparaît un peu lourde et hypothèque parfois la sensation de maniabilité qu’inspire la légèreté de l’ensemble (580 kg à vide).

Très à l’aise dans les courbes, le CD se montre d’un maniement plus délicat en virage ou son caractère sous-vireux est amplifié.
Conçue pour la piste et non pour les rallyes – à l’inverse du DB HBR – le CD était susceptible de brusques décrochements du train arrière dans les virages abordés trop vite.

Une autre limite à son utilisation optimale découle du freinage : les freins à tambours E.T.A, apparaissent bien juste aujourd’hui et incite à la méfiance dans la circulation courante.

Handicapée par ses freins, mettant ses passagers à rude épreuve du fait de ses suspensions, le CD, et ce n’est pas son moindre attrait, est capable de redorer son blason dès qu’elle rencontre une côte difficile sous ses roues, comme peut en témoigner la vidéo que Jacky Laguerre nous a concoctée lors de sa participation cette année 2011 au Ventoux-Classic et que vous pourrez voir à la fin de cet article.

Le CD se montre d’une agilité surprenante, emplissant les lacets du géant de Provence du vacarme de son bi-cylindre, habitué qu’il était au chant lancinant des cigales !
Dans cet exercice, vous verrez que le CD reprend de la vitesse de façon surprenante dans les lignes droites et laissant sur place quiconque prétendant s’accrocher à son sillage, comme la belle italienne partie quelques minutes plus tôt et que Jacky rattrapera et laissera sur place avant d’atteindre la ligne d’arrivée !

Contrepartie d’un tel tempérament, la mécanique du CD avait la réputation d’être un peu fragile : pour ma part, je n’ai jamais cassé. Le tout étant de bien la monter, de bien la régler, de mettre un dural et de savoir la conduire.
Je vous rappelle que les Panhard sont de belles maîtresses qui ne se donnent qu’aux initiés ! Alors, ne venez pas pleurer…

Avec ces qualités évidentes et des lacunes non moins évidentes, le CD Panhard a toutes les caractéristiques d’un prototype hâtivement adapté en vue d’un usage courant. Bien des détails restaient à mettre au point lorsqu’il fut commercialisé, notamment du côté de la suspension et de la boite de vitesses, sans parler de l’insonorisation.
Autant de points perfectibles qui auraient justifié une évolution de l’auto.

Le passage de Panhard sous le contrôle de Citroën devait, on le sait, en décider autrement et le CD fut sacrifié comme beaucoup d’autres avant elle sur l’autel de la rentabilité.

Pour nous panhardistes et autres initiés, elle n’en demeure pas moins la plus originale des GT produites en France après-guerre.

Maintenant, petits veinards, accrochez-vous : Jacky Laguerre vous emmène dans son CD sur les pentes du Géant de Provence !

Charly RAMPAL