ANDRE-GUILHAUDIN : IL VIENT DE NOUS QUITTER
André Guilhaudin vient de nos quitter à 100 ans ! Je vous ai tout raconté sur cet homme admirable qu’il fut dans tous les domaines.
En ce qui concerne le côté Panhard, il restera à jamais le vainqueur de la 10ème et dernière victoire de Panhard aux 24H du Mans aux indices (énergétique et performance).
Bien fatigué et au bout du rouleau, il avait fait part à des proches « qu’il était temps que ça se termine ».
Et cette expression m’est revenue à l’esprit : c’est celle qu’il avait exprimé au journal l’Equipe après sa victoire au Mans en 1962 ; « Il était temps que les 24 Heures se terminent ! ». C’est pourquoi, en son honneur, je tenais à lui rendre hommage à travers ce parallèle.
RAPPEL DES FAITS
Après la défaite à mi-course de la 2 litres 4 Ferrari préparée pour ce classement à l’indice et conduite de façon pas du tout économique par les frères Rodriguez, idolâtrés par la foule, la route était libre alors pour les Fiat Abarth, Panhard et autres Bonnet dans ce classement à l’indice de performance où les constructeurs français était classé parmi les favoris.
Longtemps Fiat-Abarth et Ferrari tinrent les premières places, cependant que, derrière eux, Panhard et Bonnet attendaient leur heure.
Celle-ci arriva.
Après douze heures de course, la Ferrari 2 L 400 s’arrêtait ; après 17 heures de course, la Fiat-Abarth était à son tour éliminée.
Panhard passait au commandement avec la voiture que pilotaient Guilhaudin et Alain Bertaut.
Pendant cinq heures encore, la Panhard allait devoir lutter pour maintenir sa position, subissant l’assaut de la René Bonnet, de Laureau-Armagnac, qui tentait résolument sa chance.
Cette lutte entre nos deux représentants revêtit alors un caractère passionnant pour tous ceux qui , l’ont suivie de près.
Ce fut à Panhard que revint finalement la palme, sans que, toutefois, René Bonnet ait démérité. I
ls ont tous deux accompli une très belle performance dont la valeur apparaît encore plus lorsqu’on sait que c’est en quelques mois. de part et d’autre, qu’on est arrivé à mettre au point des mécaniques qui se sont imposées devant les meilleures productions européennes.
Le mérite de Panhard est spécialement grand et hommage doit être rendu à la firme doyenne pour cette dixième victoire à l’indice obtenue depuis la reprise des 24 Heures, en 1949.
Avec Panhard il convient de féliciter plus spécialement Charles Deutsch, qui a dessiné la carrosserie très aérodynamique, et les collaborateurs plus modestes et peu mis en valeur, mais dont le précieux labeur est prépondérant dans cette victoire.
Je citerais MM. Pichard, Béchut, Hersant et surtout Bernard Boyer, le champion de France junior qui a manqué, de peu d’ailleurs, sur un incident ridicule, le classement énergétique (une bougie a fait fondre un piston) et qui fut, en mettant sérieusement au point toutes les mécaniques, le véritable artisan de cette victoire.
Je n’oublierai jamais Etienne de Valance, directeur de l’équipe, qui, par son labeur incessant, sa conscience professionnelle et sa compétence, a parfaitement rempli le rôle d’organisateur de la victoire qu’il s’était imparti.
Le décor étant planté, revenons au pour quoi de cette expression.
« IL ETAIT TEMPS QUE LES 24 H SE TERMINENT »
« Nous avons bénéficié des circonstances, nous expliquait Guilhaudin, toujours calme et modeste.
Sans les abandons des frères Rodriguez (Ferrari 2 L 4) et de Masson-Zeccoli . (Fiat Abarth 701 cmc.) nous n’aurions peut-être pas inscrit nos noms au palmarès.
Si la René-Bonnet de Gérard Laureau-Paul Armagnac n’avait pas dû stopper à plusieurs reprises, perdant une large poignée de minutes pour ressouder une pédale de frein cassée, jamais nous n’aurions obtenu ce titre » enchainait Alain Bertaut.
Chics camarades, Guilhaudin et Bertaut commençaient par faire l’éloge de leurs rivaux malchanceux.
Ils avaient presque l’air de minimiser leur succès et pour ses premières 24 Heures, Alain aura été comblé d’avoir réussi un exploit.
La course est la course et les malheurs des uns font le bonheur des autres !
Guilhaudin et Bertaut doivent être félicités chaleureusement pour leur remarquable performance et aussi pour les qualités de leur voiture.
La jolie et élégante Panhard, réalisée avec la collaboration de Charles Deutsch aura, elle aussi, fait des débuts plus que prometteurs dans la dans la fameuse épreuve de réputation mondiale.
Dérapage sur erreur de gonflage
« Pas d’incidents : de course ?
— J’ai débuté en me faisant une peur affreuse, se souvenait André Guilhaudin.
A Maison-Blanche, j’étais rentré aussi vite qu’à l’entrainement. Alors, Je me suis mis en travers et sur près de 300 mètres j’ai dû travailler au maximum pour ne pas sortir de la route.
A mon premier arrêt-ravitaillement, j’ai eu l’explication de ce qui aurait pu se transformer en catastrophe. Un mécanicien trop zélé avait excessivement gonflé mes pneus arrière. Quand j’y pense, quelle frousse rétrospective.
— Quoi d’autre encore ?
Hier matin, après, l’abandon de Roger Masson, nous avons conduit comme si nous avions enveloppé notre Panhard dans du papier de soie, souriait Guilhaudin.
Avez-vous équitablement partagé le pilotage ?
- J’ai peut-être tenu le volant plus longtemps qu’Alain, mais c’est Bertaut qui était dans la voiture aux heures les plus délicates, à la tombée de la nuit et au lever du jour ».
Le succès de la Panhard n°53 aura été celui de deux amis qui s’adressaient mutuellement des félicitations, celui qui a précédé la couronne officielle des vainqueurs. »
Charly RAMPAL